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Intentée, instruite et jugée. La demande n'est pas intentée comme les autres actions civiles; en effet les art. 236 s. du code civil et 875 et 878 du code de procédure civile la soumettent sur ce point à des règles toutes spéciales. Elle n'est pas non plus jugée comme les autres actions civiles; car le jugement doit être précédé des conclusions du ministère public (C. pr., art. 879). Il reste donc que la demande en séparation de corps est seulement instruite dans les formes établies pour les autres demandes, et c'est ce qu'a dit l'art. 879 du code de procédure civile. Le législateur de 1886 a commis sur ce point la même faute que le législateur du code civil et celui de 1884 (').

Les articles 236 à 244 lui sont applicables. Donc il n'y a pas lieu d'appliquer l'art. 249, d'après lequel : « Le juge›› ment ou arrêt qui prononce le divorce n'est pas susceptible » d'acquiescement ». D'autant plus que cet article déroge aux règles du droit commun, d'après lesquelles on peut toujours acquiescer à un jugement, et que le mérite de la dérogation est très contestable (supra, n. 149). La jurisprudence est en ce sens (2).

307. Comme les demandes en divorce, les demandes en séparation de corps sont de la compétence exclusive des tribunaux civils. En aucun cas une demande de ce genre ne peut être intentée devant un tribunal de répression, incidemment à l'action publique dont il serait déjà saisi. Arg. art. 326 et ancien art. 234.

Si quelques-uns des faits allégués par l'époux demandeur donnent lieu à une poursuite criminelle de la part du ministère public, l'action en séparation de corps demeurera suspendue jusqu'après la décision de la justice criminelle; car le criminel tient le civil en état (arg. art. 3 al. 2 C. I. cr.).

(1) Il serait plus exact de dire que la procédure de la séparation de corps ressemble, depuis la loi de 1886, sauf sur quelques points, à la procédure du divorce. V. Planiol, op. cit., n. 697.

(*) Cass., 28 déc. 1891, S., 92.1. 120, D., 92. 1. 114; 28 nov. 1887, S., 90. 1. 113. Besançon, 1er fév. 1893, D., 93. 2. 590. Bordeaux, 20 janv. 1899, S., 99. 2. 144. Il est certain, par suite, que l'appel d'un jugement prononçant la séparation de corps peut faire l'objet d'un désistement. — Cass., 23 oct. 1889, S., 90. 1. 61. Paris, 4 juin 1892, Loi, 7-8 sept. 1892.

Lorsque la justice criminelle aura définitivement statué, et quelle que soit sa décision, l'action en séparation de corps. pourra être reprise. Cpr. supra, n. 76.

Le tribunal compétent est celui du domicile commun des époux (C. pr., art. 59 al. 1 et 875 et arg. de ces articles).

308. L'époux demandeur débute par une requête adressée au président du tribunal et accompagnée des pièces à l'appui, s'il y en a (C. pr., art. 875). A la différence de ce qui a lieu pour les demandes en divorce, il n'est pas nécessaire que l'époux demandeur présente sa requête en personne, et, par conséquent, si cet époux ne peut se déplacer, le président du tribunal n'aura pas à se transporter près de lui. Cpr. C. civ., nouveaux art. 234 et 307, et C. pr., art. 875 (').

En réponse à cette requête, le président du tribunal rend une ordonnance portant que les époux comparaitront devant lui au jour fixé par ladite ordonnance (C. pr., art. 876). Cpr. C. civ., nouveaux art. 234, et C. pr., art. 877). Cette mesure, qui n'est pas prescrite à peine de nullité (arg. art. 1030 C. pr.), a pour but de soustraire les parties à toute influence étrangère; et de faciliter ainsi l'heureuse issue de l'essai de conciliation que va tenter le président du tribunal.

La tentative de conciliation devant le président du tribunal est d'ordre public. En conséquence, si cette tentative n'a pu avoir lieu par suite d'un fait imputable à l'époux demandeur, la procédure qui suit est nulle (2).

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309. Au sujet de cet essai de conciliation, l'art. 878 du code de procédure dispose: « Le président fera aux deux époux [ou au demandeur seul si l'époux défendeur ne se présente pas] les représentations qu'il croira propres à » opérer un rapprochement; s'il ne peut y parvenir, il rendra » en suite de la première ordonnance, une seconde portant » qu'attendu qu'il n'a pu concilier les parties, il les renvoie

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(') Il y a d'autres différences entre la procédure du divorce et celle de la séparation de corps: l'art. 247 n'est pas applicable à la séparation; il en est de même de l'art. 246 et de l'art. 249; le délai d'appel n'est pas suspensif en matière de séparation; le jugement de séparation n'est pas soumis à la formalité de la transcription. — V. Planiol, op. cit., III, n. 699.

(2) Paris, 28 août 1879, $., 81. 2. 244, D., 81. 2. 30.

PERS. IV.

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» à se pourvoir, sans citation préalable, au bureau de conci»liation».

Le membre de phrase que nous venons de souligner doit être entendu dans ce sens que les époux sont dispensés de l'épreuve ordinaire du préliminaire de conciliation, remplacée ici par l'essai de conciliation devant le président du tribunal. Tel qu'il est ponctué, le texte signifierait qu'après l'essai de conciliation qui a été tenté sans résultat devant lui, le président doit renvoyer les parties à se pourvoir devant le juge de paix, pour y subir l'essai de conciliation du droit commun. Il faut supprimer la dernière virgule, qui, bien évidemment, fait dire au législateur le contraire de ce qu'il

veut.

310. L'art. 878 C. pr. ajoute : « Il autorisera par la même » ordonnance la femme à procéder sur la demande, et à se retirer provisoirement dans telle maison dont les parties >> seront convenues ou qu'il indiquera d'office; il ordonnera que >> les effets à l'usage journalier de la femme lui seront remis ».

Il n'est plus nécessaire que le président du tribunal autorise expressément la femme à procéder sur sa demande, le nouvel art. 238 al. 4, déclaré applicable à la séparation de corps par le nouvel art. 307, disposant que, par le seul fait de l'ordonnance, « la femme est autorisée à faire toutes procédures pour la conservation de ses droits et à ester en justice jusqu'à la fin de l'instance et des opérations qui en sont les suites». Cpr. supra, n. 111.

Si la femme veut changer de résidence pendant le cours de l'instance, elle devra s'y faire autoriser en référé par le président du tribunal (nouvel art. 238 al. 5). La sanction de l'obligation imposée à la femme de résider dans le lieu qui lui a été assigné est la même qu'en matière de divorce. Cpr. supra, n. 207.

Enfin l'art. 878 C. pr. se termine par ces mots : « Les » demandes en provision seront portées à l'audience ». Pour la femme qui plaide en séparation de corps, comme pour celle qui plaide en divorce, la provision ad litem ne peut être allouée que par le tribunal. Mais aujourd'hui la provision alimentaire peut aussi être allouée par le président du tribu

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nal, dans l'ordonnance qui clôt l'essai de conciliation (nouvel art. 238 al. 2, et supra, n. 185).

Bien que l'art 878 C. pr. ne parle que de la femme demanderesse en séparation de corps, il est certainement applicable aussi à la femme défenderesse.

311. Les règles relatives à la garde provisoire des enfants pendant la durée de l'instance en séparation de corps, aux mesures conservatoires et au sort des actes passés par le mari en fraude des droits de la femme, sont les mêmes qu'en matière de divorce. Arg. art. 307, cbn. 242 et 243.

312. L'instance en séparation de corps une fois engagée conformément aux règles que nous venons de tracer, la cause sera instruite dans les formes établies pour les autres demandes, le ministère public entendu (C. pr., art. 879, et C. civ., art. 239 al. 1 cbn. 307), par conséquent en audience publique, sauf au tribunal à ordonner le huis clos « si la discus»sion publique devait entraîner ou scandale ou des inconvé »nients graves » (C. pr., art. 87). La reproduction des débats par la voie de la presse est interdite (art. 239 al. final cbn. 307). Le tout comme au cas de divorce.

Mais lorsque le droit du demandeur est bien établi, le tribunal ne peut pas, comme le permet le nouvel art. 246 pour le cas de divorce, suspendre le jugement pendant un délai de six mois. Arg. art. 307 (').

313. Les jugements sur les demandes en séparation de corps sont toujours susceptibles d'appel. L'appel doit être jugé en audience ordinaire (ordonnance du 16 mai 1835), Le délai de l'appel n'est pas suspensif de l'exécution comme en matière de divorce (supra, n. 159), mais seulement l'appel interjeté, conformément aux règles du droit com

mun.

Les règles spéciales au divorce en matière de jugement par défaut et d'opposition ne doivent pas être étendues à la séparation de corps; l'opposition demeure ici soumise aux règles ordinaires; notamment l'opposition au jugement par

(') Rennes, 21 fév. 1826, S., 28. 2. 167, D., 28. 2. 30. Duranton, II, n. 610; Demolombe, IV, n. 486; Carpentier, op. cit., n. 2595.

» à se pourvoir, sans citation préalable, au bureau de conci» liation ».

Le membre de phrase que nous venons de souligner doit être entendu dans ce sens que les époux sont dispensés de l'épreuve ordinaire du préliminaire de conciliation, remplacée ici par l'essai de conciliation devant le président du tribunal. Tel qu'il est ponctué, le texte signifierait qu'après l'essai de conciliation qui a été tenté sans résultat devant lui, le président doit renvoyer les parties à se pourvoir devant le juge de paix, pour y subir l'essai de conciliation du droit commun. Il faut supprimer la dernière virgule, qui, bien évidemment, fait dire au législateur le contraire de ce qu'il

veut.

310. L'art. 878 C. pr. ajoute : « Il autorisera par la même » ordonnance la femme à procéder sur la demande, et à se >> retirer provisoirement dans telle maison dont les parties >> seront convenues ou qu'il indiquera d'office; il ordonnera que >> les effets à l'usage journalier de la femme lui seront remis ».

Il n'est plus nécessaire que le président du tribunal autorise expressément la femme à procéder sur sa demande, le nouvel art. 238 al. 4, déclaré applicable à la séparation de corps par le nouvel art. 307, disposant que, par le seul fait de l'ordonnance, « la femme est autorisée à faire toutes procédures pour la conservation de ses droits et à ester en justice jusqu'à la fin de l'instance et des opérations qui en sont les suites ». Cpr. supra, n. 111.

Si la femme veut changer de résidence pendant le cours de l'instance, elle devra s'y faire autoriser en référé par le président du tribunal (nouvel art. 238 al. 5). La sanction de l'obligation imposée à la femme de résider dans le lieu qui lui a été assigné est la même qu'en matière de divorce. Cpr. supra, n. 207.

Enfin l'art. 878 C. pr. se termine par ces mots : « Les >> demandes en provision seront portées à l'audience ». Pour la femme qui plaide en séparation de corps, comme pour celle qui plaide en divorce, la provision ad litem ne peut être allouée que par le tribunal. Mais aujourd'hui la provision alimentaire peut aussi être allouée par le président du tribu

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