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ou chaque époux, si les enfants ont été confiés aux soins d'une tierce personne, a le droit de surveiller l'entretien et l'éducation desdits enfants et de recourir aux tribunaux pour obtenir la répression des abus qui seraient commis. Chaque époux doit contribuer proportionnellement à ses facultés, aux frais de l'entretien et de l'éducation des enfants. Arg. ancien art. 303. Les diverses mesures commandées par l'intérêt des enfants peuvent être ordonnées par le tribunal soit d'office, soit sur la réquisition du ministère public ou de l'une des parties ou de l'un des membres de la famille. La loi n'établit aucune limitation quant au degré, et par conséquent un parent éloigné ou un allié peut mettre en mouvement l'action du tribunal. Il en était autrement d'après l'ancien art. 267 du code civil, qui accordait l'initiative des mesures à prendre à la famille, c'est-à-dire, suivant l'opinion générale, au conseil de famille.

198. Quels sont les moyens de coercition qui peuvent être employés pour assurer l'exécution de la décision du tribunal en ce qui concerne les enfants? Le concours de la force publique peut être requis, c'est incontestable. Plusieurs décisions judiciaires ont, en outre, soit autorisé la saisie des revenus de l'époux récalcitrant, soit prononcé contre lui une condamnation à des dommages et intérêts tant par chaque jour de retard apporté à l'exécution de la sentence ('). Mais la légalité de ces deux moyens semble assez douteuse (2). La loi du 5 décembre 1901 a créé une sanction pénale, dont nous parlerons à propos des effets du divorce relatifs aux enfants (3).

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199. Pension alimentaire. Le droit, pour l'un des époux, de réclamer une pension alimentaire existe dès que

(1) Cass., 18 mars 1878, S., 78. 1. 497; 8 nov. 1864, S., 65. 1. 318, D., 65. 1. 389; 4 avril 1865, S., 65. 1. 257, D., 65. 1. 387. L'émancipation des enfants par leur père dans le but de faire échec à la décision qui les confie à la mère ne peut empêcher l'exécution de cette décision. Cass., 4 avril 1865, précité. — Douai, 25 mai 1895,

S., 97. 2. 73.

(*) En tout cas, l'époux qui voudrait soustraire ses enfants à la garde de l'autre ne saurait être poursuivi comme coupable du délit d internement de mineurs. — Rennes, 14 oct. 1842, D., 43. 2. 266.

() V. infra, n. 270.

l'instance en séparation de corps ou en divorce est engagée; mais la provision alimentaire n'est accordée que dans le cas où l'époux demandeur n'a pas de revenus personnels; si les biens dont il a l'administration et la jouissance lui procurent des ressources suffisantes ou s'il gagne sa vie par son travail, aucune pension ne lui sera, en fait, accordée ('). Du reste, pour la détermination du chiffre de la pension, il convient de suivre les règles tracees dans les art. 208 et s. (C. civ.); la pension doit être proportionnée; d'une part, aux besoins de celui qui la sollicite, en tenant compte de son rang et de sa situation sociale, et, d'autre part, aux facultés de celui qui aura la charge de la servir (), question de fait qui rentre dans l'appréciation souveraine des juges du fond (3); ainsi qu'il a été dit, et en vertu, d'ailleurs, d'une règle commune aux autres pensions alimentaires, la détermination du chiffre est susceptible d'être modifiée et de varier avec les besoins du créancier et les facultés du débiteur (*).

200. La décision qui statue sur la pension alimentaire indique, en tenant compte des circonstances de fait, comment elle devra être payée, si elle sera quérable ou portable ou remise à un tiers, payable d'avance ou par termes échus, par quartier ou en une seule échéance, à partir de quel moment le paiement devra être effectué. Si le juge n'a pas fixé le point de départ de la pension, on prendra, en principe, la date de la requête, si la pension est allouée au demandeur, la date de l'ordonnance du président, si elle est allouée au défendeur (5). La pension cessera d'être due soit à partir du rejet de la demande (6), soit à compter de la

(1) Demolombe, n. 467; Aubry et Rau, V, n. 493, p. 195; Carpentier, op. cit., n. 1274 et 1278. Trib. Seine, 15 mars 1887, Fr. jud., 88, p.386.

(2) Aix, 19 août 1868, sous Cass., 7 mars 1869, S., 70. 1. 264, D., 70. 1. 106. Dijon, 4 fév. 1880, D., 81. 2. 36.

(3) Cass., 9 mars 1869, précité.

(*) Cass., 7 janv. 1901, D., 1901. 1. 32, 11 avril 1865, S., 66. 1. 167. 2 avril 1889, D., 89. 2. 104.

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Paris, 12 fév. 1864, S., 64. 2. 223, D., 66. 1.425;

11 mai 1874, S., 74. 2. 169, D., 75. 2. 41.

(5) Cpr. Trib. Seine, 21 juill. 1892, Le Droit, 4 août 1892; 12 juill. 1892, Ga..

Pal., 1892, n. 380. - Carpentier, op. cit., n. 1316.

(6) Paris, 8 mars 1890, D., 91. 2. 131.

transcription du jugement ou même, suivant les cas, à compter de la liquidation des droits des époux (1).

201. La provision alimentaire accordée à l'un des époux ne constitue, en principe, qu'une avance dont il doit être tenu compte lors de la liquidation. Aux termes des art. 311 et 252 (Civ.), la séparation et le divorce produisent rétroactivement leurs effets, dans les rapports entre époux, au jour de la demande. Le régime matrimonial à donc pris fin à ce moment et, spécialement, c'est à cette date que la communauté est réputée dissoute; chaque époux a droit d'obtenir le remboursement des fruits et intérêts de ses propres à partir de la demande ; ainsi le mari doit restituer à la femme les revenus de ses propres et les intérêts de ses reprises; en revanche, la communauté, dont l'usufruit prend fin, ne doit plus supporter les charges du mariage; dès lors, la provision alimentaire que le mari aurait fournie à la femme ne doit pas rester à la charge de la communauté. Si, d'une part, la communauté doit compte à la femme des intérêts de ses reprises et des revenus de ses propres, la femme, d'autre part, doit compte à la communauté de la pension alimentaire qui lui a été servie pendant l'instance; il y a lieu d'établir dans la liquidation une compensation entre ces deux dettes. Si les revenus et intérêts remboursés à la femme sont supérieurs à la pension allouée, cette pension aura, pour le tout, un caractère provisionnel et n'aura été qu'une avance; si les revenus et intérêts sont inférieurs, la pension sera considérée comme une avance jusqu'à concurrence des revenus à restituer, et, pour le surplus seulement, elle aura le caractère d'une véritable pension alimentaire (2), qui reste due tant que subsistent les devoirs des époux, c'est-à-dire jusqu'à la dissolution du mariage, qui se place au jour où est opérée la transcription du divorce (3).

La provision accordée à la femme ne saurait donc consti

(1) Paris, 21 avril 1894, Gaz. Pal., 30 mai 1894. Pal., 84. 2. 480.

Orléans, 27 déc. 1883, Gaz.

(*) Cass., 22 juill. 1889, S., 93. 1. 405, D., 91. 1. 421; 7 janv. 1890, S., 93. 1.

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405. Trib. Seine, 25 juin 1897, Le Droit, 15 oct. 1897.

3 Paris, 13 déc. 1895, S., 96. 2. 80, D., 96. 2. 418.

tuer ni une reprise, ni une indemnité à son profit, dans le cas où la pension n'aurait pas été payée pendant l'instance, si la liquidation démontre que les revenus étaient suffisants (').

202. L'époux qui a obtenu une pension peut seulement exiger l'exécution du jugement; mais par quels moyens? Il a le droit incontestable de procéder à une saisie-arrêt (*); même la saisie peut porter sur la portion du traitement que la loi déclare insaisissable pour toute autre cause qu'une dette alimentaire (3); l'époux créancier pourrait aussi faire prononcer le séquestre des revenus du débiteur (*); mais il n'aurait le droit ni de recourir à une saisie-exécution ou à une saisie immobilière, ni même de prendre une hypothèque judiciaire (5).

203. Lorsque la femme a obtenu une provision alimentaire, les fournisseurs qu'elle aurait négligé de payer n'auraient aucune action contre le mari (); ils ne pourraient, même pendant la durée de l'instance, saisir que la nue-propriété des biens propres de la femme. Si la femme, bien qu'ayant une résidence séparée, n'a pas obtenu de pension, quel sera le sort des dettes par elle contractées dans la limite de ses besoins? Les créanciers auraient action contre la femme et même contre le mari, si celui-ci avait autorisé la femme à vivre séparément; dans le cas où la résidence distincte de la femme aurait été fixée par la justice, les créanciers n'auraient d'action que contre la femme, mais ils pourraient saisir la pleine propriété de ses biens propres (7).

204. Provision ad litem.

L'art. 238 permet au président de statuer sur la pension alimentaire; mais il ne lui

(1) Paris, 28 août 1837, P., 38. 1. 666.

(2) Paris, 30 nov. 1812, S. chr. - Trib. Seine, 8 mai 1896, Gaz. Trib., 24 sept. 1896; 24 mars 1891, Gaz. Trib., 21 avril 1891.

(3) Trib, Amiens, 10 août 1893, Le Droit, 1er nov. 1893, par exemple, sur une pension militaire. - Trib. Albi, 3 mai 1899, Gaz. Trib., 1er juill. 1899.

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(*) Paris, 4 août 1871, D., 73. 2. 21.

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(*) Paris, 30 novembre 1812, précité. Trib. Seine, 1er fév. 1894, Le Droil, 29 el 30 oct. 1894.

(6) Cass., 16 fév. 1898, Gaz. Trib., 21 fév. 1898.

(7) Paris, 4 janv. 1890, La Loi, 1er mars 1890; 22 nov. 1889, Le Droit, 18 déc. 1890.

donne pas expressément le droit d'accorder une provision ad litem; on a donc pu soutenir, par argument a contrario, que le tribunal seul avait le droit de statuer sur cette provision. La jurisprudence s'est toutefois fixée en sens contraire

par des motifs d'utilité pratique; la provision ad litem est, en effet, nécessaire, dès le début de l'instance, et, d'autre part, elle n'est accordée que pour les frais à faire et non pour ceux déjà exposés (1). Les époux ont donc intérêt à demander une provision ad litem aussi tôt que possible et dès leur comparution devant le président.

La provision ad litem ne pouvant être accordée pour les frais déjà exposés, il faut en conclure que devant la cour on ne pourra demander une augmentation de la pension allouée en première instance, si l'on a poursuivi la procédure sans interjeter spécialement appel de la décision relative à la provision ad litem. La cour saisie de l'instance en divorce ne peut qu'accorder une provision pour les frais d'appel (*). La provision ad litem ne doit être accordée que si l'époux demandeur n'a pas les ressources nécessaires pour subvenir aux frais de la demande, comme dans l'hypothèse de la provision alimentaire (3). La provision ad litem doit être proportionnée aux facultés de l'époux débiteur et mesurée, d'autre part, sur l'importance probable des frais de la procédure (); c'est-à-dire qu'il n'y a pas à tenir compte ici, comme pour la pension alimentaire, du rang et de la situation sociale de l'époux qui la réclame (5). La provision ad litem doit comprendre non seulement les frais de procédure proprement dits, mais encore les honoraires de l'avocat qui ne se borneront pas d'ailleurs, suivant l'avis général, à la somme fixée par le tarif de 1807 (6). Elle doit être payée en

Rouen, 30 janv. 1897, S., 97. 2. 239; Carpentier, op. cit., n. 1357 s.
Paris, 27 mai 1888; 23 fév. 1864, S., 64. 2. 223, D., 66. 5. 25.

19 nov. 1846, S., 48. 2. 521.

Douai,

(*) Paris, 23 fév. 1893, Gaz. Pal., 93. 1. 64; 13 avril 1833, Gaz. Trib., 19 août 1893; 9 mars 1887, Gaz. Trib., 10 sept. 1887.

(Douai, 24 janv. 1899, D., 1900. 2. 188.

1.30.

Trib. Seine, 25 mai 1895, Gaz Trib., 23 sept. 1897.

Paris, 6 déc. 1892, Gaz. Pal., 93.

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