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chariot magnifique : on y avait dressé un théâtre où il passait les nuits et les jours en festins et en débauches. Les chars qui le suivaient présentaient la forme, les uns de tentes ornées de pourpre, les autres de berceaux couverts de fleurs. Sur les bords des chemins, aux portes de toutes les maisons, on avait placé des tonnes où les soldats puisaient du vin à volonté. L'air retentissait du son des instruments et des chants des courtisanes. Cette marche dissolue dura huit jours. L'ivresse du vainqueur, quoique digne de mépris, paraîtra peut-être encore moins étonnante que l'abattement des vaincus, qui auraient pu si facilement l'attaquer dans ce désordre et briser leurs chaines. Néarque, arrivé dans l'ile d'Hormusia, aujourd'hui Ormus, vint trouver Alexandre, et lui apprit l'heureux retour de sa flotte qu'on croyait perdue.

Le roi reçut de toutes parts de vives plaintes contre les rapines des officiers qui commandaient en Perse pendant son absence. Pour venger les opprimés, il fit mourir les coupables; et cet acte de justice et de sévérité affermit sa domination.

Comme il se trouvait à Pasargades, Orsine, gouverneur de la province, fit de magnifiques présents à toutes les personnes de la cour, excepté à Bagoas, disant qu'il honorait les amis du roi, mais non pas ses eunuques. Ce vil favori s'en vengea bien cruellement. Le tombeau de Cyrus était dans cette ville: Alexandre voulut rendre les honneurs funèbres au fondateur de l'empire des Perses. On ouvrit le tombeau dans la persuasion qu'il contenait des trésors: on n'y vit d'autres richesses qu'un bouclier, 'deux arcs et un cimeterre. Le roi plaça sur l'urne sa couronne d'or et son manteau; mais il s'étonna de ne point trouver dans la tombe les trésors qu'on y disait renfermés. Bagoas répondit que les sépulcres des rois étaient vides, quand les maisons des satrapes regorgeaient de l'or qu'ils en avaient tiré. Il savait, disait-il, de Darius lui-même, que le tombeau contenait d'immenses richesses; ainsi l'opulence d'Orsine provenait évidemment des dépouilles de Cyrus. Alexandre crut son favori; Orsiņe subit la mort,

Ce fut dans cette ville que le brame Calanus, âgé de quatrevingt-trois ans, voulant terminer sa carrière, fit dresser un bûcher, et s'y brûla après avoir embrassé ses amis, auxquels il dit de continuer leurs festins avec Alexandre; mais que, pour lui, il reverrait dans peu ce prince à Babylone. Ses dernières paroles furent regardées depuis comme une prophétie.

Le roi, pour remplir les intentions du brame, donna un grand repas dans lequel il proposa pour prix une couronne d'or à celui qui boirait le plus. Promachus l'emporta : il but jusqu'à vingt pintes, et ne survécut à sa victoire que trois jours. Quarante-un des convives moururent des suites de cette débauche. Alexandre se rendit à Persépolis, dont les ruines excitèrent ses remords. De là il vint à Suze et rencontra sur la rivière de Pasytigris sa flotte que Néarque avait ramenée.

Les filles de Darius étaient à Suze. Alexandre épousa l'aînée, appelée Statira, et donna la plus jeune à Éphestion. Par ses ordres tous les officiers macédoniens épousèrent des filles tenant aux plus nobles familles de Perse.

Le roi donna un festin à neuf mille personnes pour célébrer toutes ces noces qu'exigeait la politique, afin de cimenter l'union entre les vainqueurs et les vaincus. Chaque convive reçut une coupe d'or pour faire des libations. Alexandre descendit le fleuve Eulée, et longea la côte du golfe Persique jusqu'à l'embouchure du Tigre. Il désirait voir encore une fois la mer. On prétendit même qu'excité par le succès de Néarque, il avait conçu le projet de s'embarquer l'année suivante et de faire le tour de l'Afrique.

Décidé enfin à récompenser les plus vieux de ses guerriers, il déclara que tous ceux qui se trouvaient, par leur âge et leurs blessures, hors d'état de servir, pouvaient retourner en Grèce. Cette grâce, si vivement demandée au milieu des Indes, excita dans ce moment le mécontentement des troupes, et les porta à la révolte: tant est grande la mobilité des hommes et particulièrement des soldats! Ils entrèrent en fureur, s'écriant qu'on voulait donner à de nouvelles levées les fruits de leurs

sueurs et de leur sang. Le roi, assiégé par leurs clameurs, loin de céder à leurs menaces s'élança de son tribunal, fit saisir et conduire au supplice treize des principaux factieux, cassa son ancienne garde, et la remplaça par des troupes persanes; sa sévérité étouffa la sédition. Toute l'armée, jetant ses armes, entoura sa tente, et déclara qu'elle ne quitterait point ce lieu sans avoir obtenu sa gràce. Le roi leur pardonna et combla de biens ceux qui voulurent retourner dans leur pays.

Il se rendit ensuite à Ecbatane, où il perdit Éphestion, le plus cher de ses amis; car il avait coutume de dire que d'antres aimaient le roi, mais qu'Éphestion aimait Alexandre. Pour faire diversion à sa douleur, il conduisit son armée dans les montagnes de la Médie, contre les Cosséens, que jamais aucun roi de Perse ne put dompter. Il les subjugua en moins de quarante jours, passa le Tigre, et prit la route de Babylone. Lorsqu'il fut près de cette capitale, les Chaldéens, qui passaient pour de grands astrologues, le prièrent de ne point entrer dans la ville, parce qu'il devait y trouver la mort. Les philosophes grecs qui suivaient le roi lui démontrèrent, suivant les principes d'Anaxagore, la fausseté de ceux de l'astrologie. Alexandre les crut d'ailleurs il savait que les ambassadeurs des rois et des républiques de l'Orient et de toute l'Europe s'étaient rendus à Babylone pour lui présenter leurs hommages. Ne voulant pas perdre un pareil triomphe, il fit dans Babylone une magnifique entrée, donna audience aux ambassadeurs, reçut leurs dons et les combla de présents. Il accepta même le titre de citoyen que Corinthe lui accordait, parce qu'il apprit qu'Hercule avait été jusque-là le seul étranger qui eût reçu cet honneur.

Il écrivit une lettre qui devait être lue aux jeux olympiques pour ordonner à toutes les villes de la Grèce de rappeler leurs exilés, chargeant en même temps Antipater d'employer la force des armes contre les peuples qui refuseraient d'obéir.

Il s'occupa ensuite des funérailles d'Éphestion, qu'il voulait rendre aussi célèbres que celles de Patrocle. Cette pompe funèbre

et la construction du tombeau coûtèrent trente-six millions. Le roi passa près d'une année à Babylone, s'occupant à l'embellir, et roulant dans son esprit de vastes projets que le sort ne lui permit pas d'exécuter.

A la fin d'une nuit passée dans la débauche, il but à la santé de chacun des convives; se faisant alors apporter la coupe d'Hercule qui tenait six pintes, il la vida tout entière; l'ayant encore remplie et épuisée de nouveau, il tomba sans connaissance; une violente fièvre le saisit. Dans les intervalles de ses accès, il continua à donner des ordres pour une expédition militaire qu'il avait projetée; mais enfin, sentant sa faiblesse, n'ayant plus d'espoir, perdant presque la voix, il donna son anneau à Perdiccas, en lui recommandant de faire porter son corps au temple d'Ammon. Tous les soldats, entourant le palais, demandaient à grands cris de voir encore leur roi. Par son ordre les portes furent ouvertes. Ses vieux guerriers, les yeux baignés de larmes, passèrent tous devant lui, et se prosternèrent à ses pieds pour baiser sa main mourante. Les grands de sa cour lui demandèrent à qui il laissait l'empire. Il répondit: «< Au plus digne. Ce prix, ajouta-t-il, sera bien disputé, « et me prépare d'étranges jeux funèbres. »

Perdiccas voulant savoir quand il désirait qu'on lui rendit les honneurs divins, il lui dit : « Lorsque vous serez heureux. » Après ces paroles il expira.

Il avait vécu trente-deux ans et huit mois, et en avait régné douze. Sa mort arriva au milieu du printemps de la première année de la 114o olympiade, l'an du monde 3683, avant JésusChrist trois cent vingt-un ans.

Plutarque et Arrien assurent que la débauche seule causa sa mort, et que son corps, exposé publiquement, demeura quelques jours sans se corrompre, malgré la chaleur du climat de Babylone. Quinte-Curce et Justin prétendent, au contraire, qu'il fut empoisonné par Cassandre, dont le père, Antipater, craignait d'être puni de ses concussions par le roi qui l'avait mandé près de lui.

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Le corps d'Alexandre porté en Égypte. Sa mort. Régence de Polysperchon. ·

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Retour

d'Olympias en Macédoine. Sa mort. — - Exploits de Séleucus et de Démétrius. SELEUCUS NICATOR. La ville d'Antioche bâtie par lui. — Mort de Démé

trius.

- Amour d'Antiochus pour Stratonice, sa belle-mère. ANTIOCHUS SOTER. Sa victoire sur les Gaulois. Mort d'Antiochus. ANTIOCHUS THÉOS.

cus.

Mort d'Antiochus.

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SÉLEUCUS CALLINICUS.

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Mort de Laodice.

Bérénice.
CÉRAUNUS.-

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Mort de Défaites de Séleucus. Sa mort. - SÉLEUCUS

Régence d'Achéus. - Mort de Séleucus. — Magnanimité d'Achéus.

ANTIOCUS LE GRAND.— Régence d'Hermias. tiochus. Mort d'Hermias.

Sa défaite. Sa mort.

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Séleucus empoisonné par lui.- ANTIOHCUS ÉPIPHANE.- Régence de
Retour d'Antiochus. Sa vie honteuse.

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Bataille entre Alexandre Bala et Démétrius. ALEXANDRE BALA. Ses noces. Crimes de son favori Ammonias. faite et mort d'Alexandre.- DÉMÉTRIUS NICATOR. Son ingratitude. - Conspiration contre lui. Sa défaite.

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prise de la ville de Mosnestie. Victoire d'Eusèbe. Sa défaite. Fin du règne des Séleucides". Règne de Tigrane. ANTIOCHUS L'ASIATIQUE. - Fin de l'ancien empire des Perses.

Lorsque Alexandre mourut, il ne laissa qu'un fils de Barsine, qui portait le nom d'Hercule. Une autre de ses femmes, Roxane, se trouvait enceinte; Statira, fille de Darius, espérait l'être; mais sa grossesse n'était pas déclarée. Il existait encore un frère naturel d'Alexandre, qu'on appelait Aridée, et qui prétendait au tròne. Le conquérant de l'Asie n'avait désigné aucun héritier,

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