Page images
PDF
EPUB

dans le plus juste, le plus utile, et le plus nécessaire de ses droits!

» Je suis avec un profond respect, Sire, etc.

» Paris, le 6 janvier 1808. Signé CLARKE. »

Lecture faite de ces pièces, il est présenté un projet de senatusconsulte portant que quatre-vingt mille hommes de la conscription de 1809 sont mis à la disposition du gouvernement, et qu'ils seront pris parmi les jeunes gens nés du 1er janvier 1789 au 1er janvier 1790. ..

MOTIFS; exposés par M. le conseiller d'état Regnault ( de Saint-Jeand'Angely).

[ocr errors]

Monseigneur, sénateurs, lorsque votre sagesse appela sous les drapeaux les conscrits de 1808, vos vœux se dirigeaient vers la paix, que d'éclatantes victoires avaient préparée.

» Vous voulûtes assurer des moyens nouveaux de vaincre et de pacifier

» Le succès a passé votre espoir.

» Le feu de la guerre s'est éteint sur le continent; une paix durable a été jurée entre les deux plus grands souverains du monde, et l'Europe a respiré.

» Mais il est un gouvernement dont le repos de l'Europe ́est le désespoir, dont la paix est l'effroi, dont la discordé est le besoin, dont la guerre est l'espérance.

[ocr errors]

L'Angleterre a répondu à l'offre d'une médiation généreuse, offerte par l'empereur de Russie, en portant le fer et la flamme chez son plus ancien allié; en professant plus solennellement le mépris des droits des nations; en proclamant plus inhumainement le principe d'une guerre éternelle.

>>

L'indignation de tous les souverains a répondu aux manifestes injurieux; aux déclarations astucieuses, aux actes barbares du cabinet de Saint-James.

il

» Les pressentimens que les orateurs de S. M. y a un an à cette tribune sont réalisés.

་་

vous faisaient

C'est, disions-nous, c'est du sein du continent, que l'An- ̧ gleterre a voulu embraser, que désormais une guerre ter»rible lui sera faite. (Voyez plus haut, page 335.)

[ocr errors]

» C'est en lui appliquant, sur tous les rivages européens', » les principes qu'elle a appliqués sur toutes les mers, qu'on >> la ramenera aux principes du droit des gens et des nations >> civilisées.

>> C'est en exilant ses vaisseaux de toutes les côtes où nous » aurons des soldats et des alliés, que le ministère anglais sera puni du refus coupable de donner la paix au monde. »

» Telles furent, sénateurs, les paroles que nous vous adressâmes en demandant la conscription de 1808; et voilà qu'en effet une ligue sainte et puissante s'est formée pour punir l'oligarchie anglaise, défendre le droit des nations, venger l'hu

manité.

»De la mer Baltique à la Méditerrannée, du Nil à la Newa, à peine reste-t-il aux vaisseaux de la Grande-Bretagne quelques rivages où ils puissent aborder, quelques points où il ne leur soit pas défendu de toucher.

» Mais ce n'est pas assez d'avoir, par une juste réciprocité prononcé contre l'Angleterre cette effrayante mise hors la loi des nations; il faut encore qu'il ne lui soit pas donné d'être en repos dans le siége de son inique domination, sur aucune de ses côtes, dans nulle de ses colonies, sous aucun des points du globe qui ne lui sont pas encore interdits.

Il faut que, repoussée d'une partie du monde, menacée dans toutes les autres, l'Angleterre ne sache où diriger le peu de forces militaires dont elle dispose, et que nos armées, plus formidables que jamais, soient prêtes à porter dans ses possessions nos aigles victorieuses et vengeresses.

» Tels sont, messieurs, les motifs qui ont décidé S. M. à vous demander une conscription nouvelle.

le

» La levée de la précédente a été, comme vous l'aviez prévu, gage de la paix continentale : la levée dé celle-ci sera le présage de la paix maritime.

» Le pillage de l'arsenal et du port de Copenhague, l'émigration de la flotte portugaise, n'ont pas encore laissé le con

tinent sans vaisseaux.

Nos légions peuvent encore atteindre les milices anglaises; l'Irlande peut encore espérer des secours contre l'oppression; J'Inde peut encore attendre des libérateurs.

» Et pendant que nos vieilles phalanges marcheront pour hâter les jours de la justice, de nouvelles légions de jeunes braves s'essaieront à la discipline et aux conibats sous l'œil paternel de ces guerriers magistrats, de ces généraux sénateurs qui, avec un zèle si heureux, ont déjà formé des braves pour remplacer ceux que la guerre à enlevés à la patrie, ou que les congés ont rendus à leur famille.

a

» S. M. aura une surabondance de moyens pour la réalisation de ses vues pacifiques, ou pour l'exécution de ses projets guerriers.

» Aux armées puissantes de ses fidèles alliés, S. M. l'empereur et roi unira, pour la défense et les triomphes communs, une masse si redoutable que le succès ne sera pas douteux longtemps.

» Une si juste cause ne sera pas en vain défendue par tant de forces, protégée par tant de puissance.

» Une ligue si imposante dans ses élémens, si généreuse dans sa politique, si juste dans son objet, si redoutable dans ses moyens, ramenera enfin nos ennemis à la justice par la crainte, ou à la soumission par la victoire.

[ocr errors]

Dans sa séance du 21 janvier 1808, sur un rapport fait par M. Lacépède au nom d'une commission à qui ces différentes pièces avaient été renvoyées, le Sénat adopta le senatus-consulte qui mettait à la disposition du gouvernement quatre-vingt mille conscrits de 1809. Cette fois il n'y eut point d'adresse à l'empereur. Quant au rapport de la commission, il n'offrait qu'une paraphrase des motifs exposés par l'orateur du gouvernement.

XIII.

ÉTABLISSEMENT DES TITRES HÉRÉDITAIRES.

[ocr errors]

Les statuts impériaux qui établissent les titres héréditaires et les majorats sont appuyés, comme on va le voir, d'abord sur d'autres décrets impériaux du 30 mars 1806, mentionnés plus haut, page 287; puis sur un senatus-consulte du 14 août de la même année, acte qui ne fut l'objet d'aucune discussion au Sénat, et auquel on ne donna pas d'abord plus d'attention qu'on n'en accôrde ordinairement aux lois relatives à des aliénations ou échanges de biens communaux, C'est ainsi que de simples décrets d'une part, et de l'autre un acte législatif proposé et obtenu furtivement, ont rétabli en France une noblesse héréditaire. Voici d'abord ce senatus-consulte, tel qu'il est indiqué et rapporté dans le Bulletin des Lois.

[ocr errors]

SENATUS-CONSULTE qui autorise l'acquisition en France de biens destinés à remplacer la principauté de Guastalla, cédée au royaume d'Italie par la princesse Pauline et le prince Borghèse son époux. - Du 14 août 1806.

-

« Napoléon, par la grâce de Dieu et les Constitutions de la République, empereur des Français, à tous présens et à venir, salut.

» Le Sénat, après avoir entendu les orateurs du Conseil d'état, a décrété et nous ordonnons ce qui suit:

» Art. 1er. La principauté de Guastalla ayant été, avec l'autorisation de S. M. l'empereur et roi, cédée au royaume d'Italie, il sera acquis, du produit de cette cession, et en remplacement, des biens dans le territoire de l'Empire français.

» 2. Ces biens seront possédés par S. A. I. la princesse Pauline, le prince Borghese son époux, et les descendans nés de leur mariage, de mâle en måle, quant à l'hérédité et à la réversibilité, quittes de toutes charges, de la même manière que devait l'être ladite principauté, et aux mêmes charges et conditions, conformément à l'acte du 30 mars dernier.

» 3. Dans le cas où S. M. viendrait à autoriser l'échange ou l'aliénation des biens composant la dotation des duchés relevant de l'Empire français érigés par les actes du même jour 30 mars dernier, ou de la dotation de tous nouveaux duchés ou autres titres que S. M. pourra ériger à l'avenir, il sera acquis des biens en remplacement sur le territoire de l'Empire français avec le prix des aliénations.

[ocr errors]

4. Les biens pris en échange ou acquis seront possédés, quant à l'hérédité et à la réversibilité, quittes de toutes charges, conformément aux actes de création desdits duchés ou autres titres, et aux charges et conditions y énoncées.

5. Quand S. M. le jugera convenable, soit pour récompenser de grands services, soit pour exciter une noble émulation, soit pour concourir à l'éclat du trône, elle pourra autoriser un chef de famille à substituer ses biens libres pour former la dotation d'un titre héréditaire que S. M. érigerait en sa faveur, réversible à son fils aîné, né ou à naître, et à ses descendans en ligue directe de mâle en mâle, par ordre de primogéniture.

» 6. Les propriétés ainsi possédées sur le territoire français, conformément aux articles précédens, n'auront et ne conféreront aucun droit ou privilége relativement aux autres sujets français de S. M. et à leurs propriétés.

» 7.

Les actes par lesquels S. M. autoriserait un chef de famille à substituer ses biens libres, ainsi qu'il est dit à l'article précédent, ou permettrait le remplacement en France des dotations des duchés relevant de l'Empire, ou autres titres que S. M. érigerait à l'avenir, seront donnés en communication au Sénat, et transcrits sur ses registres.

» 8. Il sera pourvu par des réglemens d'administration publique à l'exécution du présent senatus-consulte, et notamment en ce qui touche la jouissance et conservation tant des propriétés réversibles à la couronne que des propriétés substituées en vertu de l'article 5.' »>

SENAT.

Séance du 11 mars 1808, présidée par

l'archi-chancelier.

DISCOURS du président.

« Messieurs, les statuts que je vous apporte, et que S. M. impériale et royale a voulu vous communiquer, doivent donner le mouvement et la vie au système créé par le senatusconsulte du 14 août 1806.

L'opinion publique n'est point incertaine sur les avantages de ce système.

[ocr errors]

S'il restait encore quelques doutes à résoudre, j'aurais recours à l'expérience des siècles, et à l'autorité de l'un de nos plus grands publicistes, qui a considéré l'existence et le maintien des distinctions héréditaires comme entrant en quelque façon dans l'essence de la monarchie.

» Les prééminences qu'une telle institution établit, les rangs qu'elle détermine, les souvenirs qu'elle transmet, sont l'aliment de l'honneur; et cet honneur est en même temps le principe du gouvernement sous lequel la force du caractère national nous a ramenés.

» Il était donc urgent de remplir cette lacune de notre organisation politique.

Mais, vous le savez, messieurs, le succès des établissemens auxquels se lie le sort des états dépend d'un concours de circonstances que la prudence du législateur doit saisir.

>> Il trouve des motifs d'encouragement ou d'hésitation dans le génie, dans les progrès, dans l'importance relative du peuple auquel s'appliquent ses conceptions.

» Les lois, les institutions ont, comme les plantes, un sol, une saison qui leur permettent de jeter de plus profondes racines.

» C'est en France surtout qu'on peut tendre avec succès tous les ressorts dirigés par l'amour de la gloire: c'est dans des temps féconds en prodiges qu'on peut pour d'autres âges consacrer les symboles que la gloire a choisis.

» Jamais les distinctions dont il s'agit n'auront eu une source plus pure les titres ne serviront désormais qu'à signaler à la reconnaissance publique ceux qui se sont déjà signalés par leurs services, par leur dévouement au prince et à la patrie.

>>

L'Europe, témoin de nos convulsions politiques, admire les ressources du génie qui en a amené l'heureuse issue; elle est couverte de nos trophées; et son estime accueillera les

« PreviousContinue »