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sent. Les gardes champêtres et forestiers peuvent arrêter et conduire devant le juge de paix ou le maire tout individu surpris en flagrant délit, lorsque ce délit emporte la peine d'emprisonnement ou une peine plus grave (art. 16). Les procureurs de la République, les juges d'instruction, et tous les officiers de police auxiliaires doivent, dans tous les cas de flagrant délit, lorsque le fait est de nature à entraîner une peine afflictive ou infamante, se transporter sur les lieux et dresser tous les procès-verbaux nécessaires à l'effet de constater le corps du délit, son état et l'état des lieux; ils doivent recevoir les déclarations des personnes présentes ou qui peuvent donner quelques renseignements; ils appellent les parents, voisins, domestiques; ils saisissent les instruments du délit; ils font toutes les perquisitions utiles à la manifestation de la vérité; ils ordonnent même l'arrestation de l'inculpé (art. 32 et suiv,, 49 et 59). Les mêmes pouvoirs leur sont donnés dans le cas d'un délit même non flagrant, commis dans l'intérieur d'une maison, lorsque le chef de cette maison les requiert de le constater (art. 46 et 49). Ainsi, dans ces deux cas, ils procèdent à une véritable information; ils exercent même des pouvoirs qui excèdent les limites de la police judiciaire; ils remplissent, par une délégation légale, les fonctions du juge lui-même. C'est ainsi que le Code n'a admis que comme une exception, nécessitée par des circonstances extraordinaires, une attribution qui formait le droit commun des législations antérieures.

Enfin la loi, pour donner à l'institution qu'elle

crée une vie plus énergique, pour imprimer à son action une impulsion plus active, l'a soumise à une surveillance hiérarchique dont elle a multiplié les

ressorts.

Le procureur de la République, dans les mains du duquel se réunissent tous les renseignements recueillis par la police judiciaire, dont les autres officiers de police ne sont que les auxiliaires, et qui est personnellement chargé de la recherche et de la poursuite de tous les crimes et délits, exerce naturellement sur tous les actes qui se rattachent à cette recherche et sur tous les agents qui y concourent, une surveillance immédiate et nécessaire.

Le procureur général exerce un second degré de surveillance: l'art. 279 du Code d'inst. crim. porte: Tous les officiers de police judiciaire, même les juges d'instruction, sont soumis à la surveillance du procureur général. Tous ceux qui, d'après l'art. 9, sont, à raison de fonctions même administratives, appelés par la loi à faire quelques actes de la police judiciaire, sont, sous ce rapport seulement, soumis à la même surveillance. Ce magistrat peut, en cas de négligence, les avertir et, en cas de récidive, les dénoncer à la cour.

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Enfin, aux termes de l'art. 9, la police judiciaire est exercée sous l'autorité des cours d'appel. Nous verrons plus loin de quelle manière et dans quels cas cette autorité peut être exercée.

Voy. aussi l'art. 45 de la loi du 20 avril 1810.

S 212.

Examen de l'organisation de la police judiciaire suivant le Code d'instruction criminelle.

L'organisation de la police judiciaire telle que notre Code l'a faite, satisfait-elle complètement aux doubles exigences de la justice pénale et de la liberté civile? Est-elle suffisamment tutélaire des droits et des intérêts qu'elle a mission de sauvegarder?

En essayant de définir la police judiciaire, nous avons établi que deux règles générales dominent son organisation.

Il faut, en premier lieu, qu'elle soit investie de tous les moyens d'action, qu'elle soit servie par tous les agents nécessaires à l'accomplissement de sa mission; car le premier vœu de la loi est que toute infraction soit connue, soit poursuivie, soit jugée; car aucun crime, aucun délit, aucune contravention ne doit rester sans poursuite'.

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Il faut, en second lieu, qu'elle présente dans tous ses actes les garanties indispensables pour rassurer les droits que son exercice a pour effet de froisser; car, destinée à protéger la liberté civile, elle ne doit ni l'entraver, ni même l'inquiéter; et si « son action doit être assez prompte et assez sûre pour que nul ne puisse l'éluder, elle doit être assez modérée pour

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ne pas blesser même l'individu qu'elle atteint'.

D

Ces deux principes, qui constituent le double fondement de la police judiciaire et qui résument à la fois son caractère et son but, ont-ils reçu dans notre législation une entière application?

Cette question doit être examinée au point de vue: 1° des droits que la loi a conférés à cette police; 2° des agents qu'elle emploie pour les exercer.

Les droits de la police judiciaire ont été plus ou moins étendus sous les différentes législations qui ont régi la France. Dans notre ancien droit, qui ne concevait qu'imparfaitement la séparation de la police et de la justice, parce qu'elles étaient dans les mêmes mains, les premiers actes qui suivaient la découverte des crimes étaient des actes de poursuite et d'instruction; l'information dressée au seuil même de la procédure faisait charge au procès; la police judiciaire semblait donc usurper une partie des actes de la justice. Dans les lois intermédiaires des 16-29 septembre 1791 et 3 brumaire an IV, elle constituait une véritable procédure préparatoire, distincte de l'instruction définitive, mais composée en partie d'actes de poursuite et même d'instruction. Enfin, dans la loi du 7 pluviôse an ix, elle tendait à se confondre de plus en plus avec l'instruction, puisque le magistrat de sûreté, à la fois officier de police judiciaire, officier du ministère public et chargé même de l'instruction, recherchait les crimes, les poursuivait et présidait aux premiers actes de la procédure.

4 Instruction du 29 septembre 1791.

Il n'en est plus ainsi dans le système de notre Code. Les pouvoirs des officiers de police judiciaire ont été, en général, restreints. Leurs fonctions ordinaires consistent uniquement: 1° a recevoir les dénonciations des crimes, délits et contraventions; 2° à dresser, quand il y a lieu, des procès-verbaux de ces faits; 3° à transmettre ces actes à l'officier du ministère public compétent pour poursuivre. Ce n'est que par exception, et seulement au cas de flagrant délit ou de réquisition d'un chef de maison, qu'ils reprennent le droit d'information et les attributions extraordinaires que les lois antérieures leur conféraient.

Cette restriction, hors des cas de flagrant délit, est-elle contraire aux règles de la matière? Peut-être, au seul point de vue de la justice répressive, on pourrait la regretter, car l'enquête sommaire à laquelle l'officier de police pourrait procéder, dans tous les délits graves, flagrants ou non flagrants, éclairerait et dirigerait l'action judiciaire. Mais que de périls à côté de cet avantage! Notre ancien droit qui ne conférait le droit d'informer qu'aux seuls juges, les lois intermédiaires qui ne l'attribuaient qu'aux juges de paix, aux officiers de gendarmerie, aux magistrats de sûreté, pouvaient, sans de graves inconvénients, abandonner ce droit au pouvoir discrétionnaire de ces agents; mais serait-il possible de le livrer à des fonctionnaires purement administratifs, à des commissaires de police, à des maires, à adjoints de maires? Le procès-verbal d'information est un acte d'une haute importance; c'est là qu'est

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