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tique de Napoléon aux champs de Waterloo, et sa voix n'eut plus d'empire sur l'esprit des représentants de la -nation: il fut même forcé d'abdiquer définitivement. Détrôné, proscrit, abandonné de tous, il courut à Rochefort s'embarquer pour les Etats-Unis. La fortune lui - refusa cette dernière voie de salut, et il fut forcé de se jeter sur un vaisseau anglais qui gardait la côte. Il compta inutilement sur la générosité anglaise; il fut conduit et enchaîné sur le rocher de Sainte-Hélène.

Louis XVIII remonta sur le trône après Cent jours d'exil, et le sol français fut inondé pour la seconde fois des armées étrangères. L'armée française, retirée sur la gauche de la Loire, pouvait encore en imposer à l'étranger, et faire obtenir des conditions de paix honorables : elle fut licenciée, et elle posa les armes, au nom de la patrie et de la paix. Le second traité de Paris fut désastreux pour la France: il nous enleva une ligne de places fortes, nous imposa la démolition de Huniogue, une contribution de 700 millions et l'occupation d'une partie du territoire pendant cinq ans. Paris fut dépouillé des chefs-d'œuvre que l'Empire y avait rassemblés dans ses -jours de gloire.

Cette seconde restauration n'eut point le caractère conciliant et sans fiel de la première: elle crut qu'il fallait punir; plusieurs des hommes qui avaient favorisé le retour de Napoléon furent livrés à des commissions militaires et exécutés; d'autres furent proscrits. Le maré-chal Ney ne put être sauvé par sa vieille gloire, et il reçut la mort près du palais du Luxembourg, où il avait droit de siéger comme pair de France. Des mesures acerbes furent prises dans plusieurs villes contre ceux qui avaient pris part à la fatale tentative des Cent jours. La chambre des députés s'associa à ces récriminations. Bientôt, dominant le pouvoir, elle voulut le pousser en dehors de la charte, et elle manifesta même le dessein d'en modifier les principales dispositions.

La sagesse du roiarrêta une si funeste tendance, et le 5 septembre 1816 une ordonnance de dissolution attei gnit la chambre des députés : il fut déclaré que la charte ne serait point révisée; et par une convocation nouvelle des colléges électoraux, il fut démontré que le gouver

nement allait rentrer dans les voies de modération poli-tique. Les trois années qui suivirent ce coup d'état et d'habile politique virent encore se développer les institutions promises par la charte, et seront toujours comptées comme les plus belles années du gouvernement représentatif.

Bientôt la confiance rétablit le crédit public, et permit d'ouvrir un emprunt dont le produit fût destiné à solder aux puissances étrangères la dette contractée par le dernier etraité de Paris. Un congrès fut assemblé à Aix-la-Chapelle ́afin d'avancer le terme de cinq années fixé pour l'occupation du territoire. La confiance qu'inspirait Louis XVIII, le calme qui se rétablissait en France, et la crain'e que les troupes cantonnées ne s'imprégnassent trop des idées de liberté française, déterminèrent les souverains alliés à les retirer immédiatement. Nos villes furent enfin gardées par des soldats français, et les impôts furent allégés.

Ce bienfait fut aussi dû à l'influence dont jouissait le duc de Richelieu, l'un des plus honorables caractères que la restauration ait mis en saillie il dirigeait le ministère des affaires étrangères, comme M. Decazes dirigeait la politique de l'intérieur.

1. Cependant la paix, en augmentant le bien-être des populations, leur donna la conscience de leur force, et l'affranchissement de la pensée fit bouillonner tous les cœurs. En Italie, Naples et le Piémont eurent leur révolution, et se donnèrent des chartes qui anéantissaient l'autorité royale. Les rois s'alarmèrent et jurèrent une Sainte-Alliance pour combattre le principe de la souveraineté désordonnée des peuples. Cette résolution des rois rendit de la vigueur en France au parti qui avait été vaincu le 5 septembre. Le ministère fut modifié dans un sens plus favorable au pouvoir, et l'intention fut avouée de restreindre les libertés. A cette époque, la nation se divisait en deux camps hostiles, lorsqu'un événement funes e vint dé nouveau troubler la sécurité publique.

Le duc de Berry, second fils de Monsieur, comte d'Artois, le seul prince sur qui la famille royale pût fonder l'espoir que la dynastie serait continuée, fut assassiné par un homme de sang nommé Louvel. I le frappa d'un coutelas, à la vue de son épouse consternée, et il faillit même

s'échapper. La victime expira quelques heures après, prononçant des paroles de pardon. Le meurtrier subit le supplice des parricides.

Alors fut renversé M. Decazes avec son système de pondération, et la direction des affaires fut remise à des hommes dont les principes exclusifs replacèrent le pouvoir dans une situation plus conforme à ses intérêts.

La naissance arrivée en septembre 1820 de Henri, duc de Bordeaux, fils de feu le duc de Berry et de MarieCaroline, princesse de Naples, son épouse, calma les passions qui agitaient la France: sa naissance fut saluée par de vives acclamations. Les haines s'effacèrent autour de son berceau. La paix, la confiance publique, le développement du commerce et de l'agriculture élevèrent bientôt la France à un haut degré de prospérité.

Les révolutions de Naples et de Sardaigne avaient été comprimées par l'Autriche; mais l'Espagne à son tour s'agita. Les cortès qui, en 1812, avaient soulevé le pays pour résister aux armées de Napoléon, invoquèrent leurs services passés et demandèrent une constitution. Bientôt Ferdinand VII fut leur prisonnier. La Sainte-Alliance s'effraya des progrès du radicalisme dans ce pays, et la guerre fut résolue au congrès de Vérone. Louis XVIII était, par les liens du sang et la position respective des deux nations, plus intéressé que les autres rois à prendre la défense de Ferdinand. Il déclara qu'il le replacerait sur le trône. Une armée forte de cent mille hommes, à la tête de laquelle fut placé le duc d'Angoulême, franchit les Pyrénées sur deux points : les armées des cortès furent vaincues, et Ferdinand rentra à Madrid, où il régna paisiblement, même après que l'armée d'occupation se fut retirée.

La fin du règne de Louis XVIII fut calme. La nation était toute occupée d'industrie, d'agriculture, de sciences, de beaux-arts et de crédit public. Napoléon avait rendu le dernier soupir à Sainte-Hélène en 1821, et son nom glorieux ne pouvait plus servir de drapeau aux factions. Enfin le roi termina sa carrière en l'année 1824, heureux d'avoir réussi à calmer les tempêtes populaires, et d'avoir pu procurer du repos à la France, à l'ombre des institutions qu'il lui avait données. Ce roi sera très-apprécié dans l'histoire.

CHARLES X.

La couronne passa à Monsieur, comte d'Artois, qui prit le nom de Charles X. Il fut sacré à Reims, suivant les anciens usages, avec d'imposantes cérémonies. Le premier acte de son gouvernement fut de rétablir la liberté de la presse en faveur des journaux, que des lois exceptionnelles soumettaient encore à une censure préalable. Le ministère, habilement dirigé par M. de Villèle, se trouvait assez fort pour abandonner sans crainte aux intelligences le libre exercice d'une arme si puissante et si dangereuse. Ce ministre marchait alors dans une harmonie parfaite avec les deux chambres. Toutefois, des divisions ne tardèrent pas à se former dans le sein des majorités, et donnèrent naissance à cette opposition qui, appuyée par toutes les classes de la société, ne devait pas tarder à renverser le gouvernement.

Un grand événement se lie à cette époque. La Grèce, qui depuis trois siècles était courbée sous le cimeterre ottoman, releva sa noble tête en 1828. Un cri de liberté appela tous les Hellènes sous les armes. Ibrahim-Pacha redoubla ses fureurs: Ypsara, Scio, Salamine, Missolonghi, furent témoins de luttes sanglantes. Les cabinets européens se décidèrent à appuyer l'affranchissement de la Grèce. Les escadres combinées de la France, de la Russie et de l'Angleterre détruisirent, au combat naval de Navarin, la flotte turco-égyptienne. Bientôt un corps de quinze mille hommes français, commandé par le général Maison, aborda en Morée, prit Modon et le fort de Navarin, força Ibrahim à se retirer, et assura l'indépendance de ce beau pays, qui fut organisé en monarchie.

Cependant, en 1829, les partis s'observaient en France, l'opposition grossissait, et le ministère Martignac, qui était modéré, était menacé de perdre la majorité : une crise était imminente. Charles X, après dix-huit mois de tâtonnements et de concessions, sentant le pouvoir lui échapper par les exigences toujours croissantes de l'opposition, se décida à nommer le ministère qui devait le perdre. M. de Polignac, M. de Labourdonnaye, et d'au

tres hommes connus par leurs opinions absolutistes, prirent la direction des affaires, avec la résolution de tout oser.

La chambre des députés refusa de l'associer au mouvement qui emportait le gouvernement dans des voies que la nation repoussait. Une adresse votée à l'ouverture de la session de 1830 par l'opposition forte de 221 membres, fut regardée comme une levée de boucliers. La chambre fut prorogée, puis dissoute. Les colléges électoraux réélurent les 221, plus d'autres députés dans le même sens. La lutte se trouva engagée entre le roi et la nation, et devait se terminer par une révolution.

Le Conseil des ministres résolut de la prévenir. Toutefois une grande position était nécessaire pour assurer le coup d'état depuis longtemps médité. Le succès de l'expédition d'Alger, faite en 1830, lui donna cette force. Une insulte avait été faite par le Dey d'Alger au Cousul Français, on résolut de la chât er, et d'affranchir enfin la France et l'Europe des exactions barbaresques Une expédition est dirigée contre ce repaire de pirates, sous la conduite de l'amiral Duperrey. Le genéral Bourmont, ministre dela guerre commande l'armée de terre. Quelquesjours suffisent pour mettre au pouvoir de la France cette côte inhospitalière. Le port d'Alger est forcé, les Arabes sont battus, les forts vivement attaqués par nos soldats, sont emportés ou s'écroulent. Avec les trésors amassés dans le fort de la Casauba, les arsenaux, les bâtiments de guerre, un poste important dans les eaux de la Méditerranée, et une colonie à fonder tels furent les résultats de cette brillante expédition accomplie en quelques jours.

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Le gouvernement de Charles X se crut invulnérable : le 25 juillet 1830, les fatales ordonnances consommèrent la ruine de la monarchie, la chambre des députés est dissoute, les colléges électoraux mutilés, et la liberté de la presse supprimée. Aucune mesure n'avait été prise dans la capitale pour assurer l'exécution de ce coup d'état, On répondit aux ordonnances par l'insurrection; le sang coula pendant trois jours. Le Louvre fut sillonné par la mitraille et envahi; le manteau royal fut mis en pièces, le sceptre brisé, et le peuple proclama sa souveraineté. Pour la troisième fois, la famille royale fut obligée de s'exiler de France, accablée sous le poids de la colère du

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