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dirent les uns à Regium, les autres à Mar- | riple Teichos, Gytte, Acra, Melitta et seille. C'est la première bataille navale | Arambe; l'ile de Cérée à l'embouchure dont parle l'histoire; il ne paraît pas que d'un fleuve pourrait être Santa - Cruz. dans ces temps-là Carthage eût acquis Il est évident, d'après le détail de la naune grande prépondérance dans la Mé-vigation de Hannon, qu'il arriva dès lors diterranée. On ne la voit point former d'établissemens sur ses côtes, et il y a lieu de penser qu'elle eut rarement l'avantage dans les combats qui durent suivre cette première action. Justin dit formellement que les Marseillais, les constans adversaires des Carthaginois, furent souvent vainqueurs et qu'ils dictèrent la paix.

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Quand Rome eut fondé Ostie elle étendit aussi son commerce vers les côtes occidentales de la Méditerranée. Ce fut sous l'empire ces circonstances que fut conclu le traité d'alliance de Rome avec Carthage. On fixe les limites que la marine romaine ne devra pas dépasser, on prescrit certaines formalités pour la vente des marchandises, on donne au négociant la garantie d'un officier public dont l'intervention est nécessaire dans toutes les affaires. Dans la partie carthaginoise de la Sicile, les Romains auront les mêmes droits que les Carthaginois eux-mêmes. Le principal but des Carthaginois, en concluant ce traité, était d'exclure les Romains de leurs ports de l'Orient et notamment des deux Syrtes. Il est probable que ce fut à cette époque que Carthage suivit, au-delà des Colonnes d'Hercule, la route que lui indiquaient les courses maritimes des Phéniciens. Le Périple de Hannon déposé dans le temple de Saturne, nous est parvenu traduit en grec; malheureusement nous ne sommes plus aussi bien informés sur les découvertes de Himilcon, le long des côtes de l'Espagne et de la Gaule, l'inscription qu'il avait faite ayant péri sans laisser de souvenirs. Mais Hannon partit avec 60 vaisseaux et une population de 30,000 ames, hommes et femmes; après avoir franchi les Colonnes d'Hercule, il fonda dans une grande plaine la ville de Thymiatérium; puis il navigua vers l'ouest et bâtit sur le promontoire de Soloé un temple consacré à Neptune. On croit qu'il pénétra ensuite dans le pays appelé aujourd'hui Safy et que c'est là qu'il fonda les villes appelées dans le Pé

au Sénégal et à la rivière de Gambie. Carthage et Marseille nous apparaissent dans l'antiquité comme les seules républiques où l'esprit des découvertes ait étendu les bornes de la science.

Maintenant jetons un coup d'œil sur l'organisation intérieure, sur la constitution, le commerce, la civilisation de cette grande cité marchande. Au sud, le territoire de Carthage s'étendait jusqu'au lac Triton qui était en communication avec la mer au moyen d'un canal. Vers Cyrène, la limite était sur le rivage oriental de la grande Syrte, les Aræ Philanorum et la Turis Euprantus. A l'ouest, le territoire n'avait point de limites certaines et se confondait avec les états numides avec lesquels on vivait sur un pied d'alliance, mais qui ne payaient pas toujours le tribut. Du reste toute la côte jusqu'à Cadix était semée de colonies. Scylax dit formellement que tous les ports de la Libye vers l'Espagne avaient appartenu à Carthage. Tous ces pays se peuvent diviser en trois classes: 1° les sujets : ce sont les Libyens ou Liby-Phéniciens; 2° les habitans des anciennes villes alliées des Phéniciens; 3o les populations nomades. Les Libyens occupaient le territoire proprement dit entre le lac Triton et la petite Syrte d'une part, et la Numidie de l'autre. Ils étaient agriculteurs comme ceux de Cyrène et comme les Égyptiens. Ce sont leurs abondantes récoltes qui approvisionnaient les nombreuses armées de Carthage. Hérodote y distingue trois peuples différens : les Maxyens à l'ouest du lac Triton; auprès d'eux les Zauécères, dont les femmes combattaient sur des chars, ce qui a pu donner lieu à la tradition des Amazones du lac Triton; le troisième peuple est celui des Gyzantes ou Byzantes. Subjugués peu à peu, ces peuples apprirent avec le temps le phénicien: aussi furentils appelés Liby-Phéniciens. Toutefois ils se montraient impatiens du joug, et comme Rome fondait des colonies latines pour assurer sa puissance, il fallut que

Carthage recourût à ce moyen pour les pagne. On comprit de quel avantage se

contenir.

Les villes phéniciennes antiques comme Utique, Leptis, Hadrumète, Hippo-Zaritus, étaient la plupart bien fortifiées et avaient d'excellens ports. A l'exemple de leurs métropoles de Phénicie, elles composaient une sorte de fédération plutôt alliée que sujette de Carthage, dont cependant il leur fallut bien reconnaître la suprématie. Ces contrées étaient riches en grains, en pâturages, en troupeaux. Telles n'étaient point les terres comprises entre les deux Syrtes: leur stérilité ne permettait point l'établissement de colonies; on n'avait donc aucun moyen régulier de contenir les populations, nomades et de les astreindre au tribut. Les habitans de la Numidie et de la Mauritanie étaient les plus difficiles à soumettre. Leur pays était coupé par des montagnes et sillonné par des fleuves; leur principale force consistait dans une cavalerie endurcie à toutes les fatigues : aussi les Massyliens de Massinissa, et les peuples de Syphax ne furent pas moins dangereux à Carthage que Rome ellemême. Les colonies du nord vers l'Espagne eurent principalement pour but le commerce d'entrepôt avec cette contrée. Nous citerons celles que l'on appelait Metagonitiques, parce qu'elles étaient près du promontoire Metagonium vis-à-vis de Carthage. Les Grecs donnèrent le nom de Metagonitis à toute la côte septentrionale d'Afrique; Scylax désigne comme carthaginois tous les ports depuis la grande Syrte jusqu'aux Colonnes d'Hercule.

En terre ferme, Carthage ne s'établit qu'en Espagne. Les anciens Phéniciens déjà voguaient vers ces contrées: Cadix, colonie de Tyr, s'était élevée à une grande prospérité; elle était la capitale de toutes les villes de la riche Turdetanje. Attaquée par les indigènes, elle fut plus d'une fois défendue par Carthage. Toutefois celle-ci demeura long-temps fidèle à son principe de ne pas conquérir plus qu'elle ne pouvait défendre de territoire, et ce ne fut que dans la suite, quand les guerres contre Rome l'eurent privée de la Sicile et de la Sardaigne, que les conquêtes de Carthage s'étendirent en Es

raient les soldats ibères pour les armées sans cesse prêtes à marcher contre Rome. Les mines d'Espagne seules purent donner à Carthage les moyens de soutenir si long-temps la guerre contre Rome. Himilcon, ainsi que nous l'avons dit, créa des colonies en dehors des Colonnes d'Hercule, sur la côte occidentale. Il est hors de doute que Madère, sur la côte d'Afrique, ne leur ait appartenu. Les Étrusques essayèrent d'y conduire une colonie, mais les Carthaginois les en empêchèrent; ils défendaient même à leurs propres citoyens de s'y établir, se réservant d'y transporter leur cité elle-même, si jamais Carthage venait à succomber sous un ennemi puissant. C'est ce fait qui a donné lieu, sans doute, à l'absurde opinion que les Carthaginois auraient découvert l'Amérique.

La constitution de Carthage. ne nous est guère connue que par des fragmens d'Aristote et de Polybe; elle paraît avoir été formulée d'après celle de Tyr. L'aristocratie est assez ordinairement dominante dans les états commerçans. Malchus, Hannon, Bomilcar firent d'infructueuses tentatives pour le renversement de ce système. Les grands avaient trop d'influence et de richesses pour n'en pas triompher; d'ailleurs le peuple avait aussi sa part de liberté qu'il tenait à conserver. La souveraine puissance était exercée par deux suffètes (choffetim), que l'on compare tantôt aux rois de Sparte, tantôt aux consuls romains. Cette magistrature existait aussi à Cadix et dans les autres colonies phéniciennes. Les Grecs appelaient les suffètes βασιλείς oυ πρωτ TEúovtes, les Romains disaient reges, ou consules, ou dictatores. Ils présidaient le sénat; souvent aussi ils présidaient aux débats judiciaires et commandaient les armées. S'il est quelquefois parlé d'un seul suffète, ce ne peut être que pour des cas rares et exceptionnels, et à raison de fonctions qui ne pouvaient être remplies que par un seul. Nous ne savons rien de la durée des fonctions des suffètes. Aris tote est si bref que l'on ne pourrait même rien inférer de ce qu'il les compare aux rois de Sparte. Ce n'est que par voie d'induction que l'on peut croire

que les fonctions de suffète n'étaient pas conférées à vie.

Dans l'ordre hiérarchique, les prêtres et les chefs militaires venaient immédiatement après les suffètes. S'il fallait démontrer l'importance de la religion dans l'état, les exemples ne marqueraient pas. Nous citerions Carthalo, le fils du suffète Malchus, envoyé à Tyr pour apporter la dime à Hercule; nous rappellerions la sanglante superstition qui faisait sacrifier à Saturne des centaines d'enfans, la fondation de monumens dans les temples, et notamment les inscriptions qui perpétuaient le souvenir des Périples de Himilcon et d'Hannon; enfin nous dirions de combien de considération jouissaient dans les armées les devins qui se mêlaient aussi de toutes les affaires importantes. Les suffètes étaient souvent chefs militaires : tel Hannon quand il alla fonder les colonies d'Afrique; tel Annibal, fils de Giscon, et beaucoup d'autres; mais en général il y avait séparation de pouvoirs. Dans la nomination des uns et des autres on avait égard au mérite, à la naissance et à la richesse. D'abord les élections appartenaient au sénat, et ce n'est qu'à une époque de décadence que ce droit fut exercé par le peuple. Les chefs militaires étaient investis d'une puissance souveraine; néanmoins on voit parfois des sénateurs les accompagner et prendre part aux délibérations du conseil de guerre. Le sénat est quelquefois consulté sur un plan de campagne et c'est lui qui prononce le rappel et la disgrace des généraux.

L'administration et le gouvernement paraissent avoir résidé dans le sénat. Sans doute il fut originairement composé des chefs de famille venus de Tyr, et leurs descendans se recrutèrent sans doute ensuite parmi les hommes remarquables par leur position ou leur mérite. Si ce corps se fût incessamment renouvelé, si ses fonctions n'eussent été que temporaires, il ne serait jamais parvenu à ce haut degré de puissance. On pense, d'après les nombreuses députations du sénat, d'après les commissions prises dans son sein, qu'il devait avoir plus de 300 membres. Quand il y avait accord entre les suffètes et le sénat, la résolution avait

force de loi; quand il y avait dissentiment, on portait l'affaire devant le peuple. On voit que la souveraineté de ce peuple était rarement exercée, mais on ne saurait la nier; les témoignages d'Aristote et de Polybe sont formels. Le premier va jusqu'à appeler Carthage une démocratie; peut-être le peuple confirmait-il par une ratification les choix faits par le sénat.

La constitution avait un danger plus grand à courir de la part de l'aristocratie, toute puissante par la prépondérance du collège des cent qui paraît avoir été institué à l'époque où la maison de Magon devint dangereuse pour la république. Comme les éphores de Sparte, les centumvirs avaient le droit de demander compte aux généraux de leur commandement, et ils en usèrent souvent avec une dureté blâmable, prodiguant les amendes, les exils, les condamnations à mort; le malheur à leurs yeux devenait crime, et l'on n'a point oublié comment le grand Annibal luimême fut traité par eux. Que l'on compare à cette injuste sévérité la magnanimité de Rome remerciant Varron de n'avoir point désespéré du salut de la république, quoiqu'elle fût près de périr par sa faute. Les centumvirs paraissent avoir fait partie du sénat, mais ils étaient élus par les pentarchies qui formaient la nouvelle aristocratie de Carthage. Dans l'origine, les centumvirs n'étaient nommés que pour un an, mais dès le temps d'Annibal ils sont magistrats à vie, et leur puissance est imposante et pour le peuple et pour le sénat. Ils s'étaient adjugé aussi l'administration de la fortune publique, eu sorte qu'ils tenaient en leurs mains l'honneur et les intérêts pécuniaires des citoyens. Il est probable que le præfectus morum ou juge des mœurs faisait aussi partie de ce collége. Il se pourrait même que la qualité de préteur donnée à Annibal par Polybe et Tite-Live ne signifiat autre chose sinon que ce grand homme était à la tête des centumvirs. Leur chef seul aurait pu mettre un frein à leur despotique puissance.

A Rome, les principales ressources de l'état consistaient dans le patriotisme et le dévouement des citoyens; à Carthage,

l'argent était tout et la fortune aplanis-
sait le chemin des honneurs : aussi cher-
chait-on principalement à s'enrichir. Il
n'est pas douteux que l'usage de battre
monnaie n'y fût très anciennement établi;
cependant la plupart des médailles puni-
ques nous viennent des colonies cartha-
ginoises. Le commerce se faisait princi-
palement par échange; les magistrats ne
recevaient point de traitemens: les soldats
étaient presque toujours payés en nature;
il n'y avait donc pas une grande masse
de numéraire en circulation. C'est ce que
prouverait au besoin un passage du dia-
logue d'Eschine sur les richesses: il parle
d'un signe représentatif qui tenait lieu de
monnaie et que l'on enveloppait dans un
petit morceau de cuir en le cachetant mys-
térieusement; mais Eschine ajoute qu'on
ignorait ce qu'il y avait dedans et que ce
qui faisait la richesse de Carthage valait|
à peine les pierres des montagnes. Les
revenus consistaient en produits naturels
imposés comme tribut aux provinces, en
deniers comptant payés par les villes
sujettes; les impôts étaient fort lourds,
et dans les circonstances difficiles on les
élevait quelquefois jusqu'au double,
non sans exciter le mécontentement des
classes ou des peuples soumis au tribut.
Les douanes et les octrois, surtout dans
les villes frontières et dans les ports, fai-
saient une branche considérable du re-
venu public, et ils s'élevèrent au-dessus
de la valeur du tribut lorsque Carthage
eut perdu une partie de ses provinces.
Une autre ressource, c'était l'exploita-
tion des mines d'Espagne et notamment
celles de Carthagène (voy.), assez fécondes
en argent. Les avantages du commerce
étaient très grands même pour l'état. Hee-
ren (dans le second tome de ses excel-
lentes Idées) parle encore de la pirate-
rie, comme d'une troisième branche de
revenu; mais son opinion à cet égard
repose sur des autorités peu sûres. En
général il faut bien distinguer entre les
sources d'où nous viennent les rensei-
gnemens et ne jamais oublier qu'Aris-
tote, par exemple, nous parle de Car-
thage florissante, et Polybe de Carthage
en décadence.

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tenir des luttes sanglantes, et quand elle eut étendu son commerce de Cyrène à l'île de Cerné sur les côtes occidentales d'Afrique, quand elle eut acquis des possessions en Espagne, en Sardaigne, en Sicile, dans les îles Baléares, etc., il fallut bien entretenir des armées et une marine militaire qui pût tenir tête aux Grecs, aux Romains, aux Etrusques. Les Carthaginois étaient meilleurs navigateurs, et surtout meilleurs constructeurs qu'aucun des peuples leurs rivaux, et souvent d'habiles manœuvres leur donnèrent la victoire. Cependant les Romains mettaient à bord de meilleures troupes: aussi l'emportaient-ils presque toujours à l'abordage. Le port de Carthage pouvait offrir un abri à 220 vaisseaux de guerre; Utique, Hippone et quelques colonies avaient aussi de bons ports. Habituellement les flottes étaient de 130 à 200 navires; dans la première guerre punique on en voit une de 350, et le total des vaisseaux que perdit Carthage dans cette guerre s'élève à 500. D'abord on n'avait que des trirèmes, mais Aristote dit que les Carthaginois inventèrent les quadrirèmes. Les généraux de terre commandaient assez souvent en chef, mais parfois aussi ils étaient soumis à ceux de la flotte; chaque vaisseau avait son commandant, et les vaisseaux de transport avaient aussi un chef séparé de celui de la flotte.

Quant à l'armée, elle ne contenait que fort peu de Carthaginois; les garnisons, moins celle de la ville, consistaient presque toutes en troupes étrangères. Il fallait un grand homme comme Annibal pour établir quelque unité entre des mercenaires de tant de nations différentes. Ce système avait du moins cet avantage que les victoires n'étaient pas achetées au prix du sang des citoyens, et que les défaites étaient faciles à réparer tant que la république avait de l'argent. Mais d'un autre côté, comment des mercenaires pouvaient-ils combattre avec le même amour de leur cause que l'eussent fait des citoyens? Souvent ils se révoltaient pour demander impérieusement le paiement de leur solde; ils se joignirent Forces militaires de Carthage. Dès même aux peuples de Numidie après la l'origine cette cité se vit obligée de sou-première guerre punique. Dans les cas

tion d'une manière trop absolue : l'histoire, et notamment celle du siége de Syracuse, la démentirait. Il était difficile de faire accorder entre eux des hommes qui ne se comprenaient pas, et c'est ce qui explique les fréquentes désertions et cette guerre terrible qui dura plus de 3 ans et que Carthage eut à soutenir contre ceux qui avaient d'abord combattu pour elle.

de danger, les citoyens pouvaient former un corps de plus de 40,000 hommes; ils se distinguajent par l'éclat de leurs armes. Diodore parle d'un bataillon sacré de 2,500 hommes: il y avait dans ce bataillon sacré des cavaliers, des hoplites et des soldats armés à la légère. Les Libyens étaient regardés comme faisant le second corps d'armée dans l'ordre des préséances; ils portaient des glaives et des lances plus longues. Puis venaient les Gaulois et les Espagnols: ceux-ci portaient des vêtemens blancs bordés de rouge et des pelisses; leur bouclier était ger, leur casque d'airain surmonté de panaches rouges. Les Gaulois étaient moins bien vêtus et moins disciplinés. Il y avait de plus des Liguriens, des Campaniens, et dans la suite les Grecs même prirent du service dans les armées de Carthage. Les frondeurs baléares composaient presque toujours l'avant-garde. On rapporte que ces insulaires étaient exercés à la fronde dès leur enfance et

qu'on ne leur donnait à manger que quand ils abattaient leur pain placé au haut d'une perche; rien ne résistait à la vigueur avec laquelle ils lançaient des balles de plomb qui enfonçaient casques et cuirasses. Ils avaient chacun trois frondes: l'une à la main, une seconde pendant au col, une troisième nouée autour du corps. Ils étaient ordinairement précédés par les éléphans. Dans les premiers temps, Carthage se servait aussi de chars armés de faux: elle en eut 2,000 dans la guerre contre Agathocle. Les cavaliers numides étaient répartis sur les ailes de l'armée; on les a comparés aux Parthes et aux Cosaques. Ils n'étaient pas uniquement Numides: les Massyliens, les Massagyliens, les Maurussiens, les populations nomades des Syrtes, et surtout les Lotophages et les Nasamones, fournissaient de nombreux contingens. En marche, les Carthaginois et les Libyens étaient en avant, les Numides en arrière, les Espagnols et les Gaulois, ainsi que les autres mercenaires, étaient entre eux; une discipline sévère était observée dans les camps, qui paraissent avoir été construits absolument comme ceux des Romains. Aristote dit qu'il était défendu d'y boire du vin; mais il ne faudrait pas prendre cette indica

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Commerce. Carthage voulait conserver le monopole du commerce: aussi la vit-on tenir ses colonies dans un état de stricte dépendance, et d'autre part apporter beaucoup de mystère dans ses opérations; de là ces prohibitions dans le traité avec Rome de naviguer au-delà des Syrtes. On ne voulait pas que les transactions commerciales avec l'intérieur du pays pussent avoir d'autres intermédiaires; il fallait que Carthage en demeurat l'entrepôt. Les relations des Syrtes s'étendaient jusque dans la Haute-Égypte, à Thèbes; c'est là qu'Hérodote recueillit des renseignemens sur l'intérieur de l'Afrique, et peut-être interrogea-t-il des marchands carthaginois; ils allaient sans doute aux oasis appelées Augila et Ammonium. Hérodote dit positivement que les Nasamones venaient faire la récolte des dattes à Augila, et des Cyrénéens lui apprirent que les Nasamones visitaient aussi l'Ammonium. On peut conclure des assertions de cet historien que les Carthaginois pénétrèrent assez loin dans l'intérieur de l'Afrique et notamment dans le Fezzan (Fazania). Il faut qu'il ait existé une route de caravanes conduisant depuis le pays des Lotophages chez les Garamantes qui habitaient alors le Fezzan. Cela est d'autant plus vraisemblable qu'aujourd'hui encore il y a une route de ce genre qui part de Tripoli, située dans l'ancien pays des Lotophages, et qui suit la même direction. Ce qu'on cherchait dans ce pays, c'était principalement des esclaves éthiopiens; de nos jours on y fait encore la chasse aux nègres. On en rapportait aussi des pierres précieuses que les Carthaginois vendaient en si grande quantité dans le nord et dans l'ouest que ces pierres furent appelées de leur nom (Quos et carchedonios vocant, a dit Pline, propter opulentiam Carthaginis

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