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JUILLET.

3. Loi sur les sucres. La question des sucres est une des plus considérables dont la solution ait été demandée aux chambres. La fabrication du sucre indigène, à laquelle Napoléon a donné naissance, devint bientôt une. industrie agricole et manufacturière du premier ordre. Les colonies, gênées dans leur exploitation et obligées de verser exclusivement leurs produits sur le marché de la métropole, ne tardèrent pas à sentir le contre-coup de la production indigène. La consommation nationale est évaluée, année moyenne, à 110 millions de kilogrammes. Sur cette quantité, les colonies fournissent 79 millions de kilogrammes, qui se réduisent par le raffinage à 70 millions,

Avant l'introduction de l'industrie saccharine en France, les 40 millions de kilogrammes, nécessaires au complément de la consommation, étaient obtenus à l'étranger, à Cuba, au Brésil, etc., moyennant une surtaxe considérable qui les frappait à l'importation. Toutefois, dans ces dernières années, la production indigène avait non-seulement comblé le déficit, mais elle avait même dépassé de 44 millions de kilogrammes les besoins de la consommation. De là l'emcombrement sur le marché, la baisse des prix coloniaux et la ruine des colons.

Ce fut pour remédier à cet état de choses, que l'impôt sur le sucre indigène, qui avait été fixé d'abord à 11 fr. par 100 kilogrammes, fut porté à 16 fr. 50 c., à partir du 1er juillet 1839. Ce surcroît de charges, imposé à l'indus

trie rivale, n'avait pas suffi pour que les colons pussent produire avec sécurité. Suivant des évaluations exactes, ils se trouvaient encore en perte de 8 fr. 25 c. par 50 kilogrammes. Pour couvrir cette perte, le gouvernement leur concéda, par ordonnance, le dégrèvement correspondant de 16 fr. 50 c. par 100 kilogrammes. Une hausse de 2 à 4 fr. avait fait réduire le dégrèvement à 13 fr. 20 c. D'un autre côté, l'attente du dégrèvenient avait réduit de 27 la plantation de la betterave. Mais le cours relevé des sucres, qui avait été le résultat de ces combinaisons, devait agir comme un stimulant, et pouvait faire craindre le renouvellement de la crise qui avait jeté dans le commerce une si grande perturbation. De là, la nécessité de la loi nouvelle. On voit quelle était son importance; elle avait à régler à la fois les intérêts de l'agriculture, ceux des fabricants de la métropole, l'intérêt général des nationaux qui ne permettait pas de laisser tarir la source d'un produit indigène de première nécessité (1), et enfin l'intérêt contradictoire des colonies, auquel se lient si intimement celui de notre marine marchande et militaire, et celui de nos ports.

En présence de ces intérêts, trois systèmes se sont formulés au sein de la chambre des députés.

Le premier consistait à établir en principe l'égalité des droits pour les deux industries, en prenant pour chiffre normal le droit de 49 fr. 50 c. par 100 kilogrammes, auquel était soumis, dans ces derniers temps, le sucre colonial; à maintenir les proportions différentielles établies par l'ordonnance; à joindre à ces dispositions, pour donner un nouvel essor à la navigation, la diminution à 10 ou 15 fr.

(1) On a calculé qu'en 1812 et 1813 les bénéfices de l'Angleterre, sur cette seule branche de commerce, s'étaient élevés par année à un milliard.

de la surtaxe sur les sucres étrangers; enfin à baisser le rendement à 68 ou 70 pour cent.

Le deuxième système, celui de la commission, maintenait tout simplement le régime de 1837: droit de 49 fr. 50 c. sur le sucre colonial; impôt de 16 fr. 50 c, sur le sucre indigène.

Le troisième système tranchait la question, en détruisant la fabrication indigène, moyennant indemnité.

C'est à cette dernière solution que s'arrêta le gouvernement dans la loi présentée aux chambres.

Ce système avait le mérite de rapporter au trésor, audelà des millions de l'indemnité, quelques millions à titre de boni; mais il sacrifiait aux colonies, aux armateurs et au fisc, l'intérêt agricole et manufacturier, intimement lié à notre nouvelle industrie; aussi fut-il accueilli dans le public avec beaucoup de défaveur. Cependant il trouva à la chambre des députés de chauds partisans; il se produisit dans un amendement présenté par M. Lacave-Laplague, ancien ministre des finances.

L'autre système (car celui de la commission avait disparu dans le débat) se résuma dans un amendement de M. Lanyer. D'après cet amendement, adopté à une forte inajorité, le droit sur le sucre français a été élevé à 25 fr. par 100 kilogrammes, et le droit sur le sucre colonial abaissé à 45 fr.

Le 26 juin, ce projet de loi a été adopté, sans amendement, par la chambre des pairs.

Voici les deux principaux articles de la loi

Art. 1er. Le tarif des sucres à l'importation sera réglé ainsi qu'il suit, à partir de la promulgation de la présente loi :

» Sucre des colonies françaises, brut autre que blanc,

de Bourbon, par 100 kilogrammes, 38 fr. 50 c.; d'Amérique, 45 fr.

» Sucre blanc, de Bourbon, 46 fr.; d'Amérique, 52 fr. 50 c.

» Sucre terré de toutes nuances, de Bourbon, 60 fr. ; d'Amérique, 66 fr. 50 c.

» Sucre étranger, brut autre que blanc, par navires français, de l'Inde, par' 100 kilogrammes, 60 fr. ; d'ailleurs, hors d'Europe, 65 fr.; des entrepôts, 75 fr. ; par navires étrangers, 85 fr.

» Sucre brut, blanc ou terré, sans distinction de nuance ni de mode de fabrication, par navires français, de · l'Inde, 80 fr.; d'ailleurs, hors d'Europe, 85 fr. ; des entrepôts, 95 fr.; par navires étrangers, 105 fr.

» Art. 5. A partir de la promulgation de la présente loi, le droit de fabrication sur le sucre indigène de toute espèce, établi par la loi du 18 juillet 1837, sera perçu d'après les types formés en exécution de l'ordonnance du 4 juillet 1838, et conformément au tarif ci-après :

>> 1° Sucres au premier type, et toutes les nuances inférieures, 25 fr.

» 2° Sucres au-dessus du premier type, jusqu'au deuxième type inclusivement, 27 fr. 75 c.

» 3° Sucres au-dessus du deuxième type, jusqu'au troisième type inclusivement, 30 fr. 50 c.

4° Sucres d'une nuance supérieure au troisième type, et sucres en pains, inférieurs au mélis ou quatre cassons, 33 fr. 30 c.:

50 Sucres en pains mélis ou quatre cassons, et sucres. candis, 36 fr. 10 c.

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Après la prise de Morella, Cabrera, à la tête de 4,000 hommes et de 300 chevaux, a traversé l'Ebre au commencement de juin, et s'est replié sur la Catalogne. Il a passé près de trois semaines à Berga, où il a commencé, par quelques exécutions, le procès des assassins du comte d'Espagne ; puis, quand l'armée d'Espartero s'est approchée de ce dernier rempart de la faction en Espagne, il s'est remis en marche pour la frontière française. Le 4 juillet, à cinq heures du matin, Berga est pris par Espartero, et le 6, Cabrera se réfugie en France, avec 10,000 hommes de l'armée d'Aragon; il est aussitôt arrêté. Les carlistes catalans tiennent seuls encore contre les troupes christines.

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· ANGLETERRE.- Guerre contre la Chine.- Prise de l'île de Chusan. Le 4 juillet, le commodore sir Gordon Bremer est entré dans le port de Chusan, à la tête d'une division anglaise composée de six vaisseaux. A la sommation de capituler, le gouverneur de l'île répond qu'il ne peut se soumettre, sans avoir fait un semblant de résistance. Le 5, au point du jour, les jonques (bateaux) de guerre des Chinois s'embossent près de la plage. Vingtquatre pièces de canon sont en batterie sur la terre; des étendards, des drapeaux, des pavillons de toutes les formes et de toutes les couleurs, représentant des animaux hideux et ces êtres fantastiques qu'a créés la bizarre imagination des Chinois, sont arborés à profusion sur les jonques et sur le rempart de la ville Ting-Haï-Lin. A deux heures et demie, les Anglais se dirigent vers la plage dans leurs embarcations, au bruit des tambours et des hurlements affreux des Chinois. Les jonques et la batterie font une décharge générale qui est la seule, la plupart des canons ayant crevé sur le coup ou sauté de leurs affûts vermoulus.

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