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LES RUINES D'ANGKOR

Les monuments d'Angkor ont été édifiés par les rois primitifs, qui ont laissé dans ces chefs-d'œuvre de pierre une marque imposante de la grandeur de leur règne et de la civilisation de leur pays.

Ces ruines ont été étudiées par M. Delaporte qui a retracé dans son livre les émotions qu'il a ressenties et les renseignements qu'il en a apportés. « Ces monuments splendides, nous « dit-il, qui couvrent le pays, ces ruines étranges frappent « l'esprit et le cœur. La conception grandiose de ces monu«ments, l'harmonie parfaite de toutes les parties sont admi<< rables.

« L'art khmer, issu du mélange de l'Inde et de la Chine, « épuré, ennobli par des artistes d'une incomparable valeur, « est resté comme la plus belle expression du génie humain. « dans cette vaste partie de l'Asie, qui s'étend de l'Indus au « Pacifique.

« Il s'écarte des grandes œuvres classiques du bassin de la « Méditerranée; ce ne sont plus les colonnades majestueuses, « ni ces grandes surfaces calmes de la Grèce ou de l'Egypte ; « ce sont, au contraire, des formes laborieuses, complexes, su« perpositions, labyrinthes, galeries, tours dentelées, pyramides << à flèches innombrables, une profusion de sculptures, d'orne«ments, d'effets de clair et de sombre qui enrichissent l'en« semble sans en altérer la majesté et s'harmonisent merveil«<leusement avec la lumière intense et la végétation luxuriante « de ces régions du tropique. C'est une autre forme du beau. « Les archéologues placent les œuvres de l'ancien Cambodge. <<< bien au-dessus de celles de l'Inde. L'art khmer, en effet,

« résume et surpasse les arts de toutes les contrées dont le « Cambodge occupe le centre. C'est autour de la collection «kmer que se grouperont plus tard tous les monuments ar« chéologiques de l'Extrême-Orient. »

Les principales ruines explorées dans ces derniers temps sont celles d'Angkor-vat et d'Angkor-thom.

Nous empruntons au remarquable ouvrage de MM. Bouinais et Paulus « Le Cambodge » la description de ces monuments. Le temple d'Angkor-vat a une première terrasse qui est gardée par d'énormes liens de pierre; un pont dalle lui succède, traversant un large fossé aboutissant à la galerie à trois tours; ces tours sont des édifices à base carrée avec des salles disposées comme les bras d'une croix grecque dont les étages décroissants sont couronnés par des feuilles de lotus et se terminent en pointe. A l'entrée principale, des serpents fantastiques dressent leur 9 têtes en éventail; chacune de ces pièces a été taillée dans un bloc de grès de 9 mètres cubes, ce qui donne une idée des dimensions du monument. Vu du dehors, ce premier édifice, à travers la végétation qui cache sa base, ne laisse apparaitre qu'une longue colonnade surmontée de voûtes et de sommets ruinés.

A l'intérieur, on ne voit plus que des moulures surmontées d'entablements dont les saillies sont formées par des doucines aux courbes harmonieuses; de distance en distance s'ouvrent des fenêtres à moitié remplies par des balustres délicatement ouvragės; au-dessus courent des frises d'ogives fleuries, des rinceaux de dragons et d'ornements transformant la pierre en une véritable dentelle au milieu de laquelle des espaces ont été réservés pour servir de fond à des figures célestes tenant en main des tiges de lotus.

En pénétrant dans le parc, on aperçoit le temple; l'ouverture est un massif quadrangulaire à trois gradins entourés chacun d'une galerie; la base de la pyramide a 240 mètres 80 de l'Est à l'Ouest et 211 mètres 70 du Nord au Sud.

Il faudrait un volume entier pour donner une idée simplement approximative des richesses artistiques de ce sanctuaire dont les restes sont encore assez visibles pour faire comprendre quel pouvait être le degré de luxe et de splendeur de ce monument qui n'a jamais été surpassé dans aucun pays ni à aucune époque.

Les sujets des statues et des bas-reliefs sont en général le triomphe de Rama terrassant Prakshasas d'un très beau mouvement et d'une exécution parfaite.

Toutes ces ruines sont grandioses et dépassent en étendue celles de Karnak et de Balbec; elles sont malheureusement envahies par une végétation inextricable qui empèche d'en apercevoir tous les détails.

Mais ces ruines, d'époques différentes, se distinguent entre elles par leur style.

« L'impression produite par l'ornementation de l'art Khmer, <dit M. Fournereau, qui a exploré ces ruines en 1880, est à « peu près analogue à celle que l'on éprouve à la vue de cer«taines sculptures de la fin de notre Moyen-âge et de la Renais«sance. Ces ruines indiquent une certaine analogie dans la « manière générale de concevoir la décoration et comme une ⚫ parenté artistique entre les maîtres de notre art à ces époques « et les grands artistes de l'ancien Cambodge, parenté qu'aucune « des œuvres de l'Extrême-Orient ne faisait supposer ».

En dehors des monuments, on trouve sur le territoire des anciens Khmers de grands rochers sculptés, des constructions magnifiques et des bronzes très curieux.

On peut voir au musée de Dresde un de ces bronzes qu'on a rapporté de Java jusqu'où s'est étendue l'influence artistique des anciens Khmers.

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