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jurisprudence, un caractère personnel, indiquant la condition et la capacité des personnes quant à leur participation plus ou moins étendue au droit civil romain. Il y eut d'autres villes auxquelles fut concédé le droit italique (jus italicum) expression qui avait un caractère territorial et qui avait servi à marquer la différence de condition entre le sol italique et le sol provincial; les habitants des villes auxquelles ce droit avait été concédé, avaient, par assimilation de leur territoire à celui d'Italie, le dominium ex jure Quiritium, d'où pour eux l'usage de modes d'acquisition de ce domaine (mancipatio, usucapio); ils étaient exemptés du paiement de l'impôt foncier (vectigal) et jouissaient de certaines prérogatives personnelles comme par exemple la dispense de la tutelle jure liberorum, suivant qu'on avait trois enfants à Rome, quatre en Italie et cinq dans les provinces. (Inst. 1.25 pr.)

A l'époque de Constantin, l'Empire fut divisé en quatre grandes préfectures prétoriennes, l'Orient, l'Illyrie, l'Italie, les Gaules; chaque préfecture se divisait en plusieurs diocèses, à la tête desquels l'Empereur envoyait, pour représenter les préfets, des magistrats nommés vicarii; chaque diocèse comprenait plusieurs provinces qui avaient chacune pour les gouverner un président portant le titre de proconsul ou de recteur (rector provincia). C'est à cette même époque que nous voyons apparaître dans les cités une nouvelle magistrature sous le nom de defensores civitatis, ce fut, au temps de Constantin, un mandat temporaire donné pour une affaire de la cité; mais, à partir de l'année 365, cette

charge se transforma en charge permanente, ainsi que le prouvent des constitutions de Valens, Valentinien et Théodose (1). L'élection de ces défenseurs était faite par la cité entière et leurs fonctions devaient durer cinq ans; Justinien les réduisit à deux ans. Ils devaient défendre la cité contre l'oppression du lieutenant impérial; ils avaient encore une juridiction civile restreinte dans l'origine à cinquante solidi; par la suite, ils envahirent les droits des magistrats. Mais comme ces defensores ne devaient exercer les droits de la magistrature qu'à défaut de magistrats, leur importance s'accrut dans les provinces, où il n'y avait pas de magistrats, tandis qu'en Italie et dans les villes de province où il y en avait, ils ne sortirent point des limites de leurs fonctions primitives.

Enfin, même avant l'invasion des barbares, les droits des cités furent méconnus, en même temps que la puissance romaine s'affaiblissait et que le trône des Césars s'écroulait. Les Empereurs ne sont plus que les élus de la soldatesque qu'il faut enrichir; alors les villes sont opprimées par les exactions des gouverneurs; les impôts excédant la mesure, sont difficilement recouvrés; et la curie, dignité jadis recherchée, devient la ruine de ses membres chargés des rentrées de l'impôt; les curiales sont attachés à leurs fonctions comme à une glèbe; d'abord seulement héréditaire, cette dignité est imposée aux personnes riches ayant au moins une fortune de vingt-cinq jugera; on la fuit par tous les moyens

(4) Code L. I, Tit. LV.

possibles et l'on voit condamner des criminels à entrer dans l'ordre des décurions, bien que des lois impériales l'aient d'abord défendu; enfin des priviléges de toute espèce étaient offerts à ceux qui entraient volontairement dans la curie; l'enfant naturel, par exemple, acquérait ainsi les droits de la légitimité.

Dans les campagnes, la culture est abandonnée, parce qu'il n'y avait plus d'intérêt à cultiver les terres, en raison des nombreux impôts dont elles étaient grevées ; c'est en vain que l'État offrait des terres à ceux qui voulaient s'en charger, il ne trouvait personne. Les habitants des villes se mettaient sous la protection des potentes assez puissants pour résister aux efforts du gouvernement et tombaient sous leur clientèle. Quelques empereurs essayèrent encore de rétablir l'ordre et de faire revivre les institutions qui avaient fait la prospérité des villes ; leurs tentatives échouèrent devant le courant de désorganisation qui, en amenant la chute de l'Empire romain, devait en livrer les débris aux barbares.

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CHAPITRE III.

DES MUNICIPAUX.

La diversité des constitutions et des droits locaux qui régissaient les différentes villes d'Italie d'abord et plus tard des provinces, nous a fait comprendre combien il était important en droit romain de déterminer exactement quelle était la ville dont un individu était citoyen originaire ou habitant.

Tout individu, en ce qui touche les rapports du droit public, se trouve placé dans une double dépendance: d'abord envers l'État dont il est citoyen et sujet, puis envers une circonscription locale plus restreinte ou municipalité; cette dépendance envers cette dernière qui résulte soit du droit de cité dans la ville (origo), soit de la résidence habituelle sur son territoire (domicilium), soumet tout individu aux charges de la ville (munera), à l'obéissance envers les magistrats municipaux, et enfin, au droit spécial de la ville qui doit être considéré comme le droit personnel de cet individu.

On appelle, d'une manière générale, municeps ou municipalis tout citoyen d'une ville quelconque, c'està-dire toute personne qui a le droit de cité dans une ville autre que Rome, sans égard aux distinctions que nous avons vues ci-dessus entre les colonies, les muni

cipes et les préfectures, et par conséquent ce mot a le même caractère de généralité que respublica et civitas (1).

Cette expression, toutefois, ne s'entendait, à l'origine, que des citoyens de certaines villes d'Italie, qui restaient gouvernés par leur droit et leurs lois propres, et qui n'étaient nullement soumis aux lois du peuple romain, à moins qu'ils ne fissent partie d'un populus fundus; c'est dans ce sens qu'Aulu-Gelle (16, 13) nous définit les municipaux : « Municipes sunt cives romani ex municipiis, legibus suis et suo jure utentes, muneris tantum cum populo romano honorarii participes (a quo munere capessendo appellati videntur) nullis aliis necessitatibus, neque ulla populi romani lege ad stricti. >

Cujas (VIII, 641 A et B) nous donne aussi cette ancienne définition du mot municeps : Proprie municipes sunt qui muneris cum populo romano participes sunt, qui muneribus civitatis romanæ fungi possunt, qui ita recepti sunt in civitatem romanam ut possint Romæ muneribus publicis fungi. » Mais plus loin, revenant au séns général qu'a eu ce mot par la suite, il ajoute : < Improprie municipes etiam sunt qui in eodem municipio nati sunt, licet munerum cum populo romano societatem nullam habeant. » Les deux sens se trouvent également signalés dans la loi 1, 81, Ad munic. Ulp. : < Proprie municipes appellantur muneris participes, recepti in civitate, ut munera nobiscum facerent; sed

(4) Savigny. Traité de droit romain, tome VIII, § 352, page 55.

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