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me d'après le Pere Gaichiés de l'Oratoire, c'eft. de bien favoir ce qu'on a à dire. Rien, dit ce bel écrivain, de plus néceffaire pour le fuccès d'un fermon que la mémoire. Un fermon bien appris, paroît bon, quoiqu'il ne foit que médiocre, & s'il eft bon, il paroît excellent. S'il n'eft point de défaut qui frappe tant l'auditeur que le défaut de mémoire, il n'en eft point non plus qui le fatigue davantage; il fouffre toute la peine que le prédicateur s'eft épargnée en fe négligeant. Le prédicateur qui a négligé d'apprendre, paye bien chérement le plaifir de fa pareffe c'eft un trifte fort que celui d'un orateur qui hésite; dans la néceffité de penser toujours ce qu'il va dire, il ne penfe jamais à ce qu'il dit il y a plufieurs inconvéniens à fe repofer fur fa facilité.

On court rifque de languir, jufqu'à ce que l'imagination foit échauffée: on dépend de fon humeur, de fa fanté, du tems: fi toutes ces chofes ne concourent, on ne peut fe contenter foi-même, encore moins contenter les autres: on a tort de dire que cette fujettion rallentit le zéle; mieux on pofféde la matiere, plus on eft en état de l'animer. On eft plus concis, plus jufte, plus preffant. La prononciation d'un difcours bien appris eft infinuante; elle cache mieux l'art, & fait croire la compofition plus naturelle. Celui qui parle fur le champ, eft ordinairement diffus, languiffant, fujet aux redites, fe perd en digreffions, dit de chaque chofe ce qu'il en fait, fans ordre & fans rapport au fujet; les penfées fe noyent, pour ainft dire, dans un déluge de paroles.

On doit fur-tout bien prendre les détails; ils fe foutiennent moins que les principes & chacun eft capable d'en juger. Tout ce qu'on

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fait parfaitement, se dit avec une liberté qui impofe, & l'on fe rend maître de l'efprit des autres, quand on eft maître du fien. Le plus grand fecours de la mémoire eft l'analyse du difcours, & l'enchaînement des matieres; l'harmonie des phrases & leur longueur fervent auffi; les pages multipliées, & les alinéa trop fréquens la fatiguent & la brouillent. On l'aide encore par la diverfité de l'écriture, par l'inégalité des marges, par des traits bizarres qui ont rapport au fens. Ufez de toutes ces précautions, appliquez-vous, comme fi le fuccès dépendoit de vous. Lorfque le moment d'inftruire est arrivé, n'attendez de fuccès que de Dieu priez-le de bénir vos foins, c'est le vrai moyen de parler avec ferveur.

Plaife au Seigneur d'augmenter la mienne,; de recevoir mon travail, de lui faire porter au centuple, & de m'en réferver la récompenfe pour l'éternité.

HOMÉLIES

SUR LES

ÉVANGILES

DE TOUS LES DIMANCHES

& principales Fêtes de l'année.

EVANGILE

du I. Dimanche de l'Avent. Luc 21.

E

N ce tems-là, Jefus dit à fes Dif ciples: Il y aura des fignes dans le foleil, dans la lune, & dans les étoiles & fur la terre les nations feront dans l'abattement & dans la confternation, la mer faifant un bruit effroyable par l'agitation de fes flots : & les hommes fécheront de frayeur dans l'attente des maux dont tout le monde fera menacé Car les vertus des cieux feront ébranlées ; & alors ils verront le fils de l'homme qui viendra fur une nuée avec une grande puiffance, & une grande majeflé. Pour vous

Tom. I.

A

lorfque toutes ces chofes commenceront d'arriver, regardez en haus, & levez la tête, parce que votre rédemption eft proche. Il leur propofa enfuite cette comparaifon : Confidérez, dit-il, le figuier & les autres arbres: lorfque vous voyez qu'ils commencent à pouffer vous reconnoiffez que l'été eft proche. Ainfi lorfque vous verrez arriver ces chofes, fçachez que le royaume de Dieu eft proche. Je vous dis, en vérité, que cette génération d'hommes ne finira point que tout cela ne foit accompli Le ciel & la terre passeront; mais mes paroles ne pafferont point.

.A

Homélie fur le Jugement dernier.

LA crainte, la confiance font, mes freres, les

deux vertus dont l'évangile nous infpire les fentimens les plus vifs; toutes les nations dans l'abattement, les cieux ébranlés, les aftres obfcurcis, la mer élevant fes ondes irritées, le feu qui diffout les élémens, l'univers en flammes, a le trifte spectable ! fpectacle bien propre à jetter la terreur dans les efprits! mais auffi un moment qui annonce à de miférables captifs leur délivrance prochaine, à de malheureux exilés leur rentrée dans l'ancienne patrie, le doux moment ! le moment bien capable d'infpirer les fentimens de la joye la plus pure !.

une

Notre évangile nous montre tout cela & bien plus que tout cela; il vous montre, pécheurs fous l'idée de ce bouleverfement général, créatures qui fe fouleveront contre vous, confcience qui fera tout à la fois accufatrice témoin, juge contre vous; un Dieu qui étend fon bras pour punir vos crimes fans miféricorde. Voilà ce qu'il vous montre, & ce qui doit vous faire trembler bien plus que la confufion

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