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sont remises en circulation, acquitter le droit d'enregistrement et le droit de timbre afférents à toute émission nouvelle.

Seine, 24 novembre 1900.

Attendu que la Régie prétend que les lettres de gage rachetées par le Crédit foncier doivent, lorsqu'elles sont remises en circulation, acquitter le droit d'enregistrement et le droit de timbre afférents à toute émission nouvelle ;

Que par contraintes signifiées à la dite société, les 4 et 6 février 1897, elle lui réclame pour le premier de ces droits une somme de 628.020 fr. et pour le second une somme de 375.000 fr.;

Que le Crédit foncier de France a fait opposition à l'exécution de ces contraintes et assigné l'Administration devant le tribunal;

Attendu que la Régie demande la jonction des deux instances ainsi introduites, en raison de leur connexité; que le Crédit foncier déclare ne pas s'y opposer; que les moyens des parties ont été développés dans des mémoires respectivement signifiés ;

Attendu qu'aux termes du décret du 28 février 1852, et aux termes des statuts du Crédit foncier de France, les lettres de gage restant en circulation ne doivent jamais excéder les capitaux restant dus sur les prêts hypothécaires; que, par suite, quand il se produit des remboursements anticipés, la société est obligée de racheter et d'éteindre des obligations pour une somme égale afin de rétablir l'équipollence; que l'art. 87 des statuts dispose que les obligations ainsi rachetées sont immédiatement frappées d'un timbre spécial, et ne peuvent être remises en circulation qu'avec un nouveau visa du gouverneur; que dans tous les cas elles participent aux tirages; Attendu qu'il est constant que le rachat de la dette effectué par le débiteur ne peut laisser subsister l'obligation; que, d'autre part, un titre ne survit pas à la créance qu'il représente; que, par suite, les lettres de gage rachetées par le Crédit foncier sont juridiquement éteintes ;

Attendu qu'on ne peut invoquer la participation aux tirages comme impliquant la continuation de la vie juridique de l'obligation remboursée ; qu'il s'agit là uniquement d'une mesure de comptabilité et d'ordre intérieur, personnelle à l'établissement financier, justifiée par des considérations d'utilité pratique et de nécessité matérielle, mais ne pouvant modifier en rien les conséquences nécessaires qui découlent, en droit, des actes intervenus entre le créancier et le débiteur;

Attendu que si la lettre de gage rachetée est juridiquement éteinte, sa remise en circulation, autorisée par la disposition susvisée des statuts, ne peut constituer autre chose qu'une émission nouvelle; que cette remise en circulation correspond à de nouveaux prêts faits par le Crédit foncier et nécessitant de sa part l'emprunt de nouveaux capitaux; que, malgré la similitude du numéro, il n'y a rien de commun entre le contrat que constatait la lettre de gage rachetée et le contrat que constate la lettre de gage réémise; que, chaque titre constituant la représentation fractionnée d'un gage hypothécaire, la lettre réémise se trouve représenter la fraction d'une hypothèque nouvelle absolument distincte de la première dont mainlevée a été donnée à la suite du remboursement anticipé; que cette distinction, juridiquement certaine, était même matérialisée d'une façon saisissante quand, d'après la législation originaire du Crédit foncier, le visa devait être donné par le notaire dépositaire de la minute de l'acte de prêt; qu'il s'agit donc bien d'un contrat nouveau et d'une émission nouvelle ;

Attendu que le Crédit foncier prétend qu'il ne peut y avoir émission parce que les formalités habituelles exigées pour la création de nouveau

titres ne se rencontrent pas en l'espèce; que notamment tout titre nouveau doit être signé par un administrateur, et que toute émission de valeurs à lots doit être autorisée par approbation ministérielle;

Attendu que cette objection est sans portée puisque le but de la disposition, si particulière, relative au rachat et à la remise en circulation des titres, a été précisément de déroger au droit commun des émissions, de conférer au Crédit foncier des facilités spéciales correspondant aux nécessités de son fonctionnement et de l'équipollence qu'on lui imposait, et de lui permettre de donner une vie juridique nouvelle à des obligations éteintes, par un simple visa du gouverneur sans autre intervention administrative ou ministérielle;

Attendu que, s'agissant d'une émission distincte de la première, il s'ensuit qu'un nouveau droit d'enregistrement est exigible sur ces titres puisque les art. 14 du décret du 28 février 1852 et 1er du décret du 31 décembre suivant, font de l'émission la cause génératrice de l'impôt ; que le Crédit foncier objecte qu'il s'agit d'un droit d'acte ne pouvant étre perçu deux fois sur la même formule;

Mais attendu qu'on ne peut dire qu'il y ait identité matérielle absolue entre les deux titres, puisque d'après les prescriptions légales, la lettre de gage réémise doit porter un nouveau visa du gouverneur qui lui donne une individualité propre et la différencie de la lettre de gage rachetée et frappée d'un timbre constatant cet amortissement; qu'au surplus, même s'il y avait identité de formule, cette formule serait en tout cas la représentation matérielle successive de deux actes différents, et qu'à la pluralité des actes doit correspondre la pluralité des droits ;

Attendu que les mêmes raisons s'appliquent aux droits de timbre édictés par les art. 1er de la loi du 5 juin 1850 et 29 de la loi du 8 juillet 1852; Attendu que le Crédit foncier objecte que le droit de timbre est un impôt de consommation du papier et que, même s'il y a formation d'un nouveau contrat, le droit n'est pas dû parce qu'il n'y a pas création matérielle d'un nouveau titre, ni consommation d'une nouvelle formule;

Attendu que la loi du 13 brumaire an VII, à laquelle aucune dérogation n'a été apportée sur ce point par les lois postérieures, dispose que le papier timbré employé à un acte quelconque ne pourra plus servir pour un autre acte; qu'elle édicte pour le cas de contravention non seulement des pénalités, mais encore l'obligation de payer un nouveau droit de timbre; - qu'en l'espèce, et comme on l'a démontré ci-dessus, la même feuille de papier sert à la constatation matérielle de deux contrats successifs; que si la législation spéciale du Crédit foncier, en autorisant ce mode de procéder, écarte toute idée de contravention au point de vue de la pénalité, cette législation n'a pu, en l'absence d'une disposition formelle, dispenser le Crédit foncier de la perception du second droit de timbre prévu par la loi de brumaire; que le papier timbré déjà employé est assimilé au papier non timbré; qu'il n'y a donc pas cumul de deux droits pour la même feuille comme le prétend la société ;

Attendu enfin que le tribunal n'a pas à examiner les objections tirées de la façon dont la Régie applique la loi du 28 avril 1893 sur les opérations de Bourse, ou dont elle perçoit le droit de conversion lors de la remise en circulation sous la forme nominative d'obligations rachetées au porteur ; qu'il est constant que les solutions ou les pratiques administratives ne sauraient créer ou engager le droit ; que si les perceptions dont il vient d'être parlé sont maintenues par la Régie et si elles apparaissent au Crédit foncier comme inconciliables avec les perceptions actuellement réclamées, il appartiendra à la dite société de déférer la question à l'autorité judiciaire; Par ces motifs,

Prononce la jonction des deux instances, en raison de leur connexité, et statuant par un même jugement,

Déboute le Crédit foncier de ses oppositions aux contraintes des 4 et 6 février 1897;

Le condamne au paiement : 1° des droits d'enregistrement qui seront re connus exigibles sur les lettres de gage rachetées pour maintenir l'équilibre entre les obligations et les prêts, et remises de nouveau en circulation dans le public, d'après la déclaration détaillée qui devra être fournie au bureau, et à défaut de déclaration, dans les deux mois de la signification du présent jugement, au paiement de la somme de 628.020 fr. ; 2o des droits de timbre exigibles sur les obligations réémises après rachat, parmi celles des emprunts 1882, 1883 et 1885 pour lesquelles le Crédit foncier n'a pas souscrit d'abonnement, d'après la déclaration à fournir, et, à défaut d'une déclaration détaillée dans le délai ci-dessus fixé, au paiement de la somme de 375.000 fr. énoncée dans la contrainte ;

Le condamne, en outre, à tous les dépens.

Annoter T. A., V° Crédit foncier, nos 53 et 58.

Art. 2575.

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Droits successifs (Cession de). - Prix. Imputation. Instruction n° 342.

Une cession de droits successifs entre cohéritiers est un acte équipollent à partage-licitation, alors surtout qu'elle fait cesser l'indivision.

En conséquence, le prix de la cession doit s'imputer, de même que la soulte de partage, de la façon la plus favorable aux parties.

Ambert, 13 novembre 1900.

Attendu que par acte reçu Me Armilhon, notaire à Ambert, le 19 avril 1895, Joseph Fournet a fait donation portant partage de présuccession, en conformité des art. 1075 et 1076,C. civ., à ses deux enfants, Auguste Fournet et Marie Fournet, femme Dépaillet, par égalité entre eux, de tous ses biens meubles et immeubles ; que dans cet acte les biens mobiliers étaient détaillés, article par article, et s'élevaient à la somme de 7.286 fr. 40; et que les immeubles d'un revenu annuel de 400 fr. comprenaient un corps de biens avec les bestiaux et instruments aratoires attachés à l'exploitation ; Attendu que par autre acte passé le même jour devant le même notaire, les époux Dépaillet ont cédé à Auguste Fournet la part leur revenant dans la dite donation par forme de licitation amiable, faisant cesser l'indivision, moyennant la somme de 8.300 fr. et à la charge de payer comme supplément de ce prix principal la moitié devant être supportée par la femme Dépaillet dans les charges de la donation évaluées à 2.200 fr., sous réserve expresse pour la femme Dépaillet de garder par devers elle sans le rapporter, l'avancement d'hoirie de 6.000 fr. qui lui avait été constitué par son père lors de son mariage;

Attendu que pour la perception des droits d'enregistrement le receveur, se conformant d'ailleurs aux instructions données jusqu'à ce jour par son Administration dans sa solution du 16 août 1883, a considéré cet acte comme cession ayant les effets d'un partage, et le prix porté, charges comprises, comme une soulte payée par Auguste Fournet à sa sœur ; qu'il a perçu, en conséquence, le droit proportionnel de soulte édicté par l'art. 69 de la loi

du 22 frimaire an VII, en l'imputant suivant l'Instruction administrative du 22 septembre 1807, de la manière la plus avantageuse au contribuable, c'est-à-dire sur les créances jusqu'à concurrence de 7.286 fr. 40, à 1 0/0, soit 73 fr., et pour le surplus, sur les immeubles, savoir: 3.263 fr. 60, à 40/0, soit 131 fr. 20; qu'il a enfin perçu pour droit de partage, à 0 fr. 150/0 sur 6.000 fr. (dot restant aux mains de la femme), 9 fr., en tout,213 fr. 20; Attendu que l'Administration tout en reconnaissant qu'elle avait adopté antérieurement ce mode de perception, croit devoir le critiquer aujourd'hui et qu'elle prétend que le seul droit exigible était le droit proportionnel de 4 0/0 réglé pour les immeubles, l'acte en litige étant, non un partage, mais un acte translatif de propriété à titre onéreux et les parties ne s'étant point conformées à l'art. 9 de la loi de frimaire, qui exige que, dans tout acte de cette nature, un prix particulier soit stipulé pour les objets mobiliers e qu'ils soient désignés et estimés article par article ; qu'elle réclame,en conséquence, à Fournet, un supplément de droits de 258 fr. 50;

Attendu que ces variations dans l'application de la loi fiscale sont regrettables et peuvent préjudicier aux intérêts des contribuables qui ont besoin d'être fixés la plupart du temps, avant de faire certains actes, sur les droits qu'on exigera d'eux; mais qu'il faut reconnaître que l'Administration est libre d'interpréter la loi comme il lui plait, ses solutions n'ayant, au surplus, que la valeur d'une opinion individuelle; que le tribunal n'a qu'à examiner si c'est l'ancien mode de procéder qui est régulier dans l'espèce ou si c'est le nouveau proposé par l'Administration et si l'acte dont l'appréciation lui est soumise constitue un partage ou au contraire un acte de translation de propriété à titre onéreux;

Attendu sur ce point qu'il est hors de contestation en droit civil que tout acte qui fait cesser l'indivision entre cohéritiers ou communistes est un partage, et qu'il en a l'effet déclaratif ;

Attendu que le même principe est admis en droit fiscal, avec cette différence seulement que la loi ne considère le partage comme purement déclaratif que lorsqu'il y a égalité complète des lots entre les copartageants; qu'elle le considère comme translatif pour partie lorsque les lots, étant inégaux, les soultes deviennent nécessaires pour égaliser, ce qui suppose une transmission, une mutation de propriété d'un des héritiers à l'autre ; que dans ce dernier cas un droit de mutation proportionnel est dû par celui qui paie la soulte, et réglé par l'art. 69 de la loi de frimaire an VII;

Attendu qu'il est aussi de principe que l'acte qui nous est soumis doit être apprécié en lui-même, et non d'après les termes plus ou moins propres employés par le notaire ou les parties; qu'appliquant ces règles au cas qui nous occupe, il faut remarquer d'abord que cet acte fait cesser l'indivision complètement entre les copartageants, qu'il faut donc le qualifier partage; que, de plus, fait le même jour et en même temps que la donation du père, il fait corps en quelque sorte avec la dite donation-partage et en est la suite; que d'après leur texte les parties ont bien voulu régler par ces deux actes tous leurs intérêts héréditaires, que dès lors importe peu que le notaire ait fait deux actes au lieu d'un seul et qu'il se soit servi du mot licitation en même temps que du mot partage, et qu'il est bien évident que c'est bien un partage anticipé que les parties ont entendu faire et qu'on ne peut considérer comme une vente ordinaire ;

Attendu que l'Administration ne peut même faire valoir dans son système cet argument qu'elle croit péremptoire « qu'il n'y a pas partage parce que la femme Dépaillet vend toute sa part et ne garde aucune portion de l'hérédité» puisqu'au contraire elle garde ses 6.000 fr. de dot qui assurément en faisaient partie et étaient sujets à rapport;

Attendu, en conséquence, qu'on ne peut pas faire droit à ses prétentions;

que l'art. 9 de la loi de frimaire n'était pas applicable dans l'espèce; qu'il est donc superflu d'examiner si les parties en avaient observé les prescriptions ;

Attendu qu'il suit, dès lors, que le receveur avait agi régulièrement en considérant l'acte du 19 avril 1895 comme un partage et le prix payé par Fournet à sa sœur comme une soulte, et en calculant le droit de mutation à percevoir selon les principes reconnus en pareil cas;

Par ces motifs,...

Observations. Cette décision est conforme à la doctrine que nous n'avons cessé de défendre. La jurisprudence tend à se prononcer de plus en plus en ce sens.- Voir Gourdon, 17 juillet 1895,R. E.1095; Guéret, 7 décembre 1898, R. E. 1894; Rappr. R. E. 1637, 1723, 1869 et 1987.

Annoter T. A., Vis Droits successifs, n° 59, et Partage, no 167.

Art. 2576.

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Impôt sur le revenu. Société civile par actions. Répartition consécutive à la dissolution. Valeur supérieure au capital nominal des titres. - Action de l'Administration. Liquidateur.

Amendes de retard.

Associés.

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Lorsqu'une société civile par actions constituée au capital nominal de 100.000 fr. répartit, après sa dissolution, 500.000 fr. à ses membres, la taxe de 4 0/0 sur le revenu est duc sur la somme de 400.000 fr. représentant l'excédent des sommes distribuées sur le chiffre des apports.

L'Administration peut, après la dissolution, poursuivre en paiement des droits et amendes, tant les associés pris en leur nom personnel que le liquidateur pris ès qualité et comme détenteur des deniers sociaux.

Faute de déclaration relative à la distribution des bénéfices et de paiement dans le délai légal, il est dû une amende de 100 fr. à 5.000 fr. Seine, 9 novembre 1900.

Attendu que Charles Mildé fils et Cie ont fait apport à la Compagnie électrique du secteur des Champs-Elysées, le 12 mai 1891:

1° De la concession d'un secteur électrique votée le 4 avril 1890 par le conseil municipal de la ville de Paris;

2o Du résultat de leurs études, des recherches faites par eux, de leur système de distribution et de la clientèle qu'ils ont formée ;

Attendu que pour ces deux apports Charles Mildé fils et Cie ont reçu en leur qualité de fondateurs 25 0/0 dans les bénéfices nets de la société ; Attendu qu'il était dit que Charles Mildé fils et Cie n'auraient aucun droit de contrôle ni d'immixtion dans l'établissement des comptes de la société, qu'ils accepteraient les bilans tels qu'ils seraient établis par la dite société et recevraient leur part de bénéfices telle qu'elle résultera des écritures après approbation de l'assemblée générale ;

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