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un agent de l'Administration des Postes, mais l'employée du sieur Cornevin.

A la date du 14 décembre 1911, un jugement par défaut du juge de paix de Montmorency condamna M. Cornevin à payer à Mlle Sensal la somme de 158 francs, avec intérêts.

M. Cornevin fit opposition à ce jugement en soutenant que la situation des « aides » est réglementée par un arrêté ministériel du 4 juillet 1910; qu'il résulte de ses dispositions que les auxiliaires dont il s'agit sont bien des employées de l'Administration des Postes; que, si le receveur les rémunère directement, il le fait au moyen de fonds ayant reçu, à cet effet, une affectation spéciale; que, dans ces circonstances, l'action de la demoiselle Sensal impliquait l'appréciation d'actes et de règlements administratifs et que, par suite, l'autorité judiciaire était incompétente pour en con

naître.

Sur cette opposition, est intervenu un jugement contradictoire. en date du 21 décembre 1911, par lequel le juge de paix de Montmorency, statuant sur l'opposition, se déclara incompétent.

Mlle Sensal a interjeté appel de cette décision.

Le 7 février 1912, un déclinatoire à fin d'incompétence fut présenté par le préfet du département de Seine-et-Oise, devant le tribunal civil de Pontoise, juridiction d'appel.

Contrairement aux conclusions du ministère public, le tribunal civil de Pontoise a, par jugement du 16 juillet 1912, infirmé la sentence du juge de paix et s'est déclaré compétent, par le motif que les aides des Postes agréées par les receveurs traitant directement avec eux pour la fixation de leurs appointements, étant rétribuées par ces fonctionnaires qui peuvent les renvoyer, n'ont pas la qualité d'agents de l'Administration des Postes, mais sont les employées des receveurs et que, dès lors, la demoiselle Sensal avait, à bon droit, saisi la juridiction civile d'un litige portant sur la rupture du contrat qu'elle avait passé avec Cornevin et qui constituait de la part de ce dernier un simple acte de gestion. La demande d'évocation était toutefois rejetée, M. Cornevin n'ayant jamais conclu au fond.

Par arrêté en date du 17 septembre 1912, le préfet de Seine-etOise a élevé le conflit d'attributions.

C'est dans ces conditions que le Tribunal des conflits, après avoir

entendu M. Rau, membre du Tribunal, en son rapport, et M. Chardenet, commissaire du Gouvernement, en ses conclusions, a statué en ces termes :

Le Tribunal des conflits,

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

Considérant que la copie du jugement rendu sur la compétence par le tribunal civil de Pontoise le 16 juillet 1912 a été, en conformité de l'article 7 de l'ordonnance du 1er juin 1828, adressée, le 20 juillet 1912, au préfet du département de Seine-et-Oise, mais que la copie des conclusions du ministère public qui aurait dû, d'après le même article, être également adressée à ce fonctionnaire dans les cinq jours suivant le jugement, ne lui a été transmise, par suite d'une erreur, que le 4 septembre 1912;

Que, dès lors, c'est à partir de cette dernière date seulement qu'a commencé à courir le délai de quinzaine imparti par l'article 8 de ladite ordonnance pour élever le conflit;

D'où il suit que l'arrêté de conflit susvisé pris le 17 septembre 1912 est régulier;

Sur la validité du conflit :

Considérant qu'aux termes des arrêtés ministériels en date des 4 juillet 1910 et 8 février 1911, les femmes ne peuvent faire partie du cadre des <<< aides » attachées à certaines recettes des Postes et Télégraphes qu'autant que leur candidature a été admise par le directeur départemental et qu'elles ont prêté le serment professionnel prévu par le décret du 30 octobre 1901;

Que le receveur qui agrée une employée de cette catégorie et fixe avec elle le chiffre de ses appointements, lesquels sont prélevés sur des fonds affectés par l'État à cet usage, ne conclut pas, dans son intérêt privé, un contrat de louage de services appartenant au droit commun, mais exerce un acte de sa fonction prévu par les règlements susmentionnés et destiné à assurer la marche régulière d'un service public;

Que ce fonctionnaire, lorsqu'il congédie l'« aide » en usant du droit qui lui est conféré à cet égard par l'article 10 de l'arrêté du 4 juillet 1910, accomplit également un acte administratif rentrant dans le cercle de ses attributions;

Considérant que la demande formée par la demoiselle Sensal, ancienne aide du bureau de poste de Montmorency, contre le sieur Cornevin, receveur dudit bureau, à raison du congé que ce dernier lui avait donné, tendait à faire condamner le defendeur à lui payer: 1o une somme de 90 francs pour appointements du mois de novembre 1911; 2o une somme de 90 francs à titre d'indemnité pour brusque renvoi; 3° une somme de 20 francs également à titre d'indemnité pour défaut de délivrance d'un certificat;

Considérant qu'une action de cette nature, dans laquelle la deman

deresse ne relevait, à la charge du receveur, aucune faute personnelle se détachant de l'exercice de ses fonctions, impliquait l'appréciation d'un acte administratif et de ses conséquences;

Que l'autorité judiciaire était, dès lors, incompétente pour en connaître;

D'où il suit que le tribunal civil de Pontoise, en se déclarant compétent, a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs;

Décide :

ART. 1. L'arrêté de conflit ci-dessus visé est confirmé.

ART. 2. Sont considérés comme non avenus l'acte d'appel du 6 janvier 1912 et le jugement du tribunal civil de Pontoise en date du 16 juillet 1912.

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A défaut de tous actes administratifs, le juge du fond a qualité pour déterminer la nature d'une mare communale.

S'il déclare qu'en l'absence de toute justification, par la commune, de l'affectation de la mare et de ses dépendances, on ne peut les considérer comme faisant partie du domaine public municipal, cette déclaration est souveraine, et il est autorisé à en déduire qu'un particulier a pu prescrire certaines desdites dépendances.

La commune d'Azy s'est pourvue en cassation contre un arrêt de la Cour d'appel de Bourges rendu le 18 décembre 1907, au profit de Lavot fils.

La chambre civile, sur les conclusions conformes de M. l'avocat général Lombard, a statué en ces termes :

La Cour,

Sur le premier moyen :

Attendu que le juge du fond avait qualité, à défaut de tous actes administratifs, pour déterminer la nature de la mare, objet du litige; que l'arrêt attaqué décide souverainement qu'on ne peut, en l'absence de toute justification, par la commune, sur l'affectation de la mare et de ses dépendances, les considérer comme faisant partie du domaine public municipal; d'où il suit qu'en déclarant que Lavot fils a pu pres

crire la partie des dépendances de la mare, figurées au plan de l'expert par les lettres M N O, l'arrêt dénoncé n'a pas violé les articles de loi visés au moyen;

Sur le deuxième moyen :

Attendu, en ce qui concerne la parcelle O P, autre dépendance de la mare, que, tout en reconnaissant qu'elle est possédée par Lavot père, lequel n'est pas partie dans l'instance, le pourvoi fait grief à l'arrêt de n'avoir pas prononcé la démolition des constructions qui y sont élevées; Mais, attendu qu'il incombait à la commune d'agir contre le possesseur; que l'arrêt attaqué, qui adopte les motifs du jugement en ce qu'ils ne sont pas contraires aux siens propres, déclare à bon droit que, d'après son assignation, la commune ne visait que la partie M N O, et que, Lavot fils n'ayant jamais excipé de droits plus amples que ceux qui lui étaient contestés, n'avait pu succomber sur une prétention qu'il n'avait jamais formulée; qu'en statuant ainsi, l'arrêt, d'ailleurs motivé, n'a pas violé les textes de loi invoqués par le pourvoi;

Par ces motifs :

Rejette...

Toute mare communale doit être considérée comme publique dès l'instant que des habitants, fussent-ils peu nombreux, y lavent ou y abreuvent des bestiaux (Voir FABREGUETTES, Traité des eaux, II, p. 554). Mais il peut arriver qu'une telle mare ne sot pas utilisée par les habitants. Le juge du fond a le pouvoir souverain, à défaut d'actes administratifs, pour déterminer la nature de la mare et pour dire si oui ou non elle est affectée à un usage public.

RETRAITES OUVRIÈRES ET PAYSANNES.

(24 décembre 1912)

MINISTRES DU CULTE

Les ministres du culte ne rentrent dans aucune des catégories prévues par l'article 1 de la loi du 5 avril 1910 sur les retraites ouvrières.

Ils ne sont pas liés à l'évêque diocésain par un contrat de louage de services et, par conséquent, les allocations qu'ils reçoivent de l'évêché ne constituent pas un salaire au sens de la loi.

Le desservant d'une paroisse ne peut donc, à ce titre, bénéficier de la loi susvisée et c'est à bon droit que son nom est rayé de la liste des assurés obligatoires.

M. l'abbé Bernard a formé un pourvoi en cassation contre un jugement du tribunal civil d'Arcis-sur-Aube, en date du 14 décembre 1911.

La chambre civile, sur les conclusions conformes de M. Mérillon, avocat général, a statué en ces termes :

La Cour,

Sur le moyen unique du pourvoi :

Attendu que l'article 1 de la loi du 5 avril 1910 accorde, dans les conditions déterminées par ladite loi, une retraite de vieillesse aux salariés de l'industrie, du commerce, des professions libérales et de l'agriculture, aux serviteurs à gages et aux salariés de l'État, des départements et des communes;

Attendu que le jugement attaqué a décidé que l'abbé Bernard, en sa qualité de desservant de la paroisse de Dosnon, ne bénéficiait pas des dispositions de la loi du 5 avril 1910, et maintenu la radiation de son nom sur la liste des assurés obligatoires;

Attendu que les ministres du culte ne rentrent dans aucune des catégories prévues par l'article 1 de la loi susvisée; qu'ils ne sont pas liés à l'évêque diocésain par un contrat de louage de services et qu'en conséquence les allocations qu'ils reçoivent de l'évêché ne constituent pas un salaire au sens de la loi; que, dès lors, en décidant que l'abbé Bernard ne pouvait bénéficier de la loi du 5 avril 1910, le jugement attaqué en a fait une exacte application;

Par ces motifs :
Rejette...

EXPROPRIATION PUBLIQUE.

CONCLUSIONS DES PARTIES.

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CONTESTATIONS ÉTRANGÈRES AU MON

TANT DE L'INDEMNITÉ. DEVOIRS DU JURY. RENVOI DEVANT QUI INDEMNITÉ ÉVENTUELLE.

DE DROIT.

(21 janvier 1913)

En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, dans les cas prévus par l'article 3-§ 4 de la loi du 3 mars 1841 et, notamment, « toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité », les parties doivent être renvoyées à se pourvoir devant qui de droit, et le jury ne peut fixer qu'une indemnité éventuelle.

Les termes de cette disposition, dans leur généralité, s'appliquent au cas où, s'agissant d'une expropriation poursuivie contre une commission syndicale, l'expropriant, dans les conclusions par lui prises devant le jury, a demandé acte de ce qu'il contestait les pouvoirs du président de ladite commission pour la représenter dans la cause, et, au surplus (2o espèce) l'existence même du syndicat, et de ce qu'il ne prenait part aux opérations du jury que sous la réserve de tous ses droits ».

En présence de la contestation soulevée par de telles conclusions, doit être annulée, comme enfreignant la règle ci-dessus rappelée, la décision qui, au lieu de fixer

une indemnité éventuelle, alloue à l'exproprié une indemnité définitive, tranchant ainsi, implicitement, les difficultés étrangères au montant de cette indemnité

qui s'étaient élevées entre les parties.

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REV. D'ADM. 36e ANNÉE, T. I AVRIL 1913

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