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D'après les anciennes règles que la loi de 1791 à en tre tendu respecter, nos cultivateurs ont le droit de revendi-le quer le bénéfice des anciennes embanies, et de réservere pour l'usage exclusif de leurs animaux de trait, les pàtures de celles de leurs prairies qui ne sont pas enclavées et qui ont issue sur la voie publique. Ces sortes de réserves doivent être dénoncées à la mairie et connues de tous les intéressés. Egalement et pour atteindre le même but, plusieurs cultivateurs peuvent s'entendre et demander la réserve des pâtures d'un canton de prairies à eux appartenant. Les animaux attachés à la culture se trouveraient beaucoup mieux du régime de pareilles réserves, que d'être mis en concurrence avec les troupeaux sur des pâtures que les lois anciennes et modernes ont affectées à l'entretien de ceux-cì.

8° Les pâtres ou gardiens de bétail ne peuvent mener les troupeaux d'aucune espèce dans les champs moissonnés et ouverts, que deux jours après la récolte entière; c'est-à-dire, dans nos pays de division et d'enchevêtrement de la propriété, deux jours après la récolte du canton entier. Différemment, les troupeaux pourraient porter préjudice à des récoltes non faites.

L'ensemencement factice d'un champ après les récoltes ne serait point un obstacle à l'exercice de la vaine påture; par exemple: s'il n'y avait que quelque semence semée artificiellement à la tête ou aux côtés d'un champ pour le tenir en réservé. ( Arrét de la Cour de cassation, du 24 juin 1813.)

9o La vaine pâture est un droit attribué à la généralité des habitants d'une commune et non à aucun en particulier. Ce droit est purement personnel pour l'utilité de chaque habitant : il a quelque ressemblance avec le droit d'usage, et, comme lui, il n'est pas transmissible. L'habitant qui n'a point de bestiaux ne peut donc disposer, aliéner, ni même louer son droit à la vaine pâ ure, ou prêter son nom pour en faire jouir à sa place. La vaine pâture n'est autorisée qu'à l'égard de ceux qui sont propriétaires ou chepteliers de bestiaux et non à ceux qui font commerce de bestiaux ou qui les tiennent d'autrui simplement pour les nourrir et engraisser. Delà, les conducteurs de bestiaux revenant des foires ou les menant d'un lieu à un au

art

tre, ne peuvent, à peine d'amende, les laisser pacager sur les terres des particuliers, même dans les pays de parcours et de vaine pâture.

10° Les conseils municipaux sont chargés de faire les règlements sur l'exercice du parcours et de la vaine pâenture; ils déterminent le nombre de têtes de bétail que chaque habitant peut mettre sur les pâtures. Le règlement est arrêté par le conseil municipal, sur la proposition du maire et celle du sous préfet, approuvé, s'il y a lieu, par le préfet. La règle, à peu près générale, est de mettre sur les pâtures trois bêtes à laine par hectare : une vache équivaut à six bêtes à laine. D'ailleurs, la fixation doit avoir 6 lieu en raison seulement des biens que l'on a, et qui sont susceptibles de l'exercice de la vaine pâture. Par exemple, le propriétaire de 50 hectares dont 10 seraient, soit en clos, soit en bois, vergers, vignes et prairies artificielles, ne pourrait réclamer la fixation dont il s'agit qu'en raison des 40 autres hectares.

Le droit attribué au pouvoir municipal de régler les pâtures, emporte virtuellement celui de les distribuer entre les diverses espèces de bétail. Ainsi, les pâtures des prairies peuvent être attribuées exclusivement au gros bétail, comme les chaumes et d'autres pâtures sèches aux troupeaux de bêtes ovines. Cependant si ceux-ci, et par l'effet de la distribution, n'avaient pas suffisamment pour leur dépaissance, il faut se souvenir que les anciennes lois du pays, respectées par la loi de 1791, les admettaient dans les prairies. Pour la repousser de ces prairies, on a été jusqu'à prétendre que la bête ovine, par son coup de dent, détruisait les plantes trifoliées, mais c'est une erreur; elle cause moins de dommage dans les prés que le piétinement du gros bétail. Le parcours des troupeaux, en temps opportun, est nécessaire au contraire pour tasser le sol et tenir les prés à faux courante.

11° Néanmoins tout chef de famille domicilié, qui n'est ni propriétaire, ni fermier, et celui qui, en raison de la modicité de son exploitation, n'aurait à jouir de la vaine pâture que pour un nombre de bêtes à laine au-dessous de six, peut mettre en vain pâturage, soit au troupeau commun, soit en troupeau séparé, jusqu'au nombre de six bêtes à laine et d'une vache avec son veau, sans préjudi

cier aux droits desdites personnes sur les terres commu→ nales, s'il y en a dans la commune, et sans entendre rien innover aux lois, coutumes et usages locaux et de temps immémorial qui leur accorderaient un plus grand avantage.

La loi consacre ici une réserve, toute remplie d'humanité, à laquelle les pauvres ont toujours eu droit dans l'économie du système de la communauté de paroisses : ils recevaient généreusement et religieusement leur part de tous les fruits de la terre, non à titre d'aumône, mais à titre d'associés. Aujourd'hui, les habitants pauvres des communes ne profitent guère du bénéfice de la loi, que dans celles qui ont conservé l'usage des troupeaux en commun; car autrement, et par troupeau séparé, ils ne peuvent sacrifier à la garde du bétail le prix de leur journée de travail, sur lequel repose leur existence. Cependant, l'intérêt général du pays serait que chaque intéressé réclamât et utilisât la part de pâtures que la loi lui a faites il est certain que la possession d'un peu de bétail, entre les mains de tous, est la voie la plus sûre et la plus naturelle d'obtenir la quantité que réclame l'agriculture `et les besoins de la consommation. Dans les années de disette de fourrages, il est plus facile au pauvre de sauver sa vache, qu'an fermier de sauver un fort troupeau.

12° Il peut être prescrit par l'autorité municipale au propriétaire d'un troupeau atteint ou seulement suspecté de maladie contagieuse, d'exercer son droit de vaine pàture sur un cantonnement séparé.

13o Dans les pays de parcours et de vaine pâture, soumis à l'usage du troupeau en commun, tout propriétaire ou fermier peut renoncer à cette communauté et faire garder par troupeau séparé, un nombre de têtes de bétails proportionné à l'étendue des terres qu'il exploite dans la commune. Alors le propriétaire du troupeau séparé n'est pas tenu de contribuer aux frais du troupeau commun. (Cour de Cassation, 4 juillet 1821.)-Le pâtre, gardien du troupeau commun, est seul responsable des dégâts commis par ce troupeau; mais la commune répond du fait de ce pâtre. Cassation, 14 frimaire, an xiv et 22 février 1811.-On ne peut user du droit de parcours et de vaine pâture qu'individuellement, par troupeau sé

paré, ou bien en mettant les bestiaux dans le troupeau commun, sous la conduite du pâtre choisi par le maire. Plusieurs habitants ou fermiers ne peuvent pas réunir leurs troupeaux pour le parcours, sous la garde d'un berger choisi par eux. Les maires peuvent prendre à ce sujet des arrêtés qui ont force et vigueur. (Arrêt de la Cour de Cassation, du 8 février 1838.)

Nous avons vu, dans la première partie de notre travail, qu'anciennement nos pays étaient soumis à l'usage des troupeaux en commun; les paroisses mettant en communauté les produits de la terre, après les premières récoltes, c'était par les troupeaux communs que chaque intéressé pouvait en retirer sa part. Le nouveau mode d'user des pâtures individuellement a présenté des inconvénients dans l'application; d'une part, il a rendu impraticable la bonne économie et la juste répartition des pâtures; il a corrompu les bonnes mœurs, à la campagne, en excitant trop aux habitudes du vol et du gaspillage, et il a rendu, pour ainsi dire impossible et illusoire, la surveillance des gardes champêtres ; d'un autre côté, il a fait disparaitre, et c'est là le plus grand mal, la bête ovine des petites exploitations, où sans la possibilité de la faire garder au troupeau commun, elle ne peut exister. Il faut respecter la faculté de tenir un petit troupeau à part, puisque la loi l'autorisé et que, d'autant plus, les grands troupeaux en commun paraissent impossibles aujourd'hui dans les petites cultures; mais l'autorité municipale doit veiller avec soin au maintien et au bon gouvernement de ces derniers, dans les grandes cultures, où l'usage s'en est maintenu. Ici, c'est le troupeau communal qui, pouvant faire la part la plus juste des pâtures à chaque intéressé, peut faire supporter, avec moins de réclamations, la servitude du vain pâturage. C'est lui aussi qui, étant satisfait, peut faire tolér er sans opposition, sur les pâtures communes, les troupeaux particuliers, entretenus dans les grandes fermes. Il ne faut pas oublier aussi que la législation forestière n'ouvre les forêts dans les années de pénurie de fourrages, qu'aux seuls troupeaux de gros bétail, réunis en commun sous la garde d'un berger responsable.

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Le nombre de têtes de bétail que chaque habitant a

droit de mettre à part sur les pâtures communes, doit être déclarée annuellement à la mairie; il est juste que l'autorité compétente vérifie si ce nombre n'excède pas celui fixé par la loi. Du temps que les paroisses réunissaient leurs troupeaux en commun, il ne s'est jamais élevé de difficultés sur la quantité du bétail que chaque habitant y mettait. La cour souveraine de Lorraine a été obligée quelquefois d'intervenir pour faire réduire les troupeaux excessifs des seigneurs, qui dévoraient les pâtures aux dépens de ceux des communautés.

14° Tout propriétaire peut se soustraire à l'exercice du parcours et de la vaine pâture, par la clôture de son héritage. L'héritage est réputé clos, lorsqu'il est entouré d'un mur de quatre pieds de hauteur, avec barrière ou porte, où lorsqu'il est exactement fermé et entouré de palissades ou de treillages, où d'une haie vive ou d'une haie sèche faite avec des pieux ou cordelée avec des branches, ou de toute autre manière de faire les haies en usage dans chaque localité, ou enfin d'un fossé de quatre pieds de large au moins à l'ouverture et de deux pieds de profondeur.

Nous ferons de nouveau l'observation, déjà faite dans la première partie de ce travail, qu'à travers l'ordre des grandes cultures, on ne peut enclore sa propriété de manière à intercepter les passages nécessaires aux voitures, aux charrues et aux troupeaux des cultivateurs. Cette réserve fondée sur des droits acquis et stipulée par l'édit des clôtures, de 1767, peut toujours être invoquée, bien qu'elle ait été omise dans les lois modernes (1).

15° La clôture de l'héritage fait perdre au propriétaire de l'héritage son droit au parcours et vaine pâture, en proportion du terrain qu'il y soustrait.

16° Si les clôtures finissent par trop restreindre le droit de parcours, la commune qui souffre à cet égard a le droit de renoncer à la faculté réciproque qui existait entre elle et l'autre commune ou le particulier; mais elle ne peut prétendre aucune indemnité, même lorsque son droit serait fondé sur un titre.

17o Les difficultés qui s'élèvent sur la question de sa

(1) Voir les lois rurales de la France, par Fournel.

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