Page images
PDF
EPUB

vous reconnaissez qu'avant toutes poursuites, la prescription décenna e avait atteint les droits réclamés sur les biens de la succession Pierre F..., autres que les 12 obligations foncières susvisées, et que la prescription biennale établie par l'art. 14 de la loi du 16 juin 1824 avait atteint les demidroits en sus; vous réduisez, en conséquence, la réclamation à la somme de 438 fr. 75, montant (décimes compris des droits simples calculés sur la valeur d'après le cours de la Bourse au décès de M. Pierre F..., des 12 obligations foncières que M. Yves F..., avait détournées. En ce qui concerne ces derniers droits, vous pensez que le délai pour les recouvrer n'a pu prendre cours que de la date du jugement du 23 janvier 1896, qui a constaté le détournement,

Cette manière de voir paraît très contestable.

En effet, M. Pierre F... avait laissé comme héritiers: 1o son frère Yves, auteur du détournement des 12 obligations foncières; 2o son frère Jean, devenu légataire universel d'Yves; 3° et 4° deux sœurs, encore existantes. Ces quatre cohéritiers étaient tenus de souscrire la déclaration de la succession du défunt dans les six mois du décès, c'est-à-dire dans le délai de six mois à compter du 23 décembre 1889 (L. 22 frimaire an VII, art. 24, 27 et 39).

Ils étaient solidaires entre eux (art. 32).

M. Yves F..., auteur du détournement commis, qui connaissait nécessairement les valeurs détournées, a certainement, en ce qui le concernait, commencé à prescrire à compter du 23 décembre 1889, et cette prescription peut être opposée à l'Administration actuellement, soit de son chef, par M. Jean F..., son légataire universel, soit de leur propre chef, par les trois cohéritiers survivants, M. Jean F..., et ses deux sœurs qui n'ont, à cet effet, qu'à se prévaloir du principe que la prescription acquise à un débiteur solidaire avec d'autres profite à tous les codébiteurs (C. civ. 1208).

La situation est, en somme, analogue au cas où une déclaration ayant été souscrite et où les valeurs détournées ayant été omises, la déclaration a été passée par l'héritier auteur du détournement. L'Administration a admis à diverses reprises, dans cette dernière hypothèse que, lorsque la prescription quinquennale est acquise à l'héritier auteur du détournement, elle profite, par suite de la solidarité qui existe entre cohéritiers, à tous les autres. Il ne saurait en être autrement de la prescription décennale.

La situation n'est différente que dans le cas où l'auteur du détournement est un légataire, comme dans l'affaire Richard, qui a donné lieu à un arrêt de la Cour de cassation du 23 février 1898 (Instruction no 2967 § 1or), ou un époux qui n'est pas davantage débiteur solidaire des droits de mutation par décès.

J'estime, par ces motifs, qu'il n'y a pas lieu de défendre à l'instance engagée avec les consorts F.... Vous prendrez les mesures nécessaires pour qu'il ne soit pas donné suite à cette instance et vous ferez rembourser ou régulariser les frais exposés de part et d'autre.

Annoter: T. A., Recel, 23 bis (à créer).

Art. 2718.

Renonciation frauduleuse à usufruit. - Présomption.Renonçant atributaire des biens délaissés. - Partage avec l'héritier.-Contrainte décernée contre l'héritier seulement. Validité de la renonciation implicitement reconnue.

Lorsqu'une veuve instituée legataire en usufruit de tous les biens de son mari, renonce à cet usufruit, pour s'en tenir à ses droits dans la communauté, et partage ensuite avec l'héritier, l'attribution qui lui est faite dans ce partage, en représentation de ses droits, de l'usufruit auquel elle avait renoncé ne suffit pas pour établir que cette renonciation était frauduleuse, alors surtout que la Régie ne réclame pas les droits de mutation par décès sur le legs d'usufruit, mais seulement un droit de donation sur le partage et ne s'adresse qu'à l'héritier, en laissant la veuve hors de cause.

Clermont, 19 avril 1901.

Attendu que M. Louis Joseph Delavière est décédé à Balagny-sur-Thérain, le 6 août 1897, laissant sa femme Elisabeth-Aglaé Gérin commune en biens et, aux termes d'un testament authentique, légataire de l'usufruit de tous ses biens ;

Attendu que par le même testament le sieur Léon Auguste Delavière était institué légataire universel desdits biens en nue propriété ;

Attendu que par acte reçu Martin, notaire à Mouy, le 4 février 1898, la dame Delavière ayant renoncé à son legs, M. Delavière devint de ce fait légataire universel en toute propriété ;

Attendu que se trouvant dans l'indivision au regard des biens de communauté, les parties ont procédé au règlement de leurs droits respectifs par acte reçu Martin, notaire à Mouy, le 4 février 1898;

Attendu que, liquidation faite de la dite communauté, il revenait à M. Delavière une somme de 3.035 fr. 25 et à Mme Delavière une somme de 619 fr. 40;

Attendu qu'au lieu de partager sur ces bases, les parties ont arrêté entre elles, à titre de transaction et de pacte de famille, les conventions suivantes: la dame Delavière a abandonné au légataire universel de son mari : 1o la nue propriété de ses droits dans la communauté de 619 fr. 40; 2° la nue propriété d'immeubles à elle propres estimés 3.800 fr.; valeur en toute propriété : 4.419 fr. 40.- Le sieur Delavière, en représentation dudit abandon, lui a cédé l'usufruit de ses droits dans la communauté ayant en toute propriété la valeur de 3.075 fr. 25;

Attendu que le receveur d'Enregistrement croyant reconnaître dans cette disposition un échange de nue propriété contre usufruit, a, à la date du 8 février 1898, perçu les droits en conséquence;

Attendu que, critiquant cette perception, l'administration de l'Enregistrement, après avoir adressé tant à Mme Delavière qu'à M. Delavière (en modifiant chaque fois ses calculs et ses arguments) diverses réclamations par elle successivement abandonnées, a enfin délivré une dernière contrainte à M. Delavière seul, à la date du 1er février 1900, pour avoir paiement de la somme de 469 fr. 15, à laquelle ledit Delavière a fait opposition;

Attendu que l'Administration, tant dans sa contrainte que dans ses mémoires, pose en principe que Mme Delavière ayant récupéré les biens auxquels elle avait renoncé, cette renonciation est fictive et, par suite, inopérante; que, dès lors, par le pacte de famille, Mme Delavière ne recevant rien en échange de la nue propriété de ses biens propres, l'acte dont s'agit constitue une libéralité;

Attendu que l'instance n'est dirigée que contre M. Delavière seul, que celui-ci n'est pas partie à l'acte de renonciation, qu'il ne pouvait dépendre de lui soit d'en assurer, soit d'en empêcher l'accomplissement;

Attendu que cet acte, qui n'a pas été déclaré nul au regard du véritable renonçant, doit également subsister et produire au regard des tiers tous ses effets;

Attendu, du reste, que l'administration de l'Enregistrement après avoir réclamé à la dame Delavière les droits de mutation par décès de l'usufruit auquel celle-ci avait renoncé (parce que renonciation fictive, disait-elle), s'est désistée ensuite de cette réclamation par décision du 20 juin 1899 et a, par ce désistement, implicitement reconnu que cette renonciation était valable; qu'elle ne peut, dès lors, la considérer comme inopérante à l'égard de Delavière ;

Attendu que c'est encore à tort que l'Administration prétend que les deux valeurs échangées sont d'une inégalité telle qu'elles ne peuvent faire l'objet d'un échange, parce qu'on ne saurait assigner à un usufruit reposant sur une tête de 67 ans une valeur égale à la nue propriété, la valeur de cet usufruit devant être arbitrée d'après les tarifs des Compagnies d'assu rances;

Attendu que les Compagnies d'assurances ont pris pour base de leurs calculs un ensemble d'existences et que, traitant avec un nombre considérable d'assurés, il leur est facile d'établir d'une façon à peu près certaine une moyenne de la durée de la vie humaine, sans être lésées; qu'il n'en saurait être de même lorsqu'il s'agit de traiter de particulier à particulier; que dans ce cas le traité est tout à fait aléatoire ;

Attendu qu'au surplus la Cour de cassation a elle-même décidé, par arrêt du 16 mai 1900, qu'on ne pouvait se fonder sur des calculs de probabilité pour attribuer une valeur à un usufruit, la durée de la vie humaine étant nécessairement incertaine; - qu'en cet état, le pacte du 4 février 1898, intervenu entre les parties, doit être considéré comme constituant bien un échange et les droits abandonnés de part et d'autre comme étant sensiblement égaux;

Par ces motifs,...

Annoter: T. A., Renonciation, 160.

Art. 2719.

Société. - Apport d'un fonds de commerce. Dissolution. - Cession du fonds à un associé non apporteur. Droit de 20/0. Valeur imposable. Prix sti

[blocks in formation]

Lorsqu'un fonds de commerce est apporté à une société en nom collectif formée entre deux personnes et que, après la dissolution, l'apporteur cède à son coassocié tous ses droits, à la charge d'acquitter sa part du passif, le droit de 2 0/0, pour cession de fonds, est dû non sur le pas

sif formant le prix, mais sur la valeur initiale de l'apport, outre le droit de 0 fr. 50 0/0 sur les marchandises.

Seine, 20 avril 1901.

Attendu qu'aux termes d'un acte sous seings privés du 15 septembre 1897, les frères Colle et Henri Escoffier ont formé entre eux une société pour l'exploitation à Paris de divers restaurants; que les frères Colle ont apporté, pour la somme de 135.000 fr., l'établissement connu sous le nom de « Diner de Paris » situé Boulevard Montmartre, no 12, ensemble la clientèle, le matériel et le droit au bail, et pour la somme de 25.000 fr. les marchandises dépendant dudit fonds et diverses avances; qu'aux termes d'un acte du 3 février 1898, cette société a été dissoute d'un commun accord et Escoffier nommé liquidateur; qu'aux termes d'un autre acte, en date du même jour, les frères Colle ont cédé tous leurs droits sociaux à Escoffier moyennant le paiement de leur part dans le passif évalué 40.000 fr.; qu'en conséquence de ce dernier acte, Escoffier,qui a continué le commerce en son nom personnel, a été inscrit au rôle de la patente pour l'année 1899 aux lieu et place de la société qui était imposée en 1898; que lors de l'enregistrement du contrat de cession, le receveur a perçu le droit d'enregistrement de 20/0 - sur le prix stipulé de 40.000 fr.;

Attendu que la Régie prétend que la perception aurait dû être établie sur la valeur du fonds au moment de l'apport en société, soit sur 135.000 fr.; qu'elle réclame à Escoffier, par voie de contrainte, le supplément entraîné par ce nouveau mode de liquidation que dans le dernier état de ses conclusions elle réclame également le droit de cession sur les marchandises existant au jour de la dissolution de la société ;

Attendu qu'Escoffier a fait opposition à la contrainte et que les moyens des parties ont été développés dans des mémoires respectivement signifiés ; Attendu que c'est par une faveur spéciale que la loi de l'enregistrement permet de percevoir le droit fixe (ou les droits substitués) sur l'apport d'un fonds de commerce fait par un associé comme mise sociale; que dans ce cas, l'associé est censé retenir conditionnellement la propriété de son apport jusqu'à l'événement du partage, mais que si lors de la dissolution de la société le fonds de commerce passe sur la tête d'un autre associé, la condition suspensive étant désormais réalisée dans le sens d'une mutation définitive, le droit proportionnel provisoirement suspendu devient rétroactivement exigible et doit être acquitté sur la valeur du fonds de commerce au jour de l'apport en société ;

Attendu que l'ensemble de l'argumentation de l'opposant consiste à prétendre que l'acte du 3 février 1898 ne contient aucune cession de fonds de commerce ni d'un corps certain quelconque ; qu'il a simplement acquis des droits sociaux et que la perception a été régulièrement faite par le receveur sur le prix de cette acquisition;

Mais attendu que tout ce raisonnement, tant dans son idée générale que dans ses déductions accessoires, repose sur une erreur manifeste; qu'il ne s'agit pas, en effet, de savoir si, à la date du 3 février 1898, les contractants ont entendu faire ou non une cession de fonds de commerce; mais seulement de savoir si la cession implicitement contenue dans l'acte de société du 15 septembre 1897 a été réalisée, lors de la dissolution, par l'attribution du fonds à un associé autre que l'associé apporteur; que les faits rapportés plus haut ne laissent place à aucun doute; que par les deux actes concomitants du 3 février la société a été dissoute et tout l'actif, y compris le fonds apporté par les frères Colle, est devenu la propriété d'Escoffier; que cette constatation suffit pour justifier pleinement l'application des principes

Attendu que l'opposant prétend en vain qu'au moment de son organisation l'être moral avait disparu pour faire place à une indivision entre les anciens associés; qu'en effet, la dissolution de la société n'implique pas l'extinction immédiate de l'être moral qui continue à subsister pour les besoins de la liquidation jusqu'à l'issue de celle-ci; qu'en l'espèce, c'est la cession du 3 février qui, par la réunion de tous les intérêts sociaux dans la même main, a entraîné la clôture de la liquidation et la disparition de l'être moral; que l'événement qui tenait en suspens la mutation conditionnelle résultant de l'apport en société s'est donc réalisé, alors que les associés étaient encore liés par le pacte social;

Attendu, en ce qui concerne les marchandises, que si les droits de mutation sur les objets transmis doivent être calculés d'après leur valeur au jour de l'apport, cette règle ne peut s'appliquer qu'aux objets existant encore en nature; qu'en l'espèce, les marchandises qui se trouvaient dans la maison de commerce au moment de la constitution de la société ont été consommées par celle-ci et remplacées par de nouvelles marchandises qui ont juridiquement pris la place des précédentes; qu'en conséquence, ce sont les marchandises existant au 3 février 1898 qui doivent supporter le droit proportionnel;

Attendu, en ce qui concerne l'incidenee de l'impôt, qu'il résulte des dispositions de l'art. 29 de la loi du 22 frimaire an VII que toutes les parties qui ont figuré dans les actes sous seings privés sont solidairement tenues envers la Régie des droits auxquels ces actes donnent ouverture; que l'art. 31 de la même loi a eu pour unique objet de régler le recours des parties entre elles sans infirmer en rien le principe de la solidarité; Par ces motifs,...

Observations. Rapprocher les jugements de Trévoux (27 janv. 1899) et d'Arras (17 mars 1897) rapportés sous l'art. 2029 de la Revue ainsi que nos observations.

Annoter T. A., Société, 303-A, et 312.

Art. 2720.

Société en commandite simple. Immeubles apportés par les associés en nom. Amélioration au cours de

la société.

Plus-value spontanée. Licitation à la dissolution. Associés en nom adjudicataires conjoints et indivis. - Droit de transcription.

I. L'acte par lequel, à la dissolution d'une société en commandite simple, deux associés en nom sont déclarés conjointement et indivisément adjudicataires des biens apportés par eux, moyennant un prix supérieur à la valeur initiale attribuée à l'apport, ne donne pas ouverture au droit de mutation sur la part revenant aux autres associés dans la plus-value même provenant de constructions effectuées par la société, mais seulement au droit d'indemnité de 0 fr. 50 0/0.

II. Le droit de transcription n'est pas exigible sur cet acte, alors même qu'il laisse subsister l'indivision entre les acquéreurs conjoints.

« PreviousContinue »