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des États-Unis d'Amérique a adoptées sur les inventions industrielles, ne diffèrent que dans un petit nombre de points, de celles qui sont pratiquées en France et en Angleterre.

Les Américains admettent les brevets d'invention et de perfectionnement; mais ils n'accordent pas de brevets d'importation; une industrie connue ou pratiquée chez une autre nation ne peut donc pas devenir chez eux l'objet d'un monopole.

Un étranger est admis à demander un brevet d'invention ou de perfectionnement; mais il faut pour cela qu'au moment où il forme sa demande, il ait déjà résidé deux années dans les États-Unis.

Un brevet d'invention ou de perfectionnement est, du reste, accordé pour les mêmes objets qu'en France et en Angleterre; il est soumis aux mêmes conditions; la durée du privilége qu'il confère est de quatorze ans (1).

En exposant ici la nature, l'étendue et les principales conditions d'une espèce de monopole qu'on a mis au rang des propriétés, je ne me suis pas proposé de faire connaître aux personnes qui veulent obtenir des brevets d'invention, la marche qu'elles ont à suivre ; je n'ai pas eu, non plus, pour objet de fournir à ceux dont l'industrie est entravée par des

(1) James Kent, Commentaries on the American law, vol. II, part. 5, lect. 36, p. 299-305.

priviléges, des argumens contre les brevets d'invention; je ne me suis proposé que de faire connaître les principes généraux qu'on a suivis à cet égard, soit en Angleterre, soit en France.

CHAPITRE XXXI.

Des fondemens et de la nature de la propriété littéraire.

AYANT admis en principe qu'une personne ne peut jamais être la propriété légitime d'une autre, nous en avons tiré la conséquence que toute utilité, toute valeur appartient à celui qui la crée; nous avons reconnu que, tant qu'il ne l'a pas aliénée, on ne peut la lui ravir sans le dépouiller de sa propriété.

Ces propositions sont peu contestées, tant qu'on ne les applique qu'à des produits purement matériels; ainsi, l'on admet facilement qu'un habile ouvrier qui transforme un morceau d'acier en un instrument d'un grand prix, est le propriétaire de cet instrument, ou de la valeur à laquelle il a donné l'existence; on admet aussi que l'homme qui construit ou fait construire un navire avec des matériaux dont il a payé le prix, est propriétaire de ce navire, surtout quand il a payé la main-d'oeuvre des ouvriers qu'il a employés.

On admettra de même, sans contestation, que si, sur un papier qui m'appartient, j'écris un poème que j'ai composé, j'aurai la propriété de toute la chose, des vers et du papier; mais si je livre une copie de mon ouvrage à une personne, soit à titre de dépôt, de prêt ou de vente, celui à qui je l'aurai livré, ne pourra-t-il pas s'en servir pour en faire une copie nouvelle, sans porter atteinte à ma propriété? S'il me restitue, sans lui avoir fait subir aucune altération, le manuscrit que je lui ai confié, ne me rend-il pas ma propriété tout entière? S'il m'a payé la valeur d'une copie, n'a-t-il pas acquis par cela même le droit d'en faire des copies nouvelles et de les vendre? C'est sur ces questions que des doutes s'élèvent.

Ceux qui pensent qu'on ne porte pas atteinte à la propriété d'un auteur, en multipliant, sans son aveu, les copies de ses écrits, se fondent sur ce qu'une idée n'est la propriété d'une personne qu'aussi long-temps qu'elle demeure renfermée dans son cerveau; aussitôt, disent-ils, qu'elle est divulguée et qu'elle a pénétré dans l'esprit d'autres personnes, elle devient à leur tour leur propriété; celui qui le premier l'a conçue, n'y a plus aucun droit exclusif.

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Considérer ainsi les productions littéraires, lorsqu'il est question de propriété, c'est les envisager sous un point de vue faux. On doit remarquer

d'abord que des pensées qui n'ont jamais été divulguées, ne peuvent donner lieu à aucune discussion. Il importe donc assez peu de savoir si elles. sont ou ne sont pas la propriété de tel ou tel individu. On doit observer, en second lieu, que personne n'a jamais prétendu sérieusement qu'une pensée publiée fût irrévocablement acquise au premier qui l'a conçue. Les hommes qui publient leurs ouvrages, sont si éloignés d'avoir de telles prétentions, qu'ils ne se proposent, au contraire, que de faire passer, dans l'esprit de leurs lecteurs, les idées qu'ils ont exprimées. Aucun n'a jamais été assez fou pour revendiquer, à titre de propriétaire, les idées que d'autres avaient puisées dans ses écrits, et dont ils avaient fait usage, soit en les mettant en pratique, soit en composant des ouvrages nou

veaux.

Un écrivain qui s'approprierait par l'étude, toutes les pensées que renferme l'Esprit des lois, et qui s'en servirait pour composer un ouvrage qu'il donnerait comme sien, ne serait pas accusé d'avoir porté atteinte à la propriété d'autrui, quand même les œuvres de Montesquieu appartiendraient encore à ses héritiers. Dans un cas pareil, le nouvel ouvrage produit serait une chose dont la création appartiendrait à celui qui en serait l'auteur, et qu'il ne donnerait pas comme l'œuvre d'un autre. Les pensées qu'il aurait puisées dans les écrits de

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