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éclatante, que je suis certain, messieurs, d'être l'interprète fidèle des mouvemens de vos cœurs en vous proposant de porter au pied du trône, pour dernier acte de votre honorable existence, une adresse qui frappe les peuples de cette idée que nous avons reçu l'acte du Sénat sans regrets pour nos fonctions politiques, sans inquiétude pour la patrie, et que les sentimens d'amour et de dévouement au monarque qui ont animé le corps vivront éternellement dans chacun de ses membres. »

Cette proposition est adoptée. La commission chargée de rédiger l'adresse, et de la présenter séance tenante, est composée de MM. Fabre (de l'Aude), président; Dacier et Delaistre, secrétaires'; Carrion-Nisas, Perrée, Delpierre, Gillet-Lajaequeminière, Fréville.

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ADRESSE du Tribunat à l'empereur.

Sire, au moment où vos fidèles sujets les membres du Tribunat ont appris que leurs fonctions touchaient à leur terme, ils ont dû s'interroger sur la manière dont ils les avaient remplies; et en cherchant quel témoignage ils pouvaient se rendre à eux-mêmes, ils ont trouvé de nouvelles raisons pour apporter au pied du trône l'hommage de leur admiration et de leur reconnaissance.

» Le Tribunat était placé dans le système constitutionnel pour être l'organe de l'opinion publique : si le devoir qui nous était imposé a été facile à remplir, c'est parce que Votre Majesté a réuni tous les genres de gloire et surpassé toutes les espérances.

» Sire, quand votre sagesse effaçait les traces et presque le souvenir des désordres antérieurs à votre règne; quand votre main puissante donnait une nouvelle impulsion à toutes les parties de l'administration; quand votre génie concevait ces fois qui mettent la doctrine des siècles passés en harmonie avec l'expérience des temps modernes, nous n'avions qu'à mêler nos applaudissemens aux acclamations générales.

» Plusieurs fois l'imprudence de l'étranger les troubla par des cris de guerre; mais la France resta inaccessible à toute espèce d'alarme.

»En présageant alors tant de triomphes, tant de triomphes bientôt suivis par les traités les plus mémorables, nous ne faisions encore qu'exprimer la confiance que l'habitude des prodiges avait inspirée à votre bon et grand peuple.

Sire, admis pour la dernière fois à vous offrir l'expression des sentimens dont le Tribunat fut constamment animé pour votre auguste personne, nous ne pouvons nous

défendre d'une vive émotion; mais elle ne nous empêchera pas de nous montrer jusqu'à la fin religieux interprètes de l'opinion publique. Nous honorons avec elle les hautes pensées qui portent Votre Majesté à environner le Corps législatif d'une nouvelle considération, et à perfectionner des institutions qui tiennent de si près à l'intérêt national.

>> Sire, nous osons mesurer d'un regard satisfait l'espace que nous avons parcouru, bien sûrs d'avoir toujours marché dans les voies de l'honneur et de la fidélité; et lorsque Votre Majesté daigne nous accorder des témoignages solennels de son approbation et de sa bienveillance, nous croyons moins arriver à l'extrémité de notre carrière politique qu'atteindre le but de tous nos efforts, et la récompense la plus précieuse pour notre dévouement. »

SÉANCE DU CORPS LÉGISLATIF DU 18 SEPTEMBRE 1807.

DISCOURS de M. Boulay (de la Meurthe), conseiller d'état.

(L'orateur du gouvernement donné d'abord lecture du senatusconsulté du 19 août 1807.)

« Messieurs, le senatus-consulte dont vous venez d'entendre la lecture est la suite naturelle de ceux des 16 thermidor an 10 et 28 floréal an 12.

» Par le premier le Tribunat avait été réduit à cinquante membres, et devait se diviser en sections.

» Par le second quelques unes de ses attributions avaient été reportées dans le Sénat il n'avait plus été envisagé que comme un conseil propre à l'examen des projets de loi; et pour le rendre plus utile sous ce rapport, on lui avait interdit cet examen en assemblée générale et publique; on l'avait divisé en trois sections, et chacune d'elles devait discuter séparément les projets de lois, qui lui étaient d'abord communiqués par le Conseil d'état, et ensuite transmis officiellement par le Corps législatif ; chacune devait former son vœu particulier, et vous le faire porter par des orateurs chargés d'en développer les motifs.

» Ce qui est à remarquer, c'est qu'aux termes de l'article 87 de ce senatus-consulté ces sections da Tribunat constituaient les seules commissions du Corps législatif. Or n'était-ce pas une chose sans exemple, et qui paraissait contraire à la nature même des choses, que les commissions d'un corps fussent composées de membres d'un corps différent? Par là le Tribunat était devenu une partie de vous-mêmes, et cette

partie vous était étrangère : n'y avait-il pas dans cette combinaison quelque chose qui impliquait contradiction?

» Ce vice disparaît aujourd'hui le senatus-consulte dont nous venons de vous donner communication remet les choses. dans leur état naturel; il vous rend en quelque sorte vos propres organes en replaçant dans votre sein vos commissions, et en les formant de vos membres.

» Par ce changement des rapports plus intimes et plus immédiats vont être établis entre les deux branches du pouvoir législatif, et cette partie de notre système constitutionnel en reçoit tout à la fois et plus de simplicité et plus d'utilité.

» Le gouvernement a seul l'initiative des lois : les projets qu'il présente ne peuvent pas même être modifiés par le Corps législatif; il faut que celui-ci les adopte ou les rejette en leur entier; et certes l'expérience nous a bien appris que cette prérogative du gouvernement était une des principales garanties de la stabilité des lois et de la tranquillité publique. Mais il en est encore une autre dans la sagesse de ces lois, et par conséquent dans la manière dont elles se préparent; et c'est ici que se déploie, comme dans tout le reste, la constante sollicitude du chef de l'Etat pour le bonheur de ses peuples. Toujours attentif à leurs besoins, à tout ce qui peut améliorer leur bien-être, il recueille partout les connaissances nécessaires; il appelle de tous côtés les lumières, et, toujours plus riche de ses propres idées que de celles des autres, il les médite dans son Conseil d'état, et y fait dresser les projets de loi. Cependant, avec quelque soin qu'ils aient été préparés, il craint encore qu'ils n'aient pas acquis le degré de perfection dont ils sont susceptibles: on peut s'être trompé sur l'utilité de quelques dispositions; il peut s'y être glissé des ambiguités dans le sens, des obscurités dans la rédaction, des défauts de liaison dans les idées. Or c'est pour préserver la législation de ces vices que S. M. a voulu, et que nos Constitutions ordonnent qu'avant d'être soumis définitivement à la sancțion du Corps législatif les projets de loi subissent une discussion préalable, une censure utile de la part d'hommes choisis dans un corps différent. C'était pour remplir cet objet essentiel que le Tribunat, recevant une organisation plus sage, avait été divisé en différentes commissious; et c'est pour le remplir d'une manière plus sûre et plus facile encore que ces commissions vont être formées dans votre sein, et composées de ceux de vos membres dans les lumières et l'expérience desquels vous placerez plus particulièrement votre confiance.

Ainsi, messieurs, vous serez désormais appelés non seu

lement à sanctionner les projets de loi, mais encore à concourir à leur formation. Il va s'établir entre les sections du Conseil d'état et vos commissions une communication de zèle et de lumières, unc noble émulation pour le bien public; et tel sera l'heureux effet de ce concert, que, sans porter aucune atteinte aux prérogatives essentielles du gouvernement et du Corps législatif, il ne servira qu'à vous diriger plus sûrement dans l'exercice de vos fonctions, qu'à vous donner plus de confiance dans votre vote, et à la nation une garantie de plus de la sagesse de ses lois.

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Un résultat si utile sera moins l'effet d'un changement que d'une amélioration dans nos Constitutions. En supprimant le nom d'un des corps de l'Etat on conserve réellement tout ce que ce corps avait de bon dans son organisation; ce n'est donc point ici une abolition, mais une simple réunion, leur centre naturel, de fonctions' importantes, et qui se trouvaient mal à propos séparées et distinctes.

>> Tels sont aujourd'hui, messieurs, les progrès de l'expérience et de la raison publique, qu'on pourrait mettre en problème si le Tribunat, tel qu'il avait été d'abord organisé, était une institution salutaire et bien assortie même dans la Constitution de l'an 8, bien que cette Constitution conservât encore beaucoup de cet esprit inquiet et démocratique qui nous avait si longtemps agités. Mais depuis que le vœu national, fortement exprimé, avait donné au gouvernement une assiette plus sclide et plus stable; depuis que la première magistrature avait été déclarée d'abord à vie, ensuite héréditaire, et qu'une famille impériale se trouvait constituée, il est évident que le Tribunat n'offrait plus dans notre édifice politique que l'aspect d'une pièce inutile, déplacée et discordante.

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Cependant, messieurs, ce qui est bien remarquable, c'est que cette institution, qui, considérée en elle-même, aurait pu devenir inquiétante et dangereuse, n'avait jusqu'à présent produit que de bons résultats; mais ces résultats il ne faut les attribuer qu'à d'heureuses circonstances, et surtout à l'excellent esprit des membres du Tribunat, qui se sont constamment montrés plus sages que l'institution même. C'est un témoignage, messieurs, que nous aimons à leur rendre devant vous, et pour ainsi dire en présence de la nation tout entière: : en cela nous nous conformons aux intentions de S. M., et nous remplissons un devoir bien doux. En effet, au lieu de se jeter dans une opposition fausse et mal entendue, que semblait appeler quelques unes de leurs attributions, et le nom même de leur établissement, les membres du Tribunat n'ont pas cessé de seconder, avec un zèle aussi ardent qu'éclairé,

les mesures de toute espèce qu'un gouvernement sage et restaurateur créait successivement, et poursuivait avec une incroyable activité pour la gloire et le bonheur de la patrie. Quelle part utile n'ont-ils pas eue à la confection de nos lois civiles, administratives et financières ! Avec quel empressement ne se sont-ils pas montrés les interprètes aussi éloquens que fidèles du vœu national pour le perfectionnement de uos chartes politiques! Et certes leur conduite était d'autant plus désintéressée et plus noble, que chaque pas que nous faisions, et qu'ils nous aidaient à faire vers notre amélioration, mettait toujours plus à découvert l'inutilité de leur établissement.

»La patrie ne peut donc voir en eux que des citoyens utiles et respectables. Déjà S. M. a daigné témoigner à tout le corps qu'elle en était satisfaite. Quelques uns ont été appelés à d'éminentes fonctions; une partie est destinée à venir concourir à vos nobles travaux; tous apprendront qu'il est doux de servir sous un prince qui sait si bien apprécier les services et employer les

talens et les vertus.

Tandis que nos lois constitutionnelles se simplifient et prennent une assiette plus convenable, nos lois de second ordre se complètent en se prêtant un mutuel appui. Dans la même session le commerce intérieur et maritime aura été constitué ; le taux de l'intérêt calculé sur ses besoins, et réglé sur le cours des escomptes de la Banque et des négociations du trésor. Les changemens introduits par S. M. dans l'organisation de ces deux grands établissemens ont déjà produit, dans moins de deux années, sur le crédit, des effets que dans tout autre temps on aurait à peine osé espérer de la sagesse, de l'ordre et des économies d'un long règne. L'histoire ne présente point d'exemple d'un semblable résultat. Jusqu'ici les nécessités de la guerre, les dépenses, les alarmes et les maux qu'elle entraîne, ont chez tous les peuples produit des embarras domestiques, et faitespendre tous les travaux d'amélioration intérieure. Ces circonstances, qui sont pour tous les états des causes d'appauvrissement et de destruction, n'ont fait qu'accélérer chez nous le mouvement de la restauration et le retour de la richesse. Des lois qui protégent et animent l'industrie nationale, qui rendent aux hospices leurs ressources, et aux malheureux leurs consolalations; qui assurent au trésor public et aux principales communes de l'Empire une garantie puissante contre l'emploi illégitime ou la soustraction de leurs revenus, et à tous les comptables honnêtes une voie plus prompte et plus rassurante d'appurement et de liquidation; des entreprises qui embellissent os cités, qui fécondent nos campagnes, qui lient par des

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