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» Les commerçans français en Espagne ataient perdu leurs anciens priviléges; les lois de douane étaient dirigées principalement contre le commerce français; elles étaient rensarquables par leur arbitraire et leurs perpétuelles variations. Ces Nariations ne pouvaient être connues; elles n'avaient aucune pubiicité, ce n'était que dans les bureaux des douanes que l'on apprenait que la loi de la veille n'était plus celle du lendemain. Les marchandises confisquées, souvent sans prétexte, n'étaient jamais rendues; toutes les réclamations faites par des Français, ou pour des intérêts français, étaient repoussées. Pendant que J'Espagne faisait ainsi la guerre en détail aux Français et à leur Commerce, tous ses ports, et principalement ceux du golfe de Gascogne, étaient ouverts au coinmerce anglais. Les lois de blocus, proclamées en Espagne comme en France, n'étaient qu'un moyen de plus de favoriser cette contrebande des Anglais, dont les marchandises se répandaient de l'Espagne dans le reste de l'Europe.

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Mais, indépendamment des considérations que je viens de retracer, les circonstances actuelles ne permettent pas à Votre Majesté de ne point intervenir dans les affaires de ce royauine. Le roi d'Espagne a été précipité de son trône; Votre Majesté est appelée à juger entre le père et le fils. Quel panti prendrat-elle ? Voudrait-elle sacrifier la cause des souverains, et permeltre un outrage fait à la majesté du trône? Voudrait-elle laisser sur le trône d'Espagne un prince qui ne pourra se soustraire au joug des Anglais qu'autant que Votre Majesté entretiendra constamment une armée puissante en Espagne ? Si au a contraire, Votre Majesté se détermine à replacer Charles IV sur sou trône, elle sait qu'elle ne peut le faire sans avoir à vaincre une grande résistance, et sans faire couler le sang français, Ge sang, que da nation prodigue pour la défense de - ses propres intérêts, peut-il être versé pour l'intérêt d'an seroi étranger dont le sort n'importe nullement à la France? Enfin Votre Majesté peut-elle, ne prenant aucun interêt à ces grands différends, abandonner la nation espagnole

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son, sort, lorsque déjà une extrême fermentation l'agite, et que l'Angleterre y sème le trouble et l'anarchie? Votre Majesté doit-elle laisser cette nouvelle proie à dévorer à Augleterre ? Non, sans doute. Ainsi Votre Majesté, obligée de s'occuper de la régénération de l'Espagne d'une manière utile pour ce royaume, utile pour la France, ne doit donc ni rétablir au prix de beaucoup de sang un roi détrôné, ni abandonner l'Espagne à elle-même; car dans ces deux dernières hypothèses ce serait la livrer aux Anglais, dont l'argent et les intrigues ont amené les déchiremeus de ce pays.

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» J'ai exposé à Votre Majesté les circonstances qui l'obligent prendre une grande détermination. La politique la conseille, la justice l'autorise, les troubles de l'Espagne en imposent la nécessité. Votre Majesté doit pourvoir à la sûreté de son Empire, et sauver l'Espagne de l'influence de l'Augleterre. » Je suis avec respect, etc. Signé CHAMPAGNY. »

* Second RAPPORT fait à l'empereur par le ministre des relations exté

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Sire, j'ai l'honneur de proposer à Votre Majesté de communiquer au Sénat les deux traités qui ont mis la couronne d'Espagne entre ses mains, et la Constitution que sous ses - auspices, et éclairée par ses lumières, la Junte rassemblée à Baionne, après de mûres et libres délibérations, a 'adoptée pour la gloire du nom espagnol, et la prospérité de ce royaume et de ses colonies.

Si, dans les dispositions que Votre Majesté a faites, la sécurité de la France a été votre soin principal, l'intérêt de P'Espagne lui a cependant été cher, et, en unissant les deux états par l'alliance la plus intime, la prospérité et la gloire de l'un et de l'autre étaient également le but qu'elle se proposait. Les troubles qui se manifestaient alors en Espagne excitaient - particulièrement la sollicitude de Votre Majesté ; elle en crai--gnait les progrès; elle en prévoyait les funestes conséquences; elle espérait les prévenir par des moyens de persuasion et par des mesures d'une sage et huntaine politique. Votre Majesté intervenait comme médiateur au milieu des Espagnols divisés; elle leur montrait d'un côté l'anarchie qui les menaçait, de l'autre l'Angleterre s'apprêtant à profiter de leurs divisions pour s'approprier ce qui est à sa convenance; elle leur indiquait le port qui devait les sauver de ce double danger, une -Constitution sage, prévoyante, propre à pourvoir à tous les > besoins, et dans laquelle les idées libérales se conciliaient avec lės institutions anciennes dont l'Espagne désire la conservation.

L'attente de Votre Majesté a été trompée. Des intérêts particuliers, les intrigues de l'étranger, son or corrupteur, ont prévalu. Pourquoi est-il si facile, en déchaînant leurs passions, de conduire les peuples à leur propre ruine! Dans un - précédent rapport j'ai fait connaître à Votre Majesté l'influence qu'acquéraient les Anglais en Espagne, le parti nombreux qu'ils s'étaient formé, les amis qu'ils s'étaient faits dans les !ports de commerce, surtout par l'appât du rétablissement des relations commerciales; je les avais montrés à Votre Majesté

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auteurs du mouvement qui avait renversé le tronc de Charles IV, et fauteurs des désordres populaires qui prirent naissance à cette époque. Ils avaient brisé le frein salutaire qui, pour son intérêt, tient le peuple dans la soumission. La populace espagnole, ayant secoue le joug de l'autorité, aspirait, gouverner. L'or des Anglais, les intrigues des agens de l'In quisition, qui craignaient de perdre leur empire, l'influence des moines, si nombreux en Espagne, et qui redoutaient une réforme, ont dans ce moment de crise occasionné l'insurrection de plusieurs provinces espagnoles, dans lesquelles la voix des hommes sages a été méconnue ou étouffée, et plusieurs, d'entre eux rendus victimes de leur courageuse opposition aux désordres populaires; et on a vu une épouvantable anarchie se répandre dans la plus grande partie de l'Espagne. Votre Majesté permettra-t-elle que l'Angleterre puisse dire : l'Espagne est une de mes provinces; mon pavillon, chassé de la Bat tique, des mers du Nord, du Levant, et méme des rivages de Perse, domine aux portes de France....?

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>> Non, jamais, Sire! Pour prévenir tant de honte et de malheurs, deux millions de braves sont prêts, s'il le faut, à franchir les Pyrénées, et les Anglais seront chassés de la

presqu'ile »Si les Français combattent pour la liberté des mers, il fau pour la conquérir commencer par arracher l'Espagne à l'influence des tyraus des mers.

S'ils combattent pour la paix, ils ne peuvent l'obtenir qu'après avoir chassé de l'Espagne les ennemis de la paix.

Si Votre Majesté, embrassant l'avenir comme le présent, aspire au noble but de laisser après elle son empire calnie, tranquille, et environné de puissances amies, elle doit com༡༣། mencer par assurer son influence sur les Espagnes.

Enfin, si l'honneur est le premier sentiment, comme le premier bien des Français, il faut que Votre Majeste tire une prompte vengeance des outrages faits au nom français, et des atrocités dont un si grand nombre de nos compatriotes ont été victimes. Des Français établis en Espagne depuis plus de quarante ans, exerçant en paix leur utile industrie, et regardant presque l'Espagne comme leur patrie, ont été massacrés; partout les propriétés françaises ont été enlevées; les agens consulaires de Votre Majesté ont éprouvé un traitement qu'ils n'auraient pas redouté dans les pays les plus barbares. De quelle estime, de quelle considération jouirait en Europe le nom français, si, dans un pays si voisin de nous, des injures aussi atroces e aussi publiques restaicut, impúnies? Elles doivent être répa rées, mais réparées comme il convient à des Français, par fa

victoire

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Ce n'est pas un faible avantage que la probabilité de rencontrer enfin les Anglais, de les serrer corps à corps, de leur faire aussi éprouver les maux de la guerre, de cette guerre dont ils ignorent les dangers, puisqu'ils ne la font qu'avec leur or. Les Anglais seront battus, détruits, dispersés, à moins qu'ils ne se hâtent de fuir, comme ils ont fait à Toulon, au Helder, à Dunkerque, en Suède, et dans tous les lieux où les armées françaises ont pu les apercevoir; mais leur expulsion de l'Es pagne sera la ruine de leur cause. Ce dernier échec aura épuisé leurs moyens, en même temps qu'anéanti leurs dernieres est pérances, et la paix en deviendra plus probable.

Cependant toute l'Europe fait dans cette lutte des vœux pour la France.

>> La France et la Russie font cause commune contre l'Angleterre.

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Le Danemarck soutient avec honneur une lutte qu'il n'a pas provoquée.

» La Suede, trahie et abandonnée par l'allié auquel un cabinet insensé l'a sacrifiée, a déjà perdu ses plus importantes provinces, et marche à cette ruine effet inévitable de l'alliance set de l'amitié de l'Angleterre.

» Tel sera le sort des insurgés de l'Espagne. Lorsque la lutte -sera sérieusement engagée, les Anglais abandonneront l'Espa gne, après lui avoir fait le funeste présent de la guerre civile, de la guerre étrangère, et de l'anarchie, le plus cruel des fleaux. Ce sera à la sagesse et à la bienfaisance de Votre Majesté à réparer les maux qu'ils auront faits.

» La cour de Vienne a constamment témoigné à Votre Majesté les intentions les plus amicales. Indignée de la politique dé d'Angleterre, elle a voulu rappeler son ministre de Londres, renvoyer le ministre anglais qui était à Vienne, fermer ses ports à l'Angleterre, et se mettre avec elle en état d'hostilité. Elle vient d'ajouter à ces mesures en interdisant dans ses ports l'admission des bâtimens qui, sous pavillon neutre, ne sant que les colporteurs des denrées et des marchandises anglaises.

Votre Majesté a cultivé ces dispositions bienveses.

elle a

témoigné à la cour de Vienne amitié et confiance, et plusieurs fois elle lui a fait connaître que la France prend à sa prospérité un véritable intérêt. Cependant vers ces derniers temps cette puissance a porté ses armemens outre mesure: ses forces militaires sont aujourd'hui hors de toute proportion avec sa population et ses finances. Vos ministres, Sire, n'ont voulu le remarquer que pour faire sentir à Votre Majesté la nécessité d'augmenter ses forces, afin de conserver toujours la supériorité relative qui existe entre la puissance et la population des deux empires.

» Une nouvelle revolution a éclaté à Constantinople. Le sultan Mustapha a été déposé, 675 aliud on 180 ca

Les Américains, ce peuple qui mettait sa fortune, sa prospérité, et presque son existence dans le commerce, ont donné l'exemple d'un grand et courageux sacrifice; ils se sont interdits par un embargo général tout commerce, toute navi gation, plutôt que de se soumettre honteusement à ce tribut que les Anglais prétendent imposer aúx navigateurs de toutes les nations.

L'Allemagne, PItalie, la Suisse, la Hollande sont paisi bles, et n'attendent que la paix maritime pour se livrer à toute leur industrie.

Cette paix est le vœu du monde; mais l'Angleterre s'y oppose, et l'Angleterre est l'ennemie du monde.

La nation française, l'Europe entière savent tous les efforts de Votre Majesté pour la paix ; elles savent que ses entreprises sont le résultat immédiat de l'inutilité des tentatives qu'elle a faites pour l'obtenir.

Le dévouement du peuple français est sans bornes ; et c'est surtout dans cette circonstance, qui intéresse si essentielle ment son honneur et sa sûreté, qu'il fera éclater ses sentimens, et qu'il se montrera digne de recueillir l'héritage de gloire et de bonheur que Votre Majesté lui prépare.

Je suis avec respect, etc. Signé CHAMPAGNY. - (Leministre donne connaissance au Sénat des traités passes avec le roi d'Espagne Charles IV et son fils le prince dés - Asturies. )

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RAPPORT fait à l'empereur par le ministre de la guerre.

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Du 1o septembre 1808.

« Sire, j'ai l'honneur de soumettre à Votre Majesté l'état de 'situation de ses armées en Pologne, en Prusse et en Silésie, en Danemarck, en Dalmatie, en Albanie, en Italie, à Naples, et dans les Espagnes; j'y joins celui de ses armées de réserve à Boulogne, sur les côtes, sur le Rhin, et dans l'intérieur.vn,

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Votre Majesté verra que jamais la France n'a eu de plus nombreuses et de plus belles armées, et que jamais'elles n'ont rété mieux entretenues ni mieux approvisionnées. POO Cependant les divers événemens qui ont eu lieu en Espagne ont produit une perte assez considérable; résultat de l'opé ration, aussi inconcevable que pénible pour l'honneur français, du corps du général Dupont. Votre Majesté a fait connaître l'intention où elle était de réunir plus de deux cent mille homes 9** arabes in spissian 9170 *ri para greb

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