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est en vous, le gouvernement représentatif, et vous ouvrez au pouvoir arbitraire le champ le plus vaste qu'il ait à parcourir, puisque vous détruisez toute résistance légale, tout refuge contre les concussionnaires ou contre les persécuteurs.

Les hommes complaisans qui savent s'insinuer doucement dans les antichambres,qui trou vent toujours le moyen de pénétrer dans les bureaux les plus inabordables, et que Leurs Excellences n'aperçoivent jamais sans les saluer d'un gracieux sourire, paraissent des hommes d'un grand prix à une certaine classe d'électeurs. Ce sont en effet des hommes excellens pour donner une bonne apostille, pour solliciter une petite faveur, pour faire obtenir une judicature de paix à un ami, ou un bureau de tabac à un cousin. Ils peuvent aussi aller demander à un commis des explications sur une spoliation ou sur une arrestation arbitraire; en solliciter sa réparation, si cela ne contrarie pas la politique de Son Excellence, ou exhorter le plaignant à la patience, si la mesure a été commandée par l'intérêt de l'état.

Des hommes qui possèdent de semblables qualités sont précieux sans doute; mais c'est parce qu'ils accordent des impôts immodérés,

ou qu'ils attribuent aux agens du pouvoir des salaires sans mesure, qu'ils réduisent les citoyens à la nécessité de solliciter des places; c'est parce qu'ils souffrent que le mode d'élection des fonctionnaires soit mal réglé, que les intrigues sont nécessaires; c'est parce qu'ils accordent leur sanction à de mauvaises lois, qu'on a besoin de faire réparer des injustices. Ces hommes engendrent les abus par milliers, et ils ne peuvent les attaquer qu'un à un; encore leurs attaques sont-elles si molles, qu'il est bien rare qu'elles ne faiblissent au moindre obstacle,

Ne conviendrait-il pas de choisir un certain nombre de fonctionnaires publics? Permetteznous de répondre à cette question par une autre. Supposez que, les idées de gouvernement représentatif arrivant jusqu'en Turquie, il prenne un jour envie à un sultan paternel d'accorder à ses sujets une représentation nationale; supposez que les Turcs se réunissent en colléges électoraux, et que, pour porter leurs doléances aux pieds de Sa Hautesse, pour demander des réformes dans l'administration, enfin pour dénoncer les excès qui les accablent, ils choisissent les pachas et les commis des pachas, les visirs et les sous-visirs, l'aga des janissaires et

ses officiers, enfin tous les hommes qui exploi tent le pays, et qui s'engraissent d'abus; pensez-vous que le sultan n'entendra que la vérité, que les impôts seront diminués, les abus dénoncés, les concussionnaires poursuivis, la sûreté des personnes garantie, les propriétés inviolables, la liberté de la presse respectée ? Pensez-vous que cette réunion, ou plutôt cette coalition d'hommes du pouvoir, au lieu d'être un bien pour les habitans du pays, ne sera pas pour eux le plus terrible des fléaux ?!!

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Nous pouvons demander encore sérieusement s'il convient à un peuple de faire établir les impôts par les hommes qui en profitent, de confier la censure des agens du pouvoir aux hommes qui exercent le pouvoir, la confection des lois aux hommes qui doivent les exécuter, la charge de poursuivre les ministres, aux ministres eux-mêmes ou à leurs agens, le soin de faire des réformés aux employés qui doivent être réformés, et l'obligation d'établir la responsabilité des fonctionnaires aux agens sur qui la responsabilité doit peser. Ces ques tions en effet peuvent paraître épineuses aux publicistes que le pouvoir soudoie; mais le temps n'est peut-être pas loin où les hommes

les plus simples ne pourront les entendre proposer sans sourire de pitié.

Après avoir examiné quels sont les hommes qu'il vous convient d'appeler ou de ne pas appeler à la représentation nationale dans notre situation actuelle, il nous resterait à rechercher par quels moyens les électeurs peuvent s'entendre, soit pour faire élire les candidats qui leur conviennent, soit pour déjouer les manœuvres à l'aide desquelles on voudrait les diviser et leur faire accepter des candidats indignes ou incapables de les représenter; mais l'étendue que nous avons donnée à nos réflexions nous avertit que nous devons les terminer ici.

DEUXIÈME PARTIE.

OUVRAGES

SCIENTIFIQUES EF LITTÉRAIRES.

DE LA MONARCHIE FRANÇAISE

Depuis la seconde restauration jusqu'à la fin de la session de 1816,

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A DIVERSES époques, des assemblées populaires ont fait connaître en France les droits ou, si l'on veut, les prétentions des hommes qu'elles représentaient; elles ont réclamé la sûreté des personnes et des propriétés, le libre exercice de l'industrie, la liberté des cultes, la liberté de la presse, l'égale répartition des impôts et des charges sociales, enfin l'égalité devant la loi, soit dans les punitions, soit dans les

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