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CHARLES ET NICOLE.

Après la mort du duc Henry, Charles son gendre, et Nicole, sa fille aînée, régnèrent ensemble; leurs noms étaient joints sur les monnaies, dans les arrêts et les ordonnances. Mais le duc ne voulait rien tenir de son épouse, qui cependant était l'héritière naturelle des Etats de Lorraine; et de concert avec le comte de Vaudémont, son père, il entreprit de faire valoir le testament du duc René II, favorable à la ligne masculine des princes de Lorraine, en d'autres termes, qui établissait la loi salique en Lorraine. Le comte exposa son droit aux Etats du pays assemblés en 1625; son fils n'y forma aucun obstacle, et les Etats consentirent que François, comte de Vaudémont, succédât à son frère Henry, dans les duchés de Lorraine et de Bar.

FRANÇOIS II.

François II, né à Nancy, le 27 février 1572, avait épousé le 15 mars 1597, Christine de Salm. A la mort du duc Henry-le-Bon son frère, il laissa Charles et Nicole jouir paisiblement de la souveraineté pendant plus d'une année, la réclama ensuite pour lui-même, en exerça tous les droits pendant quelques jours, paya ses dettes dans ce moment de règne, et le 26 décembre 1625, fit à son fils, Charles, cession et transport des duchés de Lorraine et de Bar, qui eussent continué à être heureux et tranquilles s'il en eût retenu le gouvernement: Il ne se réserva que le titre de duc, et se retira à Badonviller, patrimoine de la duchesse Christine, son épouse. Cette princesse mourut le 9 décembre 1627. François II procura l'établissement des Tiercelins au mont de Sion, situé près de Vaudémont; et par les lettres de Nancy, du 1er décembre 1630, il fonda le collége de Bouquenom. Il mourut le 14 octobre 1632,

dans une indifférence philosophique et chrétienne des grandeurs de la terre.

François II eut plusieurs enfants : 1° Henry, marquis d'Attonchâtel; 2 Charles, qui l'avait précédé et qui lui succéda; 3 Nicolas-François, qui quitta la pourpe, l'évêché de Toul et ses abbayes pour la princesse Claude, sa cousine, qu'il épousa le 4 février 1634 : il continua ainsi la postérité du grand duc Charles, et mourut en 1670; 4° Henriette, célèbre par sa beauté, son esprit et son courage, et qui épousa Louis de Lorraine, prince de Phalsbourg; 5o Marguerite, mariée le 31 janvier 1652 à Gaston Jean-Baptiste de France, duc d Orléans, frère de Louis XIII, mourut le 3 avril 1672: Le roi ne reconnut ce mariage qu'en 1643; 6° Chrétienne, morte en bas-ȧge.

CHARLES IV.

Charles IV, né le 5 avril 1604, eut successivement, pour gouverneurs Jacques-Philippe de Lignéville, et Henry de Gournay, comte de Marcheville. Il porta les armes dès l'age de 16 ans : ce fut sa passion et l'occupation de presque toute sa vie. La fortune trahit quelquefois son courage, mais jamais elle ne l'abattit: il a un rang distingué entre les plus fameux guerriers: ses nombreux combats sont dans l'histoire et hors de notre sujet : ses amours seraient la matière de vingt romans. Il eut des talents pour bien gouverner, et ses lois furent aussi sages que sa conduite en politique le 'fut peu.

Au commencement de ce règne, en 1626, règne le plus malheureux dont on ait mémoire au pays, il y avait trois duchesses de Lorraine et de Bar, et deux ducs. Charles ne fut ému ni touché des plaintes de Nicole et de sa mère, et voulut régner seul; l'ombre même de l'autorité de son père lui portait ombrage. On voit dans une ordonnance du 9 octobre 1626, concernant les pauvres, que le duc François II assistait au conseil de son fils, où il prenait le second rang: exemple rare de modestie et de bonté.

L'aumône publique, selon la pensée chrétienne, est très-bien organisée dans la déclaration du 9 octobre 1626: le prince veut qu'une collecte soit faite annuellement d'une aumône générale et volontaire sur tous les ecclésiastiques, gentilshommes, affranchis et gens de robes de la ville de Nancy, pour subvenir à la nourriture, entretien et pour des pauvres invalides, à quoi il veut contribuer lui-même pour montrer l'exemple à tous. Il ordonne que cent jeunes enfants pauvres soient retirés et logés à la maison de Saint-Charles de Nancy, pour y apprendre à bien servir Dieu et un métier pour gagner leur vie : il exhorte les personnes qui ont le moyen de contribuer du leur pour accroître le pain desdits cent enfants, et à l'effet d'en recevoir à Saint-Charles, jusqu'au nombre de trois cents. Enfin, il ordonne que les pauvres honteux et infirmes soient secourus et soignés à domicile, sur le certificat des curés de paroisse.

La même Ordonnance renouvelant les anciennes veut aussi que les autres villes, bourgs et lieux aient à pourvoir à l'entretien et nourriture de leurs pauvres.

En cette même année 1628, les Etats accordèrent à Charles IV pour les années 1627 et 1628 deux florins par paire ; deux risdales et demi par fauchée de prés; trois risdales par jour de vigne, le tout sur les biens de roture. L'impôt, comme on le voit, était assis sur les fonds où il faut qu'il retombe toujours.

Les chartres et coutumes de la ville et prévôté de Marsal furent homologuées et confirmées par lettres patentes données à Nancy le 13 mars 1627.

On voit dans une ordonnance du 20 août 1627, qu'en Lorraine on s'adonnait beaucoup à l'éducation des abeilles, et que la cire nécessaire pour le service des églises, se trouvait dans le pays. Cette ordonnance prévoit les peines à appliquer pour les vols de mouches à miel.

Le 10 décembre de la même année, Charles autorisa l'établissement de la maison de refuge de Nancy, d'où cet utile établissement se répandit au loin. Le 29 janvier 1628, des dispositions nouvelles furent encore établies sur l'aumône publique

Le petum ou tabac qui commençait a être connu en

Lorraine, était regardé comme remède : il fut défendu, le 12 février 1628, d'en semer en pleine campagne.

Cette même année, Charles, sans s'inquiéter des murmures de la noblesse qui tenait à ses anciens priviléges, rendit inutile en quelque sorte le tribunal des assises, en établissant dans chaque bailliage, six conseillers, pour juger avec le lieutenant-général tous les procès comme en France.

L'ordonnance du 18 mars 1628, porte que les communautés feront réparer les chemins qui sont dans leurs bans et finages, et les entretiendront en bon et suffisant état, par ehacun an. Et en cas que lesdits chemins ne soient en état suffisant, le prince permet aux passants de se détourner et prendre leur chemin dans les terres des particuliers, ensemencées ou non, sauf à ceux-ci leur recours contre les communautés.

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En 1629, l'année ecclésiastique fut fixée au 1" janvier, pour le partage de s fruits entre les héritiers des bénéficiers et les successeurs.

Gaston, frère du roi Louis XIII, veuf de Marie de Bourbon Montpensier, s'étant retiré en Lorraine en 1629, conçut une forte passion pour la princesse Marguerite, sœur du duc Charles. Ces choses déplurent au roi. Charles de son côté, était irrité des recherches et des hauteurs de Cardin de Bret, intendant de Metz. Il leva des troupes; forcé de s'expliquer sur leur emploi, et se trouvant trop faible devant le roi, il conduisit environ dix-sept mille hommes en Allemagne contre les Suédois. Louis XIII s'étant déclaré pour Gustave-Adolphe, roi de Suède, s'était avancé jusqu'à Metz, Charles fut obligé de rentrer en Lorraine.

Il établit à Nancy, le 3 septembre 1630, un mont-depiété qui subsista jusqu'en 1647, dans une maison de la rue St.-Dizier.

Gaston étant revenu en Lorraine, y épousa secrètement la princesse Marguerite et se retira à Bruxelles. Le roi irrité, prit Moyenvic, et Marsal lui fut remis. Charles lui cédait encore, par le traité de Liverdun, Stenay, Jametz et Clermont en Argone. Ces premiers démembrements furent dans la suite suivis de tant d'autres et de si

grandes calamités, qu'il ne resta plus que le squelette d'un corps qui avait été si vigoureux sous les règne précédents. C'est dans ces fâcheuses conjonctures que Charles fondait la Chartreuse, auprès de Nancy, avec les biens confisqués sur le malheureux Melchior de la Vallée, brûlé pour magie ou prétendue magie l'année précédente, auprès de la maison de Ste.-Anne. Le chantre aumônier du feu duc Henry et Desbordes, son valet de chambre, eurent le même sort.

Le parlement de Metz fut créé en janvier 1633.Depuis, il a été supprimé le 21 octobre 1771, et son ressort attribué à la cour souveraine de Nancy; il a encore été rétabli par édit du mois de septembre 1775.

L'illustre Charles de Pois, plus connu en France sous le nom de Piso, mourut à Nancy, sa ville natale, pendant l'été de 1633; il s'était rendu dans cette ville pour soulager ceux qui étaient attaqués de la peste.

Le duc Charles ayant refusé en 1663, l'hommage qu'il avait promis pour le Barrois, le roi, pour l'y obliger, vint assiéger Nancy, après s'être assuré de St. Mihiel et de Lunéville. La princesse Marguerite en sortit secrètement le 28 août, et joignit son époux en Flandre. Cependant le duc Charles, son frère, qui était dans les montagnes de Vôge, s'avance jusqu'à Charmes, et le cardinal de Richelieu l'attire à Laneuveville devant Nancy, où le roi avait son quartier. On le presse de rendre Nancy, le marquis de Beauveau lui offre les moyens de s'y jetter, il en manque le moment, et se voit forcé d'en faire sortir une garnison en état de se bien défendre. La princesse de Phalsbourg fit une harangue digne de son courage, pour empêcher de se rendre. Le roi entra dans la place le 25 septembre et la reine le 26. Le duc de Lorraine se retira à Mirecourt.

Il avait feint dès le 26 août 1633, de remettre ses états au cardinal Nicolas François, son frère. Il lui en fit une seconde cession au commencement de 1634, et passa en Alsace avec sa noblesse et un corps de cavalerie. Son frère resta à Lunéville avec la duchesse Nicole, et avec la princesse Claude qu'il y épousa le 4 février; il consomma son mariage, et le lendemain envoya à Rome pour obtenir

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