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1807.

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ture du corps lé

Sire, il y a long-temps que votre gloire n'aspire qu'au repos. Napoléon est au-delà de l'histoire humaine. Il appartient aux temps héroïques. Il est au-dessus de l'admiration. Il n'y a que l'amour qui puisse s'élever jusqu'à lui.... »

Le cardinal archevêque Dubelloy, à la tête de son clergé: « Sire, nos vœux sont remplis, le Seigneur s'est montré en votre faveur. Les annales du monde, des siècles et des nations n'offrent aucun exemple aussi merveilleux et aussi mémorable. Le Dieu des armées a dicté vos projets. Nous le bénissons. Recevez, sire, l'hommage de notre amour, de notre respect et de notre admiration.... » (1)

Le 15 août, l'empereur assista au Te Deum, qui fut chanté à Notre-Dame en action de graces de la paix. gislatif. Cette cérémonie fut très pompeuse.

Le lendemain, il fit avec non moins de pompe l'ouverture du corps législatif. Tous les emblèmes de la Victoire et de la Paix décoroient les avenues et le péristyle de l'enceinte des séances.

Après avoir reçu le serment de fidélité des nouveaux membres, parmi lesquels M. de Fontanes, président, fut appelé le premier, sa majesté s'adressant aux différentes autorités réunies, prononça le discours suivant :

«Messieurs les députés des départements,

«Messieurs les tribuns et les membres de mon
conseil d'état,

Depuis votre dernière session, de nouvelles guerres,

(1) On se doute que nous avons abrégé ces discours: mais ce que nous en avons cité est exact et littéralement extrait du Journal officiel.

de nouveaux triomphes, de nouveaux traités de paix, ont changé la face de l'Europe politique.

« Si la maison de Brandebourg, qui la première se conjura contre notre indépendance, règne encore, elle le doit à la sincère amitié que m'a inspirée le puissant empereur du nord (1).

a Un prince françois régnera sur l'Elbe. Il saura concilier les intérêts de ses nouveaux sujets avec ses premiers et ses plus sacrés devoirs.

« La maison de Saxe a recouvré, après cinquante ans, l'indépendance qu'elle avoit perdue.

« Les peuples du duché de Varsovie et de la ville de Dantzick ont recouvré leur patrie et leurs droits.

« Toutes les nations se réjouissent, d'un commun accord, de voir l'influence malfaisante que l'Angleterre exerçoit sur le continent détruite sans retour (2). « La France est unie aux peuples de l'Allemagne par les lois de la confédération du Rhin, à ceux des Espa de la Hollande, de la Suisse et des Italies, par les lois de notre système fédératif. Nos nouveaux rapports avec la Russie sont cimentés par l'estime réciproque de ces deux grandes nations.

gnes,

« Je desire la paix maritime. Aucun ressentiment

(1) Ce n'étoit pas sans intention qu'il nommoit ainsi l'empereur de Russie. Il entroit alors dans ses projets de se faire nommer un jour empereur du midi. Et qui peut dire les suites qu'entraînoit ce nouveau titre?

(2) C'est à Napoléon, à son système continental, à ses guerres continuelles, à ses fausses mesures, à toutes ses fautes, que l'Angleterre doit l'inflence trop réelle qu'elle exerce aujourd'hui sur le continent comme sur les mers.

1807.

1807.

n'influera jamais sur mes déterminations. Je n'en saurois avoir contre une nation jouet et victime des partis qui la déchirent, et trompée sur la situation de ses affaires, comme sur celle de ses voisins.

<< Mais, quelle que soit l'issue que les décrets de la Providence aient assignée à la guerre maritime, mes peuples me trouveront toujours le même, et je trouverai toujours mes peuples dignes de moi.....

« J'ai médité différentes dispositions pour simplifier et perfectionner nos institutions....

« Messieurs les députés des départements, votre assistance me sera nécessaire pour arriver à ce résultat ; et j'ai le droit d'y compter."

Il y compta si bien, qu'il fit dans le gouvernement, sans leur concours et sans nulle opposition, tous les changements qui lui convinrent. Il supprima le tribunat, dans lequel un petit nombre de voix avoit osé s'éFever contre l'établissement des tribunaux spéciaux. Il institua de nouvelles dignités, pour donner plus d'éclat à sa couronne ; il créa un gouverneur-général pour les départements situés au-delà des Alpes ; il proclama son frère Joseph roi d'Espagne, son beau-frère Murat roi de Naples, son neveu Louis grand-duc de Berg; il réunit la Hollande, Rome et le Valais à son empire...... Administration, gouvernement, religion, esprit public, sciences et arts, journaux et spectacles, il voulut tout connoître, tout diriger et tout faire : il perdit tout.

Il sembloit avoir pris à tâche de prouver à tous ceux qui le servoient, depuis ses ministres jusqu'aux maires de village, qu'ils n'étoient que des commis qu'il employoit sans en avoir besoin, ou des instruments qu'il pouvoit briser sans le moindre regret.

Avoit-il besoin de soldats? le sénat étoit toujours prêt

à lui délivrer une conscription de deux cent mille hommes. D'argent? il pilloit la banque, il enlevoit les cais- 1807. ses, il mettoit des centimes additionnels sur toutes les

recettes.

Craignoit-il un journal ou un livre? il faisoit mettre au pilon le livre et le journal, et il envoyoit les auteurs à Bicêtre, ou à l'île de Rhé.

Si la moindre résistance s'opposoit à la marche impétueuse de sa volonté, tout étoit menacé; innocents et coupables, tous trembloient à l'aspect d'un pouvoir qui ne s'annonçoit que par des coups de tonnerre, et qui se croyoit très fort, parcequ'il étoit violent et terrible.

La même présomption qui lui fit croire que rien ne devoit lui résister en France, lui dicta les mesures violentes qui bouleversèrent l'église, ensanglantèrent l'Espagne, et achevèrent de révolter l'univers contre lui.

Nous voici arrivés aux deux événements de son régne qui lui ont donné le plus de chagrin, d'humeur et d'embarras.

Il avoit mis la religion au rang des autres branches de l'administration politique, comme si elle n'eût été qu'un département d'institution humaine qu'il pouvoit ranger, et qu'il rangea en effet dans la même catégorie que celui de la police, des finances et de la guerre.

Il porta même à cet égard l'oubli de toutes les bienséances, jusqu'à dire un jour que le pape étoit le général de son armée presbytérienne, les cardinaux ses généraux de division, les évéques ses colonels, et les curés ses soldats.

Dans le fait, il ne considéroit les évêques que comme de simples fonctionnaires publics, révocables à volonté, et non moins dépendants de lui que les préfets et les officiers de son palais.

1808.

1808.

Démêlés avec le

pape.

Le saint-père lui fit à ce sujet de vives remontrances, qui restèrent sans réponse et sans effet.

Pour ne plus entendre parler du pape et de ses remontrances, il résolut de mettre à exécution le plan qu'il avoit conçu depuis long-temps, et qu'il n'avoit jamais perdu de vue; savoir, de se déclarer chef spirituel et temporel de son vaste empire, de secouer le joug de l'église romaine, et de s'emparer des états qui, depuis Charlemagne, en composoient le domaine.

Avant d'employer la force ouverte, il essaya une de ces ruses qui lui étoient si familières ; il fit au pape plu sieurs demandes artificieuses, dont la réponse devoit placer le saint-père dans l'alternative de son déshonneur, s'il donnoit son consentement, ou de sa ruine, s'il le refusoit.

Ces demandes portoient en substance, 1o l'établissement en France d'un patriarche indépendant de la cour de Rome;

2o L'abolition en Italie, comme en France, de tous les ordres réguliers de l'un et de l'autre sexe;

3o La suppression du célibat pour les ecclésiastiques; 4o La liberté indéfinie, et l'exercice public de tous les cultes ;

5o La publication du code Napoléon dans les états de l'église ;

6o Le couronnement de Joseph, roi de Naples, par les mains du saint-père.

Ces six propositions furent soumises à la délibération du sacré collège, et rejetées à l'unanimité.

On s'y attendoit aux Tuileries; et dès que la nouvelle en fut parvenue officiellement, une armée françoise, rassemblée dans la Lombardie, reçut l'ordre de mar

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