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ment chez une personne, lorsqu'ils demeurent avec elle dans la même maison (art. 109).

Les trois premières personnes n'exerçant leurs droits. que sous l'autorisation ou par l'entremise d'un protecteur ou d'un administrateur légal, leur domicile a été fixé au lieu où se trouve celui du mari ou du tuteur. Quant aux fonctionnaires, la loi leur assigne un donicile par suite d'une présomption légale à l'encontre de laquelle rien ne peut aller, ni le fait, ni l'intention contraire. Enfin il existe à l'égard du serviteur une présomption légale d'intention conforme au fait de la demeure; il habite dans la maison de son maître; la loi présume qu'il a la volonté d'y avoir son domicile.

Nous allons étudier successivement ces différentes espèces de domicile de droit.

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La femme mariée n'a pas d'autre domicile que celui de son mari (art. 108); cette disposition reçoit son effet du moment même de la célébration du mariage et par le seul fait de cette célébration, encore bien qu'elle ait eu lieu dans un endroit autre que celui du domicile du mari (Marcadé, I, sous l'art. 108, n° 1; - Demol., I, 357). La femme mariée ayant pour devoir de rester auprès de son mari ne peut être légitimement éloignée de lui que par la séparation de corps ou la mort; elle peut être forcée de retourner à lui quand elle le délaisse, et elle ne peut en conséquence avoit de résidence distincte

que par l'effet d'une espèce de délit de sa part, ou d'une tolérance momentanée de la part de son mari; on comprend donc qu'elle ne puisse avoir d'autre domicile que le domicile marital et que la loi ait pris soin de le dire elle-même.

C'est donc une présomption qui ne saurait être détruite par la preuve contraire et qui exercerait toute sa force soit dans le cas où par telle ou telle cause, la femme n'aurait jamais habité avec son mari (Duranton,I,364; Toullier, I, 375), soit dans le cas où celui-ci aurait consenti même expressément à ce que sa femme se constituât un domicile à part; car on sait que le mari ne peut pas renoncer à la puissance maritale et au droit qu'il a toujours de rappeler sa femme près de lui (art. 6, 214, 1388). Aussi la femme qui aurait reçu des assignations ailleurs qu'au domicile de son mari, pourraitelle en demander la nullité; et cela sous quelque régime que les époux soient mariés, puisque, sous tous les régimes, la femme est obligée d'habiter avec son mari.

Lorsque la female a obtenu sa séparation judiciaire, c'est une question de savoir si le domicile marital subsiste pour la femme, ou si, au contraire, elle acquiert le droit de se choisir elle-même un domicile où bon lui semble. Quant à la séparation de biens, elle ne saurait évidemment constituer une exception à l'article 108, car aucune atteinte n'est portée au lien conjugal, et rien n'empêche la femme de suivre son mari partout où il lui plaît d'habiter (Colmar, 12 juillet 1806). Au contraire, quand la séparation de corps a été prononcée, alors que la femme est affranchie de l'obligation de vivre avec

son mari, la question s'élève et elle donne lieu à controverse entre les auteurs.

Merlin (Rép. V° Domicile, § 5 n° 1) soutient que même après la séparation de corps la femme mariée a son domicile chez son mari, en se fondant sur ce que l'article 108 s'exprime en termes généraux et sans faire aucune distinction; cet article porte, en effet, d'une manière absolue que la femme mariée n'a pas d'autre domicile que celui de son mari, et ne dit pas, « la femme non séparée de corps » comme il a soin de dire « le mineur non emancipé ». Cet auteur ajoute en outre que la séparation de corps n'étant pas destinée à durer, la résidence de la femme séparée n'a point les caractères de fixité et de durée qui constituent le domicile; et qu'enfin la femme restant soumise à l'autorité de son mari dont elle doit toujours demander l'autorisation pour faire certains actes, doit également conserver son domicile, l'art. 108 étant un effet immédiat et direct de la puissance maritale.

Mais cette opinion de Merlin est loin d'être adoptée par les auteurs; et bien qu'en effet le texte de l'art. 108 soit général, nous ne devons pas oublier qu'il n'est que la conséquence des articles 214 et 102. Or, dès que la nécessité d'habiter avec son mari, et par suite l'existence du principal établissement pour la femme au domicile du mari n'existent plus par suite du jugement qui a prononcé la séparation de corps, il n'y a aucune raison d'empêcher la femme de rentrer dans le droit commun et de pouvoir établir son domicile où bon lui semble. Tel était, du reste, l'ancien droit; Pothier Int. gén. aux

cout. n° 10 et Traité du cont. de mar. no 522) dit en effet que, alorsqu'il y a eu séparation d'habitation prononcée par un jugement qui n'est suspendu par aucun appel ni opposition, la femme est par là déchargée de l'obligation de demeurer avec son mari, et qu'elle a le droit en conséquence de s'établir où elle voudra un domicile qui lui sera propre. Si l'article 108 n'a pas parlé de la femme séparée de corps, c'est sans doute parce que, lors de sa rédaction, on était encore sous l'empire de la loi du 20 septembre 1792 (art. 7) qui n'admettait que le divorce; on peut dire aussi que le chapitre de la séparation de corps (chap. 5 du tit. 6, art. 306 à 311), loin de régler en détail les effets de la séparation, en ce qui concerne l'état des époux, n'en dit pas un mot; c'est donc qu'il se réfère purement et simplement aux anciens principes puisqu'il n'y a pas dérogé. Il est vrai que la séparation ne soustrait pas la femme à l'autorisation maritale, mais est-ce une raison suffisante pour lui donner le même domicile que son mari? et d'ailleurs ne serait-il pas contraire à toute justice, si ce domicile était conservé, de voir les exploits faits à la requête des tiers contre la femme valablement remis aut domicile du mari avec lequel celle-ci est en mésintelligence, et qui sera certainement peu disposé à les lui communiquer. Quant à l'objection que le nouveau domicile choisi par la femme n'a point les caractères de fixité et de durée qui constituent le domicile, nous devons la repousser, il nous semble au contraire que ce domicile est établi pour toujours; car ce n'est pas au moment où des époux se séparent qu'on peut leur attri

buer la pensée de se réconcilier un jour. (Duranton, I, 365,- Toullier, II, 773.- Proudhon et Valette, 1, 244; -Demol., no 1, 358.- Marcadé, 1, art. 108.-Aubry et Rau, I, p. 579.-Laurent, II, no 85;- Orléans, 25 nov. 1848.)

Lorsque pendant le procès qui précède la séparation de corps, la femme a été autorisée par le président du tribunal à résider provisoirement dans une maison étrangère, cette résidence devra-t-elle être considérée comme constituant pour la femme un domicile particulier, ou bien conservera-t-elle son domicile chez son mari?

Un arrêt de la cour de Dijon, 28 avril 1807, a déclaré que pendant l'instance en séparation de corps, les juges pouvaient assigner à la femme un domicile séparé de celui de son mari. Cela nous paraît contraire à l'article 108, et si nous admettons qu'il y ait exception à cet article au cas de séparation de corps, nous ne saurions l'étendre au cas de l'article 878 C. pr. La résidence séparée de la femme pendant le procès est essentiellement accidentelle et provisoire, et par cela même elle exclut les caractères qu'elle devrait avoir pour être érigée en domicile; le domicile de la femme reste donc toujours celui du mari. Toutefois, à ce principe nous croyons devoir apporter un certain tempérament en ce qui concerne le mari; et appliquant ici la doctrine dont nous avons déjà dit un mot, page 107, que relativement à la remise des exploits on s'attache plus souvent au domicile apparent qu'au domicile véritable, nous dirons que les significations à faire par le mari à sa femme doivent être remises à la résidence provisoire de celle-ci

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