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un pivot de sept à huit pouces et plus, et une tige seulement de trois à quatre : à ce jeune âge, on obtiendra le pivot dans tout son entier et avec un chevelu plein de vie, surtout en l'arrosant fortement avant de l'arracher, enfin en le noyant d'eau.

Dans ce cas, ne couper du pivot que la partie qui aura pu être froissée par la pioche ou l'arrachage. Pourquoi couper une racine si jeune et si pure?

Il n'en est pas de même du plant de forêt dont on ignore l'âge. Un chêne nain qui, dans un bois sera supposé n'avoir que trois à quatre ans en aura quinze; alors son pivot sera énorme, et, quoique la tige soit très-belle en apparence, il sera sans valeur; aprės avoir été arraché, il ne lui restera qu'une faible partie de ses membres, et encore seront-ils mutilés; le surplus sera resté en terre: ainsi blessé dans sa partie la plus vitale, il ne sera bon qu'à jeter au feu. Cependant nous avons vu, dans le haut et bas Limousin, des plantations de chêne faites en avenues, sur les routes et en plein bois, très-bien venantes, quoique composées de sujets pris en forêts et à cinq ou six ans d'âge; quoi qu'il en soit, un plant de forêt, même en très-bon état, ne peut valoir celui d'une pépinière, qui a un âge connu, qui est intact, dont le pivot n'est encore qu'en herbe, flexible et accompagné d'un chevelu frais et plein de vigueur. En définitive, nous conseillons de préférence la culture du chêne blanc, du pyramidal et du chêne toza, ct de choisir, autant que possible, pour semis le gland des chênes de bellevenue, quelles que soient la nature, la contexture et

la grosseur du gland; d'autant plus qu'on ne le rencontre sain et beau que sur les chènes de bonne essence et bien venants.

Les glands du Midi venus sur un bon terrain seraient excellents à semer dans le Nord, comme toutes les autres graines qui des régions chaudes passent aux régions froides. Le chêne n'est fertile en semences que de cinquante à quatre-vingts ans.

Pour semer un hectare en bois de chêne, d'après Duhamel, il faut huit mines ou seize pieds cubes de glands, non compris la garniture en bois blanc. Nous pensons que c'est trop peu, on ne doit pas tenir à quelques mesures de semences pour assurer le succès d'un semis. Employer jusqu'à quinze à seize hectolitres ou environ dix sacs l'hectare; le litre de glands pesant cinq cent cinquante à six cents grammes.

Le chêne tient le premier rang parmi nos arbres forestiers, tant pour son utilité à tous les usages que par sa grosseur, son élévation et sa longévité. A quelque âge qu'on le coupe, il ne pousse pas de drageons ; mais, lorsqu'il n'est pas trop vieux, les souches se reproduisent très-bien par cépées ; cependant, après la coupe d'une vieille futaie, en terrains frais et privilégiés, on en voit se reproduire sur souches et racines, mais, dans le dernier cas, très-peu; au reste, le genre de reproduction sur des fonds épuisés ne vaut pas celui des semis. Sur les montagnes et coteaux en France, jusqu'à trente ans, la végétation ne leur fait pas défaut; à cinquante ans, on en voit périr la moitié, de soixante jusqu'à quatre-vingts les quatre

cinquièmes au moins, et à cent et au-dessus les souches ne repoussent plus, du moins c'est fort rare.

Le chêne est l'arbre qui a le plus de racines, son pivot va jusqu'à 3 mètres de profondeur, quoiqu'il se contente de 1 mètre à 1 mètre 33 centimètres pour prospérer quand son pivot ne peut percer, il marche horizontalement, et alors il s'élance peu ; il a besoin des climats tempérés ; il ne vient pas dans les régions glaciales, ni sous la zone torride ; on ne le connaît point à la Guyane ni au delà.

En général, tous les terrains lui conviennent; et, à l'exception des hautes montagnes, dont la température trop froide lui est tout à fait contraire, et des sols de craie pure sur lesquels on n'a pu encore l'acclimater, cet arbre, même sur les plus mauvais fonds, trouve une nourriture suffisante pour prospérer plus ou moins bien. Sa longévité ne peut être fixée, elle dépend de la qualité de la terre et des soins que l'on donne à son exploitation.

Le chêne gèle plus facilement en massifs que lorsqu'il est isolé; dans ce dernier cas, il prend plus de consistance et de dureté; entouré d'autres arbres, il est plus tendre et, par conséquent, il craint davan→ tage les gelées.

L'hiver de 1788 à 1789 détruisit environ le huitième des chênes de taillis de M. de Perthuis; ils étaient âgés de vingt ans et plus, et situés en Bourgogne et en Brie, tandis qu'il ne fit périr aucun des baliveaux que ce célèbre forestier réservait annuellement sur ses haies de clôture.

La rigueur de ce même hiver fit fendre une grande quantité de chênes anciens sur ses taillis, tandis qu'un petit nombre seulement de ceux des haies éprouvèrent cet accident. Au surplus, le même événement n'occasionna qu'un préjudice peu sensible à la qualité du bois, car M. de Perthuis fit exploiter plus de dix mille chênes qui tous avaient supporté les trop fameux hivers de 1696, 1709 et 1740, et il en trouva rarement qui portassent des marques de ces gelées extraordinaires.

que

Les grands vents font encore plus de mal aux chênes la gelée; ils les tordent et leur occasionnent le défaut que le commerce appelle roulure; alors le chêne le plus vigoureux, en apparence, attaqué de cette maladie, ne peut se débiter en industrie, et il y aurait même danger à l'employer comme charpente; dans cet état, il n'est bon qu'à brûler. Les chênes exposés aux vents de sud-ouest ou de l'ouest sont rarement droits.

A terrain égal et convenable à chaque espèce de bois, le chêne est parmi les bois durs un de ceux dont l'accroissement est le plus certain et le plus prompt.

Un taillis uniquement peuplé en chêne croît moins vite que lorsqu'il est mélangé avec d'autres essences. Sa végétation est plus prompte, notamment avec les bois blancs; la cause de ces effets est facile à expliquer.

Ces différentes espèces puisent leur nourriture à des profondeurs inégales et laissent à chacune la jouissance des portions de terrain qui peuvent leur

convenir; mais, lorsqu'il arrive que les essences sont de même nature, elles vivent à la même table et sont obligées, quand elles se rapprochent par l'âge, de se disputer leur subsistance.

Il en résulte que, pour assurer le succès de la plantation d'un bois, il faut avoir soin, nous le recommandons particulièrement, d'en mélanger les essences et de les choisir parmi celles qui s'accordent le mieux entre elles, toujours en consultant les terrains qui leur sont propres. Ainsi il faut mettre spécialement avec le chêne, car il convient presque partout, un mélange de trembles et de bouleaux. Ces essences, nous ne saurions trop le dire, ont cet avantage que le chêne pivotant et tirant sa nourriture dans les profondeurs du sol, les bois blancs, au contraire, vivant à la superficie de la terre, prospèrent très-bien côte à côte sans se nuire.

En outre, ces essences prolifiques, ayant une croissance puissante et double du chêne, l'abritent et le protégent, particulièrement le jeune chêne des plantations, dont elles facilitent la végétation d'une manière merveilleuse aussi, quand un bois est annoncé comme riche et bien plein, c'est qu'il est garni de plusieurs essences qui se conviennent.

Les chênes francs, blancs, cerris ou rouges, ainsi que nous l'avons déjà dit, gagnent ou dégénérent suivant le sol et l'exposition, de même le gravier; mais, quand ce dernier se trouve sur les montagnes ou en coteau et sur un terrain pierreux, sa croissance est magnifique les trois ou quatre premières années de sa coupe, notamment la première; tandis

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