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CHAPITRE III.

CONSÉQUENCES JURIDIQUES COMMUNES A L'ORIGO ET AU

DOMICILIUM.

Il nous reste maintenant à examiner les diverses conséquences qui résultent de la dépendance provenant de l'origo et du domicilium entre un individu et une commune urbaine déterminée.

Nous remarquerons, avec Savigny, que notre titre parle presque exclusivement des charges et des fonctions publiques et personnelles attachées à la qualité de municipal originaire ou d'habitant d'une ville; mais quant aux avantages qui peuvent résulter de cette même qualité, il en est à peine fait mention, si ce n'est dans la loi 27, 81, Ad munic.,qui nous indique des prérogatives de fait, sans nous donner une énumération de droits déterminés. On peut expliquer cela, si l'on observe que les divers jurisconsultes qui ont écrit les lois de ce titre, écrivaient à une époque où la décadence municipale commençait, alors que notamment le titre honorifique de sénateur, qui avait été recherché dans l'origine, était devenu oppressif et se fuyait par tous les moyens; il n'est donc pas étonnant que ce recueil qui fut fait exclusivement pour l'empire de Justinien ait mentionné les charges qui subsistaient encore à cette époque, tandis qu'il

passait sous silence les prérogatives municipales, tombées en désuétude pour la plus grande partie.

Nous nous occuperons donc seulement ici des obligations résultant du droit de cité ou du domicile, matière que nous étudierons dans trois paragraphes :

1o Des charges municipales ;

2o De la juridiction;

3° Du droit local. - Droit personnel du citoyen ou de l'habitant.

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Les charges (munera) qu'impose le droit de cité ou le domicile acquis dans une ville, résultent du droit public et sont appelées civilia ou publica; mais elles n'étaient pas toutes établies dans l'intérêt exclusif des villes car, souvent le produit des charges municipales les plus oppressives était appliqué aux besoins de l'Etat et non à ceux des villes qui les supportait (loi 18, 3, 4, 8 et 16, l. L t. 4).

Pomponius définit ainsi les charges publiques dans la loi 239, 3, 1. L, t. 16: « Munus publicum est officium privati hominis, ex quo commodum ad singulos, universos que cives, remque eorum imperio magistratus extraordinario pervenit, » et nous trouvons dans le titre 4 du livre L, au digeste l'énumération de toutes les fonctions municipales auxquelles les citoyens ou habitants des villes pouvaient être appelés.

Les jurisconsultes romains distinguaient le munus et l'honor à ce dernier seulement était attachée une

dignité personnelle (dignitas) loi 1 4 pr. 31, l. L, t. 4, mais ils étaient obligatoires l'un et l'autre (loi 3, 2, 3, 15, 17, 1: L, t. 4). Toutefois la personne appelée à remplir un honor était dispensée des munera personalia, tandis que celle qui remplissait déjà un munus pouvait se voir appelée ad honores (loi 10, 1. L, t. 4).

L'expression honor s'appliquait aux diverses magistratures, aux duumviri, aux censores et aussi aux décurions, ainsi que nous le voyons dans la loi 5, 1. L, t. 5., tandis que le mot munus était employé pour désigner les fonctions inférieures, comme celles de défenseur de la cité, de syndic, d'écrivain, de questeur municipal, et d'autres, qui variaient selon les cités (loi 1, § 2, 1. L, t. 4).

Les munera en général (munus et honor) se divisaient en charges attachées à la personne ou personnelles (personalia) et en charges attachées aux biens (patrimonalia), suivant qu'elles entraînaient soit des peines et des travaux, soit des dépenses ou une responsabilité compromettante pour les biens (loi 1 pr., loi 6, § 3, 1. L, t. 4).

Les charges personnelles sont celles qui sont accomplies d'après la conscience et avec des soins corporels qui ne causent aucun dommage à ceux qui les supportent, comme la tutelle, la curatelle, les fonctions de juge (loi 1, § 4; loi 18, 21, 14, l. L, t. 4). Nous pouvons citer encore, à titre d'exemple, comme remplissant des charges de cette nature, ceux qui sont chargés de faire le transport des deniers publics, des vivres ou de l'habillement des troupes, ceux qui prennent soin de la

poste aux chevaux ou qui fournissent des moyens de transport pour le service du prince, ceux qui perçoivent les impôts en nature ou en argent, etc. (loi 18, § 3, 4, 8, 1. L, t. 4).

Les emplois patrimoniaux sont ceux dont les frais et dépenses doivent être pris sur le patrimoine et au préjudice de celui qui gère ces emplois, comme, par exemple, l'obligation, à Alexandrie, de fournir l'approvisionnement des huiles et des légumes, ou, dans la province d'Afrique, celle de fournir les vases ou les magasins où est placé le vin public (loi 18, 18, 19 et 20, 1. L. t. 4). Ce sont là des charges patrimoniales qu ne peuvent être imposées qu'aux habitants ou aux municipaux; mais il y a d'autres charges patrimoniales qui grèvent uniquement la propriété foncière et qui doivent être supportées par tout possesseur, étranger ou non à la ville sur le territoire de laquelle est situé le fonds grevé; nous pouvons citer l'impôt foncier, l'entretien des routes, l'obligation de fournir des chevaux pour les convois militaires, des chariots pour le transport des bagages de l'armée ou pour conduire la poste (loi 6, 25; loi 14, 22; loi 18, 21, 1. L, t. 4).

Il y avait enfin des emplois mixtes (mixta) qui participaient des personnels et des patrimoniaux, parce qu'ils exigeaient à la fois du temps et des déboursés; ils consistent, par exemple, dans l'obligation imposée aux décurions de percevoir l'impôt foncier et la capitation, et d'indemniser le fisc de la différence entre la somme due à l'État et celle qu'ils avaient à recouvrer (loi 18, 26, 1. L, t. 4).

Les charges municipales, avons-nous déjà dit, étaient supportées dans chaque ville par quiconque y avait droit de cité ou domicile; et, lorsqu'une personne avait droit de cité dans une ville et son domicile dans une autre, elle pouvait être appelée aux charges municipales dans chacune de ces villes, de même que, si une personne avait plusieurs droits de cité ou plusieurs domiciles, elle pouvait être appelée aux fonctions dans chaque endroit (loi 29, Ad munic., loi 1, Code X, 38; lois 5 et 6, Code X, 39). De même lorsque nous lisons dans la table de Malaga (chap. 53) que les incolæ, cives romani ou latini, avaient dans le municipe où ils étaient domiciliés un certain droit de vote, et, dans Orelli (Inscrip. nos 5709, 3725) qu'ils avaient l'accès aux dignités, nous devons supposer que ces droits leur appartenaient dans leur ville originaire; mais c'est une conjecture qui nous paraît conforme aux principes que nous avons rapportés; toutefois, nous ne saurions l'affirmer. Il résulte de la loi coloniale de Genetiva Julia, n° 91 (Bronzes d'Osuna, Ch. Giraud, page 15), que nul ne pouvait être élu dans cette colonie, augur, pontifex ou decurio, s'il n'y avait depuis cinq ans son domicile, soit dans la cité même, soit dans les mille pas environnants. Était-ce là une règle générale ? ou bien n'était-ce, au contraire, qu'une loi spéciale à cette colonie? Ce temps de domicile était exigé, ajoute la même loi, afin que l'on pût trouver et saisir les gages et cautions qu'on serait en droit d'exiger d'eux. Si cette règle était générale, nous trouverions là une différence entre les honores et les munera, puisque, pour les pre

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