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vertu d'une délégation exceptionnelle, et pour ainsi dire en vertu de la délégation implicite du juge lui-même qu'ils ne font que suppléer. Dès lors, dès qu'il se présente, tous les officiers, qui ne sont au fond que ses auxiliaires et ses délégués, doivent cesser d'agir et s'en référer à lui. Seul il a la plénitude du pouvoir d'informer, et par conséquent il absorbe par son action tous les pouvoirs extraordinaires établis pour lui servir d'aide ou le remplacer. Et d'ailleurs, puisque les actes que ces officiers auraient pu faire à son défaut doivent lui être transmis, puisqu'il a le pouvoir de les examiner, de les régulariser et même de les refaire, comment ne les ferait-il pas lui-même aussitôt qu'il le peut, comment ne serait-il pas saisi de plein droit de l'information, aussitôt qu'il est sur les lieux? Seul, le procureur de la République ne cesse point ses fonctions, mais elles changent de nature. Avant l'arrivée du juge, il procédait provisoirement aux actes de l'information, il faisait l'office de juge; il reprend, en présence de ce magistrat, ses fonctions du ministère public; il se borne à requérir et le juge statuc sur ses réquisitions'.

Enfin, non-seulement le juge d'instruction réunit en lui-même tous les pouvoirs que la loi a délégués aux officiers de police judiciaire, mais il y joint, mème en ce qui concerne les actes de la police judi

1 Voy., dans ce sens, M. Treilhard, Exposé des motifs (Locré, t. XXV, p. 242); Carnot, De l'iustr. crim., t. I, p. 289; Legraverand, t. 1, p. 180; Bourguignon, t. I, p. 165; Duverger, t. I, p. 282.

ciaire, des pouvoirs plus étendus et qui n'appartiennent qu'à lui seul. C'est ainsi que seul il peut placer les inculpés en état de mandat de dépôt (art. 61); c'est ainsi que seul encore il peut se transporter dans le domicile des citoyens autres que le prévenu, pour y faire la perquisition des papiers ou effets qu'il jugerait utiles à la manifestation de la vérité (art. 88). C'est ainsi enfin qu'il peut seul recevoir des témoins, non de simples déclarations seulement, mais des dépositions sous la foi du serment (art. 53 et 75).

Le principe général qui règle les pouvoirs de tous les officiers de police judiciaire est la distinction des cas où le délit est flagrant et des cas où il n'est pas flagrant. Dans la première hypothèse, l'urgence de la constatation, la nécessité de rassurer les esprits alarmés, le péril occasionné par le délit ont porté le législateur à déléguer à ces officiers des attributions exceptionnelles que nous examinerons plus loin. Dans la deuxième hypothèse, qui doit nous occuper d'abord, puisqu'elle forme la règle commune, ces attributions sont très-restreintes : le juge d'instruction conserve seul les mêmes pouvoirs, sauf le droit d'instruire d'office.

Il peut donc recevoir les plaintes des parties il en ordonne la communication au ministère public pour être requis ce qu'il appartiendra'.

Il est saisi, par l'intermédiaire du ministère pu

1 C. d'instr. crim., art. 65 et 70, et aussi les art. 48 et 50. Voy. aussi notre tome II, p. 254, 382 et 452.

blic, de tous les actes et de toutes les pièces qui ont pour objet de constater les crimes et les délits prévus, soit par le Code pénal, soit par les lois spéciales, à l'exception de quelques catégories d'infractions qui sont soumises à un mode de poursuites, ou sont portées devant des juridictions exceptionnelles '. Il se transporte sur les lieux 2;

Il dresse tous les procès-verbaux nécessaires à la constatation des faits dénoncés 3;

Il procède à l'audition, non-seulement des parents, voisins et domestiques, mais de tous les témoins, qu'ils soient ou non sur les lieux, qui peuvent fournir d'utiles renseignements à la justice *; Il ordonne l'arrestation des inculpés et décerne, sans que les conclusions du ministère public soient nécessaires, le mandat d'amener et le mandat de dépôt 5;

Il délégue des experts pour vérifier, soit l'état des lieux, soit le corps du délit ';

Il délégue les officiers de police judiciaire pour procéder à son défaut aux actes d'instruction qui peuvent être délégués ;

Il peut se transporter d'office, soit dans le domicile de l'inculpé, soit même dans le domicile des

Art, 53, 54 et 60 du C. d'instr. crim.; voy. aussi l'art. 22 ; nous énumérerons les délits exceptés en examinant la compétence du juge d'instruction dans la procédure écrite.

2 Art. 47 et 62.

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tiers, pour y faire les perquisitions qu'il juge nécessaires à la justice';

Il requiert, au besoin, l'assistance de la force publique';

Enfin, il procède à tous les actes de recherche et de vérification qui peuvent préparer l'information. Nous nous bornons ici à indiquer ces actes: les questions qu'ils soulèvent seront examinées quand nous déterminerons la compétence générale du juge d'instruction dans le cours de la procédure écrite.

$215.

Droits et attributions du procureur de la République et de ses substituts

Nous avons exposé l'organisation générale du ministère public et les principes qui régissent son action 3.

Nous avons particulièrement défini les fonctions. du procureur de la République et de ses substituts, en ce qui concerne l'exercice de l'action publique *. Il nous reste à parler ici des attributions que leur confère la police judiciaire.

L'art. 9 du C. d'instr. crim. dispose que la police judiciaire sera exercée par les procureurs de la Ré

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publique et leurs substituts. La loi délégue donc directement ces fonctions à chacun de ces magistrats. Les substituts n'ont donc besoin d'aucune délégation spéciale pour les remplir; il trouvent ce pouvoir en eux-mêmes et l'exercent comme membres du ministère public. Mais ils ne l'exercent toutefois qu'autant qu'ils remplacent le chef du parquet, ou qu'ils ont reçu de lui une mission à cet effet. Placés, en effet, par la hiérarchie de leurs fonctions, sous les ordres du procureur de la République, ils sont attachés aux branches du service qu'il leur désigne. Ainsi, l'art. 18 du décret du 18 août 1810 porte que le chef de chaque parquet peut charger un de ses substituts des fonctions d'officier de police judiciaire. Mais il ne faut pas confondre la délégation, qui vient de la loi, et la désignation qui assigne telle ou telle fonction à chaque substitut; la loi délégue le pouvoir, le chef du parquet en règle l'exercice.

Les attributions du ministère public, en matière de police judiciaire, sont tout à fait distinctes suivant qu'il s'agit d'un délit flagrant ou assimilé au délit flagrant, ou d'un délit non flagrant..

Si le délit est flagrant, le ministère public qui, en principe général, n'est qu'une partie poursuivante, réunit temporairement aux pouvoirs de la poursuite les pouvoirs de l'instruction: il supplée le juge dans les actes de son ministère; il peut donc se transporter sur les lieux du délit, entendre les parents et les voisins, dresser des procès-verbaux, faire saisir pro

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