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bien qu'en famille et protégés par l'ombrage de leurs voisins.

Mais nous pensons que ce même mode, très-avantageux sur les taillis de hêtre et les bois résineux, n'est pas sans inconvénient en France pour nos vieilles futaies, particulièrement sur un sol peu riche de fonds, et qui ne serait pas frais, à cause, notamment, de la nécessité de faire plusieurs exploitations dans un court espace de temps et à diverses reprises sur le même terrain.

Il arrive souvent qu'on détruit à la seconde éclaircie les jeunes plants de l'éclaircie précédente, soit par l'exploitation, soit par la voiture des produits de chaque éclaircie, qui, dans une futaie, sont toujours fort considérables. On doit sentir que de pareils abatages, faits par intervalles, renouvellent annuellement les dégâts de la forêt; les petits arbres, en outre, se trouvent fort mal de la chute des gros.

Dans les contrées où le mode de repeuplement que nous venons d'indiquer est en vigueur, le bois a peu de valeur en général, et on n'y regarde pas de si prės; ensuite l'essence et la température peuvent y être plus propices.

On ne contestera pas que dans un vallon ou plaine, sur un terrain léger, frais et riche, le système allemand, dont il s'agit, n'ait quelque succès; mais on peut assurer que sur un sol pierreux, aride et sec, si on en faisait l'essai, on perdrait en partie le fonds de bois le mieux garni.

Dans nos contrées, les réensemencements naturels des futaies pleines ne peuvent se faire avec avantage, à cause de la nature du sol en général, qui a peu de profondeur, attendu, aussi, que nos forêts, aujourd'hui, sont en partie calcaires ou granitiques, chassées des plaines et réduites à végéter sur nos montagnes, ou sur des coteaux peu fertiles. Au surplus, on tente, en ce moment, des essais de ce genre dans les bois de l'État, notamment à Compiègne et à Fontainebleau; la surveillance en est confiée à des forestiers consciencieux. Si ce genre réussit, il sera bientôt connu; toutefois nous estimons qu'il n'aura pas tout le succès qu'on attend.

Nous croyons avoir suffisamment indiqué, pour la reproduction des bois et le renouvellement des futaies, les moyens de protéger les réensemencements naturels, de faire des semis, des plantations sur tous les terrains, en appropriant les espèces convenables au sol et d'en faire à 400 fr., à 200, à 80 et même à 35 f. l'arpent; on aura à choisir, d'après sa position de fortune et les localités, le mode qu'on jugera le plus utile. Nous avons l'intime confiance de n'avoir épargné aucun des détails qui peuvent être nécessaires pour se livrer soi-même à cette culture avec économie et avec tout l'avantage possible.

CHAPITRE V.

ESSARTAGE, ÉLAGAGE DES CHÊNES ET ROUETTAGE DÁNS
LES JEUNES BOIS.

SECTION PREMIÈRE.

ESSARTAGE.

C'est avec circonspection qu'on doit essarter ou élaguer ses bois; cette saignée peut leur être trèsutile ou fort nuisible, suivant le sol et la manière dont elle est dirigée.

Pour la rendre profitable, il faut, en général, qu'elle soit faite sous les yeux du propriétaire et par des ouvriers intelligents et honnêtes : si on la confie à des mains mercenaires ou intéressées, elle est meurtrière, parce qu'au lieu de ne couper que des branches, des ronces, des épines et des bois traînants et parasites, on fait en quelque sorte une première coupe en abattant tout ce que l'on peut détruire et en s'arrêtant seulement là où on pourrait en être recherché; de cette manière, on grossit les produits de l'exploitation d'essartage, mais aussi les plus beaux brins en jeunes plants disparaissent.

Le mieux serait, pour le propriétaire qui ne pourrait surveiller lui-même, ou faire surveiller par un bon garde, cette opération, de laisser agir la nature; les bois

s'élaguent et se nettoient insensiblement sans qu'on s'en occupe même là où ils sont très-fourrés, parce que le fonds en est bon et peut tout nourrir; les épines noires et les autres mauvais bois qui ne sont pas étouffés par le taillis, vivant à la superficie de la terre, n'empêchent pas les bonnes essences de pousser, et tout se retrouve à la coupe; il n'y a rien de perdu.

Il faut, toutefois, avoir grand soin de ne faire aucun élagage, essartage ou nettoyage, que sur des taillis richement fourrés, ayant au moins dix à douze ans.

Dans les lieux où l'on coupe les bois à cet âge, on élague ordinairement à quatre ans, afin d'avoir de plus gros bois à la coupe : c'est souvent un massacre qui se fait aux dépens du fonds. Pour surcroît de calamité, les bestiaux y vont journellement; alors ce ne sont plus des bois, ce sont des broussailles, dont on tire, tous les dix ans, 100 à 150 fr. l'hectare au plus; les bruyères et la queue de renard y tiennent cour plénière: aussi, tous les jours, ces fonds vont en dépérissant, et bientôt ils disparaîtront du sol forestier, pour n'être plus qu'un mauvais pâturage.

Dans les jeunes plantations où le bouleau abonde, on doit faire élaguer cette essence lorsqu'elle commence à se brancher fortement (de cinq à dix ans), suivant le sol et sa force végétative, pour en faire des balais, près des villes, et des bourrées quand cette spécialité n'est pas connue. On doit faire procéder à cet essartage ou élagage par des ouvriers adroits et à soi, ou le louer, même à bas prix, à des fabricants de balais, pour en prévenir le vol.

On doit choisir avec soin ceux par qui cet élagage sera exécuté; il est bien entendu que ce seront des gens intelligents et bien connus, qui offriront assez de garantie pour qu'on puisse les rendre responsables des dommages qu'ils causeraient. (Voir ce que nous disons, à ce sujet, à l'article Bouleau, page 114.)

Un élagage de plantations et de taillis en bouleau peut se louer 40 à 12 francs l'arpent; aux environs de Paris, il est des propriétaires qui en louent annuellement pour 200 à 300 francs et plus. Règle générale, il ne faut permettre cet élagage que dans les plantations de cinq à dix ans et dans les taillis de neuf à douze ans; au-dessus de quinze ans ce serait une fausse opération, attendu qu'alors la tige de bouleau en plein bois s'élance déjà trop et perd en grosseur ce qu'elle gagne en élévation.

SECTION II.

ÉLAGAGE DES CHÊNES.

Les avis, d'après les expériences faites depuis vingtcinq ans, sont généralement contre cette opération, qui, tout en produisant, aide, il est vrai, à la végé– tation de l'arbre élagué et à celle des arbres voisins, mais est contre nature, même quand elle est faite à 8 ou 15 pouces du corps de l'arbre.

Ce nouveau système de culture, employé dans les forêts de la liste civile, répudié hautement par nous, n'est pas aussi avantageux que nos premiers forestiers se l'imaginent. Nous allons essayer de traiter cette question de conscience, et établir

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