OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES & HYDROMÉTRIQUES FAITES AU JARDIN PUBLIC D'ANNECY Altitudes: Du Jardin, 448 30. Du baromètre, 453 10. Du zéro de l'Echelle du Lac, 446 275. (Annecy par 45° 53′ 59′′ de latitude et 3° 47' 33" de longitude E.) THERMOMÈTRES BAROMETRE A ZÉRO PLUIE Evapo- HUMIDITÉ 22237 7,5 N.-0. N.-0 ? N.-O faible calme couv.3/4 Baisse barométrique après midi. id. Couvert tout le jour. 500 2,9 470 2,8 470 3,5 460 3,3 ? O.-N.-O id. id. Id. 440 3 ? ? id couvert Id. clair à 10 heures du soir. 460 3,7 450 3,7 435 3,7 id. br. (1000) Br. jusqu'à midi. Neige. 430 3,7 N.-N.-O très faib. couvert Temps brumeux. 420 2,7 id. id. Couvert à midi. 410 3,2 N-O faible couv. br N.-O id. 1/2 couv. Id. Id. Moins couvert à midi, partie de nuit claire. Nuit claire à 10 heures et demie du soir. br. (60) Br. tout le jour, à midi (500), après midi (60). br. (300) Br. se disspe à 10 h. 1/2 m. par v. N.-E. couvert Midi soleil voilé, baisse barométrique de 3 mill. 410 4 S id id. S faible beau 1/2 couvert à midi, pluie légère avant 9 h. m. Beau tout le jour, baromètre monte. S.-S.-O id br. (200) 355 3,3 S.-S.-O très faib. id. 1/2 couvert à midi. 350 3,2 S.-0 faible beau 345 3,7 br. (400) Br. à midi, beau à 9 h. du soir. br. (300) Couvert tout le jour et la nuit. br. (400) Ciel clair à 10 heures du soir. 325 3,6 320 4 310 3,4 EXPLICATIONS. La lettre p signifie pluie inappréciable au pluviomètre; de même n signifie: quantité de neige inappréciable au pluviomètre. ainsi qu'à l'évaporation, représentent des millimètres. Le signe? indique qu'on n'a pas pu reconnaître la direction ou la force du vent. parenthèses qui suit le mot brouillard ou son abréviation, signifie que les objets cessent d'être perceptibles à cette distance. Annecy. Impr. PERRISSIN. Le signe Les nombres relatifs aux hauteurs de pluie marque un calme plat. Enfin le chiffre entre AUGUSTE MANGE, architecte de la ville. 17me Année. 3. Omnes omnium caritates patria una complexa est. 31 mars 1876. ON S'ABONNE EN FRANCE REVUE SAVOISIENNE Par un bon postal à l'or- JOURNAL PUBLIÉ PAR LA SOCIÉTÉ FLORIMONTANE D'ANNECY dre du Directeur; A L'ÉTRANGER Par un effet sur une maison d'Annecy. La Revue rendra compte des ouvrages dont deux exemplaires lui auront été adressés. SOMMAIRE. La neutralité du nord de la Savoie (suite), par On ne reçoit que des abonnements annuels. Les communications de tout genre adressées à la Revue savoisienne doivent être affranchies. de l'empire germanique et ne furent qu'un ferment. de discorde dans toutes les guerres subséquentes, tantôt pour la France, tantôt pour l'Autriche. La défense de la Savoie, pour ses princes établis définitivement à Turin, exigeait presque deux camps Observations météorologiques et hydrométriques faites au jardin permanents: l'un, à Suse, pour le Mont-Cenis et public d'Annecy, par M. A. Mangé. LA NEUTRALITÉ DU KORD DE LA SAVOIE (Suite) III Le titre de Vicaire impérial donné par les empereurs d'Allemagne à plusieurs princes de Savoie, dans les XIII et XIVe siècles, et le titre bien plus important de Vicaire perpétuel du Saint-Empire puisque c'était une vice-royauté héréditaire, donné à Amédée VI dès 1363, et confirmé à ses successeurs en 1412, 1496, 1503, 1521, avaient pour but de poser la maison de Savoie comme une barrière contre les ambitions de la France par-dessus les Alpes. les vallées de l'Arc et de l'Isère; l'autre, à Aoste, dont les corps devaient déboucher par le Petit-SaintBernard dans la vallée de l'Isère, par le col de la Seigne dans les vallées de Beaufort et de l'Arve. contre Genève, et par le Grand-Saint-Bernard sur le Vallais. C'est l'histoire des campagnes de 1471, 1477, 1505, 1536, 1589, 1596, 1600, 1610, 1614, 1630, 1690, 1703, 1705, 1709, 1711, 1742, 1743, 1793, 1814. La charge était trop lourde pour un petit Etat. La plupart du temps la Savoie était surprise sans autre moyen de défense que l'héroïsme isolé de quelques châteaux ou villes insuffisamment garantis, ou de quelques vallées naturellement fortifiées, comme en 1536, 1630, etc. Les princes se faisaient ordinairement suivre des troupes de ce pays, dont ils savaient la fidélité, et envoyaient dans les forteresses de Savoie des garnisons étrangères, trop mercenaires pour défendre au prix de leur vie l'indépendance du pays, quand elles ne l'épuisaient pas par leurs exactions. Pour recevoir et exercer avec plus de dignité cette vice-royauté au nom de l'empereur dans quelques anciennes provinces burgondes et lombardes, le chef de la maison de Savoie n'était point considéré comme Cette lutte aux deux extrémités de ses Etats déun comte ordinaire de l'empire. Outre sa qualité de doublait, souvent sans profit, l'activité et les moyens marquis en Italie par l'héritage d'Adélaïde de Suse, par trop restreints de cette famille princière, vades 1091, il portait dès 1265 le titre de duc de Chaleureuse autant qu'habile, dont le malheur fut toublais, qui comprenait alors tout le bas Vallais, dès 1416 celui de duc de Savoie, et avait repris, en 1659, le Genevois, érigé en duché dès 1564 en faveur d'une branche cadette. Il portait encore le titre de roi de Chypre, depuis que Louis II, héritier de ce royaume, s'y était fait couronner en 1460. Mais, comme il ne le possédait plus, l'usage diplomatique ne lui conserva que le titre d'Altesse royale jusqu'en 1713. L'exercice de cette charge de Vicaire perpétuel du Saint-Empire romain donna lieu à beaucoup de discussions, soit pour les préséances cérémonielles, soit à l'occasion de la succession des principautés de la Haute-Italie, pendant les guerres des XVIe et XVII siècle, entre l'Autriche, la France et l'Espagne. Car depuis le règne de Charles-Quint, les Espagnols, introduits en Italie, y divisèrent les intérêts jours d'avoir à capitonner, pour ainsi dire, la chaîne des Alpes contre les chocs de l'Allemagne et de la France dans leurs prétentions sur l'Italie. Entre deux puissantes rivales qui se disputaient ses services, et dont elle ne recevait souvent qu'ingratitude, il serait injuste d'accuser de versatilité l'adresse qu'elle mit à se maintenir dans son poste d'honneur, sans jamais oublier son programme. J'ai formulé le mot d'ingratitude pour ne rien dire de plus, et c'est à l'Espagne, dédoublure de l'Empire, et surtout à la France, que ce reproche a dů s'adresser alors. Faut-il rappeler les iniques procé dés de Louis XI contre le jeune duc Philibert Ier et son ministre, le comte de La Chambre, en 1479 et 1482; de Charles VIII contre le duc Charles Ier, en 1488; de François Ier contre le président Lambert, envoyé du duc Charles III à Paris, en 1529; de Richelieu contre Charles-Emmanuel Ier, en 1629, Victor-Amédée Ier, en 1636, sa veuve, Chrétienne de France, et ses enfants, en 1637 et 1639, ses ministres, Monod et d'Agliè, en 1640; de Louis XIV contre l'ambassadeur de Savoie à Paris, en 1690, contre Victor-Amédée II, en 1702, etc.? Aucune législation n'a pu légitimer de pareils attentats. une défense des plus héroïques. Dès lors la Savoie fut écrasée de contributions, subit toutes sortes de déprédations. Les familles d'officiers semblaient mème s'inspirer des exigences despotiques de Louis XIV. Ce fut au point que les administrations locales eurent mille peines à arrêter les réactions violentes qui menacaient. Sollicité à plusieurs reprises par Louis XIV, le duc de Savoie accepta enfin, le 29 août 1696, la paix de Turin, le mariage de sa fille Adélaïde avec le duc de Bourgogne et l'honneur de porter sa médiation entre les parties belligérantes pour la suspension d'armes qu'il fit conclure, en effet, à Vigevano, le 6 octobre. La paix générale fut arrêtée ensuite au traité de Ryswik le 20 septembre 1697. Mais ce fut en vain. que le duc de Savoie, qui n'avait pu oublier les malauthenti-heurs de ce pays pendant l'occupation française, y proposa de nouveau la neutralité définitive de cette contrée avec celle de la Suisse. La France y fit opposition, une autre discorde se préparait. Nous ne parlons pas des autres brèches bien plus nombreuses encore faites au droit des gens, signalées par l'histoire, mais que les tergiversations de la politique ont toujours cherché à justifier. Encore moins raconterons-nous les services rendus à ces diverses puissances belligérantes par la famille princière, victime de ces indignités le récit de nos annales historiques, même appuyé de documents ques, ne parviendra pas à faire croire au dévouement dans les tractations diplomatiques. IV Lorsque Louis XIV prétendit, en 1667, rétablir les droits de son épouse sur le royaume d'Espagne, il essaya de flatter Charles-Emmanuel II en reprenant la question de l'échange de la Savoie pour Milan. Mais, loin d'acquiescer à cette demande, le duc de Savoie pensait alors à rétablir aussi ses droits sur le pays de Vaud et Genève, et cherchait à les faire sortir de la neutralité suisse. Tout resta dans les cartons. La régence de Jeanne-Baptiste de Genevois-Nemours, la dernière de cette branche cadette de Savoie qui avait toujours été presque française, avait déplu en Piémont, ainsi que le mariage qu'elle avait conclu avec Louis XIV entre le prince Victor-Amédée et Anne d'Orléans. Victor-Amédée II avait à peine pris de lui-même les rênes du gouvernement que Louis XIV lui fit signifier par Catinat des ordres qui aboutissaient, en réalité, à un désarmement complet entre les mains de la France, et qui jetèrent le duc de Savoie dans l'alliance avec l'empereur d'Allemagne, le 4 juin 1690. Quand cette nouvelle fut connue, l'exaltation de la ville de Turin fut telle que Victor-Amédée dut prendre des mesures pour prévenir des Vêpres turinaises contre tout ce qui était français. Toutefois ce ne fut qu'après l'occupation de la Savoie, en juillet et août, même année, par des troupes franco-irlandaises, que le duc adhéra publiquement, le 20 octobre suivant, à la ligue d'Augsbourg, où presque toute l'Europe s'était coalisée contre les prétentions exorbitantes du monarque français. Louis XIV avait fait emprisonner l'ambassadeur de Savoie à Paris. Victor-Amédée fit enfermer aussi l'ambassadeur de France au château d'Ivrée. Ce furent les seules représailles dont on usa ex æquo visà-vis de la France contre tant d'actes d'iniquité de ce genre. Dans ces conjonctures Victor-Amédée allait conclure avec les Suisses un traité de neutralité protégée pour la Savoie, lorsque l'Angleterre et la Hollande s'y opposèrent en lui promettant des subsides convenables pour la guerre. Mais, faute d'action simultanée, le fort de Montmélian succomba en 1691, après La mauvaise saison de 1698, dont les conséquences déplorables se prolongèrent jusqu'à l'année suivante, servit de trait d'union entre deux guerres également désastreuses pour la Savoie. V La succession d'Espagne venait encore jeter le fléau de la guerre en Italie et faire peser sur le duc de Savoie l'ineptie des généraux français et la fatuité de son gendre, le duc d'Anjou, nouveau prétendant roi d'Espagne sous le nom de Philippe V. En face de ses frontières découvertes et du double guet-à-pens, aussi traître que cruel, contre ses troupes et lui-même, commandé au duc de Vendôme par Louis XIV en 1702, Victor-Amédée II avait accepté les offres de l'Autriche, de l'Angleterre, de la Hollande et de la Prusse, et proposé de faire déclarer la Savoie pays neutre sous la protection de la Suisse, qui jouissait de ce privilége depuis qu'elle fournissait des troupes régulières aux diverses puissances belligérantes. Le comte de la Mellarède avait gagné ces messieurs de Berne; mais l'ambassadeur de Louis XIV y mit un veto absolu. La Suisse ne pouvant donc alors accepter cette charge d'honneur, qui aurait éloigné la guerre de ses frontières, obtint néanmoins, dans l'accord du 24 mai 1704, l'assurance que la Savoie, occupée par Louis XIV dès 1703, ne serait jamais réunie à la France. C'est la quatrième phase de l'idée de neutralisation émise déjà en 1611, 1690 et 1696. Les rôles étaient bien changés. Le protectorat de Berne et de Fribourg, exercé par la Maison de Savoie jusqu'à Amédée IX, avait été perdu par les aspirations d'Yolande de France au duché de Bourgogne contre les Suisses, et par les agissements de son frère Louis XI dans le traité de 1478. Les procédés de Louis XIV avaient indigné l'Europe et exalté le sentiment national en Savoie; il ne pouvait que devenir plus hostile à la France sous le régime arbitraire de cette occupation qui dura jusqu'en 1713, et qui allait se terminer par des Matinées savoisiennes, comme la menace en avait déjà été faite en 1696, sans les recommandations les plus pressées adressées aux administrations de Chambéry 1 et d'Annecy par le représentant de la Savoie au congrès d'Utrecht, le comte de la Mellarède. Aussi les alliances françaises étaient-elles devenues impopulaires dans nos contrées. On n'y avait pas à redouter les prétentions de l'Autriche, qui ne faisait d'ailleurs que reculer en Italie. Mais nos chroniques locales contiennent de tristes souvenirs de la domination française de 1477 à 1482, de 1536 à 1559, de 1596 à 1598, de 1600 à 1601, de 1630 à 1631, de 1690 à 1697, de 1703 à 1713. Il est juste d'ajouter que les corps espagnols, napolitains, suisses, lorrains, luzernois, lansquenets, etc., si souvent de passage ou de garnison dans nos villes et villages, surtout vers la fin du xvIe siècle, au commencement et à la fin du xvire, ont généralement aussi emporté les malédictions des habitants. Les 40,000 hommes de diverses parties de l'Allemagne et de l'Italie, qui, sous la conduite du comte. Dhaun, venaient en 1709 pour chasser de la Savoie les Français commandés par le général Berwick, la rava gèrent pendant quelques mois autant que les envahisseurs. La famine leur fit repasser les Alpes. Malgré la promesse faite à Berne, en 1704, de ne jamais annexer la Savoie à la France, Louis XIV l'avait retenue dix ans, et par le traité du 11 avril 1713, il la rendait épuisée, avec ses frontières découvertes sans aucune fortification, puisque la seule qu'il y eut trouvée, Montmélian, avait succombé le 11 décembre 1705 et avait été rasée l'année suivante. Les plénipotentiaires de la Savoie proposèrent de nouveau la neutralité de ce pays au congrès d'Utrecht. La France y mit encore obstacle. Mais, forcée de reconnaître que les Etats de Son Altesse royale étaient ouverts de toutes parts, elle stipula, dans l'art. VIII, la faculté, pour le duc de Savoie, de les fortifier dans la mesure qu'il voudrait. On n'insista pas, en vue de plus graves intérêts; car les traités du 10 juin et du 13 juillet 1713 allaient donner à la maison de Savoie la couronne de Sicile et lui confirmer l'éventualité de celle d'Espagne, promise déjà par le testament de Charles II, du mois d'octobre 1700, peu de jours avant sa mort. d'en appuyer en 1690 le projet, tel qu'il était proposé par le duc de Savoie, ce fut encore contre la France. Le duc de Savoie aurait cédé ses droits sur Genève qui, reconnue ainsi comme Etat indépendant, entrait dans la ligue d'Augsbourg et devait faire diversion contre la France le long de ses frontières. Elle aurait bien protégé, même occupé la Savoie, en compensation de laquelle Victor-Amédée aurait reçu le Montferrat. Les pourparlers durèrent jusqu'en 1692, que la Cour de Versailles commença à changer de ton vis-à-vis celle de Savoie, sans pourtant que celle-ci crût pouvoir accepter ses offres jusqu'en 1696, au traité de Turin. VI Ensuite du bouleversement politique causé par les entreprises extravagantes d'Alberoni, ministre d'Espagne, le chef de la maison de Savoie se vit prié d'accéder au traité de la quadruple alliance à Londres, le 2 août 1718, et d'échanger le royaume de Sicile contre celui de Sardaigne, qu'il ne put même occuper que le 8 août 1720. Dès lors il s'adonna entièrement à la révision de la législation, à l'organisation des provinces, à la régularisation des finances, à l'encouragement de l'industrie, à l'œuvre de la péréquation des terres de Savoie pour l'assiette de l'impôt et la sécurité de la propriété, etc. Enfin il abdiqua le 3 septembre 1730. La guerre pour la succession de Pologne entre l'élu de l'Autriche et celui de la France, mit la maison de Savoie dans une alternative assez semblable à celle de 1609. Chaque puissance intéressée aurait voulu disposer de la diversion que le roi de Sardaigne pouvait créer à l'Autriche en Italie. Celle-ci tenait surtout à diriger ailleurs ses aspirations et lui faisait, comme déjà par le passé, l'offre illusoire du Dauphiné et de la Provence à conquérir; l'Angleterre, celle de la Sicile à reprendre. Pour garder cette dernière, l'Espagne lui offraît quelques lambeaux de la HauteItalie, d'accord, en cela, avec la France. Par le traité de Turin du 26 septembre 1733, Charles-Emmanuel III accéda aux offres de son neveu, Dans le même but on ferma les yeux sur la remise Louis XV, pour l'échange du duché de Savoie, où il faite par la France au canton de Genève des trois avait pressenti quelques mécontentements dans les communes de Chancy, Avully et Cartigny, en les as- hautes classes sociales, contre le Milanais à conquésimilant à la vallée de Chésery, pour le privilégerir de concert, et à garder pour sa Maison au même d'une neutralité plus nominale que réelle, bien que cette cession fùt contraire à l'art. IV du traité de 1601. Ces possessions et d'autres enclaves, gardées par les Genevois, ne laissèrent pas que de compliquer et même de retarder l'opération si importante du cadastre de Savoie commencée en 1729. Il est donc bien évident, par tout ce qui précède, que, si la maison de Savoie avait proposé à plusieurs reprises le privilége de la neutralité pour le berceau de sa monarchie, c'était pour le soustraire à une invasion française, et pour donner à l'occupation suisse, si elle devenait inévitable, un caractère tout-à-fait protecteur sous la sanction des puissances. Il est bien vrai également que c'est la France qui avait toujours fait opposition à la reconnaissance de cette situation exceptionnelle. Si l'Angleterre et la Hollande ne furent pas d'avis titre que les descendants espagnols de Charles Quint. Après de brillants succès, le double jeu des Espagnols et l'influence anglaise amenèrent le traité de Vienne du 11 avril 1736, entre l'Autriche et la France, sans la participation du roi de Sardaigne, qui avait fait l'admiration de l'armée française pendant la campagne. Par le traité de Luxembourg du 6 juin 1736 il ne reçut que trois provinces en Italie mais il garda la Savoie. Tous ces traités ne furent définitifs que le 18 novembre 1738, sauf encore les explications du 20 janvier et du 3 février 1739, sur les réclamations du roi de Sardaigne. A peine se remettait-on des suites de cette guerre que les excès de saison qui se succédèrent en 1739, 1740, 1741, allaient aggraver les malheurs qui menaçaient encore notre patrie. Lorsque la guerre pour la succession d'Autriche eut permis à l'Infant, don Philippe d'Espagne, d'envahir la Savoie, en 1742, pendant que le roi de Sardaigne se couvrait de gloire en Italie au profit de Marie-Thérèse, la France, qui avait appuyé cette facile conquête, jouait le rôle de Bertrand, et pensait bien la garder pour elle, en offrant secrètement au roi de Sardaigne une compensation dans les épaves de la guerre en Italie. Elle renouvela ses instances en 1745, lorsque les affaires de l'Autriche semblaient désespérées. Mais les bons offices de l'Angleterre et l'indécision de Louis XV devant les exigences formelles de son oncle, rallièrent Charles-Emmanuel III à l'Autriche. Et dès lors le sort des armes fut défavorable à l'armée franco-espagnole. Par le traité d'Aix-la-Chapelle, en 1748, le roi de Sardaigne garda définitivement la ligne du Tessin, selon les promesses de Marie-Thérèse dès 1743, et rentra en possession de la Savoie, que les Espagnols avaient épuisée pour longtemps. Leurs exactions inouies avaient même provoqué quelques réactions sanglantes, dont plusieurs localités ont gardé le sou(A continuer.) venir. C.-A. DUCIS. GALERIE SAVOISIENNE (1) II M. RAFFORT ET SES ŒUVRES Parmi les peintres contemporains d'origine savoyarde qui honorent le plus le monde des arts, il faut citer en première ligne M. Etienne Raffort, chevalier de l'ordre de Saint-Sylvestre et ancien maire de Gergy (Saône-et-Loire). M. Raffort appartient à une famille essentiellement savoisienne. Son père, Philippe Raffort, né aux Allues, canton de Bozel, arrondissement de Moûtiersen-Tarentaise (Savoie), en 1781, avait dix ans lorsqu'il vint s'établir en Bourgogne avec ses parents; il épousa, à Chalon-sur-Saône, le 19 février 1800, Etiennette, fille de François Seurre, propriétaire, et de Marie Tallon, et mourut en cette ville le 19 février 1850. C'est dans la patrie des Denon et des Boichot que vint au monde, le 11 mai 1802, et que fut élevé l'artiste distingué qui se nomme Etienne Raffort. zoun à Alger; - Le Port de Dieppe; L'Entrée. du Havre (1833-1836); - La Plage de Saint-Malo (1837); Une Cour de ferme en Bretagne; Marine; - Le Grand canal de Venise; - L'Eglise | della Salute à Venise (1838-1840); - Site de Thun en Suisse; L'Entrée de Henry III à Venise (1841-1843); - La Cathédrale de Palerme; - Le Palais ducal de Venise (1848); La Mosquée de Scutari et La Fontaine du sérail (1851), tableaux achetés par S. M. l'Empereur de Russie; - La Fontaine d'Eyoub; - Le Port de Constantinople; La Mosquée de Mahmoud (1852-1857), etc., etc. Ces travaux, remarquables par la finesse du coloris et la délicatesse du sentiment, valurent à M. Raffort, en 1837, une médaille de troisième classe en or, en 1840, une médaille de deuxième classe aussi en or, et en 1843, une médaille de première classe du même métal. Il reçut aussi de la ville de Rouen une médaille d'argent de première classe. En 1858 il voulut payer sa dette à la religion catholique et fit, pour la chapelle du château de Chardonnay, près Tournus (Saône-et-Loire), des fresques qui fùrent très goûtées. L'Education du Christ dans la vallée de Nazareth, Le Repos de la sainte Famille, Le Crucifiement vous arrêtent longtemps, mais ne vous saisissent point comme cette apothéose: La mort détruit et les belles actions sont immortelles. Nous ne devons pas oublier les Evangélistes sur fond d'or qui décorent la voûte. En 1867 il exécuta dans le sanctuaire de l'église de Gergy de nouvelles fresques bien supérieures encore aux peintures murales de la chapelle de Chardonnay. Ici c'est Le Christ au Jardin des Oliviers; là c'est La Fuite en Egypte; plus loin ce sont les saints patrons du diocèse d'Autun: Saint Lazare et Saint Germain; ailleurs ce sont Les Archanges Michel, Gabriel, Uriel et Raphaël. Regardons maintenant les verrières et admirons surtout celles où sont représentés, d'un trait si fin, Saint Etienne, Saint Paul et Jésus Bon-Pasteur. Signalons aussi Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Ces peintures décoratives, d'une haute valeur, ont valu à notre éminent compatriote la croix de l'ordre de Saint-Sylvestre (28 juin 1870), décoration noblement gagnée et noblement portée. En 1872, enfin, le jury de l'exposition internationale de Lyon a décerné à M. Raffort un diplôme hors concours. Homme de cœur et de dévouement, l'artiste distingué dont nous venous d'esquisser la vie et de rappeler les œuvres, a administré de 1855 à 1870 sa chère commune de Gergy; puis, fidèle au gouvernement impérial, il a déposé, au 4 septembre, l'écharpe tricolore et est rentré dans la vie privée. Après avoir suivi pendant quelque temps les cours de dessin au collège de Châlon-sur-Saône, M. Raffort, entraîné par son amour du beau, parcourut la France, l'Italie, la Sicile et l'Orient, visitant surtout les Musées et étudiant les œuvres des grands maîtres. Il développa son talent au milieu de si multiples exM. Raffort avait épousé, le 7 septembre 1821, à cursions et de si lointains voyages. Accueilli partout Paris, sa cousine germaine, Pauline-Eulalie Raffort, avec une excessive bienveillance, il ne resta pas inacdécédée le 30 décembre 1875, fille de Jean-Nicolas, tif et produisit de nombreux tableaux qui furent jus- Raffort, fournisseur de la Maison impériale de France, tement appréciés. Nous citerons surtout de lui: et de Marie-Sophie Langlois, d'où une fille, MarieSites de Palerme, de Genes et de Paternico (Si-Félicie-Stéphanie, mariée à M. Millet, inspecteur des forêts. cile), (1831); - La Place du gouvernement à Alger;- Vue de Saint-Malo; - La Porte de Baba (1) V. Revue savoisienne, novembre 1875. A. ALBRIER. |