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corps; mais il permet le divorce pour causes déterminées et le divorce par consentement mutuel.

Les causes déterminées sont: 1° l'adultère; 2° les excès, sévices et injures graves; 3° une condamnation aux travaux forcés ou à la réclusion; 4° le fait, par l'un des époux, d'avoir attenté à la vie de l'autre, ou, ayant connaissance d'un attentat prémédité par un tiers, de n'y avoir pas mis immédiatement obstacle.

Le divorce par consentement mutuel ne peut avoir lieu avant que le mari ait vingt-cinq ans révolus et la femme vingt et un ans, ni avant qu'il se soit écoulé au moins un an depuis la célébration du mariage. Il ne peut être demandé après vingt ans de mariage ou quand la femme a plus de quarante-cinq ans.

d. Russie.

377. En ce qui concerne la Russie proprement dite, la loi distingue d'après la religion des époux. Si les deux conjoints ou l'un d'eux seulement appartient à l'église gréco-russe, c'est le tribunal ecclésiastique diocésain qui prononce le divorce, sauf à obtenir dans certains cas la confirmation du saint-synode ou à exercer un recours devant cette juridiction. Le divorce par consentement mutuel est prohibé, mais le divorce pour causes déterminées est possible dans les cas suivants: 1 adultère; 2° impuissance ou stérilité; 3° dégradation civique; 4° absence.

Si les deux conjoints appartiennent à une autre église que l'église russe et autorisant le divorce, la rupture du mariage est prononcée conformément aux règles de leur église et par l'autorité compétente d'après ces règles.

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TROISIÈME GROUPE. Législations ne permettant pas l'option et imposant la séparation de corps.

a. Autriche.

378. En Autriche, les sujets catholiques ne peuvent obtenir le divorce. Lorsque l'un des conjoints au moins est catholique, la loi ne permet que la séparation de corps, soit pour causes déterminées, soit par consentement mutuel.

Les causes pour lesquelles la séparation peut être prononcée à la demande de l'un des époux sont : 1o une condamnation pour adultère ou pour crime; 2° l'abandon malicieux; 3o une conduite désordonnée mettant en péril une partie importante de la fortune du demandeur ou la moralité de la famille; 4° une maladie durable ou contagieuse.

Que la séparation soit demandée pour cause déterminée. ou en vertu du mutuel consentement, elle doit être précédée d'une triple tentative de conciliation faite ou bien par le directeur de conscience ou bien par le tribunal.

Lorsqu'aucun des époux n'appartient à la religion catholique, le divorce est possible pour différentes causes, notamment en cas d'aversion réciproque insurmontable. Dans cette hypothèse, le juge doit prononcer, comme mesure préalable au divorce, une simple séparation de corps.

b. Espagne.

379. Pour les mariages canoniques, seules les autorités ecclésiastiques sont appelées à se prononcer sur leur annulation possible. Il ne s'agit pas d'une procédure de divorce, mais de demandes en nullité. L'autorité ecclésiastique peut permettre aussi la séparation de corps, qui, en Espagne, porte le nom de divorcio.

Pour les mariages civils, la loi n'autorise pas non plus. le divorce, mais la simple séparation de corps, pour l'une ou l'autre des causes suivantes: 1° adultère de la femme, ou adultère du mari entouré de certaines circonstances aggravantes; 2° mauvais traitements ou injures graves; 3° violence exercée par le mari sur la femme pour l'obliger à changer de religion; 4o la proposition du mari de prostituer sa femme; 5o la tentative du mari ou de la femme de corrompre leurs enfants ou de prostituer leurs filles ou la connivence dans leur corruption ou prostitution; 6° la condamnation du conjoint à la chaîne ou à la réclusion.

Dans tous les cas, qu'il s'agisse de mariages civils ou canoniques, c'est la loi civile qui réglemente les conséquences de la séparation de corps et les mesures à prendre pendant l'instance.

c. Italie.

380. Le code italien permet seulement la séparation de corps, soit pour causes déterminées, soit par consentement mutuel, à la condition que la convention soit homologuée par le tribunal.

Les causes déterminées de séparation de corps sont les suivantes: 1° l'adultère; 2° l'abandon volontaire ; 3° les excès, sévices, menaces ou injures graves; 4° une condamnation à une peine criminelle, postérieure au mariage, ou ignorée du conjoint demandeur à l'époque du mariage; 5° pour la femme, le fait que le mari n'adopte pas une résidence fixe ou que, en ayant les moyens, il refuse de l'établir d'une manière qui convienne à sa situation.

d. Portugal.

381. Dans ce pays, encore, la loi n'autorise que la séparation de corps pour les causes suivantes: 1° adultère de la femme ou adultère du mari entouré de certaines circonstances aggravantes; 2° la condamnation de l'un des époux à une peine perpétuelle; 3° les sévices et les injures graves.

En ce qui concerne la procédure, il est intéressant de noter que le juge doit convoquer un conseil de famille, lequel est chargé de statuer sur la demande et les questions accessoires qu'elle soulève. Les décisions du conseil de famille sont soumises à l'homologation du tribunal et il n'y a de recours contre elles qu'en ce qui concerne le chiffre de la pension alimentaire.

SECTION II

DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

382. La diversité des législations jointe à la fréquence des actions en divorce ou en séparation de corps rend particulièrement intéressantes, au point de vue pratique, les questions de droit international privé relatives à notre matière.

Aussi, n'est-il pas surprenant que l'on ait cherché à réglementer ces questions. On se préoccupe, avec raison, depuis un certain nombre d'années, de créer un véritable droit inter

national, par le consentement des différents Etats. Les questions sont étudiées par une commission composée d'hommes compétents et autorisés à représenter les pays adhérents. Lorsque l'on est parvenu à se mettre d'accord sur certains points, sur les règles à suivre pour solutionner les conflits de lois dans une matière déterminée, on rédige une convention internationale, qui est soumise ensuite à la ratification des chefs d'Etat. C'est ainsi que le 12 juin 1902, trois conventions ont été signées à la Haye, pour régler les conflits de lois 1° en matière de mariage; 2° en matière de divorce et de séparation de corps; 3° en matière de tutelle de mineur. Une loi des 16-21 avril 1904 a autorisé le président de la République à ratifier et à faire exécuter les conventions, et par un décret du 17 juin de la même année, ces accords internationaux sont devenus exécutoires en France (1).

Il nous suffit de retenir ici la convention relative aux conflits de lois et de juridiction en matière de divorce et de séparation de corps. Une remarque générale s'impose. Les règles qu'elle contient s'appliquent seulement aux nationaux des Etats qui ont adhéré ou qui adhèreront à la convention (2). Si le conflit intéresse d'autres personnes, la solution reste soumise aux principes ordinaires, tels qu'ils sont développés ci-dessous, sans que les tribunaux français soient astreints à suivre les textes de la convention internationale. Quant aux dispositions de détail que renferme cette convention, elles vont être analysées à propos des différentes difficultés que comporte la matière.

(1) On peut consulter avec profit l'excellent rapport que M. Thézard a présenté au Sénat lors du vote de la loi. V. J. O. du 22 février 1904, Annexes Sénal, n. 4, p. 1.

(Les Etats signataires de la Convention sont : la France, l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la Belgique, l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal, la Roumanie, la Suède, la Suisse. L'art. 11 permet aux Etats représentés à la troisième conférence de droit international privé d'adhérer à la convention jusqu'au 31 décembre 1904. D'après l'art. 12, la convention a une durée de cinq ans à partir du dépôt des ratifications; mais elle se renouvelle tacilement de cinq ans en cinq ans, sauf dénonciation.

§ I. Compétence.

383. La première, qui naturellement se pose, concerne la compétence des juridictions saisies. Les tribunaux français (') peuvent-ils connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps introduite par un étranger contre son conjoint étranger (2)? Conformément aux principes généraux sur la compétence des tribunaux français par rapport aux litiges entre étrangers, il convient tout d'abord de rappeler la règle admise par la jurisprudence et la majorité de la doctrine: la compétence de nos juridictions est purement facultative; d'office, un tribunal français peut se déclarer incompétent pour connaître d'une action en divorce qui intéresse deux étrangers; mais, à l'inverse, un tribunal français peut retenir la cause, lorsque l'exception d'incompétence n'est pas soulevée par le défendeur in limine litis (3).

384. La règle,, toutefois, comporte certaines exceptions. L'incompétence ne peut plus être proposée par le défendeur, ni prononcée d'office par le tribunal, lorsque les époux avaient été admis à établir leur domicile en France et avaient acquis ainsi la jouissance des droits civils (*), ou lorsque des conventions diplomatiques donnent à des étrangers une situation privilégiée, en leur accordant le « libre et facile accès » de nos juridictions (5).

(1) Nous n'envisageons la question qu'au regard des tribunaux français ; on ne parlera qu'incidemment des solutions consacrées par les juridictions étrangères. (2) Si l'un des époux était Français et l'autre étranger, ce qui peut se produire dans l'hypothèse d'une naturalisation postérieure au mariage, les tribunaux français seraient certainement compétents. Art. 14 et 15. — V. infra, n. 398. (3) Alger, 1er février 1897, J. Trib. Alg., 1er août 1897. Nous avons indiqué supra, n. 84 s. à partir de quel acte l'instance doit être considérée comme engagée. (*) Cass., 6 mars 1877, S., 79. 1. 105; 23 juil. 1855, S., 56. 1. 148, D., 55. 1. 353Paris, 13 mai 1879, S., 79. 2. 289.

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(5) Il faut, pour cela, que les deux époux étrangers habitent la France; si le défendeur était à l'étranger, la clause du libre et facile accès ne confèrerait pas au demandeur, comme à un Français, le droit de se prévaloir de l'art. 14. Parmi les étrangers qui peuvent invoquer de telles conventions diplomatiques, il faut citer Les Espagnols (traités du 7 janv. 1862, art. 2, et du 6 fév. 1882, art. 3. Cass., 3 juin 1885, S., 85. 1. 417, D., 85. 1. 409. Alger, 7 mars 1898, D., 99. 2. 377; 13 janv. 1892, Journ, de dr. int. priv., 1893, p. 175; 7 mars 1898, Le Droit, 10 mars 1898); les Portugais (traité du 9 mars 1853.

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Trib. Seine, 6 déc. 1887,

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