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pour les colonies toute la perte qui résulte du défaut de concurrence; dès-lors aussi, indépendamment de l'intérêt de l'impôt perçu en France, il était indispensable que les retours se fissent par les mêmes voitures, et il s'en est suivi pour la métropole tous les désavantages du défaut de concurrence, ou plutôt la perte sur l'allée comme sur le retour s'est parpartagée entre la métropole et les colonies, tant en diminution sur le prix en première main, qu'en renchérissement sur la revente. Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai dit dans les deux chapitres précédents sur les effets de la concurrence dans le transport, et sur l'intérêt qu'ont les nations à la réduction des frais.

Quoi qu'il en soit, il n'est possible d'admettre la concurrence dans la voiture, que par suite de la liberté du commerce.

IX. De l'intérêt, que croit avoir la métropole, de ne permettre à ses colonies d'acheter des nègres que des agents nationaux.

Je n'examine point ici dans le point de droit la nature de ce commerce. Est-il permis d'acheter des hommes pour les réduire à l'esclavage? Est-il permis de favoriser et d'entretenir par ce commerce tous les crimes auxquels se portent ces nations barbares, et les guerres qu'elles se font continuellement pour y fournir? Les Européens voudraient-ils qu'on les traitât de même ? La justice est-elle applicable aux relations entre les Européens et les Africains; ou bien la différence du blanc au noir exiget-elle d'autres principes et une autre morale? Tout cela n'est pas de mon sujet.

Je ne considère les nègres que comme des animaux servant à la culture; et il en est bien d'autres qui ne les considèrent pas autrement. Or, cela posé, l'intérêt des colonies qui emploient ces animaux, est de les acheter au moindre prix possible: il est notoire qu'elles les achètent beaucoup plus cher des négociants français qu'elles ne le feraient dans l'état de concurrence; la preuve en est la contrebande ou interlope qui a lieu en cette partie.

Mais ce renchérissement des instruments renchérit les frais de culture, diminue le produit net, et la part que l'État devrait y avoir : il renchérit en même temps les productions qui sont les fruits de cette culture. Il est donc aussi contraire aux intérêts de la métropole qu'à celui des colonies: il produit le même effet que si, par le moyen d'une exclusion, les laboureurs voyaient les chevaux renchéris de 50 ou 100 liv.

Cette perte de la métropole et des colonies est-elle le moins du monde compensée par l'avantage de concentrer tous les bénéfices et les frais de ce commerce dans les agents regnicoles? On le croit, et c'est cette per

suasion qui est le motif de cette exclusion et de toutes les autres. J'ai suffisamment réfuté cette erreur, chap. VII, § V'.

CONCLUSION DE CET OUVRAGE.

J'ai montré dans cet ouvrage quelles sont les causes de la valeur, et son influence sur le revenu et la prospérité d'une nation ; j'ai déterminé les fonctions de l'argent, la source et les effets de la circulation; j'ai établi la nature des travaux de l'industrie et du commerce, leur utilité par rapport à nos besoins; mais leur stérilité absolue, quant à l'accroissement des richesses.

De ces vérités développées et considérées sous tous leurs rapports, j'ai tiré la conséquence de l'unité de l'intérêt social et de sa conformité avec les lois de la justice: principe de la plus grande fécondité, qui décide toutes les questions d'économie politique, qui dissipe tous les préjugés, qui ne souffre ni exception ni modification, qui présente aux administrateurs un point fixe et invariable, sans lequel il n'existerait point d'ordre social ni de règle certaine pour procurer le bonheur des hommes réunis.

L'intérêt des classes du commerce et de l'industrie serait contraire à l'intérêt social, s'il pouvait être envisagé séparément. J'ai donc traité de l'intérêt de ces deux classes, en prouvant qu'il est essentiellement renfermé dans celui de la reproduction; que vouloir le procurer par des moyens contraires au bien de la culture, c'est vouloir l'effet sans la cause; que, comme ces travaux, loin d'accroître les richesses, sont un objet de dépense, la nation qui les paye a intérêt d'en réduire les frais, et par conséquent d'assurer la plus grande liberté à leurs agents, et de ne les assujétir à aucune contribution.

Tel est le mal que souhaitent à ces deux classes les philosophes qui font profession d'enseigner les lois de l'ordre social: puissent-elles ne jamais trouver de plus grands adversaires! Et l'on ne cesse de dire que ces philosophes ne connaissent point de patrie, qu'ils sont indifférents au sort de leurs frères, qu'ils font profession d'aimer tous les hommes pour se dispenser d'aimer plus particulièrement leurs concitoyens on leur reproche de ne s'occuper que de l'intérêt des propriétaires, doute parce qu'ils demandent que tout l'impôt soit reporté sur eux, et qu'ils prouvent que cela doit être. On les accuse d'être les détracteurs du commerce et de l'industrie, sans doute parce qu'ils sollicitent en faveur de ces travaux la liberté et l'immunité; parce qu'ils démontrent que n'étant nullement productifs de richesse, mais un pur objet de dé

sans

' V., sur le régime colonial actuel, les trois dernières et savantes leçons du Cours d'économ. polit. de M. Rossi.

pense payée par la reproduction, ils ne sont pas imposables. Et des gens faits pour penser, s'attachent à la dénomination de stériles donnée à ces travaux : ils s'effarouchent comme des enfants d'un mot qu'on a expliqué cent et cent fois, qui n'a rapport ni à l'importance ni à l'utilité reconnue de ces travaux, mais qui ne sert qu'à exprimer la différence physique qu'il y a entre tirer de la terre par son travail et le bienfait de la nature des productions qui n'existeraient pas, et recevoir pour prix d'un service quelconque des productions qu'un autre a fait naître.

Mais ces philosophes savent aussi que, ces travaux étant un objet de dépense, l'intérêt de ceux qui payent cette dépense est d'être servis dans un état de concurrence. C'est pourquoi ils réclament, pour les deux premières classes propriétaires de la totalité de la reproduction, la suppression de toute préférence, de tout privilège, de toute exclusion; persuadés que, plus on épargne sur une dépense, plus on peut se procurer de jouissances; que ceux qui payent ont intérêt et droit, de par la nature, de ne payer que le juste prix; que la concurrence dans tous les travaux, et en particulier dans ceux du commerce, est de la plus grande importance pour la valeur, et par suite pour la reproduction, source unique de toutes les dépenses; qu'elle est donc sous ce rapport l'intérêt de tous, puisque tous vivent sur la reproduction, puisqu'ils vivent mieux et en plus grand nombre, lorsqu'il y a plus à partager.

C'est donc cette concurrence, si juste en elle-même, contre laquelle s'élèvent les agents du commerce et de l'industrie : c'est là ce qui les blesse tellement dans la doctrine de ces philosophes, qu'ils ne leur tiennent aucun compte de ce qu'ils enseignent de favorable pour eux; et c'est pour se garantir de cette concurrence qu'ils réclament les impôts d'encouragement et les traites. On dirait que s'ils avaient le choix de l'immunité de leurs travaux avec la concurrence, ils préféreraient l'exclusion avec toute la charge des impôts; et qu'ils souscriraient à tous les tarifs, assurés de s'en indemniser sur la nation et d'en rejeter sur elle tout le poids.

Et ils ne cessent de nous dire que s'il faut encourager la culture, il faut soutenir l'industrie, et les regarder comme deux sœurs. Sans doute ce sont deux sœurs; mais il est une sœur aînée qui nourrit la seconde, et jamais la sœur aînée ne sollicita ni exclusion, ni privilège, ni impôt d'encouragement contre sa cadette. Il faut soutenir l'industrie, mais ce ne doit pas être en nuisant directement ou indirectement à la culture qui l'entretient. Ce n'est pas par les feuilles, c'est par les racines qu'on cultive un arbre les feuilles l'embellissent, et contribuent même à son accroissement; mais c'est la racine qui fournit la sève qu'elles dépensent.

FIN DES OEUVRES DE LE TROSNE.

CONTENUES

DANS LES OEUVRES DE LE TROSNE.

NOTICE SUR LA VIE ET LES TRAVAUX DE LE TROSNE .

879

DE L'INTÉRÊT SOCIAL PAR RAPPORT A LA VALEUR, A LA CIRCULATION, A L'INDUstrie, ET AU COMMERCE INTÉRIEUR ET EXTÉRIEUR

CHAPITRE I. De la valeur et de ses différentes causes

1. Besoins, moyens de les remplir.

1. Fécondite de la terre, aidée du travail de l'homme.

885

887 . ibid.

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. ibid.

888

889

890

891

893

894

893

m. Il faut considérer dans les productions leur utilité et leur valeur

IV. Définition de la valeur..

v. Première cause de la valeur, la propriété usuelle.

vi. L'utilité n'est pas la mesure de la valeur .

VII. Deuxième cause de la valeur, les frais indispensables.

vi. Troisième cause, la rareté ou l'abondance

IX. Quatrième cause, la concurrence

x. Les productions sont elles-mêmes la cause ultérieure de la valeur. ibid. x1. La valeur dépend de la population et de l'aisance de la population. 897 XII. La reproduction et la consommation sont réciproquement la mesure

l'une de l'autre.

XIII. On ne peut améliorer la reproduction que par la valeur

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xv. La valeur est le thermomètre de l'État d'une nation

XVI. Il n'y a que la valeur en première main qui influe sur les richesses.
XVII. Résumé

CHAPITRE II. De l'échange et de la vente

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898

. ibid.

899

901

902

903

ibid.

. ibid.

908

I. La vente se réduit à l'échange, et ne diffère que dans la manière. 909

CHAPITRE III. De la fonction de l'argent dans les échanges

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1. L'argent n'est pas l'objet de la circulation : ce sont les productions
qui le font mouvoir..

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II. La circulation part toute entière de la classe productive

922

IV. Le numéraire passe tous les ans par les trois classes

924

v. Différence entre la circulation de l'argent et celle des productions. ibid.

VI. Unité de la source des dépenses.

923

VII. Le partage de la reproduction se fait à différents titres.

927

vil. Deux sortes de consommations, l'une subite, l'autre progressive EXAMEN de la doctrine de M. l'abbé de Condillac, sur l'organisation de la

928

société, et la circulation.

929

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