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été une année de guerre quoique la foudre qui a frappé nos ennemis sé soit tellement éloignée que nous avons à peine pu l'entendre.

Dès le 25 Septembre, l'empereur était parti de Paris, le 8 Octobre il était à Bamberg, à la tête d'une armée déjà réunie sur les derrières d'un ennemi qui comptait le surprendre.

Le 9, son avant-garde avait culbuté les avant-gardes ennemies à Schleitz et Saalfeld.

Le 14, jour anniversaire de la battaille d'Ulm, il rempor

`tait la mémorable victoire d'Jéna.

Le roi de Prusse fuyait après avoir vainement combattu à la tête de cent trente mille hommes; il avait vu les princes de són sang et les vieux généraux de Frédéric, soutiens de la monarchie, blessés ou prisonniers, son armée, boulevard de la Prusse dispersée et détruite; et sa destruction entraînait la chute de cette puissance élevée par une suite de princes guerriers ou habiles à profiter des circonstances, étendue et fortifiée par le génie de Frédéric, accrue récemment par l'amitié de la France.

Le 16, Erfurth capitulait.

Le 17, l'empereur était à Weymar rétablissant l'ordre dans cette villé.

Le 18, le 19, et le 20, Leipsick, Halle et Wirtenberg ouvraient leurs portes à ses troupes.

Le 23 et le 24, elles entraient à Berlin, l'empereur arrivait a Potzdam, visitait Sans-Soucy, et de sa main triomphante saisissait l'épée de Fréderic, en honorant sa mémoire.

Le 27 et le 28, il faisait son entrée solennelle à Berlin, et passait en revue, sous les murs de cette capitale, son armée victorieuse.

Le 9 et le 10 Décembre, ses avant-gardes étaient à Posen, passaient la Vistule, occupaient Thorn.

Le 15, l'électeur de Saxe et les princes de sa maison obtenaient la paix, devenaient alliés de la France, et un vain◄ queur généreux leur accordait un accroissement de dignités et de territoire.

Le 18, l'empereur faisait sou entrée dans la capitale de la Pologue, le 23, il passait le Narew, battait l'ennemi à Czarnovo, et le lendemain il le battait encore à Nasiest. L'emperear passait l'Ukra, la Sona, en poursuivant cette armée qui avait prétendu défendre Varsovie et sontenir la Prusse.

Elle était atteinte et défaite le 26 à Pultusk et à Golymin.

L'ennemi en désordre ne doit son salut qu'à une saison extraordinaire, que ni le climat ni l'époque de l'année në donnaient lieu d'attendre.

La Silésie ainsi isolée et coupée, n'ayant plus de communication ni avec la Prusse ni avec l'armée alliée, ne pouvait farder à tomber sous les effors de ce' jeune prince' qui, pour

son coup-d'essai, fait la conquête de dix places fortes et d'une des plus belles provinces de l'Europe.

Les Russes voient l'empereur un moment immobile; ce repos apparent excite leur audace; ils forment un projet téméraire : les combats de Bergfreed, de Hoff, la terrible bataille d'Eylau, ou plutôt uue suite non-interrompue de combats et de victoires pendant six jours, les repoussent au-delà de la Pregel, sous les murs de Koenigsberg et couronnent cette mémorable campagne.

L'ennemi n'est point éclairé par ces revers. Après avoir laissé à l'armée le tems nécessaire pour conquérir les plus importantes forteresses de la Prusse, il marche avec une témérité nouvelle et l'immortelle campagne de Friedland vient ajouter encore aux prodiges opérés par la grande armée et terminer la guerre.

Ses résultats.

Pendant ce rapide espace de tems, malgré les barrières opposées par les places fortes, les fleuves, l'hiver et la contrariété du tems, l'armée française, dans cette première partie de la campagne, a parcouru dans sa route victorieuse plus de trois cents lieues de pays, fait deux cent mille prisonniers, pris quatre mille huit cents canons, quatre cents drapeaux, conquis la Prusse, occupe la Pologne, menace la Russie. Les forteresses de la Prusse tombaient les unes à la suite des autres; Stettin, Custrin, Magdebourg, Breslaw, Glogau, Brieg, Hameln, Nieubourg, et Dantzick, avaient capitulé. Les débris d'une armée fugitive avaient rendu les armes, et l'électorat d'Hanovre tour-à-tour confié en dépôt à la Prusse par l'Angleterre, ou disputé entre ces deux états, était retombé sous la puissance de la France.

La Pomeranie suédoise était occupée. La Pologne, encouragée par l'éclat de ses triomphes, s'était élevée contre ses oppresseurs; elle armait ses généreux soldats, souvent témoins et compagnons de la valeur française.

La Perse et l'empire ottoman, éveillés par le bruit de ces triomphes, saisissaient avec ardeur l'occasion offerte de secouer le joug d'une longue oppression, et l'Asie entière se soulevait à la voix de l'empereur pour seconder ses desseins. Le Bosphore était devenu libre par l'apparition et la faite d'une flotte anglaise.

Schweidnitz, Neysse, Kosel avaient été pris pendant le répos de l'hiver. Dantzick, qui semblait être l'objet de la campagne, venait de succomber. Les lauriers de Friedland, nom immortel que la France répète avec orgueil, avec ceux de Marengo, d'Austerlitz et de Jena! Tilsit, si cher aux peuples de l'Europe qui ont enfin vu le terme des longues calamités d'une guerre si souvent renouvelée? On conservera à jamais le souvenir de cette circonstance mémorable qui rapN

TOME III.

procha et réunit deux puissans souverains. Ils seront fidèles aux engagemeus qu'ils ont contractés. Puissent les événemens que les princes ne maîtrisent pas toujours seconder leurs vœux et maintenir cet accord qui garantit le repos du monde! Alors ces jours si long-tems et si vainement appelés par la philantropie, auront lui pour la terre; le bonheur du genre humain cessera d'être un rêve; il datera de l'entrevue du Nyémen.

Je rappelle ces faits sans prétendre les décrire. Ils sont consignés pans les bulletins, cette partie brillante de nos annales qui, rédigés par ceux-mêmes qui furent témoins de tant de prodiges, pourront seuls rendre croyables à la postérité tant de merveilleux événemens. Vous les avez lus dans vos départemens avec l'enthousiasme qu'excite la gloire parmi des Français; ils sont présens à votre mémoire, et mon faible pinceau n'égalerait pas les souvenirs qu'ils vous ont laissés.

Examinez le résultat de tant d'événemens mémorables. Voyez comment une sage politique a resserré tous les liens qui unissaient à la France des états que rapprochaient d'elle leurs propres intérêts! Les princes placés sur les rives du Rhin, qui pendant les longues dissensions de l'Allemagne n'avaient trouvé de protection efficace que celle de la France, ont changé en une convention durable ces rapports passagers; confédérés entr'eux, unis à la France sans en dépendre, ils ont fixé le règne de la concorde sur un rivage trop long-tems ensanglanté. L'Allemagne entière est toute dévouée ou soumise. La Saxe a été délivrée du jong pesant de la Prusse. Après cinquante ans d'oppression, le traité de Posen lui a rendu son indépendance. Son territoire agrandi et protégé par la France sera aussi inviolable que celui du Rhin. Nos aigles le défendent contre tout ennemi. Les acclamations des peuples, l'estime et l'amitié d'un souverain vertueux ont été dans cette heureuse coutrée la plus douce de nos conquêtes.

La portion de la Pologne qui avait mérité notre reconnaissance a acquis son indépendance et recouvré ses droits. Une constitution sage et libérale remplace son anarchie constitutionelle. Cette généreuse noblesse qui, de son propre mouvement, a marché au-devant de son législateur, pour rendre la liberté à ses compatriotes, a acquis de nouveaux titres à l'estime de l'Europe. Trois millions d'hommes sont redevenus libres, et ont retrouvé une patrie. Cet article seul de ses lois nouvelles, place la constitution de Pologne sous la garantie de tout ce qui professe en Europe des idées libérales et des sentimens élevés.

Cette noble paix semble avoir été faite pour l'intérêt de l'humanité et de l'Europe entière. La vainqueur n'a stipulé pour lui aucun avantage. Dantzick a été rendu au commerce et à la liberté. La navigation de la Vistule a été dégagée de ses entraves. Un juste équilibre a été réglé entre des princes voisins. Tout ce qui doit les unir a été établi; tout ce qui

pouvait les diviser a été écarté; un nouveau royaume a été fondé. Il sera le lien de la France avec des contrées plus lointaines; il donnera l'existence à un peuple qui, divisé entre un si grand nombre de souverains, n'avait pas même un nom; les habitans de tant de petits états auront enfin une patrie; ils seront gouvernés par un prince français.

Naples à qui plus d'une fois la valeur française donna et ses lois et ses princes. Naples doit aussi à un prince français tous les biens d'une administration douce et équitable, d'un gouvernement régulier, d'une politique invariable; l'ordre règne dans ses murs, la paix dans ses campagnes; le caractère de son prince promet à cet état d'heureuses destinées.

La Hollande aspirant enfin à terminer des essais de constitutions politiques que la condescendance avait admis, que la patience avait prolongés, a sagement adopté un gouvernement propre à diriger vers un but utile les moyens et les ressources qui lui restent: déjà elle attend du prince qu'elle s'est donné le rétablissement de sou antique gloire et de sa longue prospérité; douce espérance qui lui fait oublier toutes ses pertes, et semble ranimer l'énergie et l'activité de ce peuple industrieux! Uni de sentimens comme d'intérêts au peuple français, il déplore comme lui un malheur domestique qui leur est commun; sous le règue d'un bon prince ce sont presque les seuls maux qu'un peuple fidèle puisse redouter.

De tous côtés, au-delà des Alpes et des Pyrénées, de la mer du Nord jusqu'au golfe de Tarente, de l'embouchure de l'Elbe jusqu'aux sources de l'Inn, la France ne se trouve plus environnée que d'une vaste chaîne de peuples amis, que ses armes avaient subjugués, que la sagesse de son chef a rendus à l'indépendance et au bonheur; et si cette sage et humaine politique, préparée depuis plusieurs années, n'a pu prévenir la la guerre dernière, du moins en a-t-elle reculé le théâtre à une immense distance de nos frontières. La France, tranquille lorsque l'Europe était dévastée par la guerre, toute entière au sentiment de sa force, envisageant l'avenir avec cette sécurité que donne le souvenir du passé, désirant la paix sans être fatiguée de la guerre, et prête à suivre les hautes destinées que lui préparait celui en qui elle a mis sa confiance, sa gloire et son amour. Cette attente d'un grand peuple a éte remplje, ses espérances surpassées; le moment de la prospérité est venu. Qui oserait en fixer les limites?

Tel est le tableau que j'ai eu a mettre sous vos yeux. Plu sieurs branches de l'administration perfectionnées, les finances dans l'état le plus heureux; la France seule, entre tous les états de l'Europe, n'ayant pas de papier monnaie, son commerce au milieu d'une stagnation inévitable, conservant toutes ses espérances et préparant les germes de sa prospérité future; nos colonies maintenues dans un état qui doit un jour enrichir la métropole; les armes de la France portées, par une suite de

succès sans exemple, jusqu'aux extrémités de l'Europe; son influence s'étendant au-delà du Bosphore et jusqu'au milieu du continent de l'Asie; le plus grand ordre, la plus profonde tranquillité régnant dans son intérieur lorsque son souverain a été pendant dix mois éloigné de six cents lieues; l'Europe étonnée, nos ennemis confondus, l'Angleterre restant seule chargéé du fardeau de la guerre et de la haine des peuples: telles sont, Messieurs, les opérations d'une année et les espérances de celle qui va suivre. Ce tableau s'embellira du bien que vous allez faire, et sans doute vous vous trouverez heureux d'avoir à concourir à l'accomplissement des vœux d'un souverain qui, parvenu au plus haut degré de gloire auquel un mortel puisse arriver fonde son bonheur sur le bonheur de son peuple, et n'ambitionne d'autre récompense de taut de pénibles travaux, de soins infatigables, d'inquiétudes et de dangers que l'amour de ses sujets et le suffrage de la posérité.

1er Septembre, 1807.
CORPS LÉGISLATIF.
Projet de loi.

Art. 1er. Tout jugement de condamnation qui interviendra au profit d'un Français contre un étranger non domicilié en France, emportera la contrainte par corps.

2. Avant le jugement de condamnation, mais après l'échéance ou l'exigibilité de la dette, le président du tribunal de première instance dans l'arondissement duquel se trouvera l'étranger non domicilié, pourra, s'il y a de suffisans motifs, ordonner son arrestation provisoire sur la requête du créancier français.

3. L'arrestation provisoire n'aura pas lieu ou cessera si l'étranger justifie qu'il possèdé sur le territoire français un établissement de commerce ou des immeubles, le tout d'une valeur suffisante pour assurer le paiement de la dette, ou s'il fournit pour caution une personne domiciliée en France et reconnue solvable.

M. Treilhard, orateur du gouvernement.-Messieurs, le projet sur la contrainte par corps contre les étrangers, dont je viens de donner lecture, repose sur une base severe en apparence, mais d'une grande justice et d'une rigoureuse nécessité.

Les étrangers sont accueillis avec faveur sur cette terre hospitalière: le Français, naturellement confiant et sensible, se livre avec une facilité que la prudence ne pourrait peut-être pas toujours avouer; faut-il que des actes de bienfaisance entrainent la ruine de l'homme généreux qui en fut capable?

Je ne vous dirai pas, comme un motif de la loi, que les autres nations exercent la contrainte par corps contre un débi

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