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guerre au comte de Bar, son beau-père, et fut fait prisonnier par lui, ainsi que ses deux frères. Ces princes furent sept mois prisonniers, et le comte leur fit la loi en leur donnant la paix. En 1212, Ferry fit le siége de Haguenau, pour l'empereur Frédéric II, son cousin, escalada les murailles de cette place et s'en rendit maître. De retour de cette expédition, il envoya cinquante familles de ses sujets repeupler la ville de Saint-Diey, qui ne s'était point encore rétablie depuis le grand incendie de l'année 1155. Ilmourut à Nancy en 1213, et fut porté à Stulzbronn où il reçut la sépulture entre son oncle et son père. La duchesse Agnès, morte en 1226, fut enterrée à Beaupré.

On croit que la boussole était connue dès ce temps là.

THIÉBAUT Ier.

Thiébaut Ier succéda en 1213 au duc Ferry, son père : il épousa Gertrude, fille unique d'Albert, comte d'Hapsbourg et de Metz. En 1214, il combattit avec l'empereur Othon à l'affaire de Bouvines, où Philippe-Auguste, roi de France, fut vainqueur. En 1216, l'empereur Frédéric II l'assiégea dans Amance, le fit prisonnier et le retint longtemps. Il revint languissant à Nancy, et y mourut en 1220. C'était le plus bel homme de son temps: il n'eut point d'enfants de la duchesse Gertrude d'Hapsbourg.

C'est à la mort du duc Thiébaut que s'éteignit la dignité de comte de Metz, qu'avaient eu jusqu'alors les ducs de Lorraine. Cette ville rentra dans la jouissance de tous ses droits, et l'autorité de sa noblesse et de ses échevins

fut considérablement augmentée.

Erard Deville était au temps de Thiébaut, lieutenant général au gouvernement du duché de Lorraine.

Ce fut aussi sous son règne, en 1215, que les Anglais obtinrent leur grande charte; époque du rétablissement de leur liberté.

MATHIEU II.

Mathieu II succéda en 1220 à son frère Thiébaut, mort sans enfants: il eut pour épouse Catherine, fille du duc de Limbourg. Il eut beaucoup de part aux grandes affaires de son temps, par la haute considération dont il jouissait en Europe, et fut souvent choisi pour arbitre des princes les plus puissants. En 1231 il accorda des franchises aux habitants de Neufchâteau. Le 12 juin 1232, il créa des tabellions ou notaires, qui seront chesi de plus idoines notables et grands parsonnaiges dudit duchie, et régla le droit de seil à quatre gros par cent francs. C'est à partir de cette époque que l'on vit les actes publics écrits en langue vulgaire, c'est-à-dire en français dans le roman pays et en allemand dans la Lorraine allemande. Précédemment les actes étaient écrits en langue latine. On plaça en 1240 l'histoire miraculeuse de Conon, comte de Réchicourt, qui s'étant trouvé en Palestine, dans les prisons et chargé de chaînes entre les mains des infidèles, invoqua saint Nicolas et se voua à lui; aussitôt il se trouva miraculeusement transporté avec ses chaînes à la porte de l'église du saint en Lorraine. Il est vrai seulement que le seigneur de Réchicourt, ayant obtenu sa délivrance, et étant revenu en Lorraine, a déposé ses chaînes à l'église de Saint-Nicolas. L'année 1241 est remarquable par l'association de plusieurs villes d'Allemagne pour le commerce: On les appelle villes anséatiques. Mathieu acquit Lunéville, Gerbéviller et d'autres terres en 1243; en 1245, le comte de Bar et lui terminèrent leur dispute sur le droit d'assigner le champ de bataille, pour duel entre gentilhommes. Ruyr, historien lorrain, parle encore d'un titre émané du duc Mathieu, en 1250, qui donna privilége et immunité aux mineurs qui travaillaient aux mines trouvées récemment au val de Galilée en Vôge, et principalement au vallon de la Croix. Ce prince mourut en 1251, pendant que saint Louis était en Egypte.

Au temps du duc Mathieu, il paraît que la piété com

mençait à entrevoir les actes de la véritable charité, et que les dons s'appliquaient déjà en fondations d'hôpitaux. Par une bulle donnée à Viterbe le 18 mars 1236, Grégoire IX mit l'hôpital de Lunéville sous la protection du Saint-siége, et le confirma dans tous les biens quilui appartenaient légitimement.

FERRY III.

Ferry III, fils de Mathieu II, commença de régner en 1251, sous la tutelle de Catherine de Limbourg sa mère : il épousa Marguerite, fille de Thiébaut I“, roi de Navarre, comte de Champagne, appelé le Troubadour. Ce prince donna ses soins à l'agriculture, et allégea le joug de l'esclavage,apportant à ce noble devoir une âme forte et sensible: en 1255 il affranchit définitivement les bourgeois de Neufchâteau et dix années après, mit sous les lois de Beaumont en Argonne, que nous avons eu soin de faire connaître précédemment, Nancy, Lunéville et la plupart des villes et bourgs des états dont il était seigneur. Les comtes de Bar et de Luxembourg en firent autant dans les lieux de leur obéissance. Tout conspirait alors contre la servitude en 1264 les communes eurent entrée au parlement en Angleterre; et les états furent consultés en France pour les choses qui intéressaient le peuple. Ce n'est point de l'anarchie et de la révolte, c'est de la bienfaisance de nos princes, ainsi qu'en France que naquit chez nous le bien inestimable de la liberté; de cette liberté sage, qui consiste dans le pouvoir de faire tout ce que permet la loi. Les habitants des lieux affranchis du pouvoir arbitraire des seigneurs devinrent sujets de l'Etat; ils purent comme nous l'avons dit, choisir entre leurs pairs des maires et des jurés pour rendre la justice; il leur fut permis d'acquérir, de vendre, de faire quelque commerce, et enfin de fonder la fortune roturière. En ce temps, Thiéry de Nancy était bailli de Nancy.

En 1270 saint Louis mourut de la peste devant Tunis;

les malheurs qui terminèrent son expédition éteignirent l'enthousiasme des croisades.

Rodolphe Ier, comte de Hapsbourg, de la maison d'Alsace, fut élu empereur en 1273; c'est en lui que commença la maison d'Autriche a laquelle celle de Lorraine devait se réunir au XVIII° siècle.

Ferry acheta les salines de Rosières, termina en Allemagne les différends de plusieurs grands princes; se trouva à Lausanne à l'entrevue du pape Grégoire X et de l'empereur Rodolphe; et fut presque toujours en guerre contre les évêques de Metz. Il vendit la Chatellenie de Longwy au comte de Bar, 28,000 livres de petits tournois. Jean, sire de Choiseuil, prit parti pour Ferry contre l'évêque de Metz; ayant été fait prisonnier en 1280, Ferry paya sa rançon fixée à 2000 livres. L'illustre maison de Choiseuil, déjà connue dans le Barrois, vint bientôt en Lorraine et s'allia aux Duchatelet. C'est dans ce temps que la maison de Ludres, originaire de Bourgogne, vint s'établir en Lorraine.

On a de Ferry une ordonnance du 5 février 1289, pour la punition des blasphèmes et de la simonie. En 1292 il fit construire un château à Plombières, afin de protéger les malades qui prenaient les eaux; il en confia la garde à son fils. L'empereur Albert lui accorda, en 1298, le droit de battre monnaie, il n'avait besoin de cette permission que pour donner cours à la sienne dans l'empire; il ne put obtenir qu'elle fût reçue en France. Ferry était à Vaucouleurs en 1299, avec l'empereur et Philippe-le-Bel, il y fit les fonctions de Marchis. Il prit le parti du roi de France contre Boniface VIII. Sa prison dans la tour de Maxéville est une fable. Il mourut le dernier décembre 1503, et fut enterré à l'abbaye de Beaupré. La duchesse Marguerite de Navarre, survécut. Son tombeau était aux dames Prêcheresses de Nancy.

C'est au temps de Ferry que Léonard de Pise apporta en Europe l'arithmétique et les principes de l'algèbre, c'est-à-dire, de l'usage des lettres dans le calcul, qu'il apprit des Arabes à Burgir, en Afrique. L'origine de la maison ottomane actuelle, date de 1299. L'invention des moulins à vent date de cette année; et celle des moulins à cau remonte à l'an 555.

Jacques, appelé de Ravennes, évêque de Verdun, jurisconsulte, né à Revigny en Barrois, se distinguait sous le règne de Ferry.

Les assises, ou l'audience des seigneurs dont nous avons déjà parlé, paraissent clairement du temps de Ferry. Ces audiences se tenaient à Nancy pour la Lorraine, à Mirecourt pour la Vôge, et à Vaudrevange et ensuite à Sarguemines pour la Lorraine allemande. Les prélats dans celles-ci étaient admis encore qu'ils ne fussent pas gentilshommes.

Les anciens chevaliers qui tenaient les assises étaient de la plus haute noblesse; aussi puissants que les ducs, ces chevaliers les traitaient d'égal à égal, et ils les jugeaient même; on voit un Lesnoncourt promettre à Ferry de ne le pas gager devant les assises, à moins que lui ou ses officiers ne lui refusent la justice. Les quatre plus anciennes maisons de Lorraine, aussi anciennes que l'état même, étaient celles des Duchatelet, de Ligniville, de Lenoncourt et d'Haraucourt. On les nommait grands chevaux de Lorraine.

C'est aussi au temps du duc Ferry qu'il faut rapporter l'octroi des premiers communaux, biens qui sont devenus si considérables en Lorraine et en Alsace. Ainsi que l'archevêque de Rheims, le duc Ferry octroya aux bourgeois des lieux qu'il a affranchis, l'usance d'une partie de son domaine seigneurial, toutefois en se réservant le domaine direct. Les villes, bourgs, et autres lieux mis sous la loi de Biaumont, ne furent d'abord que simples usagers des communaux; une longue possession les fit admettre à en partager la propriété avec les seigneurs, ainsi que nous le verrons plus tard dans les ordonnances de nos princes.

Depuis cette époque, les paroisses et les seigneurs ont commencé le système de l'entière communauté pour la dépaissance des troupeaux; la coutume du vain pàturage sur toutes les propriétés après les récoltes, s'est établie, comme aussi celle du parcours entre différents lieux limitrophes, dépendant de la même seigneurie.

Ce point de l'établissement des communaux est trèsobscur chez les annales des Français; mais il est très-clair dans les monuments du pays de Lorraine.

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