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ries diverses la note simple, le mémorial ou mémorandum, qui est une sorte de mémoire, la cédule, qui est un acte d'un caractère grave, la note diplomatique.

Certains gouvernements ne recevaient des communications que par écrit; c'était le cas pour Venise et pour les Provinces-Unies; c'était le cas également pour la diète générale de l'empire; l'usage avait pour cause la défiance. En d'autres pays les affaires pouvaient être traitées de bouche; les résultats seuls étaient rédigés par écrit.

<< On peut donner pour règle, dit Gérard de Rayneval au commencement du XIXe siècle, qu'un ministère public doit être très réservé dans ses communications par écrit, de crainte de se compromettre et de se faire désavouer. Pour éviter ce double inconvénient, il est de sa prudence de ne s'exprimer par écrit qu'autant qu'il en a l'ordre exprès. Tout ce qu'il peut se permettre, lorsqu'il est bien sûr de lui-même, lorsqu'il est bien au fait et bien pénétré des intentions et des vues de son cabinet et lorsque les choses à communiquer exigent de la précision, est qu'il peut donner une note non signée, avec le titre de note verbale ou ad nutum legendi, ou confidentielle. Une pareille note n'est censée donnée que pour soulager la mémoire et ne tire pas à conséquence il peut aussi donner lecture des dépêches, et même, selon la nature des choses, en donner ou laisser prendre une copie. Ce sont les circonstances qui doivent, dans tous ces cas, diriger l'ambassadeur; mais il doit y mettre d'autant plus de prudence que la moindre chose, un seul mot peut avoir de graves conséquences (1). »

«La manière de négocier, écrivait Pradier-Fodéré à la fin du XIXe siècle, varie selon les usages et les circonstances. Rappelons qu'elles sont orales ou écrites; que les communications «< orales » comprennent la conversation « non officielle », dite aussi conversation académique, dans laquelle les interlocuteurs échangent leurs vues, sans donner à leurs paroles le caractère d'engagement d'État; la conversation «< officielle » qui constitue comme un commencement d'engagement d'État; la «< lecture » de pièces écrites qui forment l'objet de la conclusion de la conversation; que les communications «< écrites» se composent de la copie des pièces dont il a été donné lecture dans les

(1) J.-M. GÉRARD DE RAYNEVAL, Institutions du droit de la nature et des gens, 1803, p. 373.

conversations officielles et des notes résumant l'objet de la communication faite oralement ou qui constituent une communication spéciale: notes qui prennent le nom de « mémorandum » lorsque l'objet de la communication comporte plus de développements (1). »

II

Comme nous l'avons montré, à l'époque actuelle de la civilisation les représentants de l'État dans les relations internationales sont le chef de l'Etat ou bien les membres du conseil chargé de la direction de l'État, le ministre des affaires étrangères et les agents diplomatiques, tandis que des mandataires spéciaux accomplissent des missions déterminées (2). La négociation est une des grandes manifestations du droit d'être en quelque sorte le mandataire de l'État dans la vie internationale. Envisagée comme discussion d'une affaire en vue d'aboutir à une solution, elle comprend généralement deux phases: les pourparlers qui s'engagent entre le ministre des affaires étrangères d'un pays et l'agent diplomatique de l'État avec lequel il traite; ensuite la rédaction et la signature de la convention par des agents diplomatiques (3). Dans la science du droit public, elle a fait l'objet de systèmes différents que nous avons eu l'occasion de passer en revue (4).

(1) P. PRADIER-FODERE, Cours de droit diplomatique à l'usage des agents politiques du ministère des affaires étrangères des États européens et américains, 1899, t. II, p. 298.

(2) E. Nys, Le droit international. Les principes, les théories, les faits, t. II, p. 324.

(3) A. ESMEIN, Éléments de droit constitutionnel, 1896, p. 573. (4) E. Nys, ouvrage cité, t. II, p. 326 et suivantes.

CHAPITRE II

LES CONFÉRENCES ET LES CONGRÈS.

I

Les conférences et les congrès ont rempli un important rôle dans la constitution de la société des États; pour ne pas remonter plus haut ni citer des faits moins saillants, les réunions d'Arras en 1535, de Munster et d'Osnabrück de 1644 à 1648, d'Utrecht en 1713, de Vienne en 1814 et en 1815, de Paris en 1856, de Berlin en 1878 et de la Haye en 1899 sont des événements d'une importance extrême. Même dans leurs résolutions qui consacraient le triomphe de la force, il y avait davantage que la brutale violence; la nécessité d'une collaboration des communautés politiques se manifestait dans les plus blàmables décisions et peu à peu prévalait l'idée que les communautés politiques n'étaient nullement condamnées à l'inimitié perpétuelle.

La politique de l'équilibre européen avait été l'inspiratrice des congrès et des conférences à travers le xvii et la majeure partie du xvi siècle. La Révolution française remplaça les problèmes qui avaient si longtemps agité le monde par des problèmes où tout était modifié : les agents, les données, le but; il ne s'agissait plus de souverains disposant de leurs sujets; les peuples voulaient le droit et exigeaient la liberté.

Le congrès de Vienne réagit. Pour le juger, que l'on songe done aux odieux partages. « On chercherait en vain, dans les fastes les plus gigantesques de l'histoire, dit un publiciste, une situation semblable. à celle de l'Europe en 1815. Quand l'empire romain fut dépecé, les peuples du Nord s'en partagèrent les dépouilles, et de là naquirent les

grandes monarchies modernes; l'empire de Charlemagne tomba sous ses faibles successeurs, et de cette décadence sortit la fière et sauvage féodalité. Mais à Vienne, en pleine civilisation, la statistique en main (cet élément tout nouveau), le congrès procéda à une répartition de peuples comptés par tête dans le troupeau un peu confus des nationalités perdues ou dédaignées (1). »

Une période s'ouvrait où le droit international était menacé dans son existence les règles qu'il proclame étaient appliquées non plus aux États mais aux princes eux-mêmes; les « grandes puissances >> prétendaient diriger à la fois les affaires générales de l'Europe et la politique intérieure des États d'importance secondaire. A la veille de la réunion d'Aix-la-Chapelle de 1818, le chancelier d'Autriche, Metternich, ne s'avisa-t-il point de faire ressortir que les cinq puissances, l'Autriche, la France, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, qui devaient prendre part au congrès y étaient non seulement appelées mais encore obligées par le traité du 20 novembre 1815? A la même époque, Frédéric Gentz montrait tous les pays européens << travaillés par une fièvre ardente, compagne ou avant-coureur des convulsions les plus violentes que le monde civilisé ait éprouvées depuis la chute de l'empire romain ». « C'est la lutte, ajoutait-il, c'est la guerre à mort entre les anciens et les nouveaux principes, entre l'ancien et un nouvel ordre de choses (2). » Les conférences et les congrès devaient fournir dorénavant un infaillible instrument de victoire aux princes « protecteurs et conservateurs de l'ordre public ».

Les « nouveaux principes », le « nouvel ordre de choses » triomphèrent; leur victoire ne se borna point au continent européen ; l'Amérique méridionale fut libérée. Les réunions diplomatiques ne furent point abandonnées. Cessant d'être des instruments d'oppression, elles élargirent leur mission. Le nombre des États qui y participèrent ne fit que grandir et quand, en 1899, se réunit la conférence de la Haye, parmi les puissances représentées figurèrent tous les Etats européens, des gouvernements américains, des pays asiatiques comme le Japon, la Chine, la Perse, le Siam. Il convient même de le noter, tandis que les

(1) JACQUES-LÉONARD CHODZKO, Le congrès de Vienne et les traités de 1815. Avec une introduction historique par CAPEFIGUE. Première partie, Introduction, p. v. (2) CLÉMENT DE METTERNICH, Mémoires, documents et écrits divers, 1881, t. III, p. 174.

congrès tenus en Europe prenaient un caractère universel et embrassaient le globe tout entier, à plus d'une reprise se formaient des congrès d'Etats américains. Peut-être bien que dans un avenir prochain s'ouvrira un congrès « panasiatique >>.

II

La question première est de savoir s'il existe une différence entre le congrès et la conférence. « Dans leurs traits essentiels, écrit Bluntschli, le congrès et la conférence ont le même but et le même caractère. Tous deux sont des réunions des représentants des Etats tenues en vue de discuter des questions de droit international, de travailler à amener une entente, de prendre des décisions communes et de conclure des traités. Il y a néanmoins entre eux des différences d'une nature politique plutôt que juridique (1). >> Le savant auteur passe en revue quelques-unes des circonstances. Le nombre des Etats représentés ne peut déterminer s'il s'agit d'un congrès ou d'une conférence; la présence des souverains, qui était autrefois la marque propre du congrès ne sert plus à le distinguer de la conférence; il ne saurait pas être question d'attribuer aux décisions du congrès une force obligatoire que ne possèderaient pas les résolutions des conférences. « On peut dire, ajoute-t-il, que de nos jours la différence entre les deux genres de réunions consiste surtout en ce que les congrès ont plus de prestige et de solennité. Ou bien les souverains y paraissent en personne, accompagnés de leurs ministres des affaires étrangères. Ou bien, du moins, les hommes d'État dirigeants des divers pays et les ministres des affaires étrangères y prennent part, soit seuls, soit assistés de délégués. Aux conférences, au contraire, ne figurent que des envoyés et des chargés de pouvoirs. Les gouvernements sont, jusqu'à un certain point eux-mêmes présents aux congrès; dans les conférences ne se trouvent que leurs plénipotentiaires. Mais cela même n'est point absolu. >>

Bluntschli a proclamé le droit pour tous les États européens indépendants de prendre part aux conférences et aux congrès généraux; il

(1) J.-G. BLUNTSCHLI, Le congrès de Berlin et sa portée au point de vue du droit international. Revue de droit international et de législation comparée, t. XI, p. 31.

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