Page images
PDF
EPUB

l'organisme s'en ressent. Chez les bêtes à cornes ces appendices ne se développent pas, non plus que la crête chez les gallinacées; la vigueur est singulièrement diminuée, mais on y trouve des avantages particuliers. On remarque que chez les volatiles les instincts changent à tel point que les chapons s'accoutument à conduire et à soigner les jeunes poulets aussi bien que le feraient leurs mères.

Les animaux châtrés prennent un nom nouveau: ainsi le cheval coupé devient hongre, le baudet áne, le taureau bœuf, le bélier mouton, et la brebis moutonne, le verrat cochon, la truie cochonne, le matou chat, le coq chapon, et la poule poularde.

Il a été question de châtrer les poissons dans les viviers pour leur faire acquérir plus de volume et pour rendre leur chair plus délicate; mais cette pratique ne s'est pas répandue, F. R.

CASTRIES (CHARLES-EUGÈNE-GABRIEL DE LA CROIX, marquis DE), maréchal de France, né en 1727, était, à l'âge de 16 ans, lieutenant au régiment du roi, infanterie. Dans les campagnes de Flandre, il commanda le régiment du roi, cavalerie, où il était alors mestre-de-camp. Il était maréchal-de-camp lorsqu'il commanda en Corse (1756). Il passa ensuite à l'armée d'Allemagne et fut blessé à la bataille de Rossbach. Ses services, dans la campagne de 1758, le firent nommer lieutenant-général; l'année suivante, il se trouva à la bataille de Minden, comme mestre-de-camp général de la cavalerie. Il servit encore en Allemagne en 1760, s'y distingua de nouveau, fut chargé de commander sur le Bas-Rhin, remporta sur les ennemis la victoire de Clostercamp et les força de lever le siége de Wesel. Le prince héréditaire de Brunswic commandait l'armée ennemie. Cette action importante fit beaucoup d'honneur au marquis de Castries, qui fut nommé chevalier des ordres du roi et qui continua de servir avec éclat dans les campagnes de 1761 et 1762. Il fut depuis nommé commandant en chef de la gendarmerie, gouverneur-général de la Flandre et du Hainaut, ministre de la marine en 1780, et maréchal de France en 1783. Au commencement de la ré

[ocr errors]

volution, il sortit de France et chercha un refuge auprès du duc de Brunswic, qu'il avait jadis combattu. Il commandait, en 1792, une division dans l'armée des princes, lorsque les étrangers envahirent la Champagne. Il mourut en 1801, à Wolfenbuttel, et fut enterré à Brunswic, où le duc fit élever un monument en. l'honneur de son vainqueur à Clostercamp. A. S-R.

Le fils du précédent, ARMAND-AUGUSTIN-NICOLAS DE LA CROIX, duc de Castries, pair de France, lieutenant-général, né en 1756, s'est fait connaître aux États-Généraux de 1789, surtout par son duel avec Charles de Lameth, provoqué par les opinions politiques. Il émigra dans la suite, leva, au service de l'Angleterre, un corps d'émigrés qui fut envoyé en Portugal (1795), et rentra en France en même temps que les princes de la famille de Bourbon. S. CASTRIOTA, dit Scanderberg, voy. SKANDerbeg.

CASTRO, voy. INÈS.

CASTRO (GUILhen ou Gislen de), naquit à Valence dans le xv1° siècle; sa vie offre peu de détails intéressans. Contemporain de Lopez de Vega, il cultiva, comme lui, la littérature dramatique; les critiques espagnols, sans le placer aussi haut que Lopez, le regardent comme un de leurs bons auteurs, et Lopez lui-même l'a loué dans son Laurier d'Apollon. It est surtout connu en France par sa tragédie du Cid, où se trouvent, en germe, la plupart des beautés que Corneille a depuis si heureusement développées; avant lui, Diamante avait déjà traité ce sujet, et quoique bien inférieur à Guilhen, il a fourni aussi quelques emprunts à Corneille. La pièce de Guilhen est intéressante, malgré beaucoup d'invraisemblances et de longueurs. On y trouve le rôle de l'Infante conservé dans le Cid français, et, de plus, l'éternel gracioso des pièces espagnoles. Guilhen avait composé une autre tragédie intitulée Didon y Eneas; mais elle n'a point été publiée dans le recueil de ses œuvres qu'on imprima en 1621 à Valence, sous ce titre : Las Comedias de D. Guilhen de Castro, 2 vol. in-4°. Il y a une ancienne édition du Cid français, où les vers imités de

Corneille sont cités au bas des pages. Voltaire les a rapportés aussi dans son Commentaire. L. L. O. CASUEL. On appelle ainsi les honoraires ou rétributions accordées aux curés, vicaires ou desservans des paroisses, pour les fonctions de leur ministère, comme baptêmes, mariages, sépultures, etc., afin d'assurer leur subsistance. Dans la primitive église, ses ministres ne subsistaient que des oblations volontaires des fidèles, et tout leur revenu était casuel (voir Gibbon, Histoire de la Décadence de l'empire romain, chap. xv). Lorsque le clergé est devenu propriétaire, on n'a point aboli le casuel, parce qu'on n'a pas cru devoir empêcher la générosité des fidèles, mais on a mis des bornes à l'avidité des prêtres; de là cette multitude de canons contre les abus que l'on faisait de la permission qui avait été laissée aux ecclésiastiques de recevoir les oblations volontaires des fidèles dans l'administration des sacremens. Quelques réformateurs ont tenté de supprimer le casuel, mais ils ont senti l'impossibilité d'en venir à bout. Généralement on s'est borné à exiger des évêques qu'ils fissent un tarif* de ce qu'il était permis aux prêtres de recevoir pour les baptêmes, les mariages et les sépultures, et qu'ils le soumissent à l'approbation de l'autorité civile ou judiciaire. J. L.

CASUISTE, théologien dont les études ont pour objet de résoudre les cas de conscience, c'est-à-dire les questions relatives aux devoirs de l'homme et du chrétien; d'éclairer les doutes qui s'offrent à l'esprit de ceux qui les consultent, sur la légitimité et la régularité de leurs actions; de redresser leurs fautes ou leurs erreurs, et de déterminer la juste réparation du préjudice qui peut en avoir été la conséquence.

Il exista sans doute des casuistes qui furent de bons conseillers, des hommes instruits et vertueux, qui enseignèrent

(*) Dans plusieurs diocèses,et notamment dans celui de Paris, les fidèles ne paraissent pas avoir beaucoup gagné à ce que les actes du minis tère des autels fussent tarifés. On s'est souvent récrié sur l'énormité du tribut levé sur les habi

tudes religieuses de la population de la capitale et perçu pour le clergé des paroisses par les fabriques. J. H. S.

une morale pure, conforme aux précep→ tes de l'Évangile, et qui pratiquèrent religieusement ce qu'ils enseignaient; mais les écrits d'un grand nombre des plus renommés d'entre eux, dont la plupart appartinrent à une société qui s'est rendue fameuse, leurs doctrines accommodantes et leur conduite relâchée, élevèrent une rivalité funeste avec les sages maximes et les exemples pratiques des premiers. Ils y enseignèrent l'art de conserver les apparences du bien en faisant le mal; celui d'employer les restrictions mentales comme un moyen innocent de fausser ses engagemens ; qu'il était quelquefois permis de mentir, de voler même, de calomnnier et d'assassiner.... Et leurs enseignemens produisirent leurs fruits. Joignant au précepte un exemple pernicieux, ils usèrent pour leur propre compte des facilités que leur donnait leur morale corrompue, en essayant de concilier la soif des richesses qui les dévorait avec leur vœu de pauvreté, leur vœu d'obéissance avec l'ambition de dominer, leur vœu de chasteté avec un penchant qui est suivant l'ordre de la nature. Ceux qui avaient écrit cette affreuse maxime: Justum necare reges impios, durent armer du poignard homicide la main des assassins des rois; ceux qui s'étudiaient à trouver des raisons pour justifier les actes les plus monstrueux, les plus coupables, durent qualifier de rigueurs sages et salutaires les massacres de la Saint-Barthélemy; ils durent appeler la Ligue une sainte entreprise, et conseiller la révocation de l'Édit de Nantes.

Les casuistes se sont surtout multipliés et ils ont joui d'un grand crédit dans les temps d'ignorance et de superstition; mais leur nombre et leur autorité ont progressivement diminué lorsque les lumières se sont répandues, lorsque la pratique de la morale a été substituée, dans nos mœurs, aux pratiques superstitieuses, à la faveur desquelles on prétendait effacer les fautes et les injustices reprochées la conscience. par J. L. C. CASUISTIQUE. Casuiste, comme on vient de le voir, est le nom donné dre les cas de conscience ou prescrivent aux théologiens qui enseignent à résouà la raison le parti qu'elle doit prendre

dans toutes les occasions où la règle à suivre n'apparaît pas clairement. Leur science et l'ensemble de leurs décisions s'appellent casuistique. Mais ce mot a passé de la théologie à la philosophie. Aujourd'hui il désigne également cette partie de la morale qui traite de l'importance relative de nos devoirs, en établissant des règles pour la décision des cas où il y a entre eux quelque conflit. Le mot est nouveau dans cette acception, la chose ne l'est pas. On trouve déjà dans le Traité des devoirs de Cicéron plusieurs cas embarrassans proposés et résolus par les stoïciens; ceux-ci, par exemple: Un fils, sachant que son père pille le temple ou le trésor public, doit-il en avertir les magistrats? Deux naufragés rencontrent une planche qui n'en peut sauver qu'un : que doit faire chacun d'eux ? En vendant un esclave est - on tenu de déclarer ses

défauts ?

Les casuistiques religieuses connues ont le défaut de renfermer une foule de cas

inventés à plaisir et qui probablement ne se réaliseront jamais; souvent aussi elles mettent en parallèle les devoirs sacrés de la morale avec des devoirs secondaires ou de pure surérogation. On lit dans la casuistique juive: Si le jour du sabbat le bœuf du voisin tombe dans un

puits, est-il permis de l'en tirer? Chez un peuple où la religion impose aux consciences sa casuistique, celle-ci peut devenir une arme terrible entre les mains

d'une secte ambitieuse, qui, au lieu de réponses conformes à la religion et à la saine morale, dicte des décisions fallacieuses et intéressées.

Toutes les morales philosophiques complètes devraient avoir leur casuistique; c'est encore pour la plupart d'entre elles un desideratum. L-F-T.

CATACHRÈSE. Ce mot dérivé du grec (χρῆσις, usage, κατάχρησις, mauvais usage, abus) sert à désigner un trope ou une figure de rhétorique par laquelle on emploie un mot impropre à la place du mot propre, ou qui marque l'extension que l'on donne à la signification d'une expression pour rendre une idée qui manque de termes propres. On sait qu'il n'y a point de langues assez abondantes pour fournir les mots représentatifs de

Encyclop. d. G. d. M. Tome V.

chaque idée particulière, et on est souvent obligé d'avoir recours à l'expression de l'idée voisine de celle qu'on veut faire entendre. Par exemple, l'on dit que des chevaux sont ferrés d'argent, lorsqu'on attache sous leurs pieds une armure d'argent au lieu d'une armure de fer. L'eau gelée présente une surface unie que l'on appelle glace; et, par extension, on nomme glace le verre poli d'un miroir, etc. La catachrèse, qui règne en quelque sorte sur toutes les autres figures, mérite une attention particulière. Il y en a de deux espèces: 1° celle qui se fait lorsqu'on donne à un mot une signification éloignée, qui n'est qu'une suite de la signification primitive: c'est ainsi que succurrere veut dire secourir, prévenir; petere, demander, attaquer; animadvertere, observer, punir; ce qui peut souvent se rapporter à la métalepse (voy. MÉTALEPSE); 2o celle qui n'est proprement qu'une métaphore, comme lorsqu'il y a imitation ou comparaison, quand on dit ferrer d'argent, feuille de papier, feuille d'or, etc. A proprement dire, la catachrèse n'est qu'une sorte de métaphore, puisque c'est le rapport de ressemblance qui est le fondement de ces deux figures, avec cette différence néanmoins qu'on n'a recours à la première que par nécessité, quand on ne trouve point de mot propre pour exprimer ce qu'on veut dire, au lieu que les. autres métaphores se font par d'autres mouvemens ou par des tours différens de l'imagination, qui ont de même toujours la ressemblance pour principal fondement. Voy. MÉTAPHORE. F. R-D.

CATACLYSME. Ce mot, dérivé du grec, signifie inondation; il est spécialement employé dans le langage scientifique pour désigner ces grandes révolutions physiques qui sous le nom de déluges, sont restées dans le souvenir de tant de peuples différens qu'il est difficile de soutenir que ce ne sont que des traditions erronées ou mensongères. Les Chinois, les Persans, les Chaldéens, les Grecs et d'autres nations en comptent un nombre plus ou moins grand, avec des circonstances analogues à celles dont il est fait mention dans le livre de la Genèse. Voy. DÉLUGE.

Les dépôts de cailloux roulés et d'é

7

normes fragmens arrondis de diverses | espèces de roches constituent ce que nous appelons le terrain diluvien. Le transport de ces cailloux et de ces blocs, qui n'ont certainement été arrondis que par l'action d'un frottement rapide, ne peut être que l'effet d'un violent cataclysme (voy. CAILLOUX). Quelques-uns des blocs dont nous parlons ont jusqu'à 20 mètres de longueur sur 3 ou 4 d'épaisseur : on leur a donné le nom de blocs erratiques. Leur transport est dû à une grande catastrophe dont rien de ce qui se passe aujourd'hui sur la terre ne peut donner une idée.

Norvège, puisque la Norvège est la contrée la plus proche où l'on trouve en place les roches dont ils sont formés. Des blocs erratiques semblables se font également remarquer en Écosse; sir James Hall y a même reconnu les traces d'un courant qui a traversé tout le pays et qui a signalé son passage par des espèces de sillons creusés dans les couches solides par le choc des masses qu'il transportait avec rapidité. Aux environs d'Édimbourg, le courant paraît avoir agi dans la direction de l'ouest. Mais on conçoit fort bien que, dans plusieurs localités, différens obstacles, tels que la direction de certaines vallées, auront pu modifier l'action du courant venu du nord, de sorte qu'il s'est formé des courans partiels qui ont disséminé les débris charriés dans des directions qui dé

Il a fallu du temps avant que les savans se déterminassent à reconnaître dans ces caractères les résultats de quelque terrible cataclysme. Quelques-uns, tels que Béroldingen, et plus récemment Muncke, ont prétendu que les blocs erratiques disper-viaient plus ou moins de la direction gésés çà et là dans le nord de l'Europe ont été formés où ils se trouvent; d'autres, que ce sont les restes d'une chaîne de monta

gnes qui, dans les temps les plus reculés, existait au milieu de ces contrées sablonneuses; d'autres ont pensé que ces masses de rochers ont été soulevées par un phénomène volcanique; d'autres encore ont prétendu qu'elles avaient pu être détachées d'un corps céleste; d'autres enfin, et c'est aujourd'hui le plus grand nombre des géologistes, les considèrent comme ayant été arrachées à des montagnes plus ou moins éloignées.

La première de ces opinions est inadmissible, puisque ces blocs ne sont pas tous formés de roches de la même époque, et que d'ailleurs leurs angles arrondis annoncent un transport lointain; leur origine volcanique ne mérite pas plus d'être réfutée que celle qui les fait venir d'une planète. Quant à l'opinion la plus probable, qui les considère comme ayant été arrachées à des montagnes plus ou moins éloignées, elle est prouvée par une foule de faits.

[ocr errors]

nérale. Des faits analogues se font également remarquer dans les îles Shetland.

Mais si les blocs erratiques de ces îles, de l'Écosse et des côtes orientales de l'Angleterre font partie de la péninsule scandinave, on doit retrouver les mêmes roches de transport dans les parties du continent plus rapprochées de cette péninsule; on doit les retrouver aussi dans la Suède méridionale; on doit même pouvoir reconnaître les lieux d'où ils sont partis: c'est en effet ce que l'on remarque. Prenons-les d'abord à leur point de départ.

Dans la préfecture de Goteborg et Bohus, formée de l'ancienne province de Wester-Gotland, on remarque aux environs de Stromstadt, d'Hogdal et d'autres lieux, que les plateaux de gneiss et de granit sont composés de buttes arrondies ou de mamelons qui nous semblent déjà devoir cette forme à l'érosion des eaux. M. Al. Brongniart a remarqué que ces plateaux font voir de nombreux sillons placés à côté les uns des autres, de largeur et de profondeur assez inéga

Entre la Tamise et le Tweed, c'est-à-les, dont le fond et les parois sont unis, dire sur toutes les côtes orientales de l'Angleterre, notamment dans les comtés de Suffolk, Norfolk, York, Durham, Northumberland, et même dans celui de Derby, on trouve des blocs erratiques qui doivent avoir été transportés de la

lisses, presque polis, comme si, dit-il, on y eût passé à dessein ces masses dont on se sert dans plusieurs fabriques pour broyer, user ou polir différens corps durs. Ces sillons sont parallèles et constamment dirigés du nord-nord-est au

sud-sud-ouest. Ce parallélisme et cette direction se font justement remarquer dans les dépôts de transport partis de ces plateaux sillonnés.

Ces amas de débris de montagnes, comme les ont appelés presque tous les voyageurs qui les ont observés en parcourant la Suède, couvrent une grande étendue de pays. Ils sont tellement abondans dans certaines localités qu'ils y forment des collines longues, étroites, quelquefois hautes de 80 à 100 mètres, qui ressemblent à de longues chaussées sur lesquelles, dans beaucoup d'endroits, on a établi les voies de communication. | Elles sont composées en général de sable ou de gravier, de granit ou de quartz et de blocs de roches granitoïdes d'un à deux pieds de diamètre. M. Al. Brongniart compare ces traînées de transport aux petites collines de sable qui se forment dans les cours d'eau, au-dessous d'un corps solide qui modifie le courant, comme cela s'observe à la suite de grosses pierres qui se trouvent au fond des rivières, ou à la suite des piles des ponts, ou enfin à la suite des îles.

En général, nous le répétons, ces amas de sable et de cailloux, que les Suédois appellent oses, renferment peu de blocs d'un gros volume; ceux-ci n'ont signalé leur passage que par les sillons dont nous avons parlé; ils manquent précisé ment dans le voisinage des lieux d'où a émané la force qui les a chassés au loin, ainsi que cela doit être; car il faut distinguer ici l'effet des érosions sur le sol de la Suède, du même effet aux environs des Hautes-Alpes, où l'on retrouve aussi une innombrable quantité de blocs erratiques. En Suède, les courans ont traversé sur un plan incliné, sur un sol dépourvu de vallées, un espace d'autant plus considérable que la force d'impulsion a dû être plus grande. Dans les Alpes, les courans ont suivi le cours des vallées, où des bords profondément encaissés ont dû leur offrir des obstacles propres à ralentir la marche des grandes masses de roches.

Il résulte de ces faits que les montagnes de la Suède, montagnes plus de moitié moins hautes que les Alpes et composées de granit, de syenite et de calcaire

compacte, ont été démantelées par une cause violente; que cette cause a déterminé des courans qui ont suivi une marche uniforme et rapide jusque sur les côtes de la Grande-Bretagne, d'une part, et de l'autre jusque dans les plaines du Danemark, du Mecklenbourg, du Hanovre, de la Westphalie, de la Prusse et de la Pologne. C'est dans cette partie de l'Europe septentrionale qu'il faut aller observer les blocs erratiques qui ont traversé la Suède méridionale.

Le sol sableux du Danemark est couvert de ces blocs d'une énorme dimension : ils abondent aux environs d'Elseneur et de Copenhague; ce sont même les seules pierres de construction que l'on puisse y exploiter. Dans le Hanovre occidental et dans les environs de Groningue en Hollande, ces blocs sont enfoncés dans le sable que recouvrent souvent de vastes tourbières; et comme la pierre de construction y est rare, c'est à l'aide de la sonde que l'on va les chercher. Ce genre d'exploitation a fait voir que ces blocs ne sont jamais isolés, mais qu'ils sont réunis par groupes et que des espaces considérables en sont souvent dépourvus. La même disposition se fait d'ailleurs remarquer dans les plaines où ce dépôt diluvien est à découvert.

Si ce que nous avons dit des parties de la Suède d'où ces blocs sont sortis laissait encore quelques doutes sur l'origine de ceux-ci, nous pourrions faire remarquer que l'on reconnaît parfaitement dans les plaines allemandes qui bordent la Baltique des granits, des syenites, des calcaires et d'autres roches identiques avec celles des montagnes de la Suède et de la Norvège. On avait d'abord pensé que les blocs erratiques de la Pomeranie pouvaient venir des montagnes du Harz; mais M. Hausmann et plusieurs autres naturalistes ont fait voir que les roches granitiques renfermaient les mêmes substances minérales qu'en Suède et notamment la wernérite; enfin, ainsi que l'a fait judicieusement remarquer M. Brongniart, les débris organiques contenus dans les roches calcaires sont des caractères géologiques encore plus sûrs que les espèces minérales.

« PreviousContinue »