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la loi. Nous ne pensons pas qu'après l'avoir lu, personne puisse vanter encore la prétendue supériorité sociale des peuples protestants.

Malgré la sympathie que M. Devas éprouve pour ces organisations, il est loin d'avoir une confiance absolue en leur sagesse, et il signale fort judicieusement des tendances fâcheuses qui se révèlent chez elles au fur et à mesure de leur succès, et qui les amèneront à abuser à leur tour de la force, si l'esprit chrétien véritable et pratique ne reprend pas son empire dans les institutions du pays.

Tel est, rapidement résumé, ce livre plein de faits et inspiré par la plus sûre doctrine. Nous voudrions le voir entre les mains də toutes les personnes que préoccupent les problèmes sociaux du temps.

C. J.

Le gérant, J. BARATIER.

ERRATA.

Des fautes typographiques se sont glissées dans la dernière livraison de la Revue (janvier 1878). Ainsi dans l'article de M. du Bois, page 46, ligne 10, au lieu de donné, il faut lire de mire, et, à la ligne 13, la virgule doit être enlevée; elle change le sens de la phrase.

Dans l'article de M. Claudio Jannet, sur une Colonie féodale en Amérique, le lecteur aura sans doute aussi relevé plusieurs fautes; nous devons rectifier celle qui s'est produite page 72, à la dernière ligne au lieu de institutions saintes, c'est institutions saines qu'il faut lire.

1900 Grenoble, imprimerie BARatier et DardeLET. 7945

DES

INSTITUTIONS ET DU DROIT.

(5 Année.)

PIE IX ET LES INSTITUTIONS SOCIALES.

21 février 1878.

Le Pontificat qui vient de finir a joué un si grand rôle dans la marche et dans la vie des Institutions sociales, que nous nous reprocherions de ne pas y arrêter quelques instants l'attention de nos lecteurs. Mais il faut, pour en bien juger, se faire une idée nette de l'état du monde au moment où l'illustre Pontife a pris les rênes du gouvernement de l'Eglise universelle.

L'Europe, pendant toute la durée du XVIIIe siècle, descendue sur une pente rapide, et l'ordre social s'était enfin brisé contre les doctrines de la Révolution, qui peu. vent se résumer en deux mots : la négation de l'ordre surnaturel pour la Religion, la négation de l'action de Dieu pour la société. Il est inutile de nous étendre beaucoup sur les conséquences pratiques qui en résultèrent, nous savons assez comment finit le siècle précédent et comment le nôtre fut inauguré. Les gouvernements, puis les sociétés elles-mêmes furent renversés, et des flots de sang vinrent épouvanter le monde, d'abord sur les échafauds, puis sur les champs de bataille qui prirent, ainsi que les armées européennes, de gigantesques proportions. La force commençait à primer le droit.

C'est ainsi que le XVIIIe siècle, âge de déplorable décadence, finissait sur des ruines amoncelées, et que le 6o ANNÉE. 3o LIV. MARS 1878.

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XIXe siècle commençait par les luttes terribles qui ensanglantèrent l'Europe. Et cependant un souffle providentiel semblait déjà, au milieu de ces catastrophes, promettre un siècle réparateur. Mais cette réparation, cette reconstruction sociale devait être préparée par une suite d'étranges commotions, et, par le fait, nous l'attendons encore avec une confiance dont nous devons expliquer les motifs.

L'action providentielle sur notre époque est marquée. d'un caractère très-spécial d'un côté, cette action laisse les principes délétères, que nous avons énoncés plus haut, produire tout le développement de leurs conséquences fatales. Les sociétés secrètes les ont répandus dans les masses qui en sont complétement imprégnées; et, comme les masses sont les maîtresses du pouvoir, la source de toute autorité et de toute législation, nous marchons inévitablement à un état social sans précédents.

Mais, d'un autre côté, cette même Providence, admirable dans ses moyens, toute-puissante dans son action, n'ayant besoin, pour arriver à son but, ni du nombre ni de la force, prépare évidemment, dans les mystères de sa sagesse, un ordre de choses meilleur. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, c'est la partie dirigeante de la société qui sombrait, les intelligences cultivées tombaient dans l'abîme du doute, de l'athéisme, de la perversité. Aujourd'hui, au contraire, ce sont les classes dirigeantes qui se relèvent et qui tendent à dominer les flots tumultueux de la Révolution. Nous voyons les intelligences d'élite se détacher successivement et en grand nombre de la masse pervertie ou trompée et former une armée de plus en plus nombreuse pour la défense de la vérité. Aussi, la vérité et l'erreur, qui dans la première partie de notre siècle avaient été mélangées, se séparent de plus en plus pour former deux camps opposés, dont l'un est plus fort et plus redoutable par le nombre, et l'autre tire toute sa force de cette vérité même, qui tôt ou tard est victorieuse de l'erreur.

Voulons-nous arriver à conclure de là que cette action de relèvement des idées sociales doit être attribuée uniquement à Pie IX? Loin de nous cette pensée. D'ailleurs, elle détruirait nos espérances et nous les verrions en ce moment rentrer dans le tombeau où le grand Pontife vient d'être enseveli. Il n'a été qu'un instrument puissant dont Dieu s'est servi pour avancer cette œuvre. Ce qui le prouve abondamment, c'est que cette action de salut et de relèvement avait commencé avant lui. Déjà un philosophe chrétien en avait eu l'intuition dès le commencement de ce siècle, lorsqu'il écrivait que nous touchions à la plus grande des époques religieuses. Cette action est donc évidemment providentielle, il faut remonter plus haut que l'homme pour trouver le moteur, et c'est ce qui nous donne cette confiance dont nous parlions tout à l'heure, que Celui qui a commencé l'œuvre bien avant Pie IX ne la laissera pas inachevée après Pie IX, et que tous ces matériaux rassemblés doivent servir à un édifice social prochain, dont le plan est dans les décrets d'une sagesse et d'une bonté infinies.

Mais ce que personne ne peut nier, c'est que le Pontificat de Pie IX a fait faire un pas immense à l'œuvre providentielle dont nous parlons. Il a été surtout remarquable par le dégagement complet de la vérité religieuse et sociale.

Le Concile du Vatican, en particulier, qui est l'œuvre magistrale de ce pontificat, a contribué merveilleusement à ce résultat. C'est une chose admirable de voir comment l'Eglise, au milieu de l'abandon complet des nations, se relevant au milieu de cette mer d'impiétés et d'erreurs pour apparaître comme un phare de salut, a montré tout d'un coup à notre société contemporaine, qui oublie les principes de subordination et de devoir pour ne plus reconnaître à l'homme que des droits, lui a montré, disonsnous, une autorité doctrinale, souveraine et infaillible, dérivant immédiatement de Dieu comme de sa source, et à laquelle toutes les intelligences comme tous les cœurs doivent se soumettre.

Mais, de plus, l'Eglise définissait d'une manière complète son organisation divine, et au milieu de sociétés déchirées par des divisions sans nombre, d'intelligences tourmentées par le doute, elle offrait au monde le spectacle magnifique d'une unité, d'une force, d'une grandeur qui n'ont jamais été plus évidentes.

Est-il étonnant, dès lors, que cette Eglise, toujours plus grande, plus belle et plus forte à mesure qu'elle est plus persécutée et plus haïe, toujours reine auguste au milieu de cette civilisation européenne qu'elle a enfantée, soit devenue de plus en plus aussi le centre puissant, l'aimant divin vers lequel se tournent les intelligences désireuses de s'attacher à la vérité absolue. Dieu a voulu aussi la présenter comme le fondement de toute sécurité pour l'avenir, car le concile du Vatican, l'a fortifiée contre tous les orages; elle peut braver tous les efforts et toute la haine des nations, jusqu'au moment où elle deviendra leur salut.

« L'Eglise, disait le cardinal Manning, après le Concile » du Vatican, l'Eglise est pourvue de tout ce qui lui est >> nécessaire pour la foi et pour la vérité, pour l'unité et » pour l'ordre. L'inondation peut venir, la pluie peut tom>> ber, les vents peuvent souffler et se précipiter sur elle, >> elle ne sera pas renversée, parce qu'elle est fondée sur >> la Pierre... Que les pouvoirs civils, les uns après les au>> tres, ou tous ensemble, prétendent faire des vicaires de >> Jésus-Christ leur sujet, jamais il ne sera sujet. Le non » possumus est non-seulement immuable, mais invincible. » Le chef infaillible d'une Eglise infaillible, ne peut être >> soumis à la souveraineté d'un homme. >>

Mais quelles sont les doctrines que l'Eglise tient en dépôt et dont le salut des nations doit sortir? Ceci nous amène à parler d'un autre grand événement du pontificat de Pie IX, de l'acte le plus hardi peut-être qu'il ait accompli.

Nous avons dit que le commencement de ce siècle avait vu éclore des germes d'espérance pour l'avenir de la société.

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