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vous voir, vont répondre avec ardeur à la voix de Votre Majesté, et rien ne pourra ébranler la résolution du Sénat et du peuple de seconder Votre Majesté impériale et royale dans tout ce qu'elle croira devoir entreprendre pour garantir les plus grands intérêts de l'Empire.

Que Votre Majesté impériale et royale daigne agréer le nouvel hommage de notre respect, de notre dévouement, de notre fidélité. »

Les événemens de la péninsule rendaient pressante non seulement cette nouvelle levée d'hommes, mais encore la prompte réunion de troupes déjà exercées.

Le général Dupont, par une série de fautes inexcusables, et dans lesquelles il se montra autant inhabile à la guerre que privé de courage civil, avait compromis l'honneur de l'armée française, treize mille hommes sous ses o: dres, et en rase campagne, s'étaient soumis à la honteuse capitulation de Baylen, qui fut encore violéc

par l'ennemi : ces treize mille hommes devaient être ramenés en France-sur des vaisseaux espagnols, ils furent conduits à Cadix, et entassés dans des pontons. L'insurrection était organisée dans toutes les provinces de l'Espagne. Le roi Joseph n'avait pu rester que huit jours à Madrid. Une Junte nationale avait déclaré la guerre à la France, et de nouveau proclamé roi Ferdinand en son absence elle exerçait le pouvoir suprême. Le peuple déployait un courage qui approchait beaucoup plus de la fureur que de l'héroïsme ; et c'était la fureur d'un peuple fanatique. Des prêtres commandaient ; ils publiaient des miracles, et prêchaient l'assassinat : leurs hommes croyaient et obéissaient. Les soldats français n'étaient plus appelés à des combats dignes d'eux ; ils avaient à se défendre contre des individus qui répétaient comme article de foi cette éspèce de catéchisme : « Dis-moi, mon enfant, » qui es tu? — Espagnol par la grâce de Dicu. Que veux-tu dire » par là? - Homme de bien. Quel est l'ennemi de notre félicité? » L'empereur des Français. Qui est-ce? C'est un méchant, » la source de tous les maux, le destructeur de tous les biens, » foyer de tous les vices. Combien a-t-il de natures? Deux; » la nature humaine et la diabolique. - Combien y a-t-il d'empe»reurs des Français ?-Un véritable, en trois personnes trompeuses. Comment les nomme-t-on? Napoléon, Murat et Manuel

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Murat?

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» Godoi. Lequel des trois est le plus méchant? Ils le sont tous trois également. - De qui dérive Napoléon? Du péché. - De Napoléon. — Et Godoï? — De la fornication des » deux. Quel est l'esprit du premier?-L'orgueil et le despotisme. »Du second? La rapine et la cruauté. » cupidité, la trahison et l'ignorance.

Du troisième? La Que sont les Français?

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» D'anciens chrétiens devenus hérétiques. — Quel supplice mérite » l'Espagnol qui manque à ses devoirs? La mort et l'infamie des » traîtres. Comment les Espagnols doivent-ils se conduire?

» D'après les maximes de notre seigneur Jésus-Christ. Qui nous » délivrera de nos ennemis? La confiance entre nous autres, et » les armes. Est-ce un péché de mettre un Français à mort? » Non, mon père; on gagne le ciel en tuant un de ces chiens d'hé» rétiques. >>

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D'un autre côté le général Junot, privé de secours de la France, avait été obligé d'évacuer le Portugal en insurrection, et occupé par les Anglais toutefois il ne l'abandonna à ces derniers qu'en vertu d'une convention très honorable ; l'armée française se retirait avec armes et bagages, chevaux et artillerie, et conservait la faculté de servir aussitôt sa rentrée en France.

Dans ces conjonctures une partie des corps de la grande armée qui occupaient la Prusse et l'Allemagne avait été dirigée en toute hâte sur la péninsule. La France entière salua sur leur passage les héros d'Austerlitz et de Friedland; mais des fêtes brillantes les attendaient dans la capitale : la ville de Paris leur distribua les couronnes 'd'or qu'elle leur avait votées deux ans auparavant.

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En passant en revue l'avant-garde de ces braves, le 11 novembre 1808, Napoléon leur dit :

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Soldats, après avoir triomphé sur les bords du Danube et de la Vistule, vous avez traversé l'Allemagne à marches forcées; je vous fais aujourd'hui traverser la France sans vous donner un moment de repos.

» Soldats, j'ai besoin de vous ! La présence hideuse du Léopard souille les continens d'Espagne et du Portugal. Qu'à votre aspect il fuie épouvanté! Portons nos aigles triomphantes jusques aux colonnes d'Hercule; là aussi nous avons des outrages à venger!

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Soldats, vous avez surpassé la renommée des armées moderues; mais avez-vous égalé la gloire des armées de Rome, qui dans une même campagne triomphèrent sur le Rhin et sur l'Euphrate, en Illyrie et sur le Tage?

» Une longue paix, une prospérité durable seront le prix de vos travaux. Un vrai Français ne peut, ne doit pas prendre de repos jusqu'à ce que les mers ne soient ouvertes et affranchies. Soldats, tout ce que vous avez fait, tout ce que vous ferez encore pour le bonheur du peuple français et pour ma gloire sera éternellement dans mon cœur. >>

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Après les arrangemens de Bayonne, terminés en juillet, Napoléon était revenu à Paris pour obtenir et organiser les forces nécessaires à

feur accomplissement. A la fin de septembre il se rendit à Erfurth, célèbre par sa seconde entrevue, avec le czar Alexandre les deux amis se quittèrent invariablement d'accord pour la paix et pour la guerré. Napoléon était de retour à Paris le 25 octobre, pour l'ouverture de la session du Corps législatif ( voyez plus haut.) Le 3 novembre il se retrouvait à Bayonne, ct presque aussitót à la tête de ses arinées, où sa présence ramena la victoire.","!

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LETTRE de Napoleon au président du Corps législatif

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Monsieur le président du Corps législatif, mes troupes vant, au combat de Burgos, pris douze drapeaux de l'armée Estramadure, parmi lesquels se trouvent ceux des gardes walones et espagnoles, j'ai voulu profiter de cette circonstance et donner une marque de ma considération aux députés des départemens, au Corps législatif, en leur envoyant ces dra peaux, pris dans la même quinzaine où j'ai présidé à l'ouverture de leur session. Que les députés des départemens et les colleges électoraux dont ils font partie y voient le désir que j'ai de leur donner une preuve de mon estime. Cette lettre n'étant à autre fin, je prie Dieu qu'il vous ait, monsieur le président du Corps législatif, cu sa sainte et digne gardenas En mon camp impérial de Burgos, le 12 novembre 1808, Signé NAPOLEON, M, OLGUP

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Cet envoi de drapeaux donna lieu, comme de coutume, à une adresse contenant l'expression de la reconnaissance et de l'admiration du Corps législatif; trois députés, MM. Salm-Dick, Stanislas Girardin et Delamardelle, furent chargés de la porter à l'empereur. Mais en inême temps, conformément à une proposition de M. Bruneau-Beaumetz, le Corps législatif voulut présenter à l'impératrice, restée à Paris, de respectueuses félicitations sur la victoire remportée par son auguste époux. La députation fut reçue aux Tuileries le 20 novembre, et l'impératrice Joséphine répondit en ces termes au discours du président, M. de Fontanes:

« Monsieur le président, messieurs, je suis infiniment sensible à » la démarche du Corps législatif, et très satisfaite que le premier sentiment, que Sa Majesté ait éprouvé après sa victoire ait été pour le » Corps qui représente la nation. »

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Cette réponse si juste, clairement entendue de tous les assistans, fut imprimée par ordre du Corps législatif avec le discours de son prési dent, et répétée dans la plupart des journaux, le Moniteur excepté. Peu de jours après elle parvint à Napoléon, qui la condamna coinnie

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absurde, et ordonna sur le champ L'insertion

n dans le journal officiel de cette singulière doctrine sur la hierarchie des pouvoirs, constitutionnels:

Extrait du Moniteur du 15 décembre 1808.

Plusieurs de nos journaux ont imprimé que S. M. l'impératrice, dans sa réponse à la députation du Corps législatif, avait dit qu'elle était bien aise de voir que le premier sentiment de l'empereur avait été pour le Corps législatif, qui repré sente la nation.

» S. M. l'impératrice n'a point dit cela: elle connaît trop bien nos Constitutions; elle sait trop bien que le premier représentant de la nation c'est l'empereur; car tout pouvoir vient de Dieur et de la nation.

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Dans l'ordre de nos Constitutions, après l'empereur est le Sénat; après le Sénat est le Conseil d'etat; après le Conseil d'état est le Corps législatif; après le Corps législatif viennent chaque tribunal et fonctionnaire public dans l'ordre de ses attributions : car s'il y avait dans nos Constitutions un corps représentant la nation, ce corps serait souverain; les autres corps ne seraient rien, et ses volontés seraient tout.

La Convention, même le Corps législatif, ont été représentans: telles étaient nos Constitutions alors; aussi le président disputa-t-il le fauteuil au roi, se fondant sur ce principe que le président de l'Assemblée de la nation était avant les autorités de la nation. Nos malheurs sont venus en partie de cette exagération d'idées. Ce serait une prétention chimérique et même criminelle que de vouloir représenter la nation avant l'empereur.

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Le Corps législatif, improprement appelé de ce nom, devrait être appelé Conseil législatif, puisqu'il n'a pas la faculté de faire des lois, n'en ayant pas la proposition. Le Conseil législatif est donc la réunion des mandataires des colleges électoraux on les appelle députés des départemens parce qu'ils son nommés par les départemens.

» Dans l'ordre de notre hiérarchie constitutionnelle, le premier représentant de la nation est l'empereur, et ses ministres, organes de ses décisions; la seconde autorité représentante est le Sénat; la troisième le Conseil d'état, qui a de véritables attributions législatives; le Conseil législatif a le quatrième rang.

» Tout rentrerait dans le désordre si d'autres idées constitutionnelles venaient pervertir les idées de nos Constitutions monarchiques.

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Une armée de cent quatre-vingt mille soldats espagnols, les paysans

! et les habitans des villes, les moines, les étudians, les femmes, les enfans et les vieillards; enfin tout un peuple armé fut en quelques jours, non soumis, mais battu, dispersé, en proie à tous les maux de la guerre, et même de la vengeance : les assassinats commis sur des Français isolés provoquèrent d'abord de terribles représailles.,

· Le 3 décembre l'armée française était devant Madrid; elle occupait toutes les positions militaires, et pouvait l'enlever en quelques heures; déjà ses voltigeurs se répandaient dans les faubourgs, et des ́ ́obus atteignaient les édifices de la cité. Le major général, prince de *Neufchâtel, somma la ville de se rendre. Le peuple, consulté par ses magistrats, repoussa d'abord toute proposition; les dangers d'un assaut né l'épouvantaient point : il avait dépavé les rues, crénelé les maisons, matelassé les fenêtres, élevé des barricades avec des balles de coton, établi des batteries sur des charrettes, réuni une quantité considérable d'artillerie et de munitions, et préparé tous les moyens possibles de défense; enfin il se montrait déterminé à la résistance la plus opiniâtre. Les dispositions des habitans de Madrid furent transmises au major général de l'armée française par le général Morla, membre de la Junte militaire, et par don Yriarte, envoyé de la ville, Napoléon admit ces parlementaires dans sa tente, et leur dit :

"Vous employez en vain le nom du peuple. Si vous ne pous vez parvenir à le calnier, c'est parce que vous-mêmes vous l'avez excité; vous l'avez égaré par des mensonges. Rassemblez les curés, les chefs des couvens, les alcades, les principaux propriétaires, et que d'ici à six heures du matin la ville se rende, ou elle aura cessé d'exister. Je ne veux ni ne dois retirer mes troupes. Vous avez massacré les malheureux prisonniers français qui étaient tombés entre vos mains. Vous avez il y a peu de jours laissé traîner et mettre à mort dans les rues deux domestiques de l'ambassadeur de Russie, parce qu'ils étaient nés Français. L'inhabileté et la lâcheté d'un général (Dupont) avaient mis en vos mains des troupes qui avaient capitulé sur le champ de bataille, et la capitulation a été violée. Vous monsieur Morla, quelle lettre avez-vous écrite à ce général ? Il vous convenait bien de parler du pillage, vous qui, étant entré en Roussillon, avez enlevé toutes les femmes et les avez partagées comme un butin entre vos soldats! Quel droit aviez-vous d'ailleurs de tenir un pareil langage? La capitulation vous l'interdisait. Voyez quelle a été la conduite des Anglais, qui sont bien loin de se piquer d'être rigides observateurs du droit des nations: ils se sont plaints de la convention du Portugal; mais -ils l'ont exécutée. Violer les traités militaires. c'est renoncer à toute civilisation, c'est se mettre sur la même ligne que

les

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