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commencés ont été suivis avec constance; d'autres sont médités, et chaque année prépare aux années suivantes de nouveaux projets pour la prospérité de l'Etat. Mais l'intempérie des saisons a trompé la prévoyance et le zèle de l'administration; des pluies, des torrens ont dégradé les routes avec plus de rapidité qu'on n'a pu en mettre à réparer leurs ravages; quelques travaux ont été détruits; d'autres ont été un moment suspendus; de grandes calamités ont affligé quelques départemens, et surtout celui de Rhin-et-Moselle. Un préfet, judicieux interprète des intentions de l'empereur, a porté les premiers secours aux malheureux qui en ont été les victimes. Sa Majesté a relevé leur courage par sa présence, et les a consolés par ses bien

faits.

» Le fléau de la contagion affligeait des contrées voisines; la vigilance de l'administration en a préservé notre territoire : il s'apaise dans les lieux où il exerçait ses ravages. En maintenant les mesures que commandent encore la prudence et l'intérêt de la santé publique, on préviendra l'invasion du mal sans interrompre les communications nécessaires à l'aliment de notre commerce et de nos manufactures.

» Au centre de la Vendée s'élève une nouvelle ville destinée à être le siége de l'administration. De là elle portera sur tous les points une surveillance active et sûre; de là les lumières et les principes se propageront dans tout ce département, où l'ignorance et le défaut d'information a livré si souvent des âmes simples et honnêtes aux intrigues de la malveillance.

» Des décrets de l'empereur ont rappelé le commerce sur la rive gauche du Rhin, et donné à Mayence et à Cologne tous les avantages des entrepôts réels, sans les dangers des versemens frauduleux dans l'intérieur de la France.

» Nos manufactures se perfectionnent; et tandis que, dans de vaines déclamations, les mercenaires soudoyés par le gouvernement britannique vantent ses ressources lointaines et ses ressources précaires, dispersées sur les mers et dans les Indes; tandis qu'ils peignent nos ateliers déserts et nos ouvriers mourans de misère, notre industrie étend ses racines sur notre propre sol, repousse l'industrie anglaise loin de nos frontières, est parvenue à l'égaler dans ce qui faisait sa gloire et ses succès, la perfection de ses machines, et s'apprête à lui disputer des consommateurs dans tous les lieux où elle la rencontrer et l'atteindre.

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pourra

» Notre manufacture première, l'agriculture, s'agrandit et s'éclaire un système d'exportations, tellement combiné qu'il s'ouvre ou se ferme au gré de nos besoins, assure au cultivateur le prix de son travail, et l'abondance à nos marchés.

» De nouveaux encouragemens préparent l'amélioration de la race de nos chevaux. Nos laines se perfectionnent; nos campagnes se couvrent de bestiaux, et sur tous les points de l'Empire se multiplient ses véritables richesses.

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» Avec la richesse, la sécurité renaissante a donné un plus libre essor à l'active bienfaisance excitée par la religion et par le souvenir de nos malheurs, celle-ci ne se borne plus à des charités du moment; elle embrasse l'avenir, et confie ses trésors au gouvernement, qui lui en garantit un emploi conforme à ses vœux. Jamais tant de legs, de donations pieuses n'ont été faits en faveur des hospices et des établissemens de bienfaisance. Quelques unes de ces institutions ont été créées ou rétablies par de simples particuliers. Jamais l'humanité souffrante n'a trouvé plus d'amis, ni l'indigence plus de secours. Ils sont distribués avec autant de lumière que de zèle; et les hospices de Paris, dirigés avec une intelligence qui multiplie les soins en économisant les fonds, soulagent tous les besoins, guérissent beaucoup de maux, et ne sont plus ces asiles meurtriers qui dévoraient leur nombreuse et misérable population. Aussi le nombre des indigens de la capitale est-il de trente-deux mille au dessous de ce qu'il était en 1791, et de vingt-cinq mille de ce qu'il était en l'an 10.

» La religion a repris son empire; elle ne l'exerce que pour le bien de l'humanité; une sage tolérance l'accompagne, et les ministres des différens cultes qui adorent le même Dieu s'honorent par les témoignages d'un respect réciproque, et ne veulent plus connaître d'autre rivalité que celle des vertus.

» Telle est notre position au dedans. Au dehors, le courage français, secondé par la loyauté espagnole, nous conserve Santo-Domingo: la Martinique brave les menaces des ennemis, et sous un gouvernement paternel se rétablissent, plus durables et plus forts, les liens qui l'attachaient à la mère patrie.

"La Guadeloupe s'est enrichie des dépouilles du commerce britannique, et la Guyane prospère toujours sous une active et vigoureuse administration.

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Les îles de France et de la Réunion seraient aujourd'hui le dépôt des richesses de l'Asie; Londres serait dans les convulsions et le désespoir, si l'inexpérience ou la faiblesse n'avaient trompé le projet le plus habilement concerté : du moins les îles de France et de la Réunion s'alimentent encore des prises que nous avons faites sur nos ennemis.

>> Nos armées sont toujours dignes de leur réputation. Avec la même valeur et la même discipline, elles ont acquis cette patience qui attend sans murmurer les occasions, et se confie

à la prudence et aux desseins du chef qui les conduit. Nos sol- dats, nos officiers apprennent à maîtriser l'élément qui les sépare de cette île objet de tous leurs ressentimens; leur audace et leur adresse étonnent les marins les plus vieux et les plus expérimentés.

» Nos flottes, dans des manœuvres continuelles, préludent aux combats; et tandis que celles de nos ennemis s'usent contre les vents et les tempêtes, les nôtres apprennent à lutter contre elles sans se détruire.

» Enfin, depuis la guerre nous avons gagné le Hanovre. Nous sommes plus en état que jamais de porter des coups décisifs à nos ennemis : notre marine est en meilleur état qu'elle ne l'a été depuis dix ans; sur terre, notre armée plus nombreuse et mieux tenue, plus approvisionnée de tout ce qui donne la victoire qu'elle ne l'a jamais été.

» Dans le département des finances, c'est toujours la même activité dans les recettes, la même régularité dans les régies, le même ordre dans l'administration du trésor, et presque toujours la même fixité dans la valeur de la dette publique.

» La guerre a nécessité des dépenses premières, des dépenses extraordinaires; mais elles ont été faites sur notre propre sol, et nous ont donné des vaisseaux, des ports, et tout ce qui est nécessaire au développement de nos forces contre nos ennemis.

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Aujourd'hui ces dépenses extraordinaires cessent, et celles qu'exige notre attitude guerrière seront dirigées désormais avec une économie que ne permettait pas l'urgence des préparatifs nécessaires à l'attaque et à la défense.

»Les revenus de la couronne supporteront toutes les dépenses du sacre et du couronnement de l'empereur, et celles que demandera encore la splendeur du trône. L'éclat qui l'environne ne sera jamais une charge pour la nation.

» La situation de l'Europe n'a éprouvé qu'un changement important.

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L'Espagne reposait dans une neutralité que la France avait consentie, et que le cabinet britannique avait avouée; tout à coup ses vaisseaux ont été attaqués, et le traité d'Amiens a été violé pour elle comme il l'avait été pour la France. Sa Majesté catholique a pris le parti que lui commandaient la dignité de son trône, la foi trahie, et l'honneur de la nation. généreuse dont il dirige la destinée.

»

L'empereur d'Autriche consacre à la restauration de ses finances, à la prospérité de ses provinces, aux progrès de leur commerce, le repos que lui conseillent la loyauté de son caractère et l'intérêt de ses sujets.

» La république italienne, administrée et gouvernée par les mêmes principes que la France, demande comme elle une organisation définitive qui assure à la génération présente et aux générations futures tous les avantages du pacte social. Uni à cette république par les devoirs qui lui sont imposés, et comme président et comme fondateur de cet état, l'empereur répondra à la confiance qu'elle lui témoigne, et assurera ses destinées et son indépendance en servant les intérêts du peuple français, auquel aussi elle doit son existence, et en conciliant les intérêts des deux peuples amis avec les intérêts bien entendus des puissances limitrophes. Par ces changemens, que réclament la volonté d'une nation et l'intérêt de toutes, tomberont enfin d'absurdes calomnies, et la France, ayant elle-même élevé des barrières là où elle avait posé ses limites ne sera plus accusée de vouloir les franchir.

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L'Helvétie jouit en paix des bienfaits de sa constitution, de la sagesse de ses citoyens et de notre alliance.

» La Batavie gémit encore, sous un gouvernement olygarchique, sans union dans ses vues sans patriotisme et sans vigueur; ses colonies ont été vendues une seconde fois, et livrées sans un coup de canon à l'Angleterre. Mais cette nation a de l'énergie, des mœurs et de l'économie; il ne lui manque qu'un gouvernement ferme, patriote et éclairé.

» Le roi de Prusse, dans toutes les occasions, s'est montré l'ami de la France, et l'empereur a saisi toutes celles qui se sont présentées de consolider cette heureuse harmonie.

» Les électeurs et tous les membres du corps germanique entretiennent fidèlement les rapports de bienveillance et d'amitié qui les unissent à la France.

» Le Danemarck suit les conseils d'une politique toujours sage, modérée et judicieuse.

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L'esprit de Catherine la Grande veillera sur les conseils d'Alexandre Ier; il se souviendra que l'amitié de la France est pour lui un contre-poids nécessaire dans la balance de l'Europe; que, placé loin d'elle, il ne peut ni l'atteindre ni trou-' bler son repos, et que son grand intérêt est de trouver dans ses relations avec elle un écoulement nécessaire aux productions de son empire.

» La Turquie est vacillante dans sa politique; elle suit par crainte un système que son intérêt désavoue. Puisse-t-elle ne pas apprendre, aux dépens de sa propre existence, que la crainte et l'incertitude accélèrent la chute des empires, plus funestes mille fois que les dangers et les pertes d'une guerre malheureuse !

>>

Quels que soient les mouvemens de l'Angleterre, les des

tins de la France sont fixés; forte de son union, forte de ses richesses et du courage de ses défenseurs, elle cultivera fidelement l'alliance des peuples amis, et ne saura ni mériter des ennemis ni les craindre.

"Lorsque l'Angleterre sera convaincue de l'impuissance de ses efforts pour agiter le continent; lorsqu'elle saura qu'elle n'a qu'à perdre dans une guerre sans but comme sans motifs; lorsqu'elle sera convaincue que jamais la France n'acceptera d'autres conditions que celles d'Amiens, et ne consentira jamais à lui laisser le droit de rompre à plaisir les traités en s'appropriant Malte, l'Angleterre alors arrivera à des sentímens pacifiques: la haine, l'envie n'ont qu'un temps. »

ADRESSE du Corps législatif à l'empereur; rédigée et présentée par M. Fontanes, président (1). Audience impériale du 12 nivose an 13, au palais des Tuileries; les membres du Corps législatif en corps et en grand costume. (2 janvier 1805.)

Sire, vos très fidèles sujets (2) les membres du Corps législatif viennent apporter au pied du trône l'adresse de remercîment et de félicitations qu'ils ont votée pour les sentimens contenus dans le discours de Votre Majesté.

» L'ouverture de cette session sera une époque mémorable de notre histoire. Jamais le trône et la nation ne se prêtèrent l'un à l'autre tant d'éclat et tant d'appui.

» Les droits du chef de l'État se sont accrus de tout l'intérêt qu'il a témoigné pour ceux du peuple français.

>> Nous goûtons déjà les biens qu'assure la force du pouvoir

N

(1) Nommé président pour la session de l'an 12, conformément au senatus-consulte du 28 frimaire de la même année, Fontanes avait été réélu président pour la session suivante par décret impérial du 29 brumaire an 13.

(2) « Cette forme est celle usitée par la chambre des communes. » (Note insérée dans le procès-verbal par ordre du président.)

Dans un comité général tenu le 7 nivose, le Corps législatif avait autorisé son président à rédiger l'adresse à l'empereur; il adopta même le premier projet qui lui en fut présenté, et commençant par Sire, les membres du Corps législatif viennent, etc. Mais lorsque ensuite Fontanes proposa, comme un amendement de pure forme, l'expression de fidèles sujets, de vifs murmures s'élevèrent; et il se permit de les dédaigner. Une observation anglo-française, furtivement glissée dans le procès-verbal, lui pat suffisante pour répondre à la majorité des représentans, dont il venait de compromettre la dignité.

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