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CHAPITRE XIX.

DE LA LONGUEUR ET DE LA GROSSEUR QUE PÉUVENT ATTEINDRE LES ARBRES FORESTIERS.

Suivant le sol et l'exposition: le pin, le tilleul et l'ypréau, parmi les bois blancs, prennent le plus de longueur et de grosseur.

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Dans les bois durs : le chêne, l'orme et le hêtre sont au premier rang; le châtaignier et le frêne, au second; le merisier, le cormier et le charme, au troisième. L'érable, le coudrier et le buis sont au dernier.

Il y a des phénomènes en longévité, en longueur et en grosseur.

Les arbres les plus extraordinaires, en beauté et grosseur, sont dans le royaume de Siam ; Batavia s'y approvisionne.

Il y en a aussi de très-beaux aux États-Unis d'Amérique, en Corse, dans la partie occidentale de l'Afrique et dans les forêts de Sierra-Leona.

Sur le penchant de quelques montagnes de l'Oberland (Suisse), le sol est si fertile, que, suivant M. Kasteler, le fusain, arbrisseau qui vient le long des haies, acquiert quelquefois un pied de diamètre, et l'on a vu des coudriers de six pieds de circonférence.

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Qui n'a entendu parler du tilleul de Schaffhouse dont les branches s'étendent horizontalement et re

prennent ensuite une direction verticale qui forme une salle spacieuse.

Dans la forêt voisine de Montfort (Ille-et-Vilaine), on remarque, dit-on, un chêne, appelé le chéne des Vendeurs, qui a quarante pieds de circonférence et une hauteur proportionnée : on l'appelle ainsi, parce que c'est sous ce chêne que se font annuellement les ventes des coupes de la forêt.

On voit, dans la commune de la Pommeraye, entre Beaupréau et Chalonne (Maine-et-Loire), le chêne rognon, dont la tige est d'une grosseur énorme (environ 30 pieds de circonférence), mais courte. Sa partie supérieure est détruite depuis longtemps; il ne lui reste plus que quelques branches inférieures. On a, dans la contrée, l'opinion qu'il était consacré au culte des druides, et qu'il compte deux mille ans d'existence. Les plus anciennes rentes de la Pommeraye étaient payables sous l'ombrage du chêne rognon.

M. Runch a vu dans la commune de Werth, sur les bords du Rhin, trois trembles, le premier de vingt-huit pieds, le deuxième de trente-quatre, et le troisième de quarante-deux pieds de tour.

On a tiré, d'un tilleul qui se trouvait sur la place publique d'un village du Jura, pour 600 francs de planches et madriers : c'était, sans doute, un Sully.

M. Runch cite, d'après la collection de Bath, un chêne qui contenait mille quarante-cinq pieds cubes, indépendamment de sa tête; il cite aussi le chêne de Boddington, qui avait cinquante-quatre pieds de tour, mesuré au pied de l'arbre; le calcul des pieds

cubes présenterait un nombre presque incroyable. La Bibliothèque britannique mentionne un chêne qui, en Afrique, à l'âge de vingt-quatre ans, avait huit pieds de tour. La Maison rustique du xixe siècle, page 42, parle d'un cèdre du Liban ayant trentesix pieds et demi de circonférence, et dont les branches couvraient une étendue de cent onze pieds de diamètre.

Dans la forêt de Compiègne, le chêne du roi portait vingt pieds de tour à hauteur d'homme, soixante de tige, quatre-vingt-dix à cent de toute hauteur; il pesait cent dix milliers environ, et produisit au marchand 2,400 francs.

M. de Perthuis père fit couper en 1758, à Beauvoir, en Brie, un frêne de cent cinquante-huit ans, ayant neuf pieds de tour, soixante de tige, sans nœuds ni branches, et quatre-vingt-quinze pieds d'envergure.

Tous les voyageurs qui ont visité la forêt de l'Etna, en Sicile, ont parlé du châtaignier si célèbre, connu sous le nom de castagnus di centi Cavalli, le plus gros de cette forêt et peut-être de toute l'Europe. Sa circonférence, qui a été mesurée par Denon, est d'environ cent quatre-vingts pieds. Comme il a crû sur un sol volcanique, par conséquent très-fertile, il est à croire que ce géant forestier n'a pas plus de cinq à six cents ans.

Le trop crédule Pline (Livre 12, page 1, de son Histoire naturelle) parle d'un platane de deux cent quarante pieds de circonférence (il a voulu dire d'envergure), dans le centre duquel Mutianus coucha

avec vingt-une personnes; et d'un autre où Caïus soupa avec quinze personnes et environné de sa suite; enfin d'un mélèze de deux cent vingt pieds de hauteur et de vingt-six pieds de tour.

M. de Jouy, dans son Ermite en province, tome 7, page 337, parle du chêne d'Yvetot ou d'Allouville (Seine-Inférieure), auquel on donne plus de neuf cents ans, trente-quatre pieds de circonférence à fleurde terre, vingt-quatre à hauteur d'homme, sept à huit de tige, portant d'énormes branches. Au rezde-chaussée, est une chapelle dans laquelle on célèbre l'office à certains jours de l'année; plus un escalier en spirale, conduisant au premier; là une chambre avec une couche taillée dans le bois, et audessus, à la cime, il forme un clocher surmonté d'une croix en fer, et ce clocher pittoresque renferme une cloche qu'on entend au loin. Cette chapelle a été dédiée à Notre-Dame-de-la-Paix par le curé d'Allouville, en 1696, sous Louis XIV.

Dans la forêt de Trouhart (Calvados), il y a un arbre sur lequel on a établi une salle de danse.

Nous pourrions en citer beaucoup d'autres de cette nature, la plupart creux et capables de contenir une famille entière, ayant seulement huit à onze pieds de tige et un branchage immense: ce sont des arbres monstres, hors de toute proportion ordinaire, dont nous ne parlons ici que comme curiosité forestière, et qui ne sont à peu près bons qu'à faire du bois à brûler.

En France, la commune des arbres de la plus forte

dimension, même en y comprenant la Corse, où les pins sont de la plus grande beauté, est de cinquante à soixante pieds de long, vingt à vingt-deux pouces d'équarrissage, huit à neuf pieds de tour (2 à 3 mètres produisant environ 55 à 60 solives, ou 180 pieds cnbes); cependant le port de Saint-Dizier a fourni, en 1826, un arbre pour le Louvre, provenant de la haute Marne, cubant quatre-vingt-dix-neuf solives, ou deux cent quatre-vingt-dix-sept pieds cubes. Les plus beaux arbres de France sont, dit-on, dans les forêts de Nouvion (Aisne), mais particulièrement dans celle du Der, canton dit de Brancourt (Haute-Marne); on en remarque, entre autres, un dans cette dernière, encore très-bien venant, dont le volume, y compris l'écorce, est d'environ six cents pieds cubes, et la solidité, propre à être équarrie, est au moins de trois cents pieds cubes. On a coupé, dans la même forêt, il y a environ soixante ans, un chêne qui a été employé à la machine de Marly: il avait soixante-douze pieds de longueur sur une grosseur moyenne de trois pieds d'équarrissage; son volume était, par conséquent, de deux cent seize solives ou six cent quarante-huit pieds cubes, sans parler des découpes et des branches.

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