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CHRONIQUE

CHRONIQUE D'ANGLETERRE

1. (Euvre parlementaire de l'année 1912. II. Hausse des salaires. III. Garantie d'origine britannique. - IV. Une expérience de représentation proportionnelle.

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I. Euvre parlementaire de l'année 1912. A l'année parlementaire écoulée se rattache en première ligne le souvenir de l'élaboration de la loi donnant une certaine autonomie à l'Irlande (Home Rule), ainsi que des débats sur la séparation de l'Église et de l'État dans le pays de Galles (Welsh Disestablishment Bill.) Mais grâce à la rapidité de discussion organisée par le Gouvernement, l'importance de ces travaux n'a pas empêché les Chambres de s'occuper, dans leurs longues sessions, de quantité d'autres questions. Parmi celles-ci se remarque le Minimum wage Bill, voté à la suite de la fameuse grève des mineurs qui pesa si lourdement sur l'industrie en général à la veille du printemps dernier.

Le Shops Act condensa dans un texte unique la réglementation du travail des employés de commerce. A signaler encore une loi améliorant le sort des instituteurs et leur retraite; des mesures destinées à favoriser les chemins de fer économiques ou trolleys (light railways), et le renforcement des dispositions tendant à prévenir et à réprimer la traite des blanches; à cette énumération sommaire, on pourrait ajouter plusieurs mesures d'ordre financier.

Le programme du Gouvernement comportait, d'autre part, l'examen de la réforme électorale tendant à l'établissement d'un suffrage plus large et sans vote plural, et cette étude ramenait le problème du vote des femmes, sinon universel, du moins attribuable à certaines catégories de personnes. On se rappelle comment fut rejetée, à une faible majorité, la tentative féministe. Quant à la réforme générale, votée en deuxième lecture au mois de juin, par les Communes, elle se trouve actuellement retardée dans son ensemble par un nouvel effort des suffragettes et de leurs partisans;

en effet, leurs prétentions ayant été présentées comme amendement pour être incorporées dans le texte, au moment de la troisième lecture, le président de la Chambre des Communes jugea qu'il serait nécessaire, dans ces conditions, de reprendre toute la procédure parlementaire.

Au mois de mai, vint en discussion un intéressant projet concernant les individus de mentalité anormale (Mental deficiency Bill), mais qui ne put alors aboutir.

L'attention des administrations fut particulièrement occupée par le rachat des téléphones, l'organisation de la télégraphie sans fil (contrat Marconi), et une enquête sur les questions agraires. Il s'agirait, sur ce dernier point, d'étudier l'amélioration des logements à la campagne, la mise en exécution d'un système facilitant l'acquisition de la propriété des terres par le cultivateur en s'inspirant du régime irlandais, enfin la fixation d'un minimum de salaire pour les ouvriers agricoles.

Quant aux assurances nationales, dont la date de la mise en vigueur arrivait l'été dernier, de nombreux incidents se déroulèrent avant que le Gouvernement pût trouver parmi les médecins le concours nécessaire pour l'exécution de la loi.

La marine bénéficia d'importantes réformes: le commandement pour le temps de guerre fut réorganisé au commencement de l'année; à la fin de l'année, la discipline et le droit de punir furent remaniés et mis en harmonie avec les conditions modernes du service; en même temps une augmentation de paie depuis longtemps promise était accordée.

L'armée n'a pas éprouvé de changements aussi marqués la campagne de Lord Roberts, pour l'institution d'un service militaire obligatoire, n'a pas été jusqu'ici couronnée de résultats législatifs, et le colonel Seely, qui a succédé au War Office à Lord Haldane, s'est tenu dans la même ligne de conduite que son devancier. Les deux innovations les plus importantes sont l'emploi de moteurs à pétrole pour les transports, et surtout l'organisation du corps d'aviateurs (Royal Flying Corps) qui est fort d'environ 300 individus. Il comporte 49 pilotes brevetés et forme 4 escadrons, disposant de 27 aéroplanes et de 3 navires aériens, sans compter les appareils du corps naval et les 15 aéroplanes de l'École centrale d'aviation: cette école a formé déjà 21 élèves.

La nouvelle arme a fait ses preuves aux manœuvres dernières en se renseignant avec une rapidité impressionnante sur les forces et les mouvements des armées en présence.

Ce n'est pour ainsi dire pas sortir de cet ordre d'idées que de rappeler comment, lors de la clôture de l'année financière 1911, l'énorme excédent de recettes par lequel se soldait l'exercice (6.545.000 livres), fut gardé par le Gouvernement à sa disposition, au lieu d'être affecté, suivant l'usage, à l'amortissement des dettes de l'État; l'opposition elle-même s'inclina alors devant ce procédé qu'inspirait le souci de la défense nationale. Un peu plus tard, le Chancelier de l'Échiquier put faire de ces fonds l'emploi habituel.

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II. Hausse des salaires. Au cours de l'année 1912, le mouvement de hausse des salaires, déjà signalé en 1911, s'est poursuivi. Dans les dix premiers mois, une augmentation de 104.789 livres est constatée sur les salaires hebdomadaires de 1.618.374 individus. Toutes les branches de l'industrie ont leur part dans ce progrès, mais il faut citer surtout les mines, tissages, chantiers de navires, bâtiment, industries du fer et de l'acier. L'avance gagnée par les salaires s'affirmait encore davantage à la fin de l'année, et les travailleurs de l'industrie maritime devaient voir leurs gains s'améliorer encore avec l'année nouvelle.

En même temps, la tendance à raccourcir les heures de travail s'accentuait. On calcule que pour les dix premiers mois, la durée du travail de 52.390 salariés s'est trouvée abrégée de 117.637 heures.

Ces changements ont été accompagnés d'une augmentation moins agréable à la classe ouvrière : celle du prix des denrées.

En ce qui concerne le pain et la farine, pour lesquels les rapports officiels sont les plus complets, on constate que, de novembre 1911 à novembre 1912, le prix moyen du pain a augmenté de 1 shilling 5 pence pour 4 livres, et celui de la farine de 10 pence 1/4 par 4 livres.

Malgré la grève mémorable des houilleurs et divers troubles économiques de moindre importance, l'année 1912 a été marquée par une prospérité industrielle et commerciale sans précédent.

III. Garantie d'origine britannique.

Pour signaler

au consommateur, encore plus nettement que par le passé, les marchandises importées de l'étranger et favoriser l'industrie britannique, un projet de loi publié à la fin du mois de décembre dernier (1) dispose que tout objet importé revêtu d'inscriptions de nature à faire croire qu'il a été fabriqué dans les îles de la GrandeBretagne, devra porter obligatoirement l'indication de son origine réelle, et ce, au moyen des termes : « Provenant de l'Empire britannique» (British Empire made), s'il s'agit d'objets manufacturés en territoire britannique en dehors de la métropole, ou « Non britannique» (Not british) pour les articles d'importation fabriqués à l'étranger.

Une déclaration d'origine, affirmée sous serment, accompagnerait, suivant le système, les marchandises portant la mention : « Provenant de l'Empire britannique ».

L'importation de marchandises ne remplissant pas les conditions imposées par ce projet de loi serait interdite, sous la sanction de poursuites cont les personnes vendant de telles marchandises ou trompant sur l'origine des marchandises offertes et mises en vente.

IV. Une expérience de représentation proportionnelle. Estimant le système de la représentation proportionnelle propre à stabiliser le pouvoir de la majorité sans étouffer la voix des minorités, et à assurer, suivant une forte probabilité du moins, le retour au Parlement, à chaque consultation électorale, des hommes les plus éminents de chaque parti, une société, présidée par Lord Avebury, s'est donné pour but de gagner les esprits à ce mode de scrutin. Voici quels résultats fournit récemment une espèce de plébiscite organisé par cette société, à titre de démonstration du fonctionnement du système préconisé par elle: 47.874 électeurs de bonne. volonté y avaient pris part sur l'invitation de la presse, et l'on supposait sept sièges vacants à répartir entre douze candidats dont la liste, composée de noms de personnages politiques en vue, avait été publiée à l'intention des votants.

Chaque électeur était invité à choisir sur la liste publiée autant de candidats qu'il le désirait, en indiquant un ordre de préférence : de cette manière, si le candidat désigné en première ligne se trou

(1) Voir supplément au Times du 30 décembre 1912.

vait réunir un excédent de voix, superflu pour sa nomination, ou s'il avait, en sens inverse, obtenu trop peu de suffrages pour conquérir un siège, les choix subsidiaires permettraient au bulletin de vote d'exercer néanmoins un effet utile en concourant à former, au profit du candidat désigné subséquemment, le quotient à obtenir. Le premier dépouillement, qui fut l'œuvre de deux heures, aboutit au classement suivant, d'après les désignations en première ligne :

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Par conséquent, à premier examen, seuls les deux candidats les plus favorisés, un libéral et un unioniste, avaient atteint et dépassé ce quorum. Pour les cinq sièges restant à pourvoir, leur attribution dépendait des choix subsidiaires inscrits sur les bulletins des élus excédant leur quotient. Par l'attribution des résultats de cette nouvelle consultation aux candidats non encore pourvus, finalement le parti du Gouvernement obtint cinq sièges (avec 27.531 suffrages libéraux, 3.473 suffrages travaillistes, 1.221 suffrages nationalistes); les unionistes se voyaient accorder deux sièges par 15.649 voix.

Dans les conditions de l'expérience, les opérations du dépouillement durèrent environ neuf heures.

Louis M.

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