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Meade, et Sherman remplaça, à la tête de l'armée du Tennessee, Thomas, successeur provisoire de Grant.

Le port de Charleston avait été attaqué le 7 avril 1863 par le contre-amiral Dupont, commandant l'escadre de blocus de l'Atlantique méridional. En deux heures, tous les bâtiments de sa flottille cuirassée, qui s'étaient aventurés dans la rade, furent désemparés par le feu des forts (Moultrie, Sumter, Wagner et Gregg). Les avaries étaient si graves que la lutte ne put être reprise; les monitors étaient vaincus. Dupont fut remplacé dans son commandement par le contre-amiral Foote. Bientôt après, Foote, malade, dut céder la place au contre-amiral Dahlgreen. Le même mois Gillmore, avec 12 000 hommes, débarqua dans l'île Folly (au sud de Charleston), passa de là dans l'île Morris le 10 juillet, et réduisit par un siège en règle (du 18 juillet au 6 septembre) les forts Wagner et Gregg. Un assaut tenté de nuit sur le fort Sumter le 8 septembre échoua. Un peu plus tard, un bombardement d'une extrême violence, continué pendant sept jours, mit le fort en ruine sans réduire ses défenseurs. Une nouvelle tentative d'assaut eut lieu le 23 novembre sans succès. Les fédéraux renoncèrent enfin à l'entreprise; Gillmore fut rappelé au commencement de 1864 à Richmond, Dahlgreen resta pour surveiller Charleston.

La campagne de 1864. Avec l'année 1864 s'ouvre la dernière phase de la guerre civile. Les armées de la Confédération ne peuvent plus se recruter comme aux premiers temps. de la lutte. La population est épuisée. Les pertes ont été énormes par le feu de l'ennemi, plus encore par les maladies et par la désertion. Les sudistes ont été battus à Gettysburg, rejetés en Virginie. Ils se sont vu enlever Vicksburg, Port-Hudson et tout le cours du Mississipi. L'armée de Pemberton a été prise, celle de Johnston dispersée, celle de Braxton Bragg poussée en Georgie. Dans cet immense espace qui s'étend des monts Alleghanys au Mississipi, il n'y a plus une division régulière confédérée. Seuls des partisans, comme Forrest, y peuvent exécuter des raids, vraies expéditions de maraude et de pillage, désastreuses pour la population civile, sans utilité stratégique.

A l'ouest du Mississipi, le drapeau esclavagiste était encore tenu par Magruder dans le Texas, par Price dans l'Arkansas, par Dick Taylor dans la Louisiane, par Kirby Smith, commandant en chef du département transmississipien. Contre ces généraux, Banks, dont le quartier général est à la Nouvelle-Orléans, va guerroyer pendant toute l'année 1864. Il tentera avec l'appui de la flottille de Porter, sur la Rivière Rouge, une grande expédition, d'où il reviendra vaincu.

Dans ces campagnes lointaines il se dépensera d'un côté comme de l'autre une somme considérable d'énergie, de vaillance, d'héroïsme; le sang coulera dans nombre de combats souvent très meurtriers, mais sans résultat sérieux, sans influence sur les destinées dernières de la lutte, qui vont se décider exclusivement en Virginie et en Georgie; en Virginie entre Grant et Lee; en Georgie entre Sherman et les derniers généraux que lui pourra opposer le président Jefferson Davis.

Grant et Lee. --Le major général Grant, appelé en février 1864 de Chattanooga à Washington pour prendre à la place de Meade le commandement de l'armée de Virginie, reçut bientôt après de Lincoln le grade de lieutenant général avec le commandement en chef de toutes les armées de terre de l'Union. Tous les pouvoirs militaires de conception et d'exécution étaient donc concentrés en ses mains. Il s'arrêta au plan suivant : l'armée de Virginie dont il prenait lui-même la direction aurait pour objectif la destruction de l'armée de Lee; son lieutenant Sherman, appelé à prendre à sa place le commandement de l'armée du Tennessee, poursuivrait en Georgie les forces confédérées de Braxton Bragg jusqu'à leur destruction complète. Puis, tournant par le sud la muraille des Appalaches, il occuperait les derniers États rebelles encore en armes, Caroline du Sud et Caroline du Nord, en prenant à revers l'armée de Lee attaquée de front par l'armée principale.

La grande armée fédérale était massée sur la rive gauche du Rapidan (affluent de droite du Rappahannock en Virginie), en face des troupes de Lee qui occupaient la rive droite. Grant fit savoir par un ordre du jour (3 mai 1864) qu'on allait reprendre l'offensive. Les forces prêtes à franchir la rivière étaient placées

sous le commandement en chef du général Meade et présentaient un effectif évalué à 140 000 hommes.

Grant envoya Butler s'établir avec un corps d'armée sur la rivière James pour menacer de là Petersburg, forte position située au sud de Richmond. Mais Butler, à peine débarqué sur la rive sud du James, au confluent de l'Appomattox, fut enfermé dans la presqu'île de Bermuda Hundred par Beauregard, appelé de Charleston pour protéger du côté du sud les approches de la capitale confédérée.

Les 3 et 4 mai, l'armée de Meade passa le Rapidan. Le 5, elle marcha sur Chancellorsville, couverte sur sa gauche par la cavalerie de Sheridan. Elle rencontra bientôt, dans cette région du Wilderness où l'armée de Hooker avait été arrêtée l'année précédente, les forces de Lee, divisées en trois corps toujours commandés par Ewell, Hill et Longstreet, les héros de Gettysburg. Pendant les deux journées du 5 et du 6 mai, les deux armées se heurtèrent et se firent un mal énorme sans s'entamer (bataille du Désert ou de Wilderness).

Par un mouvement sur son flanc gauche, Grant s'efforça alors de tourner l'aile droite de Lee, espérant arriver avant lui à Spottsylvania et le couper de la route de Richmond. Lee. prévint ce dessein et Grant le trouva fortement retranché. Deux journées de lutte, 10 et 12 mai, laissèrent encore intactes les lignes de l'ennemi. Les pertes fédérales furent énormes à l'angle occidental des positions confédérées (bataille de Spottsylvania). Grant commença un nouveau mouvement de flanc (23 mai), franchit la North-Anna River en deux points, mais trouva de l'autre côté Lee établi dans des positions telles qu'il n'osa l'attaquer. Passant le Pamunkey (près de son embouchure) le 29 mai, il comptait, par une marche rapide, atteindre le Chickahominy avant Lee et peut-être pousser jusqu'à Richmond. Mais Lee couvrait toute la ligne du Chickahominy, de Cold Harbor à droite, à Hanover à gauche. Le 3 juin, sans avoir cherché le point faible de ces positions ou tenté d'en reconnaître les divers aspects, Grant ordonna un assaut général sur la droite de l'ennemi. L'armée fédérale perdit là 10 000 hommes en moins d'une heure et fut rejetée dans ses lignes. C'est la célèbre tuerie de Cold

Harbor. Grant descendit (12 juin) par une marche de nuit la rive gauche du Chickahominy, franchit la rivière à quelques milles du dernier champ de bataille et marcha sans être inquiété vers le James River qu'il fit traverser à toutes ses troupes (14 juin) sur un des ponts préparés par Butler. Ce grand mouvement par la route de terre, qui venait de porter l'armée fédérale de la rive nord du Rapidan à la rive sud du James, du 3 mai au 14 juin, avait exigé un effrayant sacrifice d'hommes, et l'armée de Lee était à peine entamée.

L'armée fédérale n'avait pas encore achevé le passage du James, lorsque Grant résolut de tenter un coup de main sur Petersburg, clef des communications de Richmond avec le sud. L'opération fut mal combinée, les ordres donnés sans précision, les corps d'armée lancés au hasard contre la place confédérée à mesure qu'ils parvenaient sur la rive droite du fleuve. Pendant quatre journées, du 15 au 18 juin, les lieutenants de Grant s'acharnèrent vainement entre les lignes de Petersburg et laissèrent des milliers d'hommes sur la place.

Il fallut entreprendre contre Petersburg les travaux d'un siège régulier. La flottille bloqua le James, se protégeant par des estacades contre des bâtiments cuirassés construits à Richmond. Le chemin de fer de Weldon (Richmond-Wilmington) tomba bientôt entre les mains des fédéraux et les confédérés échouèrent dans trois attaques (19, 21 et 28 août) pour le reprendre. Ils se tinrent désormais sur la défensive, fortifiant sans cesse leurs positions. Pendant que se resserraient les mailles du réseau dont Grant voulait envelopper Richmond et Pétersburg, Lee essaya de renouveler la manœuvre qui avait réussi en 1862, et d'obliger Grant par une démonstration en force contre Washington, à lâcher prise du côté de Pétersburg. Ewell, chargé de cette tâche, s'en acquitta brillamment. Il occupa Harper's Ferry, passa le Potomac, envahit le Maryland et la Pensylvanie et jeta la terreur dans Washington. Mais les autorités fédérales, cette fois, ne rappelèrent pas l'armée de Virginie pour la défense de la capitale, bien que les communications eussent été interrompues pendant quarante-huit heures entre celle-ci et les villes de l'ouest. Ewell se trouva bientôt dans une position très aven

turée. Son coup de main ayant été surtout une grande razzia d'approvisionnements, il songea à mettre son butin en sûreté, et repassa le Potomac, poursuivi assez vivement jusqu'à Winchester. Il fit alors volte-face, balaya tout ce qu'il avait devant lui, rentra dans le Maryland, s'y promena durant quelques jours, puis s'établit à Harper's Ferry, que seule l'arrivée de Sheridan, détaché de la grande armée fédérale, le força peu après d'abandonner.

Cette diversion n'eut d'autres résultats que le gain pour les sudistes d'une grande quantité de provisions. Grant n'avait point quitté ses positions. Les batteries fédérales ne cessaient de bombarder les fortifications de la ligne Petersburg-Richmond. La ligne de circonvallation s'étendit peu à peu. A la fin d'août, il ne restait à l'armée de Lee qu'une seule voie ferrée, celle de Danville-Lynchburg. Ses communications par toutes les autres voies étaient coupées. Il allait cependant résister plus de six mois encore.

Sherman en Georgie. Les premières opérations de Grant avaient fait espérer que Richmond allait bientôt succomber. Pendant quelque temps, dans cette attente, les opérations avaient été suspendues sur d'autres points. Elles furent reprises partout dès qu'il fut démontré que la résistance des confédérés pouvait se prolonger. Du 5 au 23 août, l'amiral Farragut s'empara des forts défendant l'entrée de la baie de Mobile, après un brillant combat naval où le Tennessee, bélier cuirassé appartenant aux confédérés, tint tête pendant deux heures à toute l'escadre fédérale. Le 2 septembre, l'armée de Sherman entrait dans Atlanta. De ces deux succès, l'un enlevait à la confédération le seul débouché important qui lui restât sur le golfe du Mexique et anéantissait ses dernières forces navales. L'autre livrait au principal lieutenant de Grant toute la Georgie. et réalisait la première partie du plan consistant à tourner la rébellion par les États du sud-est.

Johnston, après la défaite de Braxton Bragg à Chattanooga, avait rallié à Dalton les troupes confédérées. L'effectif, quelques mois plus tard, ne s'en élevait encore qu'à 30 000 hommes. Sherman au contraire reçut des troupes fraiches et répartit ses

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