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jugement non enregistré s'applique au jugement enregistré seulement en débet, avec le bénéfice de l'assistance judiciaire et dont l'Administration fait usage dans un mémoire signifié à sa requête au cours d'une instance dirigée contre des personnes autres que l'assisté ou son adversaire.

En conséquence, le tribunal doit surseoir à l'examen des conclusions de la Régie au fond jusqu'à ce que le jugement qu'elle invoque ait été soumis à la formalité au complant.

Angers, 8 décembre 1900.

Faits. Un jugement du tribunal civil d'Angers, du 4 juin 1895, rendu à la requête de M. Bourreau et des époux Denou, a prononcé la résolution d'une vente immobilière consentie, aux termes d'un acte sous seing privé du 19 février 1888, enregistré, par ces derniers aux consorts Laguette, moyennant 490.000 fr.

La même résolution a été prononcée par un second jugement du même tribunal, du 14 janvier 1896, à la demande des consorts Margot et Frémy.

La première de ces décisions judiciaires a été enregistrée en débet, le 4 juin 1899, à la demande des époux Denou, pourvus de l'assistance judiciaire.

De toutes les parties en cause, celles qui ont figuré au second jugement sont seules solvables. L'Administration s'est crue autorisée, en conséquence, à leur réclamer les droits simple et en sus de mutation exigibles sur la rétrocession de la vente sous seing privé du 19 février 1888, et elle a été amenée, à cette occasion,à faire état, dans le mémoire qui leur a été signifié le 31 mai 1899, du jugement du 4 juin 1899.

Les parties ont objecté que l'Administration n'était pas autorisée à invoquer ce jugement sans le soumettre au préalable à la formalité au comptant.

Un jugement du tribunal civil d'Angers du 8 décembre 1900 a admis cette prétention et décidé que l'Administration ne pourrait réclamer les droits exigibles sur la décision du 14 janvier 1896 sans avoir auparavant régularisé l'enregistrement de celui du 4 juin 1895.

Attendu qu'au cours de l'instruction du procès et notamment dans la réplique du 31 mai 1899, l'administration de l'Enregistrement a fait usage d'un jugement rendu par le tribunal civil d'Angers le 4 juin 1895, et que les demandeurs en opposition invoquent, avant toute défense au fond, le droit de se prévaloir des dispositions dudit jugement; qu'ils demandent, en conséquence, que ledit jugement soit régularisé dans l'intérêt de toutes les parties en cause, ainsi que la disjonction de l'incident;

Attendu que l'Administration demande, sur l'incident, qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle laisse au tribunal le soin de décider s'il y a lieu ou non de le joindre au fond;

Attendu qu'il ne saurait être contesté que la discussion des dispositions du jugement du 4 juin 1895 peut être utile dans la cause, et qu'il importe

de rendre cette discussion égale vis-à-vis de toutes les parties plaidantes; Attendu, en fait, qu'il résulte des documents produits qu'en réalité le jugement du 4 juin 1895 a été enregistré en débet le 4 juin 1899, mais que l'enregistrement en débet, l'Administration le reconnaît elle-même, ne peut produire d'effet que pour le procès dans lequel la production a eu lieu, que les tiers ne peuvent se prévaloir de l'accomplissement de la formalité en débet, et qu'ils sont tenus avant de faire usage des actes qu'ils invoquent, d'acquitter les droits laissés provisoirement en suspens;

Que l'enregistrement en débet du 4 juin 1899 ne saurait donc être considéré comme suffisant à l'égard des parties qui l'invoquent dans le procès actuel ;

Attendu que l'administration de l'Enregistrement, à laquelle incombait l'obligation de faire régulariser ledit jugement avant d'en faire usage, entend se soustraire à cette obligation en alléguant que l'Etat ne se doit pas d'impôt à lui-même et qu'en outre, s'il en était ainsi, « l'Enregistrement ne pourrait plus demander les droits des actes non enregistrés dans les délais, qu'après les avoir revêtus de la formalité dont l'omission serait l'objet de leurs réclamations. ce qui serait absurde... >> ;

Attendu qu'aucune disposition spéciale de la loi n'affranchit l'administration de l'Enregistrement, agissant comme plaideur, de se soumettre à la formalité préalable de l'enregistrement des pièces qu'elle produit en justice;

Attendu qu'aux termes des art. 41 et 47 de la loi du 22 frimaire an VII, les officiers ministériels ne peuvent, sous peine d'amende, faire usage d'aucun acte non soumis à la formalité préalable de l'enregistrement, et que même les juges et arbitres ne doivent, sous leur responsabilité personnelle, rendre aucun jugement sur des actes non enregistrés ;

Que ces pénalités, qui pourraient s'appliquer dans la cause, exposent les défendeurs à voir rejeter leurs conclusions sur le jugement du 4 juin 1895, si l'enregistrement n'en était préalablement régularisé; ce qui les mettrait ainsi dans un état d'infériorité flagrant vis-à-vis de l'Administration laquelle en fait usage et pourrait ainsi obtenir gain de cause, sans défense possible, sur un document dont l'examen ne pourrait être contradictoire ;

Attendu, au surplus, que ce ne sont pas les droits du jugement du 4 juin 1895, qui sont réclamés par l'Administration par les contraintes du 3 juin 1896, mais les droits du jugement du 14 janvier 1896 dans lequel seul les consorts Frémy et sieur Margot ont été en cause ;

Que l'acquittement des droits du jugement du 4 juin 1895, ou tout au moins la régularisation de l'enregistrement dudit jugement ne semble donc pas, quant à présent, entraîner le retrait de la demande formée par l'Administration pour la perception des droits auxquels le jugement du 14 janvier 1896 a donné ouverture;

Attendu que si même la décision à intervenir devait entraîner cette conséquence, l'Administration n'aurait qu'à s'en prendre à elle-même d'avoir produit au procès le jugement du 4 juin 1895;

Par ces motifs,

Observations.

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La décision qui précède ne nous paraît pas fondée et ne constitue, qu'on nous passe le mot, qu'une mauvaise chicane. Il est évident tout d'abord que les art. 41, 42 et 47 de la loi du 22 frimaire doivent être entendus dans un sens raisonnable et non avec une extension absurde qui précisément en détruirait tout l'effet. Ils ont pour but de contraindre les particuliers à soumettre à la formalité de l'enregistrement les actes qui en sont susceptibles

avant de pouvoir les invoquer soit dans un acte public, soit en justice. Il est clair que cette prohibition ne s'applique pas aux actes dont la Régie elle-même poursuit l'enregistrement; autrement il faudrait dire que son action ne peut être exercée que lorsque la cause en a été supprimée.

Une décision ministérielle a été rendue en ce sens dès le 1er thermidor an X (Inst. 290, no 2) et il ne paraît pas que depuis lors cette question ait jamais fait l'objet d'une contestation quelconque.

La difficulté soumise au tribunal se réduisait en réalité à ces termes très simples, car les droits de rétrocession dont la Direction générale poursuivait le recouvrement étaient précisément ceux dont le juge exige le versement préalable avant de connaître de l'action intentée devant lui, ce qui revient à dire que pour juger le procès il veut que la cause même du procès disparaisse.

Le motif qu'il donne à l'appui de sa décision, à savoir qu'il est important pour la partie adverse de prendre connaissance du juge-. ment invoqué par la Régie, ne résiste pas à l'examen. En effet, ou bien l'Administration a produit à l'appui du mémoire signifié à l'adversaire (ou incorporé dans ce mémoire même) une copie du jugement qu'elle invoque, et en cette hypothèse l'adversaire pourra discuter ce document en connaissance de cause, ou elle ne l'a pas fait, et le tribunal sera fondé à n'en point faire état et, par suite, à rejeter la demande comme insuffisamment justifiée.

Nous ferons observer, en terminant, que la Direction générale, fait preuve en cette matière de l'esprit le plus large et le plus libéral. Elle recommande, en effet, à ses préposés de ne pas exiger le timbre et l'enregistrement sur les pièces produites comme justifications par les parties dans les instances fiscales, et à raison du seul fait de cette production; les agents doivent se borner à relever les infractions aux lois sur le timbre ou sur l'enregistrement dont ces actes contiendraient la preuve (Sol. 22 avril 1895; R. E. 1389).

Annoter: T. A., Vis Acte produit, no 64, et Procédure, no 189–2 (à créer).

Art. 2600.

Certificat de vétérinaire.

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Police sanitaire des animaux. Acte dressé en exécution des règlements de police.

Exemption de timbre.

Acte produit en justice ultérieurement. - Intérêt privé. -Timbre exigible.

Le certificat dressé par un vétérinaire pour attester qu'il a visité des animaux et qu'ils peuvent circuler sur la voie publique n'est pas sujet

au timbre au moment de sa création s'il est prescrit par un règlement de police.

Mais il devient ultérieurement passible du timbre s'il est produit en justice dans un intérêt privé.

Solution, 14 janvier 1901.

Monsieur le Directeur, pour défendre à l'instance en résolution de la vente d'un animal de l'espèce bovine que l'acheteur avait engagée contre lui devant le tribunal de commerce de P..., M. C..., vendeur, a produit,sans l'avoir préalablement soumis à la formalité du timbre, un certificat du 4 juillet 1900, par lequel M. B..., vétérinaire, constate qu'il a visité les animaux de celui-ci et que ces animaux ne présentant aucun symptôme de maladie contagieuse « peuvent circuler sur la voie publique ».

Bien qu'il ne soit pas indiqué que M. B.... ait été délégué par le maire et soit chargé du service sanitaire du département ou de la commune, il paraft bien établi que ce certificat a été dressé en vue d'obtempérer aux prescriptions de l'arrêté pris, le 13 juin 1900, par le préfet de Seine-etMarne, pour enrayer l'extension de la fièvre aphteuse, en interdisant la circulation sur les routes et chemins publics des animaux susceptibles d'être atteints de cette maladie.

Il est vrai que, d'après cet arrêté, le certificat d'origine aurait dû être délivré par le maire; mais il est à remarquer que la signature de M. B.... a été légalisée, le même jour, par ce magistrat et que, d'ailleurs, la délivrance d'un certificat par le vétérinaire a été reconnue indispensable par l'arrêté préfectoral complémentaire du 18 août 1900.

Dans ces conditions, il y a lieu de reconnaître, ainsi que vous en exprimez l'avis, que ce certificat rentre dans la catégorie des actes de police générale et pouvait à ce titre être établi sur papier non timbré en vertu de l'art. 16, no 1 de la loi du 13 brumaire an VII.

Mais l'exemption d'impôt n'est acquise aux actes de cette catégorie qu'autant qu'il en est fait l'usage prescrit par les règlements de police et, par le fait que le certificat dont il s'agit a été produit en justice dans un intéret privé, il tombe sous l'application de l'art. 30 de la loi précitée.

Vous pouvez, en conséquence, comme vous le proposez, ordonner au profit de M. R..., la restitution de l'amende de 50 fr. indûment perçue au bureau de P..., le 5 octobre 1900, en même temps que le remboursement du droit de timbre de la pétition; et poursuivre le recouvrement de celle de 5 fr. (art. 30 de la loi de brumaire et 10 de celle du 16 juin 1824) qui demeure à la charge de M. C..., auteur de la production.

Annoter T. A., Vis Acte produit, no 65, Certificat, no 39-1, et Timbre, no 248-16° (à créer) et 249.

Communication.

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Art. 2601.

Société par actions.

-

Impôt sur le revenu. - Assemblées d'actionnaires. - Extraits des délibérations. Comptes rendus de la gérance.

Dépôt.

Les sociétés par actions sont tenues de donner communication aux agents de l'Enregistrement, par application de l'art. 2 § 3 de la loi du

29 juin 1872, non seulement de l'extrait des délibérations des assemblées générales d'actionnaires, mais encore des comptes rendus présentés par les gérants.

Boulogne-sur-Mer, 23 novembre 1900.

Attendu que l'Enregistrement a décerné une contrainte à la date du 10 fé. vrier 1900 contre la Société Blanzy, Poure et Cie pour n'avoir pas déposé au bureau de son receveur, dans les 20 jours de chaque délibération, les comptes rendus présentés par les gérants, en même temps que les extraits des délibérations des 13 avril 1895, 15 avril 1896, 14 avril 1897; qu'il relève de ce chef trois contraventions et conclut au paiement de trois amendes de 100 fr. à 5.000 fr. chacune, contre la dite société ;

Attendu qu'à cette contrainte, signifiée le 12 février 1900, la Société Blanzy, Poure et Cie a formé opposition à la date du 7 février 1900 ; qu'elle prétend ne pas être en faute et conclut à la nullité de la contrainte; que par mémoires signifiés, les parties ont maintenu leurs prétentions respectives; Sur la nullité de la contrainte :

En la forme, attendu qu'aucun moyen n'est proposé de ce chef;

Au fond, attendu que la loi du 29 juin 1872 contient, dans son art. 2 §3 des dispositions spéciales ainsi conçues :

« Les comptes rendus et les extraits des délibérations des conseils d'administration ou des actionnaires seront déposés dans les 20 jours de leur date au bureau d'enregistrement du siège social. »

Que l'art. 5 de la même loi punit toute contravention conformément à l'art. 10 de la loi du 23 juin 1857 et que celui-ci prévoit une amende de 100 fr. à 5.000 fr. pour chaque contravention;

Attendu, en l'espèce, que la Société Blanzy, Poure et Cie ayant réuni ses actionnaires en assemblées générales les 13 avril 1895, 15 avril 1896, 14 avril 1897, et les dividendes à distribuer ayant été alors fixés, cette société s'est bornée à envoyer au bureau de l'enregistrement un extrait de chacune de ces délibérations, sans y joindre les comptes rendus des gérants;

Attendu que cette société défenderesse tente de démontrer par son mémoire que les deux documents énoncés en la loi du 29 juin 1872 ne sont pas rigoureusement exigés; qu'il suffit que l'Enregistrement soit éclairé par les documents qui lui sont remis pour établir et percevoir son impôt; que les extraits qu'elle a remis les 17 avril 1895, 16 avril 1896, 3 mai 1897, étaient suffisamment précis et qu'elle ne pouvait être contrainte à fournir d'autres pièces;

Attendu qu'il convient de constater d'abord et en fait que ces assemblées générales ont été précédées chacune d'un rapport de la gérance, ainsi que cela résulte des termes mêmes des extraits des délibérations remis à l'Enregistrement;

En droit :

Attendu que les dispositions de l'art. 2 § 3 de la loi du 29 juin 1872 sont claires et précises en leurs termes, autant que ceux-ci sont impératifs; que, si de telles dispositions doivent être considérées, dans les matières de droit commun, comme exclusives du droit pour les tribunaux de les interpréter, a fortiori en est-il ainsi en matière fiscale;

Attendu, au surplus, que si des divergences se sont autrefois produites dans l'interprétation des dispositions invoquées à l'encontre de la société opposante, ces divergences n'ont plus actuellement raison d'être ; qu'il résulte, en effet, des termes de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 11 janvier 1899, que les sociétés sont obligées à la production de l'un et de l'autre des deux documents énoncés en ladite loi;

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