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EVANGILE

du III. Dimanche de l'Avent. Joan. 1,

43

N ce tems-là, les juifs envoyerent de Jérufa

E levers Jean,

lem vers Jean, des Prêtres & des Lévites, pour lui demander: Qui êtes-vous? Et il confeffa, & il ne le nia pás; il confeffa, dis-je, qu'il n'étoit point le Chrift. Ils lui demanderent: Quoi donc? Etes-vous Elie? Et il leur dit: Je ne le fuis point. Etes-vous prophete? Et il leur répondit: Non. Ils lui dirent Qui êtes-vous donc, afin que nous puiffions rendre réponse à ceux qui nous ont envoyés ? "Que dites-vous de vous-mêmes? Je fuis, réponditil, la voix de celui qui crie dans le défert: Rendez droites & unies les voyes du Seigneur, comme a dit le prophete Ifaye. Or ceux qu'on lui avoit envoyés étoient des Pharifiens, & ils lui firent encore cette demande: Pourquoi donc baptifez-vous, fivous n'êtes ni le Chrift, ni Elie, ni prophete? Jean leur répondit: Pour ce qui eft de moi, je baptife dans l'eau, mais il y en a un au milieu de vous que vous ne connoiffez pas. C'est lui qui doit venir après moi, qui m'a été préféré, & je ne fuis pas digne de dénouer les cordons de fes fouliers. Ceci fe paffa en Béthanie le long du Jourdain où Jean baptifoit.

Vous

V vent,

Homélie fur l'Humilité.

Ous l'avez vû le premier Dimanche de l'Avent, le Dieu que nous attendons à la fin des fiécles fera un Dieu terrible, & la crainte de les jugemens eft la premiere difpofition dans laquelle nous devons entrer pour le recevoir; vous l'avez vû Dimanche dernier, le Dieu que nous

attendons eft un Dieu bienfaisant, un Dieu qui n'ufe de fa puiffance que pour faire du bien à tous les hommes, & la reconnoiffance eft la feconde des difpofitions qui doit nous attacher inviolablement à lui; vous venez de l'entendre, le Dieu que nous attendons est un Dieu véritablement caché, un Dieu humble jufqu'à l'anéantiffement, un Dieu qui nous marque une eftime finguliere pour l'humilité, & eette vertu eft la troifiéme difpofition dans laquelle l'Eglife veut nous faire entrer, pour nous préparer à fon avénement.

Quel modéle admirable elle nous propose pour cela dans la perfonne de faint JeanBaptifte! Le fils de Zacharie eft un faint que la fynagogue comble d'honneurs, un faint qui pofféde tout ce qui énorgueillit le reste des hommes, la naiffance, le mérite, les talens, les emplois les plus auguftes; un faint cependant que rien de tout cela n'éleve, un faint qui ne veut rien appercevoir de bien en lui que pour le rapporter à Dieu trois fois on l'interroge fur fa perfonne, & jamais il ne lui échappe une parole qui le flatte, il n'eft ni le Chrift, ni Elie, ni un prophete; c'est toute la réponse qu'il donne, c'eft tout l'éloge qu'il fait de lui-même.

Il obferve la même modeftie quand il s'agit de fon miniftere; malgré fes fonctions de Précurjeur & de Baptifte de Jefus-Chrift, il ne fe croit pas digne de délier les cordons de fes fouliers: ô humilité de faint Jean! prodige de l'humilité, que vous êtes peu connue de notre fiécle, qu'il eft important de vous faire connoître! l'orgueil furvit au coup mortel que la croix de Jefus-Chrift lui a donné; on fe glorifie de la régularité de fes mœurs, des inclinations de fon cœur, des talens de fon efprit; on fe glorifie de fes emplois, de fes dignités, de fes grands biens, de fa figure;

l'amour propre s'attache à tout, fe nourrit de tout détruifons ces appuis de l'orgueil, convaincons notre efprit qu'il n'a rien en quoi il puiffe fe glorifier; & ce qui eft bien plus important & plus difficile, pénétrons notre cœur des fentimens d'une véritable humilité, mettons dans tout leur jour ces deux vérités qui feront la matiere de cette homélie.

1°. Que tout en nous doit nous humilier vous le verrez dans mon premier point.

2°. Que rien hors de nous ne doit nous élever, vous le verrez dans mon fecond point.

Premier Point.

:

Qu'est-ce que l'humilité que toute notre religion nous infpire? L'humilité, dit faint Auguftin, n'eft autre chofe que l'amour de Dieu porté jufqu'au mépris de foi-même l'humilité, dit faint Bernard, eft le mépris de foi-même, fondé fur la parfaite connoiffance de ce qu'on est devant Dieu : l'humilité, répondent les Théologiens, eft une vertu qui modere en nous le défir de notre propre excellence; c'est-à-dire, & prenez bien garde à ces effets de l'humilité; c'est-à-dire, une vertu qui nous empêche de nous élever au-deffus de l'état où nous devons être; une vertu qui nous porte à nous foumettre en toute chose à Dieu, & à nos fupérieurs comme à Dieu, dont ils font les miniftres; une vertu qui nous engage à nous regarder comme inférieurs à tous, å choifir les actions les plus propres à nous humilier, & enfin à accepter avec joye, du moins avec réfignation, les humiliations & les mépris."

Tels font, mes freres, les effets de l'humilité chrétienne que je vous annonce aujourd'hui. Trois confidérations pourront vous porter à ces faintes

pratiques la premiere eft la confidération de vos péchés; la feconde eft la confidération des inclinations de votre cœur, & la troifiéme, la confidération des ténébres de votre efprit: fuivons notre évangile, & développons ces trois pensées.

Les Juifs, dit l'évangélifte, envoyerent de Jerufalem vers Jean, des Prêtres & des Lévites, pour lui demander qui êtes-vous; tu quis es? Premiere question propofée à faint Jean de la part de la fynagogue, elle fçait que les tems du Meffie ne font pas éloignés, que la naiffance de JeanBaptifte a été précédée par des prodiges qui ont étonné Jérufalem, qu'il vit d'une façon toute extraordinaire, que fa fainteté lui paroît éminente tout cela la détermine à envoyer demander n'est pas le Meffie; tu quis es?

Fut-il jamais occafion plus délicate & plus dangereuse pour l'humilité que celle où se trouve aujourd'hui Jean-Baptifte? tout y flatte fenfiblement l'amour propre, l'autorité de ceux qui font la députation, le rang de ceux qui la compofent, le motif qui y engage. Ceux qui l'envoyent ce font les juges du grand Sannhedrin à qui il appartient de juger des affaires de la religion, c'eft le corps même de toute la nation repréfentée par fon tribunal fouverain; ceux qui font députés ce font des Prêtres, des Lévites & comme il paroît plus bas, des Pharifiens dont la fecte prévaloit en Ifraël. Le motif de cette embaffade folemnelle c'eft la fainteté de faint Jean, c'est l'estime qu'on a conçu pour elle. On lui demande, comme le fait connoître fa réponse, s'il n'eft pas le Chrift, le Meffie, le défiré des nations. Qu'auroit fait ici un de ces orgueilleux, un de ces faux chrifts, dont le nombre s'eft fi fort multiplié depuis Jefus-Chrift? il auroit eu

recours à l'imposture, il l'auroit foutenu par les grandes qualités que faint Jean réuniffoit en fa perfonne mais loin du plus humble des hommes une pensée fi criminelle! il rougit à la queftion qu'on lui fait, & détruit de toutes fes forces la flatteufe mais fauffe opinion qu'on a de lui-même, il nie qu'il foit le Christ, & afin de ne laiffer aucun doute, il protefte jufqu'à trois fois la même chofe : confeffus eft & non negavit, & confeffus eft quia non fum ego Chriftus. Il auroit pû dire qu'à la vérité il n'étoit pas ce Chrift en qui le Pere Eternel avoit répandu fans mesure l'onction de fa grace, mais qu'il l'étoit dans ce fens les faints font de vrais Chrifts, parce que qu'il étoit faint dans fes pensées, dans ses désirs, dans toutes les actions; mais il oublie tout ce qu'il eft & ne veut fe fouvenir que de ce qu'il n'eft pas; non fum ego Chriftus. Voilà le fentiment d'humilité que produit dans faint Jean la premiere queftion qu'on lui fait.

Que chacun de nous s'en faffé ici une femblable, & fe demande qui il eft, tu quis es? qu'aurons-nous à y répondre? que répondra ce miniftre du Seigneur, fur le zéle avec lequel il travaille au falut des ames? tu quis es? que répondra ce magiftrat fur l'étude qu'il fait des loix & fur fon attention à les fuivre? tu quis es? que répondra ce négociant, cet homme chargé d'affaires fur la bonne foi & la fidélité néceffaire dans leur état? tu quis es? que répondra ce pere, cette mere de famille fur le foin qu'ils ont de faire fervir le Seigneur par leurs enfans & leurs domestiques? tu quis es? que répondrons-nous tous, quand on nous demandera qui nous fommes depuis l'ufage de notre raifon jufqu'aujourd'hui ? iu quis es? Si nous fommes finceres, nous répondrons que les moindres fautes de notre enfance ont été une

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