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maintien ou la propagation de la foi de chacune de ces sectes.

Depuis plusieurs années l'agriculture demande des lois, non pour régler ce qu'elle doit faire, mais pour empêcher qu'elle ne soit troublée, c'est-à-dire, pour que les délits ruraux soient réprimés avec promptitude, avec facilité et à peu de frais. Le siége de la justice ne saurait à cet égard être trop près des justiciables; les formes de la procédure ne sauraient être trop simples, ni les poursuites trop peu coûteuses. Les délits peu graves, qui exigent de grands frais de répression, ne sont point réprimés, parce que le remède est pire que le mal : le trésor perd à exiger de gros droits, et les délits se multiplient par la difficulté de les réprimer.

L'industrie manufacturière et le commerce ont aussi besoin, non d'être réglémentés, mais d'être protégés. S'il n'est pas possible de révoquer tous les règlemens qui les entravent, il faut au moins empêcher qu'on leur en impose de nouveaux ; il faut prévenir le retour de ces institutions gothiques qu'on a tenté naguère de ressusciter. Les jurandes, les maîtrises, les corporations, destructives de tout essor dans l'industrie, sont considérés par quelques-uns com~

me des moyens excellens de domination; ils savent que, pour tout asservir, il suffit de tout enrégimenter sous des chefs dont on dispose; et peu leur importe que tout dépérisse, pourvu qu'ils puissent disposer de tous les intérêts.

Enfin, la responsabilité de tous les fonctionnaires publics, depuis les gardes champêtres jusqu'aux ministres inclusivement, est à établir; et, tant qu'elle ne sera point établie, rien ne sera garanti: tout sera ou pourra être livré à l'arbitraire. Les institutions nationales pourront être attaquées et renversées; le trésor public mis au pillage; la France livrée aux troupes étrangères. L'inviolabilité des ministres et d'une multitude innombrable de leurs agens proteste tous les jours depuis quatre ans contre l'existence d'un état constitué; elle suffit seule pour rendre chimériques les deux chambres législatives, et pour donner un démenti aux actes dont l'objet paraît être de nous donner un gouvernement représentatif.

Les personnes qui voient la France dans Paris, voudraient sans doute que les députés s'occupassent d'abord de la responsabilité des ministres; mais celles qui pensent que quatre-vingt-trois départemens doivent être comptés pour quelque chose en France, désireront probablement

que la responsabilité des agens qui sont répandus sur la surface du territoire, soit d'abord établie. Quand on pourra poursuivre et faire condamner les gendarmes, les commissaires de police, les adjoints, les maires, les sous-préfets, et les préfets prévaricateurs, ou instrumens de prévarication, on pourra commencer à se croire en sûreté. Il importe sans doute que les intérêts de la nation, considérés sous un point de vue général, ne puissent pas être impunément lésés ; mais, lorsque tous les intérêts individuels sont bien garantis, les intérêts généraux ont peu de chose à craindre : c'est de la sûreté, du repos et du bonheur de chacun, que se composent la sûreté, le repos et le bonheur de tous..

Enfin, la chambre des députés doit spécialement s'occuper des dépenses publiques; et› il importe aux électeurs qu'elle supprime celles qui ne sont point nécessaires, qu'elle réduise celles qui sont susceptibles de réduction, et qu'elle surveille en un mot l'emploi que font les ministres des moyens qui leur sont confiés. Les institutions sous lesquelles les abus prospèrent, préparent de loin les révolutions; mais ce sont toujours les désordres des finances qui les font éclater; un gouvernement travaille lui-même à sa ruine le jour où il commence à consomCens. Europ. TOM. IX.

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mer au-delà de ce que la nation peut raisonnablement lui fournir.

Si vous résumez maintenant ce que doivent faire vos députés, vous trouverez qu'ils doivent organiser des administrations communales et départementales; organiser les gardes nationales, et les rendre à leur véritable destination, en les dégageant de tout ce qu'elles ont de soldatesque, et en les convertissant en gardes municipales; réformer les lois relatives à l'administration de la justice criminelle, tant celles qui sont relatives à l'instruction de la procédure, que celles qui caractérisent les délits et en déterminent les peines; créer un grand jury qui puisse, comme en Angleterre, ordonner la mise en jugement de tout individu coupable, quel qu'il puisse être, soit sur la plainte du ministère public, soit sur la plainte des parties lésées; organiser le jury de jugement de manière qu'il soit une garantie pour tout accusé innocent, et non une commission arbi

trairement composée par les agens du pouvoir; établir des institutions qui garantissent la sûreté individuelle, l'inviolabilité des propriétés et la liberté de la presse; réorganiser l'instruction publique, et rendre aux pères la faculté de faire élever leurs enfans comme ils jugeront

convenable, sauf à laisser aux administrations locales la faculté de surveiller les maisons d'éducation, pour le maintien de l'ordre public et des bonnes mœurs; garantir la liberté des cultes, et préserver la France des institutions et des doctrines ultramontaines; donner aux agriculteurs un code rural qui leur garantisse une justice prompte, simple, et surtout peu coûteuse; garantir l'industrie des villes des institutions et des règlemens dont quelques personnes voudraient les surcharger, et diminuer, s'il est possible, les entraves déjà existantes; établir, non en principe, mais en fait, la responsabilité des agens du gouvernement ; enfin travailler autant qu'il est possible à la réduction des dépenses publiques. Nous ne parlons de la délivrance du territoire et du renvoi des troupes suisses. Quand les chambres se rassembleront, la France sera sans doute affranchie, et le renvoi des Suisses résolu.

pas

Si l'opinion que nous nous faisons des besoins publics vous paraît conforme à la vérité, vous entrevoyez déjà ce que vous devez chercher dans les candidats qui se présentent ; leur capacité, comme nous l'avons déjà dit, doit être appropriée aux travaux auxquels ils peuvent être appelés à concourir. Mais, avant que

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