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CHRONIQUE D'ITALIE

La loi des garanties et l'exequatur. — A la suite de l'occupation de Rome, en 1870, et de la suppression complète du pouvoir temporel de la papauté, l'Italie a réglé la situation faite au pape et à l'Église d'Italie par une loi célèbre, votée en 1871 et appelée : loi de garantie. Tout en proclamant légalement la suppression du pouvoir temporel des papes, qui résultait en fait de l'occupation de Rome par les troupes italiennes depuis le 20 septembre 1870, la loi des garanties a fait au souverain Pontife, chef de l'Église catholique, une situation exceptionnelle. Elle lui a reconnu l'état de souverain avec tous les attributs inhérents à ce titre : exterritorialité dans les édifices laissés à sa disposition; exemption de la juridiction ordinaire; droit de recevoir et d'accréditer des représentants diplomatiques, etc. Enfin, elle a mis à la disposition du pape une liste civile annuelle de 3 millions de francs que, depuis quarantedeux ans, d'ailleurs, les pontifes qui se sont succédé au Vatican, ont refusé de toucher.

En outre, appliquant la formule de Cavour Libera Chiesa nel libero Stato (L'Église libre dans l'État libre), la loi des garanties a laissé l'Église catholique libre de s'organiser et de fonctionner, avec la jouissance des fondations qui lui appartenaient séculairement et le libre recrutement de ses ministres.

A ce dernier point de vue, la loi a réservé seulement au roi d'Italie un droit de veto, connu sous le nom d'exequatur. On sait que dans la langue diplomatique, l'exequatur est le droit pour un État d'agréer ou de refuser d'agréer les représentants d'un autre État. Il s'applique spécialement aux nominations de consuls. On appelle encore de ce nom le droit qui appartient aux tribunaux d'un pays d'approuver les jugements des tribunaux étrangers, pour leur donner force exécutoire.

Un intéressant débat a eu lieu à la Chambre italienne, le 10 février sur la question de l'exequatur religieux. La loi des garanties n'a voulu ni toucher à la conscience religieuse, ni attenter au pouvoir du pape, mais elle se réserve de ne reconnaître comme curés ou évêques que les prêtres qui ne paraissent pas un danger pour le pouvoir civil.

Le Gouvernement use très rarement de ce droit; mais récemment il a cru devoir refuser l'exequatur à l'archevêque nommé à Gênes par le pape, Mgr Caron. D'où la question qui fut portée à la Chambre.

Après avoir entendu divers députés parler en faveur de l'archevêque, le garde des Sceaux, M. Finochiaro-Aprile parla à son tour au nom du Gouvernement. Il rappela d'abord les origines historiques du droit invoqué: « La loi des garanties, dit-il, renonçant à beaucoup de moyens de défense, a réglé dans l'esprit le plus large les rapports entre l'Église et l'État. Un des faibles pouvoirs que l'État s'est réservés est la faculté d'accorder ou de refuser le consentement royal aux concessions de bénéfices ecclésiastiques; cette faculté, réservée au souverain, ne se comprendrait pas si elle ne s'appliquait qu'à des intérêts économiques ou administratifs (Très bien!) et si elle se limitait à un simple acte d'enregistrement (Marques d'approbation). Les dispositions de la Constitution et de la loi des garanties montrent clairement que ce droit fut réservé au Gouvernement avec toute sa plénitude (Vive approbation). Ainsi l'ont déclaré jadis d'autres gardes des Sceaux, notamment MM. Vigliani, Pisenelli et Zanardelli. Le Gouvernement a le droit d'examiner les antécédents du prêtre investi du bénéfice or de l'enquête ouverte sur le compte de Mer Caron, il est résulté que ce prélat traite le mariage civil de concubinage (Rumeurs) et qu'il condamne les journaux catholiques non batailleurs (Rumeurs). » Le ministre lit alors des extraits de journaux partisans du pouvoir temporel (temporalisti) qui traitent d'indigne usurpation et de spoliation la revendication de Rome par l'Italie, et outragent le patriotisme qui veut l'Italie libre et une; il abandonne cette presse au mépris des honnêtes gens (Vifs applaudissements), notant seulement que c'est celle-là qui est bien vue de l'archevêque. « En présence de tels sentiments, il n'était pas possible de lui concéder l'exequatur (Très bien !) Équité ne signifie pas faiblesse, ne signifie pas lâcheté contre qui prétend attenter à l'intégrité de la patrie, avec des revendications impossibles. Contre ceux-là, en toute circonstance, le Gouvernement italien fera usage des armes que la loi lui fournit pour la défense des suprêmes intérêts de la civilisation et de la patrie (Approbation et vifs applaudissements). »

Le ministre, à la suite de ces déclarations, reçut les félicitations d'un grand nombre de députés.

On voit par là que la législation italienne, bien qu'ayant beaucoup de rapports avec notre loi sur la séparation du 9 décembre 1905, en diffère sur un point essentiel en réservant au Pouvoir civil un droit de veto sur les nominations ecclésiastiques. A cet égard, elle est moins libérale que la législation française. Si, d'ailleurs, l'Église italienne a pu conserver les biens dont elle jouissait antérieurement, la loi française ne s'y opposait pas dans son texte primitif. C'est seulement à la suite du refus de constituer des associations cultuelles que le législateur français a été amené à attribuer les biens des menses épiscopales, curiales et des fabriques, et à ne laisser la jouissance des églises aux ministres du culte et aux fidèles qu'à titre d'occupants de fait, par suite du refus d'observer les formalités indispensables pour transformer cet état de fait en un titre juridique d'occupation.

J. A.

CHRONIQUE DE L'ADMINISTRATION FRANÇAISE

I. Chronique parlementaire.

II. Changements ministériels. III. Actes de l'état civil. Tables. IV. Frais de déplacement des percepteurs. V. École primaires. Classe et logement vacants; droit de la commune. - VI. Armée. Frères servant ensemble. Incorporation dans le même régiment. VII. Retraites ouvrières et paysannes.

I. Chronique parlementaire. Sénat. — Dans la séance du 4 mars, le Sénat a voté, après déclaration de l'urgence d'une part, une proposition de loi, adoptée par la Chambre des Députés, ayant pour objet de modifier l'article 3 de la loi du 17 mars 1909, relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce, et, d'autre part, la proposition de loi de M. Ribot, tendant à admettre les sociétés et unions de sociétés de secours mutuels à bénéficier d'avances de l'État en vue de l'application de la loi du 10 avril 1908 relative à la petite propriété et aux maisons à bon marché; puis la Haute Chambre a continué la discussion du projet de loi adopté par la Chambre des Députés, relatif aux usines hydrauliques établies sur les cours d'eau et canaux du domaine public. Cette dernière discussion devait se poursuivre le 6 et le 7. Le 7 mars, en outre, fut discuté, mais pour aboutir à un renvoi à la Commission, le projet de loi adopté antérieurement au Palais-Bourbon, concer

nant l'émission des timbres-primes et des timbres-date de com

merce.

Le 9, après avoir ouvert un crédit de 12.000 francs pour les funérailles de M. Alfred Picard, vice-président du Conseil d'État, le Sénat aborda la discussion du projet de loi adopté par l'autre Chambre, portant modification aux lois organiques sur l'élection des députés.

Les débats continuèrent les 14, 15, 17 et 18; ce dernier jour, le vote de l'amendement Peytral, hostile à la représentation proportionnelle sur la base dite du quotient, amenait le retraite du minitère Briand. Au commencement de la séance du 18, le Sénat avait voté le projet de loi précédemment adopté par la Chambre des Députés, portant approbation des conventions signées à Washington, le 2 juin 1911, en vue de modifier: 1o la convention d'union de Paris du 20 mars 1883, relative à la protection internationale de la propriété industrielle, ainsi que le protocole de clôture annexé à cette convention; 2o l'arrangement de Madrid du 14 avril 1891, pour l'enregistrement international des marques de fabrique ou de commerce; 3o l'arrangement de Madrid, du 14 avril 1891, concernant la répression des fausses indications de provenance sur les marchandises.

Le cabinet Louis Barthou constitué, sa déclaration fut lue dans la séance du 25, et ce jour-là fut adopté, après déclaration de l'urgence, un projet de loi voté au Palais-Bourbon, tendant à modifier l'article 3 du Code forestier qui fixe le minimum d'âge exigé pour l'admission aux emplois de l'Administration des Eaux et Forêts. Le 27, après divers votes budgétaires, notamment l'ouverture de deux nouveaux douzièmes provisoires, le Sénat adopta le projet de loi, précédemment voté par l'autre Chambre, relatif à la constitution des cadres et des effectifs de la cavalerie.

La séance du 28 fut consacrée à d'autres votes budgétaires, à ceux spécialement qui se rattachent aux opérations du Maroc; fut voté aussi le projet de loi adopté par la Chambre des Députés, ayant pour effet de permettre l'institution de péages sur les navires en démolition à flot.

Enfin, le 29, outre le vote de crédits additionnels aux crédits provisoires, le Sénat donna sa sanction au projet de loi, auparavant accepté au Palais-Bourbon, et portant approbation de la convention

conclue à Madrid le 27 novembre 1912 entre la France et l'Espagne en vue de préciser la situation respective des deux pays à l'égard de l'Empire chérifien.

Chambre des Députés. — Avec la loi de finances, qui englobe des dispositions législatives diverses et importantes, par exemple sur les traitements des douaniers, agents des contributions indirectes et des manufactures de l'État (2e séance du 4); des postes et télégraphes et des agents de police (1re du 5); des instituteurs (2o du 5 et les deux séances du 6, 1re séance du 7) et qui occupa encore les premières séances du 11, les deux séances du 12, du 13 et du 14, celle du 15 étant marquée par le vote de l'ensemble, ce sont les débats portant sur les projets de loi relatifs à la fréquentation des écoles et à la défense de l'école laïque (3, 2o du 4; 10, 2o du 11, 17, 18) qui absorbèrent la majeure partie du temps.

Le projet de loi portant approbation de la convention conclue avec l'Espagne au sujet du Maroc, fut adopté dans la seconde séance du 7.

Diverses questions budgétaires, notamment l'ouverture de deux douzièmes provisoires et de crédits additionnels aux crédits provisoires, les crédits pour les opérations du Maroc, furent traitées dans les séances du 25 et du 29 (2o séance).

Enfin à lui seul, le projet de loi sur l'amnistie occupa presque entièrement la séance du 28 et les deux du 29.

Notons les autres questions qui firent l'objet des travaux de la Chambre au cours du mois de mars:

Nous trouvons d'abord, dans l'ordre chronologique, l'adoption d'un projet de loi précédemment voté au Sénat, modifiant les articles 7, 57, 140 du livre II du Code du travail et de la prévoyance sociale (3).

Le lendemain, 4, était votée une proposition de loi de M. Paul Aubriot tendant à modifier l'article 3 du livre II du même Code. Dans la même séance, la Chambre vota une proposition de loi venue du palais du Luxembourg tendant à modifier les articles 148, 158, 159 et 160 du Code civil, puis une proposition de loi de M. Maurice Viollette ayant pour objet de modifier les articles 296 et 228 du Code civil (délais de viduité), enfin une proposition de loi tendant à l'abrogation du paragraphe 2 de l'article 324 du Code pénal.

Dans la seconde séance du 13 furent adoptés le projet de loi

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