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pable envers les citoyens dont il a refusé de protéger le domicile; mais les préposés et les gardes ont fait ce qui était en eux pour lui assurer cette protection, et c'est tout ce que la loi a exigé d'eux '. » Il est difficile d'adopter cette opinion. Si les gardes ont fait ce qui était en eux pour constater le délit, ils ont rempli leur devoir, et l'obstacle qu'ils rencontrent dans le refus de l'officier public ne peut engager leur responsabilité; mais ils ne peuvent aller audelà, à moins que le consentement des parties intéressées n'ouvre leur demeure; car l'intérêt de la répression d'un délit, quelque grave qu'il soit, ne permet pas de mettre aussi facilement de côté le principe constitutionnel qui protége l'inviolabilité du domicile. Sans doute il ne doit pas dépendre d'un fonctionnaire d'arrêter une poursuite par son refus de concours, et ce fonctionnaire doit être puni; mais il ne faut pas non plus que, sous le prétexte de ce refus, les agents puissent s'introduire arbitrairement dans la maison des citoyens, contre la volonté de ceux-ci. Ils devraient s'adresser à un autre officier compétent, en cas d'absence, d'empêchement ou de refus de tous les officiers du lieu, ont en référer à l'autorité supérieure.

Une autre condition de la légalité des perquisitions domiciliaires est qu'elles aient lieu pendant le jour. Aux termes de l'art. 76 de la loi du 22 frimaire an VIII, nul n'a le droit d'entrer dans une maison pendant la nuit, si ce n'est dans le cas d'incendie, d'inondation

Traité des procès-verbaux, n° 20.

ou de réclamations faites de l'intérieur de la maison. Nous examinerons plus loin, au chapitre de flagrant délit, les difficultés qui peuvent s'élever sur la signification du mot nuit; mais ce mot, en ce qui concerne les perquisitions, se trouve défini par l'artticle 1037 du C. de proc. civ., qui porte qu'aucune exécution ne pourra être faite depuis le 1er octobre au 31 mars, avant six heures du matin et après six heures du soir, et depuis le 1" avril jusqu'au 30 septembre, avant quatre heures du matin et après neuf heures du soir1.

$ 256.

Des perquisitions et visites opérées par les préposés
des contributions indirectes.

Les employés des contributions indirectes sont autorisés à procéder à des perquisitions et à des visites domiciliaires dans les cas suivants :

1 Dans les caves, celliers, magasins et autres parties des maisons des individus assujettis par leur profession aux visites et exercices, tels que les débitants, marchands en gros, distillateurs et brasseurs; 2o Dans les maisons des citoyens non sujets aux exercices, en cas de suspicion de fraude.

Les exercices et vérifications des employés dans les maisons des assujettis ne sont point, à proprement dire, des visites domiciliaires : la profession de ceux

* Voy. néanmoins, en ce qui concerne les contributions indirectes, les art. 26 et 236 de la loi du 28 avril 1816.

ci ouvre de plein droit leurs habitations à la surveillance de l'administration; ils renoncent à l'inviolabilité de leur domicile; ils acceptent les visites incessantes des préposés. La loi qui a fait de ces exercices la condition de la profession, s'est bornée à en régler les formes et les époques '.

Mais lorsque les perquisitions s'étendent aux maisons des citoyens qui n'y sont point assujettis par leur profession, les règles générales qui protégent le domicile reprennent leur empire. Elles sont rappelées dans les art. 83 de la loi du 5 ventôse an XII, et 237 de la loi du 28 avril 1816.

L'art. 83 de la loi du 5 ventôse an XII, évidemment insuffisant, n'exigeait, pour que ces visites fussent régulières, que la simple assistance d'un officier de police: « En cas de suspicion de fraude, ils (les employés) pourront faire des visites, mais en se faisant assister d'un officier de police qui sera tenu, sous peine de destitution et de dommages-intérêts, de déférer à la réquisition par écrit qu'ils lui en auront faite, et qui sera transcrite en tête du procès-verbal. » L'art. 237 de la loi du 28 avril 1816 a reproduit cette disposition, mais en la complétant par l'addition d'une forme nouvelle et non moins efficace: « En cas de soupçon de fraude à l'égard de particuliers non sujets à l'exercice, les employés pourront faire des visites dans l'intérieur de leur habitation, en se faisant assister du juge de paix, du maire, de son adjoint ou d'un commissaire de po

1 L. 5 vent. an XII, art. 81 et 82; L. 28 avril 1816, art. 26, 56, 101, 125, 140, 255 et 236.

lice, lesquels seront tenus de déférer à la réquisition qui leur en sera faite, et qui sera transcrite à la tête du procès-verbal. Ces visites ne pourront avoir lieu que d'après l'ordre d'un employé supérieur du grade de contrôleur au moins, qui rendra compte des motifs au directeur du département. Les marchandises transportées en fraude qui, au moment d'être saisies, seraient introduites dans une habitation pour les soustraire aux employés, pourront y être suivies par eux sans qu'ils soient tenus, dans ce cas, d'observer les formalités ci-dessus prescrites.

Il résulte de ce texte que deux conditions sont imposées aux visites domiciliaires des employés : 1° l'assistance du juge de paix, du maire, de son adjoint ou du commissaire de police; 2' l'ordre spécial d'un employé supérieur, du grade de contrôleur au moins. Ces deux conditions ne sont plus exigées dans le cas exceptionnel prévu par le dernier alinéa.

L'assistance des officiers publics désignés par la loi soulève la même question que nous avons examinée dans le précédent paragraphe, en ce qui concerne les gardes champêtres et forestiers; la disposition légale est la même, ses motifs sont identiques, et, dès-lors, la même interprétation doit lui être donnée. L'assistance est une garantie établie dans l'intérêt des citoyens et pour les protéger contre les actes arbitraires des employés; ils peuvent renoncer à cette protection, mais comme leur adhésion est nécessaire pour la supprimer, comme ils sont maîtres alors de fermer leur porte aux préposés et que leur consentement formel devient la condition de

pas

l'entrée de ceux-ci, il est indispensable de constater dans le procès-verbal et le défaut d'assistance et le consentement du redevable. Il faut l'une ou l'autre de ces formalités : si la première n'est pas prescrite à peine de nullité, c'est à la condition que la seconde la remplacera '. La Cour de cassation n'a adopté la nécessité de cette constatation; elle s'est bornée à déclarer que le défaut d'assistance peut être couvert par le consentement de la partie, et que ce consentement est présumé, lorsqu'il n'y a pas de réclamation. Les motifs de cette décision, tels qu'ils sont consignés dans ses arrêts, sont : « que l'art. 237 de la loi du 28 avril 1846, veut impérieusement et dans les termes les plus formels, qu'en cas de soupçon de fraude à l'égard des particuliers non sujets à l'exercice, les employés, munis de l'ordre spécial prescrit cumulativement par la deuxième disposition du même article, se fassent assister du juge de paix, du maire, de son adjoint ou du commissaire de police, pour faire des visites dans l'intérieur des habitations desdits particuliers; que cette assistance est une condition imposée aux employés pour légaliser ces visites et qu'ils sont obligés de remplir, hors du cas (dont parle le deuxième alinéa) où il est ques tion de suivre des marchandises transportées en fraude qui, au moment d'être saisies, seraient introduites dans une habitation pour les leur soustraire; que ce sont là des principes qui ont été consacrés par les lois antérieurement à la loi du 28 avril 1816

1 Voy. supra, p. 361.

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