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propre de vieillard, sanus et incolumis in mea bona memoria (1).

C'est à tort que Spon et Levrier fixent la date de cette mort en 1227, en chargeant la mémoire de Guillaume Ier des tracasseries que Guillaume II continua à faire à l'évêque de Genève. Car un de ses fils cadets, Aymon, déclare, dans un acte de 1205, exécuter les volontés de son père, mort depuis quelque temps. Une lettre du pape Innocent III, de 1204, et un acte de 1202 de Guillaume de Faucigny parlent de Guillaume de Genevois comme précédemment décédé. Et l'aîné de ses fils, Humbert, figure déjà, en qualité de comte de Genevois, dans un acte de 1196, qui doit être du commencement du mois d'août; car l'un des témoins, Nanthelme d'Escublens, chanoine de Lausanne, fut élu dans le courant du mois évêque de Sion, et figure comme élu dans un acte du 30 août, même année (2).

Selon ses intentions, le corps de Guillaume Ier fut déposé dans le tombeau qu'il s'était réservé sous le vestibule de l'église de Sainte-Catherine-du-Mont. Les dernières années de sa vie avaient été tellement remplies de bonnes œuvres que l'opinion publique le qualifia de bienheureux; et Guichenon parle même de miracles opérés à son tombeau : Vullielmus Gebennensium comes, hujus nominis primus, qui in opinione sanctitalis decessit; Jacet ante fores ecclesiæ sanctæ Catharina supra Anneciacum, tumulo miraculis claro (3).

Un des enfants de Guillaume, Amédée de Genève, fut évêque de Maurienne de 1213 à 1220.

Sa fille Béatrix avait épousé, quelques mois avant sa mort, Thomas Ier, comte de Savoie, celui qui transporta, de Montmélian à Chambéry, le centre gouvernemental de ses Etats de Savoie.

La plupart des historiens de Savoie donnent deux épouses à Thomas Ier, Béatrix de Genevois et Marguerite de Faucigny, en attribuant ses quinze enfants tantôt à la première, tantôt à la seconde, tantôt les partageant entre les deux.

Ce qu'il y a de certain, c'est que Thomas mourut en 1233. On croit avoir établi que Béatrix était encore vivante la même année, et que la date de la sépulture de la comtesse de Savoie à Hautecombe, en 1236, se rapporte évidemment à elle (4). C'est donc à cette princesse seulement qu'il faudrait attribuer tous les actes de conciliation et de bienfaisance dont les historiens gratifient, en grande partie, la prétendue Marguerite, fille de Guillaume II de Faucigny.

Ce fut cette Béatrix qui continua et acheva l'ouvre de prédilection de son père à la montagne du Semnoz. Elle y fit ajouter quelques bâtiments et installer une abbaye de femmes en 1228, ainsi qu'on le voit par l'extrait suivant d'une enquête sur l'état de ce couvent en 1771, par-devant Mgr Jean-Pierre Biord, évêque de Genève, assisté du procureur fiscal, chanoine Jean Puthod, et du greffier, Jacques-Prosper Buttin.

Déposition de Jean Philibert fils de feu Jean-Fran

(1) Regeste genevois, nos 442, 444, 455 bis, 456, 459 bis, 460, 461, 480, 486 ter, 493; Burnier, Histoire de Tamie, Documents n° 7, 8. (2) Hisely, Les comtes de Genevois, p. 95.

(3) Bibl. Sebus. Cent. II, eap. xi.

(4) Monum. hist. patriæ, I, chron. 673.

çois Veisy, de Samoëns, commissaire d'extentes et bourgeois d'Annecy, etc.

Je connais parfaitement la royale abbaye de Ste-Catherine, en ayant été procureur général pendant cinq ans, et étant encore actuellement son commissaire. Cette abbaye est fondée au mont Semenoz, à la distance d'environ une lieue de la ville d'Annecy, par Béatrix de Savoie, fille du Bienheureux Villerme, comte de Genevois, en mil deux cent vingt-huit; le corps du dit Bienheureux comte repose dans un tombeau proche l'église de Ste-Catherine, de même que ceux de trois de ses enfants et cette abbaye a toujours été sous la protection des augustes souverains de Savoye, etc. (1).

On ne peut révoquer en doute le témoignage d'un homme qui avait eu en mains tous les terriers de l'abbaye, et déposait dans le même sens que les autres témoins de l'enquête. La date que donne Besson pour la fondation de l'abbaye en 1179 est donc erronée et ne peut convenir ni à Béatrix, qui était alors trop jeune, ni à l'installation du personnel, puisque la première abbesse était encore en fonctions en 1273, comme on le verra plus loin.

Pendant l'espace de 35 ans qui s'écoula entre la fondation de la chapelle et l'installation d'un couvent de cirsterciennes, quel fut le sort du monument de Sainte-Catherine? Le tombeau du comte de Genevois ne pouvait demeurer isolé sur cette montagne, pas plus que celui du B. Humbert III, comte de Savoie, ne l'était à Haute-Combe. Ce dernier établissement acquit plus tard une importance que n'eut jamais celui de Sainte-Catherine. Mais, à sept années de distance, c'était l'inauguration des sépultures des deux maisons princières qui se partageaient alors la plus grande partie de la Savoie. L'une commençait par le B. Humbert III, en 1189, par le B. Humbert III, en 1189, et l'autre par le B. Guillaume Ier, en 1196.

La première recevait plus tard, en 1270, la dépouille mortelle du B. Boniface de Savoie, archevêque de Cantorbéry, et la seconde, en 1290, celle du B. Guy de Genève, évêque de Langres. La maison de Savoie a fait reconnaître le culte de ses deux bienheureux. La maison de Genève s'est éteinte à la fin du XIVe siècle, et personne ne s'est plus occupé des siens. Nous rappelons ici leurs titres d'après les traditions écrites, sans vouloir aucunement préjuger la question.

Revenons au personnel de Sainte-Catherine.

Dans l'insuffisance du clergé séculier, conséquence des calamités du x° siècle, les ordres religieux étaient souvent appelés au service des paroisses. C'est ainsi que le prieuré de Talloires, qui dépendait de l'abbaye de Savigny dès 1016, reçut les cures de Lovagny et de Saint-Jorioz en 1030, celles de Doussard, Marlens et Bluffy en 1037.

Guy de Faucigny, évêque de Genève, donna à ces religieux les églises d'Annecy en 1106, et son frère utérin, Aymon, comte de Genève, y ajouta une dotation convenable en 1107 (2). On a vu plus haut les libéralités que leur fit son petit-fils, Guillaume Ier, en 1192. Il est tout naturel qu'il leur ait encore confié l'église de Sainte-Catherine. Et le silence gardé

(1) Archives de la Société Florimontane. (2) Notice hist. sur Talloires, p. 104.

sur cet établissement dans l'acte de 1192 nous paraît un motif de plus d'en reculer la fondation après cette date. Si l'acte ne nous en est pas parvenu, nous savons, par l'inscription de son tombeau, qu'il en était le bienfaiteur.

M. David, chanoine et secrétaire de la collégiale de Notre-Dame-de-Liesse, au siècle dernier, a laissé des notes riches et nombreuses sur un exemplaire de l'ouvrage de Besson, que possède aujourd'hui M. Jules Philippe. Il avait, entre autres, recueilli, à l'abbaye de Sainte-Catherine, cette inscription en caractères de la fin du XIIe siècle, que nous reproduisons en capitales romaines :

ANNO AB INCARNATIONE DOMIN
MILLESIMO: DVCENTESIMO: VICESIMO
HVGO CAMERACENSIS FECIT HOO
LAVATORIVM TEMPORE GVILLEMI :
NONI ABBATIS SALVE MATER
DEI.

Cet Hugues de la Chambre, qui a fait construire le lavoir en 1220, était probablement le desservant de Sainte-Catherine. Il dépendait d'une maison religieuse qui en était à son neuvième abbé, appelé Guillaume.

Ce ne peut être celle de Tamié, bien qu'elle ait eu plus tard la direction de Sainte-Catherine; car, en 1220, l'abbé était Girard de la Tour-du-Pin.

En 1215, on voit à Haute-Combe un abbé du nom de Guy, nom que l'on confondait assez souvent, à cette époque, avec celui de Guillaume. Il était le neuvième de cette famille monastique, si l'on remonte jusqu'à leur établissement primitif à la Haute-Combe de Cessens.

Nous n'avons pu nous procurer la liste des abbés de Clairvaux, à laquelle se rattachait Haute-Combe, comme fille de Notre-Dame-d'Aulps.

Les deux territoires dépendaient du diocèse de Genève. Les comtes de Genevois ont fait plusieurs fois des libéralités à ces monastères. Toutefois, les rivalités féodales des deux maisons de Savoie et de Genevois ne permettent guères de supposer que la seconde ait voulu confier la garde de ses tombeaux aux religieux d'un établissement qui abritait déjà un dépôt semblable pour la première. Il est plus probable qu'elle aura choisi la famille religieuse la plus rapprochée de sa capitale, et qui avait d'ailleurs toute sa sympathie.

La maison de Talloires avait bien alors pour chef un Guillaume; mais ce n'était qu'un prieuré dépendant de l'abbé de Savigny. Celui-ci s'appelait également Guillaume, le premier de son nom; mais il était le trente-sixième de sa maison.

paraît aussi une inspiration de Talloires, dont l'église était dédiée à la Vierge Marie dès sa fondation.

En ne remontant de ce neuvième prieur ou abbé qu'à l'union de Talloires à l'abbaye de Savigny, en 1016, on trouve une moyenne de vingt ans pour le siége de chacun de ceux qui l'ont précédé.

Il faut donc s'en tenir à Guillaume, prieur de Talloires, qui aura été probablement chargé par la comtesse de Savoie de préparer et d'agencer les bâtiments pour l'installation d'une communauté de femmes à Sainte-Catherine.

On les appela spécialement Bernardines, parce qu'elles suivaient la réforme introduite par saint Bernard de Clairvaux dans les filiations de son ordre.

Le choix de leur patronne jette une certaine lumière sur les visées de la fondatrice. Le corps de sainte Catherine, martyre à Alexandrie d'Egypte, au Ive siècle, avait été porté sur le Mont-Sinaï et était honoré dans le monastère que sainte Hélène, mère de l'empereur Constantin, y avait fait bâtir. Et le nom de Mont-de-Sainte-Catherine fut substitué quelquefois au nom primitif par les nombreux pèlerins à son tombeau.

Le Semnoz devait être le Sinaï d'Annecy. Béatrix, fille du comte de Genevois, épouse du comte de Savoie, était la petite emperesse de ces contrées, si parva licet componere magnis, et eut l'honneur de fonder aussi un pèlerinage à Sainte-Catherine.

D'ailleurs son culte, apporté en France vers le XIe siècle, se répandit surtout dans les congrégations et les écoles, en souvenir de la science avec laquelle elle avait confondu ses adversaires païens (1).

Agathe, fille de Guillaume II de Genevois, frère de Béatrix, avait pris le voile à Bonlieu. Ce fut elle qui conduisit à la montagne de Semnoz la nouvelle colonie de religieuses cisterciennes qui devait y demeurer jusqu'au XVIIIe siècle. Il est probable que le choix de cette religieuse, pour première abbesse du Mont-de-Sainte-Catherine, fut fait à la demande de sa tante Béatrix, et conséquemment que l'installation du personnel s'y fit avant sa mort, arrivée en 1230, s'il est vrai que la note obituaire de la chronique de Haute-Combe doive se rapporter à cette princesse (2). Anno domini MCCXXX sexto Idus aprilis fuit hic tumulata illustris ac reverendissima domina et piissime recordationis parens comitum hinc ac inde dormientium, Sabaudie comtissa.

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Mais comment concilier ce texte avec celui de l'inscription de l'abbaye de Sainte-Catherine, qui porte que son corps repose dans la salle du chapitre? † HIC · IACET· FELICIS MEMORIE PIISSIMVS WILLELMVS GEBENARVM COMES · HVIVS ABBACIE INSIGNIS BENEFACTOR ET PATER BEATRICIS· A・ SABAVDIA EIVSDEM ABBACIE FVNDATRICIS

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Ducange nous aidera peut-être à expliquer cette énigme. Il assure que, dans l'ordre des bénédictins, les titres de prieurs et d'abbés se confondaient assez souvent à cette époque, et il cite plusieurs preuves à l'appui (1). La qualification d'abbé, donnée au chef religieux de Talloires par un de ses inférieurs, n'aurait donc rien eu d'insolite, surtout à la distance où ce prieuré était de sa maison-mère. Et le salut pieux leresque à ranger la scolastique seus la bannière d'une jeune héroïne qui termine l'inscription: Salve Mater Dei, nous

(1) Glossarium, etc. — - Verb. Abbas. Prior. C'est ainsi que le prieuré de Meillerie en Chablais s'appelait vulgairement l'abbaye, comme Talloires.

IN CAPITVLO RECVMBENTIS (3)

(1) Dans les anciens collèges de Savoie les élèves de philosophie avaient pour patronne sainte Catherine. Il y avait un sentiment pieux et cheva

qui avait argumenté en face d'un prêtoire romain. (2) Monumenta hist. patr., I, 673.

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Cette inscription, conservée par Besson et par le récit de D. Martenne et de D. Durand, qui y passèrent en 1712, pourrait bien avoir été placée par ordre de la première abbesse, petite-fille de Guillaume Ier, aussi bien que les portraits du père et de la fille à genoux, qu'on y voyait encore au temps de Besson. (A suivre.) C.-A. DUCIS.

CHRONIQUE MUSICALE

Paris, le 15 janvier. Le voilà ouvert enfin, ce nouvel Opéra dont on a tant parlé ; il était temps que cela finit, ne fût-ce que pour faire taire des discussions et des contestations plus qu'inutiles. Je n'ai pas à décrire les merveilles d'architecture qui coûtent à la France une quarantaine de millions. Les visiteurs se livrent à leur aise aux exclamations admiratives et aux réserves critiques : ils en arrivent toujours à cette question: << Mais le grand escalier? Ah! oui, il est superbe!... » C'est le seul point sur lequel on soit d'accord; encore les gens vétilleux font-ils des réserves. On en peut conclure que le bâtiment de l'Opéra offre une grande magnificence et un singulier amalgame de formes et d'ornements où il y a beaucoup à louer et beaucoup à critiquer.

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Si du moins tout était au mieux pour la commodité des spectateurs; mais sous ce rapport encore on peut élever quelques plaintes. La salle a la forme de l'ancienne, mais elle est un peu plus grande, et surtout plus large; aussi les défauts sont-ils plus sensibles pour la sonorité. Le public ne les apercevra bien que dans la suite; presque tout le monde cependant a remarqué dès l'abord le manque de sonorité de l'orchestre, placé dans une sorte de boîte, au-dessous du niveau du parquet.

Pour le moment, la curiosité du public se porte surtout sur le bâtiment; on en a vu les preuves à la représentation de gala qui a servi d'inauguration. Quand cette fièvre sera un peu calmée, il faudra voir si M. Halanzier prétend continuer à administrer son théâtre en industriel habile, mais à qui les questions d'art sont étrangères. Il avait fait de bons bénéfices à l'ancienne salle; il en a fait encore à la salle Ventadour; il a organisé la représentation de gala de manière à y profiter plus que personne. Pendant un an il a pu répondre aux réclamations qu'il se trouvait dans une position exceptionnelle; aussi, en dépit de son cahier des charges, avait-il augmenté les prix des places pour les représentations de Mme Patti; il a même obtenu l'autorisation d'augmenter les prix de certaines places du nouvel Opéra. Quant à Jeanne d'Arc, de M. Mermet, il paraît décidé à ne la donner que lorsqu'il éprouvera lui-même le besoin de monter un ouvrage nouveau. Nous verrons ce qu'en dira l'administration des beaux-arts.

Mme Patti a paru dans les Huguenots et dans Faust. On a appelé les quatre représentations qu'elle a données le coucher d'une étoile. Sa voix, quoique toujours fort jolie, n'a plus l'attrait de la fraîcheur; on s'aperçoit maintenant qu'à part des qualités de mécanisme vocal, c'est une cantatrice et une actrice fort estimable, mais assez ordinaire et n'ayant rien de ce qui fait la grande artiste.

L'Opéra-Comique suit toujours la même ornière. On a repris Mireille, de M. Gounod, à l'intention de Mme Carvalho et à peu près tel que cet opéra avait été donné dans l'origine, à part la conclusion. Cependant Mme Carvalho commence à vieillir; voilà près de trente ans qu'elle chante au théâtre. Elle avait eu un premier prix de chant au Conservatoire en 1847, puis elle avait débuté à l'Opéra-Comique. M. Du Locle a donné un petit ouvrage nouveau, Beppo, d'une parfaite nullité. Voilà plusieurs plaisanteries de ce genre qu'il commet; nous finirons par croire qu'il ne monte de nouveautés que pour l'acquit de son cahier des charges et qu'il ne veut de succès que par des ouvrages anciens.

Un autre malheur, c'est que nous ne sommes rien moins que sûrs d'avoir un troisième théâtre lyrique remplaçant celui qui a été incendié et qui, reconstruit, est voué maintenant au drame et peut-être au vaudeville.

L'essai fait au théâtre du Châtelet a piteusement échoué; celui qu'on fait en ce moment à la salle Ventadour me parait d'avance bien compromis. Si nous étions superstitieux, nous pourrions croire que le titre : Opéra populaire porte malheur. Il y avait un théâtre de ce nom au faubourg Saint-Antoine; on y a donné Jeanne d'Arc, de M. Duprez; sa misérable existence a peu duré. M. Martinet ayant obtenu en 1870 le privilége du Théâtre-Lyrique, conféra à ce théâtre le titre d'Opéra populaire; il n'y a jamais pu donner une représentation et le théâtre a été brùlé l'année suivante. L'Opéra populaire au théâtre du Châtelet a duré à peu près un mois; les Parias, de M. Membrée, ont été joués trois fois; une reprise des Amours du diable, opéra-féerie, musique de Grisar, a réussi un peu mieux; mais la direction a cru devoir s'en tenir là, et elle a sagement agi. Il n'est pas probable qu'après l'Esclave et les Parias, M. Membrée réussisse à faire représenter un nouvel opéra de sa composition. Ce musicien manque décidément du don d'invention dont un compositeur dramatique ne peut pas se passer.

M. Bagier lui-même semble désespérer du ThéâtreItalien; du moins ne s'est-il pas donné une peine sérieuse pour former une bonne troupe. On dit qu'il avait beaucoup compté sur Mme Pozzoni, qui a quelques qualités, largement contrebalancées par des exagérations et d'autres défauts. M. Bagier n'a pas mème cherché à se procurer une bonne basse ; il prend de médiocres chanteurs français de l'un et de l'autre sexe qui n'ont pas même une idée de la prononciation italienne; peu lui importe. Ea ce moment les représentations italiennes sont suspendues. M. Bagier a obtenu une subvention de 100,000 francs pour donner des représentations françaises, mais il ne paraît pas s'être bien rendu compte des difficultés qu'il rencontre à se créer un répertoire et à trouver de bons chanteurs. Il s'est décidé à ouvrir son théâtre lyrique français le 12 janvier par une reprise du Freischutz, qu'à l'Opéra même on ne peut pas donner d'une manière bien convenable. Le premier ténor est un chanteur usé; la prima donna a quelques mérites avec une voix un peu fatiguée; je ne la crois pas suffisante pour attirer la foule. Quoi que fasse M. Bagier il se trouvera en concurrence avec l'Opéra et

l'Opéra-Comique, qui ne sont qu'à quelques minutes de marche du théâtre Ventadour. Mile Krauss, qui autrefois était à ce théâtre, est maintenant à l'Opéra. La meilleure place pour un nouveau théâtre lyrique eût été au boulevard du Temple ou encore à la Porte Saint-Martin; mais enfin on n'a pas voulu le mettre là; M. Bagier a demandé le privilége, et le ministère, qui s'occupe peu d'art, le lui a accordé. Nous verrons avant peu comment il prétend se tirer d'embarras.

Les bouffonneries réussissent toujours le mieux ; mais aussi quand l'une ne réussit pas, on en monte une autre, et lorsqu'on tient un vrai succès on le tient pour longtemps. On a donné avec des chances diverses la Fiancée du roi de Garbe, la Famille Trouillort, les Prés Saint-Gervais, Madame l'Archiduc, Giroflé-Girofla. Les deux dernières œuvres ont le plus de succès; la meilleure, pour la pièce, c'est Giroflé-Girofla.

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Le même communique une autre circulaire ayant pour objet une demande de renseignements sur les travaux de la Société, pour l'Annuaire que doit publier le ministère.

Ensuite, M. le Président lit une circulaire adressée par la Société de géographie de Paris, informant la Société Florimontane que l'ouverture de l'Exposition géographique aura lieu seulement le 15 jaillet, au palais des Tuileries; le Congrès international des sciences géographiques se réunira le 1er août.

M. FÉLIX WAGENER, homme de lettres, à Liège (Belgique), est reçu au nombre des membres effectifs.

M. Ducis rend compte de la séance publique de l'Académie de Savoie, tenue le 22 décembre dernier. Elle avait pour objet :

1o Le concours de poésie, dont le prix a été remporté par M. Bouverat, de Cluses. Une première mention honorable a été décernée à M. de Mortillet, de Méry, et une seconde à Mlle Marie Pourrat, de

Cluses.

2o La réception, comme membre effectif, de M. l'avocat Descostes, déjà membre effectif de la Société Florimontane. Le récipiendaire a fait, avec un talent remarquable sous tous les rapports, l'éloge historique du cardinal Billiet, à la mort duquel la Revue avait publié un article nécrologique.

M. Serand a trouvé, aux Archives municipales, un très grand nombre de pièces sur la Révolution : il cite celles qui concernent l'in

Il s'est établi une véritable émulation pour l'exécution d'oratorios. M. Lamoureux a fait entendre Judas Macchabée, d'Haendel, avec quelques suppressions; M. Pasdeloup, de son côté, destine le dernier concert de chaque série à l'exécution d'un oratorio, ce qui fera trois concerts de ce genre pour cet hiver. Il a fait entendre Elie, de Mendelssohn, à l'exception de quatre ou cinq morceaux; il y a une dizaine d'années il en avait fait entendre la presurrection de Thônes, l'assassinat de M. de la Fléchère, la suppresmière partie seulement. M. Colonne, aux concerts du théâtre du Châtelet, organisés à l'imitation de ceux de M. Pasdeloup, a fait exécuter dimanche dernier l'Enfance du Christ, de Berlioz. La tentative a pleinement réussi; l'œuvre de Berlioz prendra désormais le rang qu'elle mérite. Le public n'en connaissait jusqu'à présent que la seconde partie (la Fuite en Egypte), exécutée plusieurs fois aux concerts du Conservatoire, et le trio des jeunes Ismaélites, exécuté dans des séances de musique de chambre. Dans toutes ces auditions d'oratorios, l'orchestre et les chœurs sont généralement satisfaisants; les solos de chant ne le sont pas souvent, mais il n'en saurait être autrement dans l'état actuel des théâtres.

Les concerts dirigés par M. Daubé continuent aussi dans les mêmes conditions qu'autrefois, mais dans une salle nouvelle, située rue Taitbout. Leur influence est bien moins considérable que celle des concerts du Cirque d'Hiver et du théâtre du Châtelet.

Tous les journaux illustrés se sont occupés du nouvel Opéra; on trouvera une description complète du monument dans un petit volume de M. Ch. Nuitter: le Nouvel Opéra (chez Hachette), avec gravures et plans. Il faut lire aussi le Théâtre, par M. Charles Garnier (à la même librairie); l'architecte de l'Opéra y expose ses idées et cherche à les justifier.

En fait de publications, une seule me reste à signaler, par son importance: c'est le quatrième volume de l'Histoire de la musique, par Fétis (chez Firmin Didot).

JOHANNES WEBER.

SOCIÉTÉ FLORIMONTANE

Séance du 25 janvier

PRÉSIDENCE DE M. C. DUNANT

M. le Président lit une circulaire de M. le Ministre de l'instruc

sion des églises, les dépenses faites pour la démolition des clochers, la liste des prêtres assermentés et leur rétractation, etc. En outre, 52 pièces, comprises entre les années 1629 et 1660, sont relatives aux premières démarches faites pour la béatification de saint François de Sales.

M. Gex donne des détails biographiques sur quelques-uns des personnages cités par M. Serand, entre autres sur Mer Panisset, évêque constitutionnel.

M. Mangé décrit les appareils installés au Jardin public pour les observations météorologiques. Il veut bien se charger avec un autre membre, M. Eugène Tissot, de rédiger pour la Revue des notes men

suelles.

M. Doublet, membre correspondant à Bône, envoie la photographie d'un beau sarcophage en marbre blanc, trouvé en 1867 à SoukAhras, l'ancienne Tagaste, ville où naquit saint Augustin. Le basrelief de ce monument, conservé au Musée de Bône, représente le combat des Amazones.

M. Revon expose les acquisitions récentes du Musée. Dans ce nombre figurent des séries industrielles envoyées par deux membres correspondants, M. Lacroix, à Mâcon, et M. Bernardin, à Melle (Belgique).

La Société vote ensuite l'achat d'antiquités en bronze, appartenant à la fin de l'époque du bronze, trouvées en 1852 dans les sépultures de Montrond en Maurienne. Ce sont : 6 bracelets fermés, de grandeurs décroissantes; un bracelet ou anneau de jambe, couvert de gravures; 2 crotales ou pendeloques en forme de grelots allongés; et une superbe épingle, ayant une tige de 38 centimètres, qui se recourbe en une autre section, longue de 19 centimètres, au tiers de laquelle est un disque orné de lignes concentriques. Ces objets seront placés au Musée à titre de dépôt.

M. le bibliothécaire dépose les dons et échanges:

G. Spano, Scoperte archeologiche fattesi in Sardegna in tutto l'anno 1874, don de l'auteur.-G. Vallier, Numismatique féodale du Midi de la France, don de l'auteur. Soirées populaires de Verviers, 2 volumes de littérature donnés par M. F. Wagener. Annuaire de la Haute-Savoie pour 1875, don de MM. Perrissin et Révérend du Mesnil, Armorial de Bresse, Bugey, etc.,

Cie.

achat.

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L'ouverture du canal de Suez n'a pas été si préjudiciable au cap de Bonne-Espérance que l'on pourrait se l'imaginer. Il ressort des statis. tiques officielles du Cap que ce port n'a jamais reçu autant de tonnage depuis dix ans qu'en 1873. En 1864, le nombre des navires ayant visité Cap-Town était de 210. En 1873, il était de 409; de même le tonnage s'est élevé de 27,565 tonneaux à 113,141. Pendant ces dix dernières années, le total du tonnage à Table-Bay a été de 5,733 navires jaugeant 2,036,519 tonneaux. A Port-Elisabeth, pendant la même période, il est entré 2,310 navires.

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Sur les 178,356 hommes de troupe de l'armée anglaise, 10,724 no savent ni lire ni écrire, et 9,543 savent lire seulement.

On se propose de relier télégraphiquement toutes les stations du Sahara algérien. Un capitaine du génie, chargé des études du projet, se trouve en ce moment à Laghouat.

On voulait d'abord, paraît-il, établir une ligne électrique; mais on y a bientôt renoncé à cause des difficultés. Au premier abord, en effet, il semble facile de planter des perches dans les grandes plaines. Mais à la pratique, on s'aperçoit que les transports sont hors de prix, et que les poteaux facilement plantés dans le sable sont encore plus facilement emportés au premier ouragan qui bouleverse les dunes. On a cherché autre chose.

On s'est arrêté à un système qui a été employé pendant le siége de Paris entre divers forts et qui a donné, dit-on, de bons résultats. On l'appelle le télégraphe optique.

Il rappelle un peu l'ancien télégraphe aérien. Les postes sont placés sur des montagnes. L'appareil se compose d'une forte lunette, d'une lampe à pétrole et d'un interrupteur. Les signaux sont ceux de l'alphabet Morse : ils sont formés par des interruptions de lumière; une petite interruption forme un point, une plus grande un trait. Au mogen de la lunette, on saisit les interruptions à de grandes dis

tances.

Le capitaine du génie chargé de l'étude est seul et n'a que la lunette; il fait allumer des feux par ses collègues à des heures fixes sur les montagnes et regarde avec sa lunette. Ainsi de Boghar, il aurait pu, dit-il, s'il avait ea l'appareil complet, communiquer avec Miliana, de Djelfa avec Boghar, et de Laghouat avec Djelfa. De Laghouat à Djelfa seulement, il y a cent dix-huit kilomètres, et de Djelfa à Boghar cent soixante-dix. Vous voyez l'avantage.

Ainsi quelques postes suffiraient pour tenir tout le sud de l'Agérie. On mettrait probablement des gardes du génie dans ces postes, perchés sur les plus hautes montagnes.

A un certain point de vue, les Islandaises sont beaucoup plus les égales de l'homme que leurs sœurs du continent européen. Elles reçoivent exactement la même éducation que le sexe fort.

Il n'y a point d'écoles en Islande, et comment y en aurait-il dans un pays si faiblement peuplé que les fermes y sont généralement séparées par des espaces de vingt kilomètres ou plus? C'est le père qui instruit sa famille, et il donne la même instruction à ses fils et à ses filles; à ce qu'il leur enseigne, le pasteur, dans les endroits où il y a un pasteur, ajoute un peu de latin et de danois.

De cette façon, l'Islandaise acquiert aussi bien que ses frères tout ce que le père de famille est capable d'enseigner; elle fait des mathématiques comme eux, et comme eux elle apprend les sagas. Ni elle ni le frère, d'autre part, ne poussent bien loin l'étude des arts tels que la peinture, la musique ou la danse.

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Pour peindre, il faut un matériel bien difficile à se procurer dans les solitudes de l'Islande, et il faut aussi avoir sous les yeux des objets pittoresques dans le sens littéral du mot, ce qui n'est guère le cas dans cette île peu soleilleuse. Pour jouer du piano, un piano est indispensable, et comment s'y prendre pour en transporter à dos de cheval à travers monts, torrents et marais? De même, pour danser, il faut de la musique, de l'espace, et au moins des danseurs; or, les danseurs sont rares parce que les éléments de jeunesse sont trop éloignés les uns des autres en raison du peu d'habitants de ce pauvre pays.

Toutefois, dans cette belle et bonne maison en bois, voisine, il est vrai, de la côte, demeure hospitalière où nous fûmes fort bien reçus, nous vîmes un piano et une guitare. De braves demoiselles nous jouérent avec maestria d'excellents morceaux sur l'un et l'autre instrument, et s'accompagnant mutuellement, nous chantèrent des chansons en quatre ou cinq langues dont la plus harmonieuse nous parut être le suédois. (D'après le Cornhill Magazine.)

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