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cette ville. Ce qui pouvait arriver notamment, d'après un rescrit d'Hadrien qui nous est rapporté dans cette loi 2, au Code X, 39, lorsque le séjour d'un étudiant avait duré dix ans dans la ville où il faisait ses études; mais ce laps de temps ne pouvait servir que de présomption d'établissement de domicile, jusqu'à preuve ou manifestation de volonté contraire. Car, quelque temps que cet étudiant ait habité la ville, du moment qu'il est certain qu'il n'y est resté qu'en raison de ses études, et qu'il la quittera après les avoir terminées, il ne peut pas être traité comme ayant son domicile dans une ville où son intention n'est pas de l'avoir. Cette même loi 2 au Code De incolis, ajoute que les parents des étudiants qui vont les voir ou qui restent près d'eux ne doivent pas non plus être considérés comme habitants de cette ville. Il ne peut y avoir doute sur ce point.

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2o Intention de se fixer. Pour établir le domicile, il faut, au fait de l'habitation dans le lieu qu'on a choisi, joindre l'intention de s'y fixer d'une manière continuelle, et sans esprit de retour dans une autre patrie, de telle sorte que ce lieu doive devenir, pour celui qui y demeure, le siége de ses affaires et de ses intérêts. Dès l'instant qu'apparaît l'intention de fixer son domicile dans un endroit et qu'on s'y établit en réalité, on en devient habitant, on acquiert le titre d'incola bien que peut-être on n'y ait pas la plus grande partie de ses biens, ou même qu'on n'en ait pas du tout.

Doneau IV, chap. 12, n° 4, nous dit que pour reconnaître cette intention de fixer son domicile, il faut s'attacher à ces deux points: voir dans quel endroit une

personne s'acquitte des occupations journalières de la vie (muniis vitæ quotidiana) et quel est le rang et la condition de cette personne (ordo et conditio persona).

1° Ex muniis vitæ. - Ce sont ces occupations journalières auxquelles se livrent les citoyens et habitants. dans la ville où ils demeurent ordinairement. Ulpien (1. 27, 2 1, Ad munic.) nous les indique en disant qu'une personne a son domicile dans le lieu où elle achète, vend et contracte, où elle a la jouissance des foires, des bains et des spectacles et où enfin elle participe à tous les avantages de la ville.

2° Ex conditione persona.- Il y a, en effet, des per. sonnes auxquelles leur rang ou leur condition sociale donne un domicile; Doneau nous cite, à titre d'exemple, le sénateur, le soldat, le banni.

Airsi en droit romain, chacun pouvait se constituer un domicile en tel lieu qu'il lui convenait, mais à la condition d'habiter ce lieu avec l'intention de s'y établir définitivement; et de même que l'habitation ne suffisait pas pour donner un domicile, de même une manifestation de volonté, si formelle qu'elle fût, ne pouvait pas servir à fixer le domicile dans un lieu tant qu'on n'avait pas mis cette intention à exécution, en venant y habiter (loi 20, Ad munic.).

En général, on n'a qu'un domicile, et cependant il peut arriver qu'un individu partage l'ensemble de ses rapports et de ses affaires entre deux villes et qu'il les habite alternativement selon ses besoins, de sorte qu'il soit difficile de déterminer en quel lieu il a son principal établissement et par suite son domicile; dans ce

cas, Labéon prétendait que cet individu, ayant des intérêts égaux dans les deux villes ne devait avoir de domicile nulle part; cependant certains auteurs étaient d'un avis contraire et considéraient qu'on pouvait avoir son domicile dans plusieurs endroits, Paul préfère cette dernière opinion (loi 5, Ad munic.) et nous la croyons en effet plus vraie, car, alors qu'une personne pouvait avoir plusieurs origines ainsi que nous l'avons vu dans les lois 1,2; 7, et 27, pr. Ad munic., on ne voit pas pourquoi une personne n'aurait pas également plusieurs domiciles. Nous trouvons du reste celte opinion de Paul confirmée dans deux lois par Ulpien. Dans l'une (loi 6, § 2, Ad munic.), il nous dit en effet qu'un homme peut avoir son domicile dans deux villes, c'est-à-dire deux domiciles, si dans chacune de ces villes il s'est fait construire une maison et s'est installé dans l'une et dans l'autre de telle manière qu'il ne semble pas s'être fixé plus dans l'une que dans l'autre. Et de même (loi 27, 22, Ad munic.), Ulpien, rapportant l'avis de Celse, dit que si un homme s'est établi également dans deux endroits différents, et qu'il demeure autant dans l'un que dans l'autre, il semble qu'il a la volonté d'avoir son domicile dans chacun de ces endroits. Ulpien émet toutefois des doutes sur la possibilité d'avoir deux domiciles, et cependant, ajoute-t-il, l'opinion de Celse est la véritable; on doit admettre, quoique ce cas soit fort rare, qu'une personne peut avoir deux domiciles, de même qu'on admet, avec difficulté aussi il est vrai, qu'une personne peut être sans domicile; ce qui arrive, lorsqu'un individu, ayant abandonné pour toujours son

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ancien domicile, part soit recherche d'un lieu où il cet individu est, en effet, sans domicile, n'ayant aucun endroit pour centre permanent de ses affaires. Nous pouvons citer encore, avec Savigny, comme n'ayant de domicile nulle part, les vagabonds, ces gens sans profession ni résidence qui errent cà et là sans savoir où reposer leur tête; le droit romain n'en parle pas : cela tient sans doute à ce que ces vagabonds étaient généralement des esclaves fugitifs qui, n'ayant pas de personnalité juridique, étaient incapables par eux-mêmes d'avoir un domicile et ne pouvaient avoir que celui de leur maître.

par terre soit par mer, à la puisse se retirer et se fixer;

3 II. Ce qu'on entend par habitants.

C'est le domicile qui fait les habitants ou incolae, ainsi que l'a déclaré l'empereur Hadrien dans un de ses édits. L'incola est donc celui qui a fixé son domicile dans une ville ou sur le territoire qui l'entoure, c'est-àdire celui qui s'est établi d'une manière permanente et durable dans une ville pour y jouir de tous les avantages que l'on y peut trouver, de ses bains, promenades spectacles et autres lieux publics; c'est lui que les grecs appellent naрanos (justà habitans) par opposition à celui qu'ils appellent aлonos c'est-à-dire advena ou passager qui ne fait que traverser la ville ou n'y séjourne qu'un temps plus ou moins prolongé, sans intention d'y demeurer d'une manière fixe et continue (loi 239, 8 2 et 4, liv. 50, t. 16.

Si nous nous reportons à ce que nous avons dit cidessus du domicile, nous dirons donc qu'il n'y a d'incola que ceux qui habitent une ville avec l'intention d'y demeurer; mais nous ne pouvons comprendre sous cette dénomination ni ceux qui ont seulement des propriétés dans la ville ou sur ses confins (loi 17, 8 5 et 13, Ad munic.), ni ceux qui ne viennent demeurer dans leur propriété que momentanément pour veiller à la culture des terres et à l'exploitation générale de leur domaine (loi 27, 31, Ad munic.). Mais nous devons considérer comme ayant le titre d'incola, ainsi qu'il résulte de la loi 239, § 2, Verb. signif. non-seulement ceux qui ont leur domicile dans la ville, mais aussi ceux qui sont venus se fixer dans une habitation qu'ils possèdent aux environs de cette ville qui alicujus oppidi finibus ita agrum habent ut in eum se, quasi in aliquam sedem, accipiant. D

Cette loi est en contradiction avec la loi 35 à notre titre, d'après laquelle celui qui habite un fonds rural n'est nullement incola de la ville dont ce territoire dépend; cette qualité ne peut être donnée, d'après cette loi, qu'à celui qui jouit de tous les avantages (Etapetois) de la ville, c'est-à-dire, à ceiui qui se sert du forum, des bains et des temples de la ville. Quelques auteurs, d'après Cujas, VIII, 648 C., ont essayé de concilier ces deux lois en disant que la loi 239, 82, Verb. sign. ne s'occupe que de ceux qui habitent les faubourgs de la ville; qu'au contraire, la loi 35, Ad mun., ne parle que de ceux qui habitent les champs, et déclare qu'ils ne sont pas incolæ. Mais Cujas n'admet pas cette con

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