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contenir toutes les propositions de dépenses supplémentaires, combien il a fallu écarter de projets justifiés, d'entreprises intéressantes, avec quelle parcimonie, en un mot, le Gouvernement a dù pourvoir aux besoins des services publics.

Les prévisions de recettes, telles qu'elles résultent des produits réalisés en 1904, ne laissaient d'ailleurs qu'une marge très insuffisante aux majorations de crédits. La plus-value des recettes du dernier exercice clos par rapport aux prévisions du budget de 1905 ne ressort en effet qu'à 41,733,118 francs; les produits évalués directement comportant, d'autre part, une augmentation de 2,074,111 francs, les ressources pouvant gager l'accroissement des dépenses dépassaient à peine 43 millions. Pouvions-nous, , pour assurer l'équilibre, vous proposer de renoncer à la règle de la pénultième, dont la rigoureuse application a donné en ces trois dernières années de si heureux résultats et escompter quelques plus-values presque certaines, en matière de taxes téléphoniques par exemple, parce qu'elles sont en quelque sorte liées aux dépenses correspondantes? Il était d'autant moins permis d'y songer que le mouvement des recettes pendant les premiers mois de l'année courante (1) n'a pas été aussi favorable qu'au cours des deux derniers exercices. Sans accuser, à proprement parler, un recul ou même un arrêt absolu, il n'a plus la régularité qui caractérisait les plus-values de 1903 et de 1904, et il justifie, par conséquent, une certaine circonspection. Si, sur certaines lignes, des bénéfices sont à peu près assurés, sur d'autres quelques mécomptes sont possibles et il importe de réserver tout au moins l'éventualité d'une compensation.

Devions-nous au contraire vous demander un supplément de ressources, soit par l'augmentation de certains impôts, soit par la création de taxes nouvelles? Il ne nous a pas paru que la nécessité s'en imposat. Autant il était urgent, en 1902, en présence d'une situation financière inquiétante, de moins-values persistantes et considérables, de tendre plus énergiquement, si l'on peut ainsi parler, le ressort de l'impôt, autant il nous semblerait excessif de demander au contribuable des sacrifices nouveaux pour parer à une difficulté d'importance très secondaire et, selon toute apparence, purement temporaire.

que

Rien ne permet en effet de considérer la modicité des plus-values réalisées au cours des cinq premiers mois de l'exercice comme l'indice ou le symptôme d'une nouvelle série de médiocres recouvrements. Il ne faut pas oublier que les évaluations budgétaires de 1905, basées sur une pénultième très favorable, ne laissent pas autant de place aux plus-values que les prévisions adoptées pour les deux budgets précédents ce serait par suite une conclusion tout à lait excessive d'attribuer exclusivement la réduction apparente des plus-values à une diminution effective dans le rendement de l'impôt. La situation de nos recettes est encore, on peut l'affirmer, satisfaisante, et il y a tout lieu d'espérer qu'à moins d'événements imprévus, elle se maintiendra telle en 1906. C'est donc, nous le répétons, à une insuffisance de recettes toute temporaire qu'il convenait de parer et cette considération nous a déterminés à assurer l'équilibre du prochain budget dans des conditions appropriées aux circonstances.

Les dépenses du corps d'occupation de Chine et de sa réserve stationnée au Ton kin ont depuis l'origine de l'expédition fait l'objet, en cours d'exercice, de crédits supplémentaires gagés par un prélèvement d'égale somme sur les disponibilités de l'emprunt réalisé en 1901. Ce système a fait, l'an dernier, de la part des commissions financières l'objet de critiques qui nous paraissent justifiées. Les dépenses de l'espèce seront donc comprises désormais dans les crédits ordinaires du Ministère de la guerre; en même temps que nous inscrivons cette charge au budget de 1906,

(1) Voir page 61 la situation provisoire de l'exercice 1905 au 30 juin.

nous faisons état du reliquat que fera apparaitre, après le prélèvement des dépenses de 1904 et de 1905, conformément aux errements actuels, le compte ouvert parmi les services spéciaux du Trésor pour retracer les opérations de recette et de dépense afferentes à l'emprunt de 1901; ce reliquat s'élèvera à 24,680,000 francs, mais comme un crédit de plus de 10 millions doit être ouvert pour les dépenses du prochain exercice, le budget ne bénéficiera que d'une recette de 14 millions environ. Cette ressource exceptionnelle ajoutée à l'augmentation normale des recettes (43,807,229 fr.), ne couvre que jusqu'à concurrence de 58 millions environ l'augmentation des dépenses. Nous vous demandons, pour parfaire la différence, de renouveler au Gouvernement, pour l'exercice 1906, la faculté que lui avait accordée, pour 1904, l'article 8 de la loi de finances du 30 décembre 1903, de négocier jusqu'à concurrence de 8,800,000 francs en capital les inscriptions de rente attribuées à l'Etat par voie de donation ou de legs.

Les plus-values réalisées pendant le dernier exercice ont rendu inutile l'application de cet article. Il est permis de penser qu'il ne sera pas non plus indispensable, en 1906, de réaliser cette ressource; mais l'autorisation d'y faire appel, en cas de besoin, n'en est pas moins nécessaire pour parer à toute éventualité. L'équilibre du budget de 1906 s'établirait alors comme il suit :

Recettes.
Dépenses..

EXCÉDENT de recettes

3,700,563,093
3,700,408,958
154,135

Sans doute, les propositions qui vous sont soumises ont l'inconvénient de faire état de ressources exceptionnelles pour une somme nette d'environ 23 millions; nous ne cherchons pas à le dissimuler. Mais elles ont à nos yeux l'incontestable avantage de maintenir, sans demander au contribuable de sacrifices nouveaux que la situation actuelle de nos finances ne justifierait en rien, les règles posées et les résultats obtenus dans cette législature par les efforts communs des Chambres et du Gouvernement: application stricte de la règle de la pénultième, incorporation des garanties d'intérêt, suppression des émissions d'obligations à court terme. La politique financière résumée dans ces trois principes a permis de clore, en peu de temps, l'ère des déficits, de faire face à toutes les dépenses normales sans recourir à l'emprunt, d'assurer, en dehors même des amortissements automatiques prévus au budget, le remboursement d'une partie de notre dette à court terme. Nous avons tenu et vous tiendrez avec nous à y rester fidèles.

EXAMEN DÉTAILLÉ DES ÉVALUATIONS DE RECETTES ET DE LA LOI DE FINANCES.

De même que les années précédentes, nous croyons devoir donner ci-après des explications, aussi détaillées que possible, sur les évaluations de recettes, et notamment sur les modifications résultant des récentes dispositions législatives. Nous passons ensuite en revue les principaux articles du projet de loi.

RECETTES.

Selon la nature des produits, les prévisions sont basées sur les recouvrements de la pénultième année ou font l'objet d'évaluations directes. On examinera successivement ces deux catégories de recettes.

I. Évaluations basées sur la règle de la pénultième.

Les produits qui s'évaluent d'après les résultats de la pénultième année sont les suivants: Enregistrement, Timbre, Impôt sur les opérations de bourse, Taxe de 4 p. o/o sur le revenu des valeurs mobilières, Douanes, Contributions indirectes,

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Sucres, Monopoles et Domaines. Une observation d'ensemble doit être présentée tout d'abord: l'année 1904 ayant été bissextile, une déduction a été opérée conformément aux précédents sur les recettes que le jour supplémentaire de février est venu renforcer. Cette diminution n'est pas inférieure à 6,678,800 francs.

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Enregistrement. L'article 2 de la loi de finances du 22 avril 1905 a porté à 7 p. 0/0, décimes compris, le droit d'enregistrement des ventes d'immeubles fixé à 5.50 p. o/o en principal par l'article 52 de la loi du 28 avril 1816; l'article 3 de la même loi a fixé à 4.50 p. o/o, sans addition de décime, le droit des échanges d'immeubles; enfin l'article 5 a stipulé que le droit de o.15 p. 0/0 édicté les pour partages par l'article 19 de la loi du 28 avril 1893 serait porté à 0.20 p. o/o. Ces différentes dispositions appliquées aux recouvrements de l'exercice 1904 conduisent à une augmentation de recettes de 2,199,000 francs pour les mutations immobilières à titre onéreux et à une augmentation de 1,951,000 francs pour les partages. Mais comme l'article 4 a fractionné de franc en franc (et non plus de 20 francs en 20 francs) la perception des droits dans le cas où la valeur imposable ne dépasse 500 francs, on a dû escompter de ce chef une perte de recettes de 250,000 francs. Tout compte fait, l'application des dispositions de la dernière loi de finances aboutit à une majoration de 3,900,000 francs.

pas

Timbre. Les augmentations dont il vient d'être parlé ont pour contre-partie une diminution de 4,150,000 francs sur les droits de timbre. On se souvient, en effet, que l'article 6 de la loi du 22 avril 1905 a affranchi de toute taxe de cette nature les minutes, originaux et expéditions des actes ou procès-verbaux de vente, licitation ou échange d'immeubles, ainsi que les cahiers des charges relatifs à ces mutations.

Douanes. Il est de toute impossibilité de déterminer actuellement le mouvement d'importation en 1906 des céréales et des vins. La règle de la pénultième ne peut donc être que rigoureusement observée, alors surtout qu'elle conduit à des évaluations très modérées.

Le montant des droits de douanes sur les céréales s'est élevé en 1904 à la somme de 13,629,000 francs se décomposant comme il suit: Blé, 4,171,760 francs; maïs, 7,697,178 francs; autres grains, 610,615 francs; farines de froment, 1,111,292 francs; autres farines, 38,148 francs. Or, dans l'échelle des recouvrements des dix dernières années, ce chiffre représente un minimum. Il pourrait être facilement dépassé en 1906, puisqu'il est certain que la soudure de la campagne 1904-05 avec la campagne de 1905-06 se fera avec une certaine difficulté et ne laissera, quoi qu'il arrive, que des stocks en blé très réduits.

Quant aux vins, les recettes de l'année 1904 se sont élevées à la somme de 17,828,000 francs. En 1902, elles avaient été de 18,328,000 francs; en 1903 de 17,844,000 francs.

Mais, si en ce qui concerne les céréales et les vins, aucun fait connu ne peut justifier une majoration des résultats de l'année 1904, des changements de législation d'une importance relativement considérable, proposés ou adoptés au cours des dernières années, sont venus troubler d'une façon appréciable les entrées de l'année pénultième. Dans cet ordre d'idées, nous citerons les cafés, les poivres et le cacao. 1° Cafés. Au moment du vote du budget de l'exercice 1904, le Parlement s'était trouvé, ainsi qu'on se le rappelle, en présence d'une situation anormale déterminée par la menace d'un relèvement des droits de douane sur le café, Cette appréhension avait provoqué la mise à la consommation, dans les derniers mois de

1903, d'importantes quantités de la denrée, qui, sans cette circonstance, n'auraient été acquittées qu'en 1904.

L'exercice 1903 allait par suite se solder avec un excédent de recettes devant revenir normalement à l'exercice 1904. Pour rétablir l'équilibre, il fut décidé art. 13 de la loi de finances du 28 décembre 1903) que le montant des recettes effectuées sur l'exercice 1903, au titre des droits d'importation sur les cafés, serait, pour la portion excédant la somme de 118 millions de francs, transféré à l'exercice suivant dans les écritures du Trésor. La somme de 118 millions ainsi attribuée à l'exercice 1903 représentait un chiffre égal aux recouvrements de 1902 (116 millions), majoré de 2 millions en raison du développement normal de la consom

mation.

Quant aux réalisations probables de 1904, elles avaient paru pouvoir étre fixées à 120 millions, compte tenu du prélèvement à opérer sur les perceptions de 1903. Or, les constatations ont atteint 135,104,000 francs, savoir:

Prélèvement sur les recettes de 1903.
Perceptions effectuées en 1904..

TOTAL ÉGAL...

32,341,000'

102,763,000

135,104,000

Pendant les trois premiers trimestres de 1904, les acquittements ont été affectés par les dédouanements anticipés qui avaient été effectués en 1903, et c'est seulement en fin d'année qu'ils ont repris une marche normale, ainsi

le relevé ci-après :

que

le démontre

DÉDOUANEMENTS MENSUELS DE CAFÉS PENDANT LES ANNÉES 1902, 1903 ET 1904.

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Ces données comparatives autorisent à penser que la quantité de 237,800 quintaux correspondant à la somme de 32,341,000 francs rattachée à l'exercice 1904 était complètement absorbée avant l'expiration de l'année. Mais, pour l'évaluation

BULL. DE STAT.

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des recettes de 1906, la question se pose de savoir si ces 237,800 quintaux doivent être considérés comme ayant été consommés dans la seule année 1904. Dans l'affirmative, il faudrait admettre que, pendant cette période, la consommation aurait progressé de 120,842 quintaux, tandis que pour 1903, l'augmentation n'aurait pas dépassé 20,161 quintaux. Or, cette hypothèse est peu vraisemblable, et malgré l'appoint de ressources qu'elle eut apporté à l'équilibre du projet actuel, nous l'avons délibérément écartée.

En fait, pendant les sept derniers mois de l'année 1903 et pendant l'année 1904, entre le moment où les recouvrements ont cessé d'être normaux et celui où ils le sont redevenus, c'est-à-dire dans une période de 19 mois, il a été dédouané 1,497,116 quintaux métriques de café. Ces chiffres correspondent à une consommation annuelle de 945,547 quintaux, représentant, au tarif moyen (134 fr.79), une recette de 127,452,000 francs, inférieure aux recettes de 1904 de 7,652,000 francs.

2° Poivres. Une situation analogue a été créée, en ce qui concerne les poivres, par le changement de tarif édicté par la loi du 29 mars 1903. En prévision de ce relèvement, le commerce a dédouané, en 1902 et au début de 1903, des quantités de poivre hors de proportion avec les besoins immédiats. Il en est résulté que les acquitttements qui, de 1892 à 1901, avaient oscillé entre 25,377 et 28,772 quintaux et n'avaient pas dépassé la moyenne annuelle de 28,095 quintaux, ont atteint brusquement, en 1902, 31,951 quintaux et, en 1903, 36,908 quintaux. Mais les dédouanements de 1904 s'en sont largement ressentis: à peine ont-ils dépassé 22,000 quintaux. Ce n'est que tardivement que les quantités dédouanées par anticipation ont été définitivement consommées et que les opérations ont repris leur cours ordinaire. Ici encore l'année 1904 ne pouvait servir de terme de comparaison, et nous avons cru devoir adopter pour 1906 une évaluation de 30,000 quintaux dont 6,000 quintaux en provenance de l'étranger, égale à la prévision de 1905 et qui représente en chiffre rond la moyenne des trois dernières années. Le décompte s'établit dès lors comme il suit :

4,992,000'

Poivres coloniaux: 24,000 quintaux à 208 francs......
Poivres de l'étranger: 6,000 quintaux à 312 francs...

1,873,000

TOTAL.....

6,864,000

Soit, par rapport aux recouvrements de 1904, ci...

5,110,000

1,754,000

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un excédent de....

3° Cacao. Enfin, le dégrèvement du sucre a déterminé un accroissement rapide de la consommation du cacao. Les droits de douane y afférents se sont élevés de 19,842,000 francs en 1902 à 23,090,000 francs en 1904; l'évaluation adoptée. par les Chambres pour l'exercice en cours a même atteint 23,836,000 francs. Mais effets directs de la nouvelle législation sucrière semblent aujourd'hui à peu près épuisés, à raison surtout de la hausse du prix du sucre provoquée par la diminution momentanée de la culture de la betterave, et il n'a pas semblé qu'il convint de majorer les évaluations au delà des résultats déjà acquis.

Telles sont les principales rectifications que comporte, en ce qui touche les droits à l'importation, l'application des lois récentes. Nous en signalerons une dernière, relative aux droits de navigation, et due au nouveau mode de jaugeage. L'augmentation de recette qui doit en résulter a été évaluée à 500,000 francs dans le budget de 1905 d'après les calculs sur lesquels il est inutile de revenir, la même recette a été prévue pour l'exercice prochain.

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