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de l'Aisne, la première partie, in-folio, des Antiquités et monuments historiques du département de l'Aisne. Cette fort belle publication est ornée de nombreuses gravures; la seconde partie paraîtra à la fin de l'année.

M. Doublet, membre correspondant à Bône, fait hommage d'une nouvelle série de douze photographies représentant les races qui habitent l'Algérie.

M. Papier, membre correspondant, envoie de Bône, pour le jardin public, une nombreuse collection de plantes algériennes, où l'on remarque des cactus, des agaves, des crassula, des euphorbes, etc. Des remerciements sont adressés aux donateurs.

M. Ducis rappelle sommairement l'apanage du comté de Genevois et des baronies de Faucigny et Beaufort en 1514 en faveur de Philippe de Savoie, devenu en 1528 duc de Nemours. Rattaché par ce titre à François Ier, son fils Jacques servit la France contre CharlesQuint et Philippe II, dans l'armée desquels commandait Emmanuel Philibert, duc de Savoie. Quand ce dernier recouvra ses Etats par les traités de Cateau-Cambrésis et de Lausanne, Jacques de GenevoisNemours, peine de redevenir le feudataire de celui contre lequel il avait combattu, voulut bénéficier de la moitié des provinces restituées. Mais il n'obtint que les titres de duc de Genevois et marquis de Saint-Sorlin, et force pensions. Insatiable, ce chef de la branche cadette de Savoie projeta de s'emparer de Genève pour en faire la capitale de ses états de Savoie, de Bresse et Bugey. Il comptait sur l'appui de son neveu Henri III de France. Le père de St François de Sales lui refusa, pour cette expédition, son château de Brens, relevant du duc de Savoie, et fut menacé d'être jeté par les fenêtres du château d'Annecy. Cette résistance énergique en détermina d'autres et le projet n'eut pas d'exécution. En 1578, Jacques de Genevois-Nemours prétendit encore, mais inutilement, au droit souverain des régales, et reçut une augmentation de pension. Il alla mourir, le 18 juin 1585 à la Cassine de Chatillon, près Turin, d'où son corps fut transporté à Annecy au tombeau de sa famille, le 4 août suivant. Quelques-uns de ces faits ont échappé à tous les historiens de Savoie.

M. Eugène Tissot reprend la question du Sahara et son influence sur le climat de l'Egypte. Il croit qu'on peut trouver une nouvelle preuve de cette influence dans le rapprochement des observations de température faites par les savants de l'expédition française avec celles recueillies dans ces derniers temps. Du moment, en effet, que le soulèvement du Sahara se continue, et que la surface sablonneuse émergeant au soleil va en s'agrandissant, les pays circonvoisins doivent avoir des étés de plus en plus chauds et des hivers qui le seront de moins en moins. Or c'est ce qui a lieu au Caire : le résumé des observations françaises donne, pour les six mois de fraîche saison, de 1799 à 1801, une moyenne de 17°1, et pour les six autres mois 27°2. Soixante-douze ans plus tard, une moyenne de trois années d'observations également, 1871 à 1873, donne pour les saisons correspondantes 16 8 et 27°6. Les différences ne paraissent pas encore très sensibles, mais elles le sont davantage si l'on compare les hivers entr'eux, c'est-à-dire les mois de décembre, janvier et février réunis. Au temps des Français, leur température moyenne était de 150, tandis que de nos jours, elle n'est plus que de 1309: ici, l'écart dépasse déjà 1 degré, ce qui veut dire que si les mêmes circonstances se maintiennent, il ne faudra pas plus de deux siècles et demi pour que l'hiver du Caire se soit abaissé à la température de 10 degrés.

M. Bouchet communique trois pièces déposées par lui aux archives municipales; l'une est une requête adressée à S. M. royale par Eustache Chapuys (fondateur du collège d'Annecy', par laquelle En considérant que le pays de Savoye causant les guerres passées et occupation d'icelluy par les François et les Suysses étoit réduict en telle extrêmité de povreté que tout aspirant scholastique vaccoit,

A exprimé de fonder ung collège et plue tost ici que ailleurs ( à Louvain, Belgique) et recouru qu'il plaise à S. M. permestre qu'il achapte bontés, biens et possessions fermes et establis jusqu'à la somme de sept cents florins de Pontois, considérant que cela redendera à l'honneur, prouffit et réputation de cette université et républisque. >

La reine acquiesça à cette requête par décision datée de Bruxelles, le 19 février 1549.

La deuxième pièce est une délibération prise le 20 mars 1663 dans la salle du Collège d'Annecy. L'assemblée, présidée par Mgr JeanFrançois de Sales, et composée de tous les corps de la ville et des notables, arrêta que chacun des dits corps écrirait aux seigneurs-procureurs de Louvain, afin qu'ils ne fassent plus de difficultés de recevoir les boursiers qui leur seront envoyés La troisième pièce est l'inventaire de la maison d'Eustache Chapuys, sise au faubourg de Bœuf.

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M. Revon présente une épée de l'époque du bronze, découverte en janvier sur la rive droite du Chéran, entre Rumilly et le confluent du Fier; une tête de lance de la même époque, trouvée dans le Fier en aval du pont de Saint-André ; des antiquités romaines provenant de l'arrondissement d'Annecy, et des séries lacustres du Jura bernois. To us ces objet ont été achetés par le Musée.

M. Constantin continue ses récits sur la Russie. Il raconte ce qu'il a observé dans les fêtes religieuses, notamment pendant les grands jeûnes et dans les cérémonies de Pâques. Ces études seront publiées dans les prochains numéros de la Revue.

M l'Archiviste dépose les dons et échanges:

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Ed. Fleury, Antiquités et monuments historiques du département de l'Aisne, in-folio, don de l'auteur et du Conseil général de l'Aisne. Compte-rendu des assemblées générales de la Société philanthropique savoisienne de Paris, don du Comité. Rivaud, Notice biographique sur le docteur Caffe, don de l'auteur. A. Martin, Rapport sur l'administration de la Société de lecture de Genève, don de l'auteur. Compte-rendu de la Société d'encouragement pour l'instruction dans le canton de Corbeil, don de M. Chaulin Ch. Besançon, Georgette, nouvelle, Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, dernier volume, achat. Documents sur la réunion internationale des Clubs alpins à Annecy, don de M. Mangé.

don de l'auteur.

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Revue des Sociétés savantes. — Revue bibliographique universelle. Association scientique de France.. — Journal des connaissances médicales. Courrier de Vaugelas, — Revue du Lyonnais. Atti della Società italiana di scienze naturali. L'Educateur. Revue suisse. Mémoires de l'Académie de Dijon. Revue de la poésie. · Gazette des lettres. de la Société d'agriculture et sciences de Poligny. la Société d'histoire et d'archéologie de la Maurienne. Bulletin de la Société académique du Var. Annales de la Société d'agriculture et sciences de la Dordogne. Bulletin de la Société des sciences de Semur. Bulletin de la Société d'études scientifiques

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de Lyon.

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Le Dauphiné. La Seybouse. L'Union savoisienne. Les Alpes. Industriel savoisien. L'Allobroge. L'Echo

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Le Chablais. La Savoie thermale. Le Petit Savoyard. L'Italia agricola. Le Secrétaire,

BULLETIN

LOUIS REVON.

De 206 millions de francs, chiffre total, en 1860, le commerce chilien a atteint 400 millions en 1875, sans compter 215 millions pour le transit et le cabotage.

La horde intérieure des Kirghises, dont le territoire est d'environ 7,600,000 hectares, va cesser de faire partie de l'Asie en même temps que de dépendre de l'autorité militaire: elle va passer à l'autorité civile et fera partie du gouvernement d'Astrakhan. Cette horde, qui avait conservé jusqu'à ce jour un semblant d'indépendance, est tout ce qui reste de l'immense empire de Gengis-khan et de Batou-khan qui couvrit jadis la moitié de l'Asie et la moitié de l'Europe et fit longtemps la loi à la Russie.

Le Directeur-gérant, L. REVON.

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OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES & HYDROMÉTRIQUES FAITES AU JARDIN PUBLIC D'ANNECY

Altitudes Du Jardin, 448 30. Du baromètre, 453 10. Du zéro de l'Echelle du Lac, 446 275 (Annecy par 45° 53' 59" de latitude et 3° 47′ 33′′ de longitude E.,

THERMOMÈTRES

BAROMETRE PLUIE Evapo- HUMIDITÉ

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S.-O

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5

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17

N.-E

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N.-E

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Couvert 1/2 le soir.

0,500

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S.-O id.

couvert Pluie dès 5 h. soir.

0,500

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S.-0

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0.-S.-0 id.

beau

Beau le jour et la nuit.

0,910

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couvert

Couvert tout le jour et la nuit.

0,900

id.

id.

Pluie de 10 h. à midi, de 5 h. à 9 h. soir neige

hauteur Om,10.

0,860

à 9 h. du matin.

TEMPÉRATURE

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5o6

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7,5

32,5

15

0

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beau

Très beau le soir à 10 heures.

0,810 7,6

14,5

S.-E

id.

id.

Id.

0,800 5,7

16

E.-N.-E id.

id.

Couvert à 10 h. soir.

0,750 5,5

4,5

S S-O

id.

neige

Hauteur de neige Om,02. Pluie légère à 1 h. soir. 0,720

5,5

14

S.-O

S

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couvert Pluie à 10 h. soir.

0,720

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très faib. couv. 1/2 Bourrasques de neige tout le jour, haut. Om,07. 0,720 5,6

0,720 6,1

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La lettre p signifie pluie inappréciable au pluviomètre; ainsi qu'à l'évaporation, représentent des millimètres.

-

de même n signifie: quantité de neige inappréciable au pluviomètre. Le signe? indique qu'on n'a pas pu reconnaître la direction ou la force du vent. Le signe parenthèses qui suit le mot brouillard ou son abréviation, signifie que les objets cessent d'être perceptibles à cette distance.

--

Les nombres relatifs aux hauteurs de pluie Enfin le chiffre entre marque un calme plat.

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18 Année.

N° 4.

Omnes omnium caritates patria una complexa est.

30 avril 1877.

ON S'ABONNE

REVUE SAVOISIENNE

Par un bon postal à l'or- JOURNAL PUBLIÉ PAR LA SOCIÉTÉ FLORIMONTANE D'ANNECY

dre du Directeur;

La Revue rendra compte des ouvrages dont deux exemplaires lui auront été adressés.

PARAISSANT LE 18 DE CHAQUE MOIS

Histoire Sciences-Arts - Industrie — Littérature

La Société laisse à chaque auteur la responsabilité entière
des opinions qu'il émet.

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Passons maintenant à l'art. 2 du traité du 24 mars 1860. Il est tout naturel qu'on cède un objet dans les conditions auxquelles on le possède, si d'ailleurs on a le droit de l'aliéner. C'est affaire à l'acquéreur de voir le parti qu'il en peut tirer, c'est-à-dire si ces conditions sont inhérentes à la nature de l'objet ou seulement conventionnelles, afin de se mettre en règle pour les droits des tiers, lorsqu'il y en a.

Or, nous avons établi que le roi de Sardaigne avait le droit de transmettre le domaine souverain de la Savoie. Une partie était neutralisée militairement. Dans l'intérêt de qui cette neutralité avait-elle été sanctionnée par les puissances signataires des traités de 1815? Cui bono? disait le vieux droit romain; Cui odio?

Ce ne pouvait être en faveur de la Savoie ellemême. A quel titre aurait-elle prétendu être exempte des chances de la guerre plus que le pays de Gex, la Bresse, le Bugey, le Dauphiné, le val d'Aoste et le Piémont? A quel titre surtout la Savoie septentrionale aurait-elle été plus digne de compassion que la

Savoie méridionale?

Le gouvernement de Berne a occupé, outre le pays de Vaud qu'il a gardé, le Chablais occidental, le Faucigny, les baillages de Ternier et de Gaillard, et une partie du Genevois à diverses époques. Les troupes genevoises et bernoises ont promené le fer et le feu sur les églises, les châteaux, les établissements publics et particuliers: il y avait loin de là à préserver ces contrées des horreurs de la guerre. Ce n'est pas la sauvegarde de ces pays, c'est le domaine de tout le bassin du Léman qu'a toujours am

bitionné la Suisse. Et, ne pouvant l'obtenir en 1814 et 1815, elle a dû se contenter de quelques communes au prix de la garde de la neutralité éventuelle d'une partie de la Savoie, demandée par le roi de Sardaigne et imposée à la Suisse par les puissances.

Nous ne parlons pas de l'occupation du Chablais oriental par les Vallaisans, sous prétexte d'une sauvegarde contre ceux de Berne. Comme ceux-ci, ils ont gardé la moitié de leurs prises; et, s'ils accordèrent à la Maison de Savoie le passage de ses troupes par le Vallais, ce fut toujours à titre oné

reux.

Si le tiers nord de la Savoie avait été adjugé à la Suisse, sans doute il jouirait de son privilège. Mais la neutralité de ces provinces, séparées de la Suisse, était-elle nécessaire à cette dernière? Pas plus que celle du pays de Gex, de Blamont ou d'Altkirch. La Suisse est accessible à la France et à l'Autriche par plusieurs points. La neutralité n'est inviolable que parce qu'elle est l'objet d'une sanction collective des puissances. Si cette garantie est sérieuse, la neutralité du Vallais, comme partie intégrante de la Suisse, devra suffire à arrêter la marche d'une armée par le Chablais. Si, au contraire, la force prime le droit, ce n'est pas une province de plus qui permettra à la Suisse de se garantir d'une armée étrangère.

La France a occupé la Savoie de 1536 à 1559, de 1600 à 1601, de 1630 à 1631, de 1690 à 1697, de 1703 à 1713, de 1792 à 1815. Jamais elle n'a parlé d'en faire reconnaître la neutralité; au contraire elle s'y est toujours opposée.

L'Espagne a tenu la Savoie de 1742 à 1749; elle n'a point non plus fait de demande analogue.

Qui donc a demandé cette neutralité? La Maison de Savoie toute seule. Dans quel but? On l'a vu précédemment.

Avant la cession de la Bresse, du Bugey, de Gex et Val-Romey à la France, et du pays de Vaud à la Suisse, la cité de Genève révoltée était une plaie intérieure, renfermée encore dans les Etats de Savoie; plaie presque inguérissable, il est vrai, en face de la protection que cette ville recevait de Berne et de la France, contre lesquelles réunies la Maison de Savoie n'avait pu faire prévaloir ses droits.

Depuis 1601, les Etats de Savoie perdirent les limites de la Saône et du Jura méridional pour ne

garder que celle du Rhône, qui faisait suite à celle du lac Léman, déjà convenue dès 1564.

Or, Genève se trouvant sur cette ligne, forma une brêche irréparable, qui n'a fait que grandir; c'était une porte ouverte à Berne et à la France, et dont la garde devenait de plus en plus difficile à la Maison de Savoie, établie définitivement au-delà des Alpes, la seule barrière qu'elle pût défendre avec succès.

Aussi la première demande d'une protection collective pour la Savoie fut faite après le coup manqué du traité de Brussol de 1610, à l'encontre d'une occupation française. Les troupes françaises et espagnoles évacuèrent la Savoie pour y faire place aux garnisons que Berne avait promises au duc, et Louis XIII s'engagea formellement à cette entente, le 11 juin 1611.

Mais Richelieu, devenu ministre, n'en tint nul compte en 1630. Et le cabinet de Versailles continua à s'opposer fortement à la reconnaissance de la neutralité de la Savoie demandée par ses princes, notamment en 1697, 1703, 1713 et 1741, parce que évidemment cette réserve aurait formé un obstacle à ses prétentions.

On se rappelle les limites bizarres du traité du 30 mai 1814, en vertu duquel le roi de Sardaigne ne récupéra, en septembre, que les deux tiers de la Savoie, à peine reliés par la vallée d'Arly. Celui du nord n'avait de confins naturels, ni contre Genève, ni contre la France, dont la partie savoyenne gardée sous le nom de département du Mont-Blanc, resserrait même une langue de territoire sarde contre le canton de Genève jusqu'au Rhône. Il importait à la Sardaigne de mettre ces provinces écourtées à l'abri de toute vicissitude. Son représentant à Vienne, M. de Saint-Marsan, en fit l'ouverture dès le mois d'octobre, qui suivit la remise de la Savoie par le comte de Bubna. Mais la France y fit encore opposition et réserva formellement au moins le tiers sud de la Savoie.

La Suisse accéda à recevoir dans sa neutralité le tiers nord parce qu'elle y trouva le moyen d'arrondir le canton de Genève de quelques communes, qui furent le prix de la charge qu'on lui imposait par l'acte du 29 mars 1815, jusqu'au nord d'Ugines, contre un département français sans limites naturelles en face de cette partie neutralisée. Elle utilisa dans le même but les conséquences du bouleversement des Cent-Jours.

A la réception du reste de la Savoie par le traité du 20 novembre 1815, et contre une nouvelle cession de communes à Genève, le roi de Sardaigne fit étendre la neutralité aux deux tiers nord de cette dernière restitution, c'est-à-dire d'Ugines au Rhône.

Le découvert qui, dans le versant du Léman, s'étendait de l'Hermance à la Vozona près de Valleiry, sur une longueur de 40 kilomètres, et celui du MontGrenier à la Chapelle-Blanche dans le bassin de l'Isère, sur une longueur de 15 kilomètres, auraient. suffi à motiver la neutralité de toute la Savoie.

Mais les puissances n'ayant pas cru pouvoir l'admettre toute entière pour les motifs indiqués précédemment, elles imposèrent à la Suisse la garde d'un territoire neutralisé jusqu'au nord du parallèle d'Ugines

au Rhône, et conséquemment sans limites naturelles, qui pussent justifier la moindre convoitise de sa part; opposant ainsi, pour les annuler, deux ambitions, celle de la Suisse, dont l'inviolabilité était reconnue par un concert international qui enchaînait ses tendances, et celle de la France, trop engagée dans ce concert pour essayer de le briser au profit des siennes, même en n'envahissant que la Savoie méridionale, non neutralisée.

En 1848 et 1849, les parties belligérantes, la Sardaigne et l'Autriche, étaient bien voisines de la Suisse, selon les conditions des traités de 1815 sur la neutralité. Mais la Sardaigne était précisément celle en faveur de laquelle la neutralité de quelques provinces de la Savoie avait été reconnue contre la France, qui était étrangère au conflit. Il n'en fut donc pas question.

La situation était différente en 1859, alors que la France et la Sardaigne étaient réunies contre l'A utriche. Toutefois, comme le théâtre des hostilités était dans le centre de la Haute-Italie, loin du voisinage de la Suisse et de la Savoie neutralisée, on n'y porta pas une attention sérieuse, même après l'effleurement du territoire neutralisé entre le pont de Culoz et la baie de Grésine par le passage des corps français et du matériel de guerre. Le résultat seul de la lutte pouvait réveiller la question, dans la crainte que l'armée française de retour n'occupât la Savoie, en compensation de la Lombardie, conquise au profit du roi de Sardaigne.

Cette dernière phase n'avait pas été prévue par les traités de 1815; et elle déplaçait tellement les situations que le motif de la neutralité en disparaissait naturellement. Et, si la politique de Napoléon n'eût pas été suspectée d'autres ambitions, ce résultat qui était dans les conséquences de l'histoire militaire de nos contrées, n'eût pas eu besoin d'être justifié.

En résumé, l'état exceptionnel de la neutralité de la Savoie était une sauvegarde en faveur de la Maison de Savoie à Turin contre les tendances de la France et de la Suisse. Quelque françaises que fussent nos provinces, elles ne pouvaient être cédées sans un correspectif convenable par les princes qui en portaient le nom depuis si longtemps, et qui, sous ce titre, avaient pris rang parmi les puissances de l'Europe. En attendant une solution, qui avait eu déjà des précédents, elles ont bénéficié à terme du privilége de la Suisse.

Ce n'est pas que cette dernière eût habitué la Maison de Savoie à une confiance absolue, surtout dès le xvIe siècle. Car, si la Savoie avait toujours beaucoup souffert des occupations militaires par la France et l'Espagne, on peut assurer qu'aucune invasion n'a fait autant de ruines de toute sorte que celles des Bernois et des Genevois dans les provinces qu'ils ont ravagées à plusieurs reprises.

Mais la neutralité militaire de la Suisse étant reconnue en faveur de la constitution fédérative, soit de l'union de petits Etats confédérés, les provinces étrangères, accidentellement admises à y participer, étaient pareillement sous la protection collective des puissances jusqu'au moment où elles devaient trouver leur garantie naturelle dans une situation plus normale. C'est ce qui est arrivé en 1860.

Tandis que les princes, qui avaient leur base et leurs moyens d'action au delà des Alpes, se plaignaient de ne pouvoir défendre la Savoie jusqu'à la ligne du Rhône et du Léman, et demandaient à en confier la garde à des voisins, que leur situation précaire en face de l'Europe préservait de toute tentative de détournement, la France, qui l'a acquise régulièrement, n'a vu aucune difficulté à la défendre pour elle-même sans aucun privilége contre personne. Comme, en 1814, elle en avait gardé le tiers, sans aucun bénéfice de neutralité, même en face de la neutralité accordée contre elle au tiers nord de la Savoie rendu au roi de Sardaigne, à plus forte raison peut-elle la défendre aujourd'hui jusqu'à la ligne des Alpes, en se fortifiant dans la mesure de ses limites, sans recourir à personne.

Sur quel principe aurait-on fondé l'obligation de maintenir la Savoie sous la tutelle d'un privilége que la France ne réclamait pas, et qui cessait d'avoir sa raison d'être par le changement de souveraineté? La neutralité de la Savoie n'avait tenu qu'au déplacement de ses princes au delà des Alpes, coïncidant avec un découvert sur leur ligne statégique occidentale. En repassant de la France à la Sardaigne en 1815, nos provinces ont dû entrer dans une phase exceptionnelle de défense, indispensable à la Maison régnante à Turin. En passant de nouveau de la Sardaigne à la France, elles ont repris leur état normal, dégagées de toute protection, dont la France n'avait besoin contre personne; ni contre le Piémont, auquel elle avait donné la Lombardie en correspectif, ni contre l'Autriche, qui n'avait plus à surveiller les Alpes.

D'ailleurs les troupes autrichiennes n'y avaient pénétré en 1793, 1814 et 1815 que de concert avec les corps sardes pour chasser de la Savoie les troupes de la République ou du premier Empire. Si, dans le congrès de Vienne, l'Autriche avait combattu l'extension de la Maison de Savoie en Italie, c'était pour la confiner sur les Alpes, et s'en faire, comme par le passé, un appui contre la France. On n'avait donc pas à craindre de sa part une agression en vue d'un agrandissement territorial, comme on pouvait le redouter de la France. Le passage du Vallais réclamé par le roi de Sardaigne pour le retrait de ses troupes, en cas de guerre, indiquait évidemment de quel côté pouvait venir le danger.

Pour ce motif même, l'Autriche avait un grand intérêt à appuyer la neutralité, afin d'empêcher une autre campagne de 1800, par la nouvelle route du Chablais et du Vallais, dite du Simplon, la plus courte entre Genève et le nord de l'Italie. Aujourd'hui que l'Autriche n'a plus rien à sauvegarder en Italie, la neutralité de la Savoie lui est complétement indiffé– rente.

Que reste-t-il donc des prétendus droits des tiers? Nous avons établi que la Suisse, loin d'acquérir aucun droit politique dans la charge éventuelle de la neutralité des provinces savoyennes, entre 1815 et 1860, avait dû, au contraire, la subir en correspectif de ses acquisitions et comme une entrave à ses prétentions. La question a été nettement résumée par M. Thouvenel, dans sa dépêche du 17 mars 1860, au représentant français à Berne. Après avoir rap

pelé les propositions du 26 mars 1815, acceptées le 29, il ajoutait :

Cet arrangement avait ainsi pour but de couvrir une portion de la Savoie, et la Suisse, par son acquiescement, s'obligeait à en assurer l'exécution, en s'engageant, d'une part, à livrer passage aux forces sardes pour rentrer en Piémont, et de l'autre, à placer, au besoin, des troupes fédérales dans le pays neutralisé.

« L'engagement accepté par la Confédération était le prix d'une cession de territoire faite au canton de Genève, comme la neutralisation éventuelle du Chablais et du Faucigny, une garantie stipulée au profit de la Sardaigne et la compensation d'un sacrifice. Cette neutralisation n'avait donc pas été principalement combinée en vue de protéger la frontière suisse, que sauvegardait suffisamment une barrière infranchissable, c'est-à-dire la neutralité proclamée par l'accord des puissances; elle a été, au contraire, imposée comme une charge à la Suisse, qui l'a acceptée à titre onéreux. »

Et dans sa note du 7 avril aux représentants français près des cours signataires des traités de 1815, après avoir reproduit ces traités et cité les correspondances et les protocoles, le même ministre concluait : « Il est donc irréfragablement établi que la neutralisation de la Savoie a été réclamée par la Sardaigne et obtenue à titre onéreux. La Confédération suisse y a consenti au prix des concessions territoriales accordées par le gouvernement sarde au canton de Genève.

«La Suisse le comprenait ainsi elle-même, comme l'attestent les instructions du plénipotentiaire envoyé par le Vorort à Turin, en décembre 1815, pour s'entendre avec le cabinet sarde sur la remise du terri

toire. Le Vorort, bien loin de considérer la neutralité de la partie septentrionale de la Savoie comme une faveur faite à la Suisse, s'attachait surtout à limiter les obligations qu'il savait en découler pour lui, et qui s'étaient étendues par suite de l'extension même du territeire neutralisé en vertu des nouveaux actes des puissances du mois de novembre 1815. Ces instructions ont été citées par le gouvernement fédéral dans son mémoire du mois de novembre dernier (1859), etc. Elles disaient encore : « La Suisse reconnaît cet état de choses comme un bienfait dont ces provinces doivent jouir, non comme une obligation qui lui soit imposée de les occuper et de les défendre. Mais le cabinet de Turin ne céda ses communes qu'après avoir reçu de la Suisse la certitude qu'elle acceptait les obligations imposées par le congrès de Vienne et le traité de Paris du 20 novembre 1815.

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Le passage de la Savoie à la France a exonéré la Suisse à l'égard de la Sardaigne de l'obligation de veiller à la neutralité des provinces du nord, et c'est tout. La France ne lui a pas demandé la rétrocession des seize communes, qui ont formé la rémunération d'une charge dont elle est ainsi libérée gratuitement. (A suivre.) C.-A. DUCIS.

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