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satisfaction d'avoir coopéré aux vues bienfaisantes de notre souverain; vous porterez à vos concitoyens de nobles souvenirs et de brillantes espérances. Ils partagent déjà ces espérances; ils ont appris comme vous, par les bulletins de l'armée et par les proclamations de l'empereur, les succès rapides de

ses armes.

» En peu de semaines les armées ennemies ont été détruités ou dispersées. Madrid a ouvert ses portes; l'empereur, par sa magnanimité, a sauvé cette capitale, et lui a épargné les maux auxquels voulait l'exposer l'aveugle fureur de quelques factieux.

» La clémence a suivi la victoire.

» Les Anglais n'ont jusqu'à présent retardé leur défaite que par la fuite. L'empereur chassera de la péninsule ces soldats fugitifs d'un gouvernement dont l'or est si corrupteur, Passistance si trompeuse, l'alliance si funeste.

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Tout doit donc nous faire espérer de voir accomplir bientôt le plus ardent de nos vœux, le retour triomphant et prompt de notre souverain au sein de sa grande famille.

>> Nous allons maintenant, messieurs, exécuter les ordres de S. M., et vous donner lecture du décret qui termine votre

session.

<»Mais, en nous séparant de vous, qu'il nous soit permis de nous féliciter, de l'honorable mission qui nous conduit dans cette enceinte, qu'honore annuellement la présence de l'empereur, que décorent les trophées de sa gloire, qu'illustrent vos travaux pacifiques, et d'où sortent tant de lois sages qui se répandent comme la lumière, et sont reçues comme des bienfaits par une grande partie des peuples de l'Europe. >>

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Une dynastic usée, privée de respect au dedans, de considération au dehors, et déjà entourée de factions; un trone esclave de l'autel, sans force dans ses volontés, sans volonté dans ses promesses, et devenant dès lors perfide dans ses alliances : un héritier de la couronne, Ferdinand, prince des Asturies, impatient de régner, et partageant la haine profonde du peuple contre Manuel Godoi, premier ministre, et favori de la reine : l'extrême incapacité de ce ministre, enfant de la fortune, qui de simple garde du corps, et n'ayant pour lui que des avantages physiques et des talens agréables, était parvenu à tous

les honneurs comme à tous les pouvoirs: l'étonnante faiblesse du roi Charles IV pour ce protégé de sa femme, dont il fit à la fois et son ministre, et son ami, et son maitre les efforts de Napoléon pour réaliser son système de me de fédération continentale; système qui imposait à ses alliés des sacrifices que la cour de Madrid accordait par crainte, souvent en secret, toujours en fatiguant le peuple, et donpaat de des griefs contre elle aux partis dont elle était assiégée : mais par dessus tout l'influence de l'Angleterre, toujours habile à susciter des obstacles et des ennemis à la France: voilà les causes de la guerre et de la révolution d'Espagne.

La péninsule restait le seul pays de l'Europe où l'Angleterre pût établir, avec ses comptoirs, le théâtre de sa guerre d'intrigue et de trahison; elle était aussi le seul, par ses ports et par ses forces navales, qui offrit à Napoléon des moyens de réussite dans ses projets contre l'Angleterre. C'est ainsi que la France et la Grande-Bretagne se disputèrent les états mal gouvernés de Charles IV et de la maison de Bragance.

La politique anglaise, qui dès longtemps s'était soumis le cabinet de Lisbonne, s'attacha à nourrir, à exciter les divisions de la famille royale et des conseils de Madrid; elle s'empara des dispositions hostiles d'un peuple fier et brave, mais encore ignorant et fanatique, sabruti par les moines, prêt à s'armer au nom d'un saint, et chez equi d'immenses trésors, dissipés par la paresse, n'avaient laissé que la corruption.

To Napoléon fit marcher des armées pour soutenir ses traités, et préparer l'exécution de ses desseins.

Les Espagnols, poussés d'abord par d'aveugles passions, et sacrifiés à des intérêts qui n'étaient pas les leurs, commenceront par une guerre de religion. Lorsque Napoléon, en les affranchissant des chaines de l'Inquisition, les aura ramenés au sentiment de la patric, ils soutiendront contre lui la guerre de leur indépendance.

En 1793 l'Espagne, gouvernée par don Manuel Godoï, s'était déjà unie ouvertement avec l'Angleterre contre la France; mais après deux 'années de guerre ce même ministre avait quitté la coalition, et signé avec le Directoire exécutif, le 18 août 1796, un traité d'alliance offensive et défensive que les succès et les menaces de la République française ne lui avaient point permis de rendre très avantageux à l'Espagne c'est pour prix de cette négociation qu'il obtint de Charles IV le titre de prince de la Paix ; mais ce roi débonnaire ne put le garantir de la haine de la nation, désormais implacable.

A son avénement au pouvoir Napoléon s'empara de Godoï; il le * flatta, lui promit-uné souveraineté, et en fit son esclave. Napoléon

voulut que la cour de Madrid declarât la guerre au Portugal, dont le partage entre la France et l'Espagne était ou paraissait être alors dans scs intentions; et la guérré füt déclarée, Il exigea que toute la marine espagnole se joignit à la marine française; et aussitôt des flottes combinées coururent les hasards de la guerre contre les flottes britanniques une bataille navale des plus mémorables, également funeste aux alliés et à l'Angleterre, est celle qui eut lieu le 21 octobre 1805, à la hauteur du cap Trafalgar; en voici le résultat : l'amiral français, Villeneuve, prisonnier; l'amiral espagnol, Gravina, blessé; l'amiral anglais, Nelson, tué; de trente-trois vaisseaux, tant français qu'espagnols, treize seulement sauvés de la destruction; sur vingt-huit vaisseaux anglais, seize mis hors de combat. Napoléon demanda des hommes, et il obtint vingt mille Castillans, qu'il envoya dans le nord.

Tant de sacrifices imposés à la nation espagnole fortifiaient sa haiue contre le premier ministre; les intrigues de cour se multipliaient; les partis prenaient de la consistance. De son côté Napoléon marchait à son but. L'arrivée des troupes françaises, qui toutefois ne s'avançaient encore dans la péninsule que comme des troupes amics, désilla enfin les yeux de Godoï. Tour à tour il avait essayé ou de braver les clameurs de ses concitoyens, ou de s'affranchir du joug de Napoléon; mais désormais, quelque conduite qu'il tienne, soit qu'il se rapproche des Anglais, soit qu'il continue de s'abandonner à la France, il ne peut retarder la chute de la monarchie espagnole.

Reprenons en détail ces divers événemens en les appuyant de pièces officielles, et remontons à cette proclamation qu'un jour la France reprochera à l'Espagne comme un acte hostile (1), mais qu'à l'époque de sa publication on feignit de regarder comme dirigée contre les Anglais : quand cette pièce parut Napoléon commençait la guerre de Prusse, et les relations de Godoï avec la France paraissaient intimes et sincères.

PROCLAMATION DU PRINCE DE LA PAIX.

« Dans des circonstances moins dangereuses que celles où nous nous trouvons aujourd'hui, les bous et loyaux sujets se sont empressés d'aider leurs souverains par des dous volontaires et des secours proportionnés aux besoins de l'Etat; c'est donc dans la situation actuelle qu'il est urgent de se montrer généreux envers la patrie. Le royaume d'Andalousie, favorisé par la nature dans la reproduction des chevaux propres à la cava

(1) Voyez plus lein le rapport du ministre des relations extérieures.

lerie légère; la province de l'Estramadure, qui rendit en ce genre des services si importans au roi Philippe V, verraient-ils avec indifférence la cavalerie du roi d'Espagne réduite et incomplète faute de chevaux? Non, je ne le crois pas; j'espere au contraire qu'à l'exemple des illustres aïeux de la génération présente, qui servirent l'aïeul de notre roi actuel par des levées d'hommes et de chevaux, les petits-enfans de ces braves s'empresseront aussi de fournir des régimens ou des compagnies d'hommes habiles dans le maniement du cheval pour être employés au service et à la défense de la patrie tant que durera le danger actuel. Une fois passé, ils rentreront pleins de gloire. au sein de leurs familles. Chacun se disputera l'honneur de la victoire : l'un attribuera à son bras le salut de sa famille; l'autre celui de son chef, de son parent ou de son ami; tous enfin s'attribueront le salut de la patrie. Venez, mes chers compa ́triotes! venez vous ranger sous les bannières du meilleur des souverains; venez, je vous accueillerai avec reconnaissance : je vous en offre dès aujourd'hui l'hommage, si le dieu des victoires nous accorde une paix heureuse et durable, unique objet de nos vœux. Non, vous ne céderez ni à la crainte ni à la perfidie; vos cœurs se fermeront à toute espèce de séduction étrangère. Venez, et si nous ne sommes pas forcés de croiser nos armes avec celles de nos ennemis, vous n'encourrez pas le danger d'être notés comme suspects, et d'avoir donné une fausse idée de votre loyauté, de votre honneur, en refusant de répondre à l'appel que je vous fais.

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Mais si ma voix ne peut réveiller en vous les sentimens de votre gloire, soyez vos propres instigateurs; devenez les pères du peuple, au nom duquel je vous parle; que ce que vous lui devez vous fasse souvenir de ce que vous vous devez à vousmêmes, à votre honneur, et à la religion sainte que vous professez!

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Au palais royal de Saint-Laurent, le 5 octobre 1805. Signé LE PRINCE DE LA PAIX. »

Napoléon, qui avait alors à soutenir le double choc de la Prusse et de la Russie, ne demanda donc aucune explication sur cette pièce singulière; mais dès lors il résolut de hâter l'exécution de ses projets sur la péninsule; et c'est en offrant comme appât à la cour de Madrid la ruine de la maison de Bragance, qu'il enveloppera dans une chute commune les trônes d'Espagne et de Portugal: le gouvernement de Lisbonne ne tardera pas d'ailleurs à lui donner des griefs par ses infractions au blocus continental.

Le prince Jean, régent du Portugal, tiraillé en quelque sorte par la France et par l'Angleterre, et porté par le sentiment de sa faiblesse

à se rendre agréable à toutes deux, leur donnait tour à tour des satisfactions, et restait toujours prêt à manquer de foi à l'une ou à l'autre. D'une part la position géographique de ses états et les relations commerciales de son peuple ne lui permettaient pas de se conserver neutre; de l'autre, l'ennemi de la guerre, il attachajt un plus grand prix à la possession paisible de ses pays d'outre-mer qu'à celle de ses états du continent de l'Europe, qu'il lui aurait fallu disputer par les armes. Napoléon le contraindra à opter. i

Les négociations avec la cour de Madrid se prolongèrent pendant environ une année. Jusqu'à la paix de Tilsit, Napoléon s'était sculement occupé d'affaiblir et même de disperser l'armée espagnole; Godoï lui avait donné ces vingt mille Castillans qu'il distribua dans Je Hanovre, dans le Mecklembourg, et sur les frontières de son allié le roi de Danemark, afin de l'aider à soutenir le blocus continental, Déjà vingt-sept mille Français, commandés par le général Junot, marchaient sur le Portugal, lorsque, par un traité secret avec Charles IV, conclu à Fontainebleau le 27 octobre 1807, Napoléon obtint encore le passage en Espagne pour une autre armée de quarante mille hommes, destinée à conquérir le royaume du princę Jean par ce traité les Algarves et l'Alentajo étaient donnés en toute souveraineté au prince de la Paix ; le roi d'Etrusic, prince de la maison d'Espagne, remettait son royaume à Napoléon, et recevait en échange des provinces portugaises avec le titre de roi de la Lusi tanie septentrionale; le roi Charles IV était reconnu empereur des Amériques, etc.

Les armées françaises se répandaient ainsi dans la péninsule. Tout à coup éclate le complot du prince des Asturies contre son père ; petit événement de cour, attribué par quelques personnes aux intrigues de Godoï, et qui mériterait à peine d'être cité s'il n'était encore venu favoriser des projets plus fortement conçus, et plus habilement exécutés. Voici les pièces qui ont révélé la tentative de Ferdinand, et fait de nouveau connaître l'extrême débonnaireté du roi Charles IV.

COMMUNICATION de S. M. catholique à ses conseils, assemblés en séance extraordinaire, à Madrid, le 31 octobre 1807.

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Dieu, qui veille sur tous ses enfans, ne permet pas la consommation des faits atroces dirigés contre des victimes innocentes : c'est par le secours de sa toute-puissance que j'ai été sauvé de la plus affreuse catastrophe. Mes peuples mes sujets, tout le monde connaît ma religion et la régularité de

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