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à | chaos, semblent prêts à se détacher à chaque instant. Plusieurs peintres de décors en ont fait, dit-on, un objet d'étude.

chargé de cette surveillance de 1810 1830. Ses soins et son activité ont contribué beaucoup à amener les travaux au point de perfection où ils sont parvenus, et qui offre, dans toutes les parties importantes, une sécurité complète.

On pénètre dans ces carrières par plusieurs entrées, dont la principale s'ouvre dans un des pavillons de la barrière d'Enfer. Leur profondeur est ici de 19m, tandis qu'elle n'est guère que de 6m à 7 à la descente de la rue du Pot-deFer. Au moyen du système de soutènement qui a été adopté et dont nous ne pouvons donner ici qu'une idée fort imparfaite, il existe sous chacune des rues portant sur les anciennes carrières, une ou deux galeries latérales, répondant aux rangées de maisons de droite et de gauche, et communiquant entre elles par des traverses. Les murs et voûtes de ces galeries sont construits en moellons extraits dans le voisinage et jetés par des trous communiquant au jour, qu'on appelle puits de service. Un assez grand nombre d'autres puits, dépendant des maisons sous lesquelles s'étendent les carrières, descendent jusqu'au fond des travaux et offraient ainsi un moyen de communication dont les contrebandiers ont profité plus d'une fois, mais qui leur a été depuis long-temps enlevé.

Ces carrières, autrefois ouvertes au public au moyen de billets et dont l'accès est maintenant tout-à-fait interdit, présentent divers objets faits pour piquer la curiosité. On avait surtout soin de faire remarquer aux étrangers une représentation de la citadelle de PortMahon, exécutée par un ouvrier, ancien soldat, qui avait assisté à la prise de cette ville sous le maréchal de Richelieu, en 1756, et qui, sans autre guide que ses souvenirs d'une longue captivité, employa pendant cinq ans le temps de ses repas à exécuter ce vaste relief. Il périt, peu après l'avoir terminé, par suite d'un éboulement.

Un amas confus de débris énormes appelle ensuite les regards. Ces fragmens, à demi brisés par un autre éboulement dont la date est déjà fort ancienne et que contient une faible pierre placée comme clé de voûte au milieu de ce

Mais ce que ces carrières offrent de plus remarquable est, sans contredit, la portion placée sous le lieu dit la TombeIsoire, près de la route d'Orléans, et décorée du nom un peu prétentieux de Catacombes (voy.), qui rappelle trop bien les célèbres sépultures de Naples et de Rome, si vantées par les voyageurs. Celles que nous décrivons n'ont pas servi d'ailleurs au même usage: on y a seulement déposé les ossemens retirés à diverses époques des cimetières de Paris, à partir de l'année 1786. M. De Crosne, dernier lieutenant de police, eut le mérite d'avoir fait exécuter les travaux préparatoires et le transport des ossemens dans les vieilles carrières de la TombeIsoire, ce qui (à cette époque surtout) offrait des difficultés de plus d'un genre. Les premiers qu'on y déposa provenaient du grand cimetière des Innocens, dont la suppression, bien souvent demandée par les habitans d'un quartier populeux, où ce foyer perpétuel d'infection donnait lieu à de fréquentes épidémies, fut enfin décidée à cette époque. Bientôt après, les journées désastreuses des premiers temps de la révolution, le combat du 10 août, et surtout les massacres de septembre, amenèrent dans ce même lieu les corps de plusieurs milliers de victimes récentes, au milieu des débris de tant de générations oubliées. Aujourd'hui même on y transporte encore, de temps à autre, les débris humains trouvés dans les fouilles de quelques vieux bâtimens ou d'anciens cimetières, etc. Des calculs, peut être exagérés, représentent cette population souterraine comme étant trois fois plus nombreuse que celle qui habite aujourd'hui la surface du sol.

Dans le but seulement de leur faire occuper un moindre espace, ces ossemens avaient d'abord été rangés symétriquement en piles, de chaque côté des galeries, avec des cordons de têtes à diverses hauteurs. De nombreuses inscriptions placées sur ces piles rappellent le néant de la vie et l'espoir d'un plus heureux avenir. On imagina plus tard de

eux une lutte quelquefois sanglante. Dans
les carrousels, il ne s'agissait que de dé-
per-ployer la force et l'adresse nécessaires pour
obtenir une victoire toute pacifique, dont
aucun accident funeste ne venait dimi-
nuer le prix. Suivant le P. Ménestrier, qui
a publié un traité spécial sur les tournois,
joûtes et carrousels, ces spectacles, tou-
jours pompeux et donnés dans des occa-
sions solennelles, se composaient d'une
suite d'exercices à cheval, exécutés par
divers quadrilles (voy.), entremêlés de
représentations tirées de la fable ou de
l'histoire, et où figuraient des machines
ingénieuses, introduites par les Italiens
qui y excellaient. On s'y exerçait surtout
à courre des bagues ou des tétes, c'est-
à-dire, à enlever, à la pointe de la
lance ou de l'épée, une suite d'anneaux
suspendus (d'où est venu notre jeu de
bagues, voy.) et des têtes de carton, repré-
sentant d'ordinaire des Maures ou des
Turcs. Ce dernier genre d'exercice, connu
seulement en France sous Louis XIV, a
été, dit-on, inventé par les Allemands,
au temps de leurs guerres avec la Turquie.
Il est par conséquent assez moderne.

On ne peut reporter l'origine des car-
rousels proprement dits, du moins en
France, au-delà du règne de Henri IV.
Il y en a eu de fort brillans sous Louis XIII;
ils doivent être regardés comme une dé-
génération des tournois et comme ayant
remplacé ces exercices dangereux, à
peu près abandonnés après la fin tragi-
que
de Henri II. Ils étaient un peu plus
anciens en Italie (voir le Théatre d'hon-
neur de la Colombière). On ne doit pas
s'arrêter à l'opinion de quelques écrivains
qui ont fait remonter les carrousels à la
plus haute antiquité et qui désignent sous
ce nom les fêtes des Grecs et des Romains,
et surtout les jeux du cirque. C'est aussi
des Italiens que nous est venu le nom
de carrousel, dérivé, suivant l'opinion la
plus raisonnable, de carroselo ou de car-
rozze (d'où carrosse), désignant les chars
employés souvent dans ces solennités.

former, avec ces mêmes débris, des autels funèbres, des croix et autres ornemens en rapport avec les localités. Des sonnes d'un goût sévère ont blåmé cette espèce de recherche, et cet emploi de matériaux semblables dans des constructions, dont au reste la plupart ont dépuis long-temps disparu.

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Sur le côté d'une des galeries, M. de Thury, qui a fait exécuter la presque totalité des travaux dont on vient de parler, a établi une collection géologique, disposée sur une suite de gradins offrant la coupe verticale des Catacom bes, depuis le sol supérieur jusqu'au terrain de craie qui compose le fonds du bassin de Paris. On y voit des échantillons de tous les bancs de pierre reconnus sur cette hauteur d'environ 38, et dont plusieurs fournissent des matériaux de construction d'excellente qualité; la même suite offre des fragmens assez volumineux de l'ancien aquéduc romain, qui conduisait les eaux d'Arcueil au palais des Thermes de Julien. Une collection d'un genre tout différent, mais non moins curieuse, est celle d'anatomie pathologique, offrant un cheix fait dans les Catacombes même, des ossemens qui, par leurs dimensions et leurs divers accidens, peuvent fixer l'attention des hommes de l'art.

Il y a environ 20 ans, les Catacombes étaient devenues l'objet d'une curiosité très vive, en quelque sorte un but de promenade à la mode. En 1814, les officiers et généraux des armées alliées s'empressèrent de les visiter. On raconte que l'empereur d'Autriche s'arrêta longtemps devant une inscription italienne, gravée sur l'un des piliers et tirée des Nuits clémentines, où l'on remarque les deux vers suivans:

E poichè andar del mortal fango scarchi Che distingue i pastor dai gran monarchi. C. N. A. CARROSSE, voy. Voitures. CARROSSIER, voy. SELLIER. CARROUSEL, espèce de jeu militaire que l'on a quelquefois confondu à tort avec les tournois. Dans ceux-ci (voy.), dont l'origine est beaucoup plus ancienne, chaque chevalier se choisissait un ou plusieurs adversaires, et il s'établissait entre

|

Deux carrousels célèbres furent donnés par Louis XIV: en l'honneur de Mlle de La Vallière, à Paris en 1662, et à Versailles deux ans plus tard (voir le Siècle de Louis XIV et les œuvres de Molière). Les seigneurs de la cour déployèrent,

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Pendant la tourmente révolutionnaire qui bouleversa la France et fit suspendre tous les travaux d'arts, le ciseau de Cartellier obtint quelques encouragemens : dans l'église de Sainte-Geneviève, transformée en Panthéon français, il décora deux des pendentifs de la coupole des figures de la Force et de la Victoire, qui disparurent plus tard, ainsi qu'un basrelief représentant la Nature, appuyée sur la Liberté et l'Égalité. On cite aussi avec distinction les deux figures en árrière-corps de la façade du midi du Luxembourg représentant la Vigilance et la Guerre; la statue de Vergniaud, qui décorait le grand escalier de ce palais; celle d'Aristide, placée dans la salle des séances de la Chambre des pairs. Aux ouvrages d'une époque plus heureuse pour Cartellier appartient sa charmante figure de la Pudeur, exécutée en marbre en 1808 pour la Malmaison, sur le modèle qu'il en avait exposé au salon de 1800; les statues de Bonaparte onsul, de Napoléon-empereur, de Louis Bonaparte, en costume de grand connéCARTE, voy. CARTES. table, de Walhubert, de Montebello à CARTE-BLANCHE, voy. BLANC cheval. Son bas-relief de la Gloire disSEING et POUVOIR (plein). CARTEL, voy. DUEL. CARTELLIER (PIERRE), sculpteur parisien, né en 1757 et mort en 1831, fut de bonne heure inspiré par le génie des arts. Mais il eut à lutter, une grande partie de sa vie, contre les embarras d'une position sociale contraire à ce que réclame l'étude longue et difficile du dessin. Pendant long-temps il n'eut d'autres leçons que celles données à l'école gratuite de dessin aux enfans destinés à des professions industrielles. Ses parens, ayant fini par reconnaître en lui une vocation décidée pour la sculpture, firent abnégation de leur propre intérêt et placèrent le jeune Cartellier chez Ch. Bridan, statuaire et membre distingué de l'ancienne académie. Cependant la mort prématurée de son père l'obligea de nouveau de se livrer à des travaux subalternes et obscurs pour subvenir aux besoins de sa mère et aux siens. Ses études furent ralenties, et, dans trois concours pour le prix de Rome, il eut la douleur d'échouer.

tribuant ses couronnes, placée au-dessus de la principale porte du Louvre, cité avec tant de distinction dans le rapport sur les prix décennaux, mit le sceau à sa réputation. Parmi les autres ouvrages de Cartellier nous ne pouvons passer sous silence le bas-relief de la Capitulation d'Ulm à l'arc de triomphe du Carrousel; le Louis XIV, statue équestre du frontispice de l'hôtel des Invalides; le Louis XV en bronze, sur la place de Reims, et sa Minerve faisant naître l'olivier, au château de Versailles.

Pour avoir été exécutés loin de l'Italie, les ouvrages de Cartellier n'en sont pas moins empreints du vrai sentiment de l'antique, et si quelques-uns n'ont pas toute la sévérité de style des chefs-d'œuvre grecs, ils ne le cèdent point à la plupart de ceux sortis du ciseau d'artistes qui, plus heureux que lui, ont pu recevoir, dans le pays des arts, toutes les inspirations qu'il fait naître.

Les récompenses et les honneurs dus au mérite n'ont point manqué à Cartellier: il fut nommé membre de la Légion

dans ces deux occasions, un luxe inouï et cherchèrent à s'effacer mutuellement par la magnificence de leurs costumes antiques ou chevaleresques, et le choix de leurs devises composées par Benserade. L'emplacement où la dernière de ces deux fêtes eut lieu, en face du château des Tuileries, a retenu le nom de Place du Carrousel.

Cette espèce de divertissement s'est renouvelée, même à des époques assez modernes. Il y eut un très beau carrousel à Berlin, en 1750, où se distingua le prince Henri, frère du grand Frédéric. En1828, l'école de cavalerie de Saumur donna à Mme la duchesse de Berry une fête de ce genre. Les officiers, avec l'uniforme particulier de leur arme, se livrèrent à divers jeux d'adresse et d'équitation, et les mieux faisans reçurent le prix des mains de la princesse. Elle y trouva un si grand plaisir qu'elle fit recommencer la fête le lendemain matin, au moment de son départ, ce qui n'était peut-être jamais arrivé à aucun spectacle de ce genre.

C. N. A.

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CAR

(8)

d'Honneur en 1808, de l'Académie en |
1810, professeur à l'école royale des
Beaux-Arts en 1816, chevalier de l'or-
dre de Saint-Michel en 1824. L. C. S.

CARTERET (PHILIPPE), navigateur anglais du XVIIe siècle, connu dans les annales de la marine britannique par un voyage de découvertes fait autour du globe, pendant les années 1766, 67, 68 et 69,en partie de conserve avec le capitaine Wallis. On ignore d'ailleurs les autres circonstances de sa vie et même l'époque de sa mort; les biographies anglaises ne fournissent aucun renseignement à cet égard. CARTES A JOUER. L'invention J. M. C. des cartes à jouer, comme la découverte de l'Amérique, a été long-temps attribuée à un homme qui avait seulement su l'exploiter habilement. Personne ne mettait en doute que Jacquemin Gringonneur, peintre français du xiv° siècle, n'eût le premier imaginé ces petits cartons peints, pour amuser les instans lucides de la démence de Charles VI. Mais deux savans littérateurs du siècle dernier, l'abbé de Longuerue et l'abbé Rive, ont prouvé, dans leurs dissertations, que le jeu de cartes était autérieur au règne de ce prince. Une pièce authentique qui le démontre, c'est un acte d'un concile de Cologne, d'une date plus ancienne, qui défendait ce jeu aux ecclésiastiques. Si le nom du véritable inventeur est resté inconnu, il paraît certain au moins que c'est en Italie, et vers le commencement du xive siècle, que les cartes parurent pour la première fois. D'après les recherches de l'abbé de Longuerue, elles avaient alors 7 à 8 pouces de longueur (comme celles qui sont connues aujourd'hui sous le nom de tarots), et les figures représentaient un pape et des empereurs.

Jacquemin Gringonneur ne fut donc que l'importateur des cartes qui, en effet, furent d'abord destinées à distraire le roi Charles VI dans les intervalles de sa folie. Une somme considérable l'époque fut affectée par la chambre des pour comptes au paiement du premier jeu confectionné par l'artiste. Gringonneur, toutefois, ne se borna pas tion servile: en transportant ce nouveau une imita

CAR

jeu dans sa patrie, on peut dire qu'il le
naturalisa français par le choix des figu-
res qu'il substitua aux anciennes. Plus
perfectionna encore lui-même son in-
tard, sous le règne de Charles VII, il
vention prétendue et assigna à ces figu-
jourd'hui. Ainsi David, le roi de pique,
res les noms qu'elles portent encore au-
fut l'emblème de Charles VII, également
tourmenté par un fils ingrat, et le roi
l'un de nos plus illustres monarques. Ar-
de cœur prit le nom de Charlemagne,
gine (anagramme de Regina) figura, dans
la dame de trèfle, la reine Marie, épouse
que, la vaillante pucelle d'Orléans; Ra-
du prince régnant; Pallas, dame de pi-
chel, dame de carreau, la tendre Agnès
Sorel, et la dame de cœur, Judith, la plus
valets, dans l'origine varlets (ce qui ré-
que galante Isabeau de Bavière. Les quatre
pondait à peu près au titre d'écuyers),
furent quatre vaillans capitaines, Ogier
et Lancelot sous Charlemagne, Hector
de Gallard et La Hire sous Charles VII.
Le reste du jeu offrait une sorte d'allé-
gorie guerrière dans le goût du temps.
le pique et le carreau (voy.) représen-
Le cœur était l'emblème de la bravoure,
fourrages et munitions. L'as (voy.), enfin,
taient les armes; le trèfle, les vivres,
était, dans sa signification latine, ce qu'on
guerre, c'est-à-dire l'argent.
a toujours considéré comme le nerf de la

trie un legs qui, sans doute, a beaucoup
Le peintre Gringonneur a fait à sa pa-
contribué à dissiper l'ennui des oisifs,
et à varier les distractions de nos
temps fourni un aliment de plus à la fu-
cercles; il est fâcheux qu'il ait en même
neste passion du jeu. Le fisc lui doit bien
aussi quelque reconnaissance: il a, de
nos jours, établi un impôt sur les cartes,
impôt, sans contredit, le plus moral de
tous, et qui n'est pas le moins productif.

quelques différences qui existent entre
Nous indiquerons ici succinctement
les cartes dont on fait usage en France
et celles des autres nations principales
de l'Europe. P
écrivains, elles ont été connues avant de
En Angleterre, où, suivant quelques
il sa ob 97933
l'être chez nous, on se sert dans la so-
ciété de deux sortes de cartes à jouer.
Les
unes, plus hautes et plus larges d'un

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tiers que les nôtres, offrent aussi des figures de rois, de reines, etc., beaucoup plus grosses, et par-là même encore plus grotesques. Aucune d'elles, en outre, ne porte les noms de David, Pallas, etc., qu'on lit sur les nôtres, et nul autre nom n'y a été substitué. Dans l'autre sorte de cartes anglaises, les figures ont deux tê-❘ tes, l'une en haut, l'autre en bas, de sorte que le joueur n'est point obligé de les retourner; innovation tout-à-fait dans les goûts d'un peuple ami de ses aises et du confortable.

|

En Allemagne, les cartes ont conservé quelques teintes du moyen-âge : aux rois, aux reines, aux valets, ou varlets, on a ajouté une quatrième sorte de figures, les chevaliers. Un jeu entier, qui n'est chez nous que de 56 cartes, en contenait long-temps 64 dans ce pays, et les 21 à-tous qu'il renfermait avaient pour désignation le diable, la mort, etc., etc.

La différence la plus notable entre Dos cartes et celles de l'Espagne et de l'Italie, c'est que, dans ces deux contrées, nos quatre couleurs, cœur, trèfle, pique, carreau, sont remplacées par les quatre dénominations de coupe, denier, épée et baton. Les Italiens ont, de plus, leurs longues cartes, dites tarots, qui furent, dit-on, inventées chez eux dans la province de Taro, en Lombardie, et dont on fait souvent usage pour le jeu en Pologne et en Russie. On sait que ces tarots, représentant les figures les plus bizarres, servent aussi chez nous à former ce qui s'appelle le grand jeu, parmi les devineresses et tireuses de cartes, encore assez nombreuses dans ce siècle de lumières (voy. CARTOMANCIE). Pour la fabrication des cartes, voy. l'article CARM. O. CARTES GÉOGRAPHIQUES. A en juger par le grand nombre de cartes géographiques répandues dans le commerce, on pourrait croire que rien n'est plus aisé que l'art de les dresser; mais les connaisseurs en trouvent si peu de bonnes, que l'on est forcé d'admettre qu'il existe dans cet art des difficultés dont il n'est pas donné au vulgaire de triompher. Beaucoup de gens, il est vrai, ne font consister le mérite des cartes que dans la netteté et l'élégance de la gravu

TIER.

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re, et malheureusement les amateurs de cette espèce sont en majorité; mais les gens en état d'apprécier dans leur véritable essence les qualités et les défauts de ce genre de productions s'attachent moins à ces beaux dehors qu'à la valeur intrinsèque des constructions géographiques, et leur nombre est si restreint que celui des cartographes qui puissent prétendre à leurs suffrages est naturellement aussi fort borné; car ce sont les applaudissemens du public qui déterminent l'émulation et le progrès.

Tâchons donc de montrer aux gens du monde où sont les difficultés, et par conséquent où est le véritable mérite des cartes géographiques, afin que leur discernement éclairé, faisant justice de tant d'œuvres médiocres (quelque beauté matérielle dont elles se parent d'ailleurs), apprenne aux éditeurs que les intérêts du commerce cartographique ne se trouvent plus que là où sont aussi les intérêts de la science; et le charlatanisme du dessinateur, dont l'ineptie se cache sous le titre dérisoire d'ingénieur-géographe, n'étouffera plus, sous la multitude de ses indigestes plagiats, l'œuvre originale fruit des longues veilles du véritable géographe.

L'art de construire des cartes exige, dans l'homme qui prétend s'y livrer, un rare assemblage de connaissances, puisées à la fois dans le domaine des sciences exactes et dans les trésors d'une érudition profonde et spéciale; et ces provisions de savoir ne seraient encore que d'un mince secours si l'esprit de critique, avec ses qualités indispensables, une vive perspicacité et une grande rectitude de jugement, n'en venait féconder et régler l'usage. Un géographe accompli est un savant du premier ordre, et les noms à citer sont bien rares: Guillaume de L'Isle ouvrant la carrière; d'Anville la parcourant en entier, avec une gloire encore sans égale; Rennel régnant avec éclat sur un moindre domaine: voilà les princes de la géographie; après eux on a peine à trouver cet heureux concours de savoir et d'habileté. Voy, l'art. suivant.

La construction d'une carte géographique offre à considérer deux parties constitutives distinctes, la forme et le

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